http://salve-regina.com/api.php?action=feedcontributions&user=Salettensis&feedformat=atomSalve Regina - Contributions de l’utilisateur [fr]2024-03-29T00:32:12ZContributions de l’utilisateurMediaWiki 1.28.0http://salve-regina.com/index.php?title=L%27adh%C3%A9sion_filiale_%C3%A0_la_v%C3%A9rit%C3%A9_r%C3%A9v%C3%A9l%C3%A9e_%E2%80%93_12_mai_1943_%E2%80%93&diff=2181L'adhésion filiale à la vérité révélée – 12 mai 1943 –2012-02-01T16:26:46Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 12 mai 1943<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Les familles chrétiennes des différents peuples forment ensemble, chers jeunes époux, dans l'unité d'une même foi, une grande famille spirituelle où le Christ est l'Epoux et l'Eglise l'Epouse. Cette famille a pour Chef visible le Vicaire du Christ sur la terre, le Pontife romain, et c'est auprès de lui que votre piété vous a réunis dans le désir d'écouter sa parole, cette parole de la foi divine que nous a révélée le Rédempteur du monde et à laquelle vous adhérez finalement. C'est de cette disposition de votre âme, c'est de cette adhésion filiale à la parole de Dieu que Nous désirons Nous entretenir avec vous aujourd'hui, réservant comme sujets d'autres allocutions le don surnaturel de la foi et sa justification aux regards de la raison naturelle.<br />
<br />
De cette adhésion filiale à la vérité révélée naît la force courageuse de la foi qui animait les premiers chrétiens. Ils se tenaient prêts à sceller leur foi de leur sang, persuadés qu'ils étaient que le Christ, le Fils de Dieu, nous a révélé du Père céleste des secrets que lui-même, qui est la Sagesse de Dieu, connaissait fort bien, de même qu'un homme qui contemple de la cime d'une haute montagne l'immensité des mers lointaines, les décrit à ceux qui vivent au fond de la vallée et qui se fient à sa parole de vérité. Sans chercher plus avant, sûre de l'infaillible autorité de Celui qui parle, l'âme fidèle croit ce que Dieu a révélé et que lui enseigne l'Eglise, gardienne de la parole divine.<br />
<br />
Si d'une part, chers enfants, vous considérez les vérités que Dieu nous a révélées et, de l'autre, la docilité des fidèles, une scène immense et merveilleuse s'offre à vos regards dans la grande famille catholique. Vous en retrouvez une pâle mais délicate image dans ces douces et intimes réunions du foyer domestique où la mère et les enfants sont groupés autour du père et écoutent sa parole avec une attentive et respectueuse affection. Que dit-il ? Que raconte-t-il ? Peut-être de vieux souvenirs de son enfance ; peut-être aussi qu'il leur fait part de ses expériences et de son savoir d'homme mûr ; peut-être encore leur explique-t-il quelques merveilles de la nature, de la technique, de la science ou de l'art. S'il a été sur les champs de bataille ou en captivité, il leur montrera les cicatrices de ses blessures et leur racontera les travaux et les souffrances que son amour a supportés pour eux, pour le cher foyer qu'il défendait et dont la pensée ne le quittait point. Il y a tant de choses qui montent d'elles-mêmes aux lèvres d'un père pour l'instruction, la joie, le réconfort, la formation de ses enfants ! Contemplez son visage rayonnant d'affection, alors que parlent sa mémoire, son esprit, son cœur. Admirez ensuite le regard et l'attitude de la mère et des enfants ; goûtez ce spectacle plein de charme, mais cherchez aussi à saisir les sentiments qui se manifestent et se suivent sur leur visage et dans leurs yeux. Qu'y lisez-vous ? Une attention soutenue et un vif intérêt, et en même temps une adhésion qui n'hésite point et qui ne réserve rien, une adhésion parfaite à tout ce qu'ils entendent. Les enfants sont suspendus aux lèvres paternelles ; et si l'un d'eux, trop petit pour bien comprendre, semble interroger de son œil inquiet, voilà la mère qui se penche vers lui, qui lui explique tout, qui devient auprès de lui une maîtresse affectueuse, empressée de lui apprendre toutes les paroles de son père.<br />
<br />
Il n'est pas nécessaire d'en savoir plus long pour comprendre à quoi s'applique cette scène si humaine et si délicieuse. N'y avez-vous pas reconnu Notre-Seigneur Jésus-Christ, l'Epoux de l'Eglise, le fondateur de la famille chrétienne ? N'y avez-vous pas reconnu l'Eglise notre Mère, et vous-mêmes qui recevez de l'Epoux la parole et de la Mère les explications que la faiblesse humaine, l'ignorance humaine, la corruption humaine rendent nécessaires. N'est-ce pas bien que se lisent dans vos yeux la même pieuse attention et la même adhésion d'inébranlable confiance ? Y a-t-il peut-être quelque sujet qui puisse vous intéresser à un plus haut point que ces profonds secrets de Dieu qui sont au ciel l'objet de la vision béatifique des anges et des saints ? En effet, il vous révèle ce qui est dès avant l'origine des choses, dès l'éternité ; il vous découvre les invisibles beautés de la création et il vous apprend qu'il donne aux créatures visibles et matérielles la transparence d'un voile léger à travers lequel il se fait connaître à vous ; le Verbe de Dieu vous enseigne comment il s'est fait, dans l'Incarnation, semblable à vous, petit enfant, et comment il a passé en faisant le bien et en guérissant les malades ; il vous dit ce qu'il a enduré pour votre salut et il vous montre les marques de ses plaies ; il vous raconte sa mort, sa résurrection, sa gloire, son règne présent, l'annonce de son règne futur où il vous a préparé votre place et où il vous attend. Oui, votre Rédempteur, le Pasteur de vos âmes, vous raconte toutes ces ineffables vérités et ces sublimes mystères de son amour et, dans la science infinie et grandiose de sa toute-puissance divine, il a des milliers d'autres secrets de béatitude à vous révéler. Il est donc pleinement légitime, Nous devrions dire divinement naturel, que vous vous serriez étroitement autour de lui, avides d'écouter tous ces récits, toutes ces confidences qui sont à la fois d'un charme incomparable et d'un souverain bienfait pour vos âmes dans le besoin ; comme il est évidemment nécessaire, dans votre ignorance humaine, dans votre incapacité humaine de satisfaire vos désirs d'intelligence, que vous interrogiez là-dessus votre Mère la sainte Eglise, la priant de vous communiquer ce que Dieu a dit, de vous l'expliquer, de le mettre autant que possible à la portée de votre esprit.<br />
<br />
Mais il ne suffit pas que vous prêtiez l'oreille à la parole de la révélation et aux leçons de votre Maître ; il est non moins nécessaire que vous y adhériez de tout cœur, sans l'ombre même d'un doute, d'une incertitude ou d'une hésitation. C'est ainsi qu'un vrai fils écoute son père, homme faillible pourtant et limité dans son action, capable par conséquent d'altérer, d'exagérer ou d'atténuer la réalité qu'il exprime, ne serait-ce que pour couvrir son incompétence ou pour embellir et animer la conversation. Quel enfant oserait néanmoins jamais soupçonner son père d'une telle atteinte à la vérité, ou bien supposer qu'il tombe dans l'erreur ou enseigne ce dont il est ignorant ? Mais quand c'est Dieu, la Sagesse et la Vérité même qui parle et qui révèle, est-ce que votre raison ne vous dit pas qu'il lui est impossible de se tromper ou de vous tromper, qu'il s'agisse même de la moindre des choses ? En particulier, si vous considérez que tout ce qui arrive est dans ses mains et qu'il le prévoit, le permet ou l'accomplit et l'ordonne, si bien qu'on dit que non si muove foglia, che Dio non voglia, « qu'il ne bouge pas feuille, si ce n'est que Dieu le veuille ».<br />
<br />
Imaginez un instant une ombre au tableau que Nous venons de vous dépeindre. Supposez qu'un des enfants, un de ces enfants qui ont perdu l'ingénue simplicité des petits, mais sans encore posséder la respectueuse réserve des grands, supposez que cet enfant affecte de ne prendre aucune part à ce qui se dit et qu'il attende avec un visage d'ennui la fin de la conversation dans l'impatience d'aller rejoindre ses camarades et de retourner à ses jeux. Ses frères n'en seraient-ils pas offensés, indignés, scandalisés ? Le front de la mère ne se couvrirait-il pas d'un nuage ? Cet enfant ne semblerait-il pas avoir perdu l'intelligence ou le cœur, ou bien l'un et l'autre ?<br />
<br />
Cette ombre au tableau se retrouve dans la manière d'adhérer à la révélation et à la foi. Les vérités révélées, objet de la foi, étendent à l'infini, au-delà des limites de la science humaine, l'horizon de nos connaissances sur Dieu et les œuvres de Dieu destinées à l'élévation et à la réparation du genre humain ; elles élargissent le champ de notre activité religieuse et morale ; elles stimulent et animent le cœur dans la fermeté de l'espérance, le réchauffent et le réconfortent dans le lien de la divine charité. Et pourtant trop de chrétiens n'ont aucun souci de la parole de Dieu, ne prêtent aucune attention aux confidences dont le Christ remplit les Evangiles, parce qu'ils n'ont d'intérêt que pour la matière passagère et fugitive, que pour les lectures et discours frivoles, que pour les divertissements et les passe-temps, les nouvelles et les histoires les plus inutiles à la vie et à l'activité de l'homme. Ils ont perdu la candeur des enfants et ils n'ont pas acquis la grave docilité des âmes vigoureuses.<br />
<br />
En effet, si Nous voulons rendre à ce mot la profondeur de sa signification originale, la docilité n'est-elle pas la marque de la vigueur qui anime et soutient l'esprit, qui lui ouvre les yeux sur la pauvreté du savoir humain et qui le dispose à recevoir avec une adhésion pleine de reconnaissance la doctrine de Celui qui a la science et l'autorité de maître ? Rien de plus légitime que de chercher avec amour à renforcer notre conviction que la parole entendue, c'est Dieu qui nous l'a révélée : rien de plus louable que d'y soumettre notre raison et que d'appliquer notre intelligence et nos connaissances humaines à la comprendre et pénétrer de mieux en mieux, à la goûter et aimer de plus en plus, à en vivre avec toujours plus de sincérité.<br />
<br />
<br />
Mais considérons à présent l'attitude de beaucoup de prétendus esprits forts, dédaigneux d'accueillir rien de révélé qu'ils n'aient pesé dans leur fausse balance : quel contraste ! Ils n'admettent rien qu'ils n'aient soumis à la critique incompétente de leur jugement, rien qu'ils n'aient réduit à la mesure de leur intelligence et de sa courte vue. C'est qu'ils sont incapables de voir leurs propres limites, de comprendre que la vérité est plus vaste que l'esprit de l'homme et sa recherche ; incapables de comprendre que, s'il y a déjà dans la nature des secrets qui leur échappent, il y a, bien au-delà, d'autres mystères plus profonds, et que c'est une sublime perfection pour l'esprit humain que de les connaître, un honneur que de se courber devant eux, et que rien que de les entrevoir donne à l'âme sagesse et paix. Ces esprits orgueilleux, vous les rencontrez par les rues des villes, dans les chaires des hautes écoles et dans les académies. Ils ne savent point dans les perplexités de la foi, dans les doutes, dans les malentendus, dans les objections qu'ils entendent et qui les troublent, recourir au Christ, l'Auteur de la foi, et lui dire avec le père du lunatique de l'Evangile : « Je crois, Seigneur, aidez mon incrédulité ! » (Mt 17, 14 ; Mc 9, 24) Car « avant d'appliquer le raisonnement à ce que l'on croit, il faut croire, écrit saint Ambroise, afin que nous n'ayons pas l'air de demander à Dieu des explications comme à un homme quelconque. Qu'on y réfléchisse bien, croire les hommes qui se font les témoins des autres, et ne pas croire Dieu qui se fait dans ses paroles le témoin de soi-même, c'est là une singulière indignité »1. Oui, quelle indignité que de refuser sa foi à Dieu, lequel ne peut jurer que par lui-même, puisque personne n'est au-dessus de lui.<br />
<br />
Mais que devient donc la logique de ces esprits forts, qui veulent passer pour très raisonnables et qui se croient les paladins de la raison humaine contre la foi et contre Dieu ? Ils mettent plus de bienveillance à accueillir les affirmations les plus hardies et les moins fondées et plus d'empressement à les croire, et cela sans examen, sans réserve, même lorsqu'elles proviennent des sources les moins pures. Certes, dans la pratique de la vie sociale, il faut, pour la tranquillité commune, que l'on croie le prochain sur parole tant qu'il n'a pas donné de preuve manifeste de son incompétence, de sa légèreté ou de sa déloyauté. Mais la dignité et la droiture de la conscience ne peuvent que se révolter, lorsqu'elle voit qu'on fait une seule exception à cette règle de vie : contre Dieu et contre l'Eglise, leur refusant la foi que l'on accorde aux hommes.<br />
<br />
Donnez donc à la foi divine cette adhésion filiale qui n'est pas autre chose, pour parler plus clairement, que l'assentiment de l'intelligence aux vérités révélées de Dieu, assentiment que la volonté humaine commande sous l'influence de la grâce. Car la foi est un libre assentiment que notre esprit accorde à Dieu à cause de son infaillible autorité, et personne ne peut croire s'il ne veut croire. Nous donnons à Dieu notre foi sans voir ce que nous croyons, car la foi a pour objet les choses invisibles.<br />
<br />
Jeunes époux qui vous reposez l'un sur l'autre pleins de confiance, futurs parents qui aspirez à jouir de la confiance de vos enfants, vous que ce désir poussera et aidera à surmonter toutes vos faiblesses humaines, donnez dès l'aurore de votre vie commune, donnez à votre foyer la joyeuse animation d'une foi vive et d'une franche soumission à Dieu et à la sainte Eglise de Dieu. Si vous voulez que vos enfants vous témoignent une affectueuse reconnaissance, une cordiale docilité, ne cessez pas de manifester vous-mêmes votre respectueux amour envers Dieu et ses représentants. Et s'il vous arrive jamais de rencontrer des peines et des douleurs qui troublent tant soit peu votre foi et votre soumission à la volonté divine, demandez alors au ciel, vous aussi, pour votre foi, comme les apôtres qui disaient au Christ : « Augmentez notre foi » (Lc 17, 5), cet accroissement, cette ardeur, cette puissance qui est mère de l'héroïsme dans les souffrances et les malheurs, dans les privations et les dangers, dans le sacrifice de la vie. C'est par les actes, par les sacrements, par la purification de l'âme, par l'espérance et l'amour qui vous unissent à Dieu et qui vous rendent forts dans vos souffrances et dans vos entreprises pour vous, pour la famille, pour le prochain, pour la patrie et pour l'Eglise, c'est par là que grandira votre foi. Et c'est par l'exemple visible de votre foi empressée et constante, mieux que par beaucoup de paroles, que vous élèverez vos enfants, non seulement dans l'observation du quatrième commandement de Dieu, mais encore des trois premiers. Eux à leur tour garderont ainsi à travers les tempêtes de la vie le respect qu'ils ont pour vous et leur fidélité au Christ.<br />
<br />
C'est avec ces vœux et avec la confiance de les voir exaucés par l'auteur et le consommateur de la foi, le divin Rédempteur, que Nous vous accordons de tout cœur Notre Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=L%27amour_de_Dieu_pour_nous_:_la_Foi_nous_fait_participants_de_la_nature_divine_%E2%80%93_5_mai_1943_%E2%80%93&diff=2180L'amour de Dieu pour nous : la Foi nous fait participants de la nature divine – 5 mai 1943 –2012-02-01T16:26:06Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 5 mai 1943<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
L'éclosion de la vie humaine dans la famille, chers jeunes époux, est un grand mystère de la nature et de Dieu, un mystère qui enveloppe comme d'un maillot d'énigmes l'enfant à sa naissance et qui le place entre deux mondes : entre le monde visible de la nature et le monde invisible de Dieu, le Créateur de la nature et de l'âme immortelle dont chaque homme tient la vie. D'ici à quelques mois, s'il plaît à Dieu, le foyer que vous avez fondé s'illuminera d'une joie nouvelle : un enfant, le premier fruit de votre amour, vous sourira de son berceau. Vous contemplerez avec ravissement ce petit visage ; vous vous demanderez ce que cherchent bien ces petits yeux, ce qu'ils désirent. C'est vous qu'ils cherchent et qu'ils désirent, et c'est même quelque chose de plus : c'est Dieu qu'ils cherchent et qu'ils désirent.<br />
<br />
Alors l'église paroissiale qui vous a vus échanger l'anneau conjugal, verra le jeune père de famille apporter le nouveau-né. Le prêtre interrogera l'enfant : « Que viens-tu demander à l'Eglise de Dieu ? — La foi ! » répondra pour lui le parrain. — « Et que te donne la foi ? — La vie éternelle. » Ce dialogue ouvre le rite solennel du baptême, qui purifie le nouveau-né de la faute originelle, le revêt de la grâce sanctifiante, lui donne avec la foi toutes les vertus, le fait enfant de Dieu et de l'Epouse du Christ, l'Eglise visible.<br />
<br />
Quel puissant trésor que la foi ! Tous les trésors du monde sont incapables de prolonger la pauvre vie terrestre, qui vole comme la flèche lancée vers son but (Sg 5, 12) ; mais la foi, elle, prépare dans ses précieux trésors et procure au fils de l'homme devenu fils de Dieu la vie éternelle. Qu'est-ce que la vie éternelle ? C'est l'indéfectible vie de l'esprit, lequel entraînera dans son ravissement ce corps lui-même fait de poussière ; c'est la connaissance des intimes et béatifiants secrets de la divinité, comme le dit à son Père céleste le Sauveur du monde, la veille de sa Passion rédemptrice : « La vie éternelle, c'est qu'ils vous connaissent, Vous, le seul vrai Dieu, et Celui que Vous avez envoyé, Jésus-Christ » (Jn 17, 3). Mais quelle est donc cette connaissance ? La raison humaine n'a-t-elle pas assez de forces pour arriver à connaître Dieu par elle-même ? Si, assurément, puisque les cieux chantent la gloire divine et que de la création nous pouvons nous élever à la connaissance du Créateur et des perfections de sa nature divine (cf. Rom. Rm 1,20). Et pourtant le Christ a dit aussi : « Personne ne connaît le Père, si ce n'est le Fils et celui à qui le Fils a voulu le révéler » (Mt 11, 27). La raison, il est vrai, peut bien connaître Dieu, et la connaissance à laquelle il lui est donné de l'élever est très haute : elle est le sommet de la sagesse et de la science des hommes. Mais ce n'est pas encore une connaissance qui pénètre dans l'intime de Dieu, ce n'est pas encore cette connaissance dont jouit le Fils éternel et que reçoivent ceux à qui il la révèle. Et quel trésor de connaissances divines supérieures à la raison ne renferme pas la foi ! Examinons-le de plus près.<br />
<br />
La révélation est avant tout la confidence paternelle que Dieu fait à l'homme de ses secrets à lui, des secrets de sa nature et de sa vie, de ses perfections, de ses magnificences, de ses œuvres, de ses desseins. Comprenez-vous bien tout ce que pareille « confidence » renferme d'amour, de tendresse, de généreuse confiance ? Jeunes époux, le premier grand témoignage mutuel de votre affection, est-ce que ce ne fut pas précisément l'échange de vos confidences ? Vous faire connaître l'un à l'autre, vous entretenir des grandes choses et des petits riens de votre vie d'hier, de vos plus petites inquiétudes et de vos plus nobles aspirations pour la vie de demain, vous entretenir de l'histoire de vos familles, de leurs traditions, de leurs souvenirs, n'était-ce pas là le sujet le plus vivant de vos affectueux colloques ? Et ces confidences, vous ne cesserez de les répéter et de les prolonger, sans jamais arriver à tout dire, car elles jaillissent de l'amour dont déborde votre cœur, et le sombre jour où elles cesseraient de s'épancher marquerait que la source en est tarie. Parmi ces souvenirs de votre passé, vous vous rappellerez l'heure où, vous regardant désormais comme des « grands », vos père et mère vous ont fait part de leurs pensées, de leurs affaires et intérêts, du poids de labeurs, de soucis et de souffrances qu'ils portaient pour vous préparer une vie plus belle, cette vie qu'ils rêvaient et désiraient pour votre avenir. C'était pour vous une aurore de joie que cette intimité ; et vous avez compris l'amour qui l'inspirait, vous vous êtes sentis fiers d'être devenus les confidents de vos père et mère.<br />
<br />
Elevez-vous, jeunes époux, au-dessus de vous-mêmes : Dieu va jusqu'à se faire l'Epoux des âmes ; et n'est-ce pas une vérité de son esprit que Jésus-Christ est l'Epoux de son Eglise et l'Eglise — cette Eglise qu'il a formée de son propre sang et qu'il a établie dépositaire et gardienne de ses divins secrets et desseins — son Epouse bien-aimée ? Or voici que ce Dieu d'infinie bonté s'abaisse jusqu'à nous faire des confidences pour nous élever jusqu'à Lui ; le Seigneur d'immense majesté, le Créateur et Maître souverain, Juge infaillible et généreux Rémunérateur, daigne faire de nous ses fils et nous rendre participants de ses pensées et de ses trésors en nous les révélant et en nous les communiquant malgré notre incapacité de tout comprendre. Il se sert des noms les plus doux et les plus chers que prononce jamais la famille : il nous appelle ses enfants, ses frères, ses amis, et il veut se montrer envers nous Père, Mère, Epoux admirable d'amour, jaloux de notre bien et de notre félicité. Ecoutez ce que le Sauveur dit à ses apôtres : « Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; mais je vous ai appelés amis, parce que tout ce que j'ai entendu de mon Père, je vous l'ai fait connaître » (Jn 15, 15). Quelle tendresse n'a pas le Dieu de vérité ! Et il se rencontrerait des hommes assez dédaigneux de la lumière, assez ennemis de la plus haute connaissance révélée, assez insensibles à toute marque d'amour, assez orgueilleusement satisfaits de la pauvre raison humaine, pour renier et rejeter ce qu'ils appellent le joug de la foi ? Ces pauvres oiseaux de nuit aiment l'obscurité de leur retraite, et ils ont pitié de l'aigle qui regarde de son œil tranquille le soleil en plein midi.<br />
<br />
N'y aurait-il que le grand événement d'un Dieu qui s'ouvre de ses secrets à sa créature, quelle merveille ce serait déjà que la révélation ! Jouir du privilège d'écouter un Dieu révélateur, quelle émotion ne serait-ce pas, et quelle fierté ! A qui contemple la nature dans la lumière de la droite raison, elle enseigne sur le Créateur de grandes vérités, mais si le Fils de Dieu, ce Fils sans qui rien n'a été fait de ce qui a été fait (Jn 1, 3) et qui est devenu notre frère mortel et notre maître de vérité, si ce Fils venait lui-même nous parler de son Père et des profondeurs de la vie divine qui leur est commune et qui est inaccessible à l'esprit humain, quelle joie ne se lèverait pas dans l'esprit qui cherche la vérité et soupire après elle ! Or, le Dieu Créateur de toutes choses a daigné se faire connaître aux hommes par son Fils, et le disciple bien-aimé du Christ le proclame : « Dieu, personne ne le vit jamais ; le Fils unique qui est dans le sein du Père, c'est lui qui l'a fait connaître » (Jn 1, 18). Oui, c'est un événement, une merveille, un enseignement, une révélation ; mais ce n'est que le principe et le prélude d'œuvres et de transformations spirituelles plus admirables encore dans la régénération de l'homme qui sera élevé à la participation de la nature divine.<br />
<br />
Sortis que nous sommes des éternelles profondeurs du conseil de Dieu pour venir à la vie, ce que nous serons un jour n'est pas encore apparu, mais ce que nous avons été et ce que nous sommes dans le temps se couronnera dans le demain de l'éternité. Enfants de Dieu, transformés en sa vivante ressemblance, nous le contemplerons face à face, tel qu'il est dans sa gloire. Si durant le cours de notre vie mortelle cela n'est pas encore visible en nous, nous sommes dès maintenant, par la foi et par la grâce de Dieu, non seulement de nom, mais en réalité, enfants de Dieu : « Nous sommes appelés enfants de Dieu et nous le sommes en effet... Nous sommes maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons un jour n'a pas encore été manifesté ; mais nous savons qu'au temps de cette manifestation, nous lui serons semblables, parce que nous le verrons tel qu'il est » (I Jn 3, 1-2). Ce sont là les paroles de l'apôtre Jean aux premiers fidèles. La révélation, la confidence de Dieu, est donc en même temps une promesse qui est pour nous une espérance.<br />
<br />
Attendons avec confiance l'accomplissement dans la vie éternelle ; mais Dieu, dès le temps présent, en cette vie même qui passe, nous donne à connaître et pour ainsi dire à goûter d'avance l'image et la beauté de sa profonde pensée et de son dessein : il nous en donne comme un gage dans la foi, qui est « la substance des choses, une conviction de celles qu'on ne voit point » (He 11, 1). En quoi, en effet, consiste la foi, sinon à croire ce que nous ne voyons point ?<br />
<br />
<br />
<br />
« Les profondes choses qui me livrent ici leur clair visage, aux yeux de la terre sont tellement cachée que leur essence est dans la seule foi, sur laquelle se fonde la haute espérance et qui pour cette raison joue le rôle de substance »1. L'amour de Dieu pour nous, comme s'il ne pouvait parvenir à l'éclat du plein jour, ne se laisse qu'entrevoir à l'aube de la révélation. O libres penseurs, vous qui ne croyez pas à l'amour de Dieu pour nous, pauvres aveugles volontaires qui cheminez les yeux clos dans les ténèbres et les ombres de la mort, ne plaignez pas les chrétiens : s'il ne leur est pas encore donné sur la terre de contempler le soleil, ils s'approchent néanmoins de lui dans la clarté de l'aube, dans le sourire de l'aurore, dans l'espérance de le voir bientôt briller et rayonner dans la lumière d'un midi qui ne connaîtra point de déclin. Nous suivons le Christ, nous croyons en lui qui est le Verbe, la Parole, le Fils de Dieu, la lumière éclairant tout homme qui vient en ce monde. Mais le Verbe n'est pas écouté, les ténèbres ne veulent pas le recevoir parce que les fils des ténèbres fuient le soleil et préfèrent la nuit à la lumière. Ce Fils de Dieu descendu du ciel pour nous apporter la vérité qui nous élève à des hauteurs si sublimes, se demandait un jour tristement si, lors de son retour, il retrouverait encore la foi sur la terre (cf. Luc, Lc 18, 8). Elles semblent dures, ces paroles du Christ aux hommes sans foi ; mais Pierre, au nom de tous les croyants qui ont été, qui sont ou qui seront jamais, protestait de sa foi et de sa fidélité, en dehors desquelles il n'y a que vertige d'ignorance et ruine morale : « Seigneur, à qui irions-nous ? Vous avez les paroles de la vie éternelle » (Jn 6, 68-69).<br />
<br />
La vie éternelle est la vie que le Christ a révélée à l'homme pour soulever son esprit immortel au-dessus de la matière d'où il a été tiré. Comme le corps est un voile de l'âme, ainsi la parole de la foi est un voile de la vérité divine, et ce voile en recouvre l'éclat qui jaillit des secrètes profondeurs de l'éternelle sagesse entrevue comme la source de toute beauté, à la lueur des éclairs. A celui-là même qui ne possède que les connaissances rudimentaires du catéchisme, la parole de la révélation communique la vérité de Dieu. Le message du Christ élève l'esprit incomparablement plus haut que les conceptions grossières des dieux du paganisme, plus haut que les plus nobles idées, toujours déficientes d'ailleurs, auxquelles est parvenue, touchant la divinité, la raison d'un Socrate et d'un Platon, d'un Aristote et d'un Cicéron, plus haut même que l'antique révélation, à la fois sainte et incomplète, que Dieu avait accordée à son peuple choisi. Maître de son peuple et Maître de toutes les nations, le Christ nous montre le Dieu vivant, non pas dans une froide solitude, mais dans l'infinie béatitude de sa pensée et de son amour fécond, dans la splendeur de son ineffable Trinité. Ce sublime message d'incomparable lumière nous manifeste un Dieu qui crée par un simple acte de volonté — non pour acquérir une perfection, mais pour révéler l'inépuisable épanchement de sa bonté — l'univers et toutes ses merveilles, un Dieu qui donne à toutes les natures placées par lui dans l'océan de l'être, l'instinct, les lois et l'impulsion qui les guident dans leur développement vers des ports divers, un Dieu qui sème à travers les journées que sont les siècles, la vie sur la terre et en tous lieux pour préparer à l'homme, dernier venu de la création, l'heureuse demeure qu'il habitera avant de monter dans la gloire et la béatifiante joie de son Seigneur.<br />
<br />
Mais la vérité que nous apporte sur l'homme la révélation, est à la fois triste et consolante. Dieu avait doté l'homme de précieux dons surnaturels et préternaturels, et l'homme est déchu de sa mystérieuse participation à la vie divine (cf. II Pierre, 1, 4) Dieu pourtant, dans sa tendresse de Père, ne l'a pas abandonné : il a décidé de lui rendre la dignité perdue.<br />
<br />
Et voici l'admirable histoire de l'ineffable Rédemption : voici le Fils de Dieu qui se fait homme et qui devient notre frère, notre guide, notre ami, notre modèle, notre maître de vérité et de vertu, notre pain de vie éternelle : l'Homme-Dieu qui expire sur une croix, ressuscite du sépulcre et monte dans la gloire céleste pour y être notre Avocat auprès du Père et pour nous préparer là-haut notre éternelle demeure de béatitude en nous envoyant ici-bas l'esprit d'amour infini du Dieu Créateur et Rédempteur, l'Esprit-Saint, pour habiter en nous, âme de notre âme, vie de notre vie, voix de notre prière, gémissement de nos angoisses.<br />
<br />
Quoi donc encore ? Le Sauveur laisse ici-bas l'Epouse de son sang, dépositaire indéfectible de l'infaillible parole et dispensatrice de la purifiante miséricorde : il laisse ici-bas son Eglise, pour préserver les hommes de l'erreur, pour les relever de toutes leurs chutes, pour les affermir dans le bien et la bonne voie, pour les réconforter dans la douleur et sur le déclin de leur vie.<br />
<br />
<br />
Et par-delà le déclin de notre vie, que deviendrons-nous ? La révélation nous parle de notre avenir et de notre destinée : elle nous dit que nous serons jugés, et par qui ? par ce même Sauveur qui est mort pour nous donner la vie, par ce Fils qui a établi sa Mère notre Mère et Avocate auprès de lui, une Avocate d'irrésistible puissance. La révélation promet à notre repentir la rémission des péchés ; à notre corps, sujet de tant de misères, compagnon indocile et dangereux tyran de l'âme, sa résurrection de la poussière où il sera retourné, pour se réunir à l'âme dans une vie de bonheur, immortelle et sans déclin, à moins que l'homme ne se ferme pour toujours, par son obstination à refuser le salut, la porte de la joie du Seigneur.<br />
<br />
Dans la voie du salut nous précède toujours la lumière de la foi comme une lampe qui brille dans un lieu obscur (II Pierre, 1, 19) ; avec l'espérance et la charité elle conduit, soutient et fortifie la volonté sur le chemin du bien et de la vertu, qui est votre propre chemin, jeunes époux. La foi inonde le mariage et la famille d'une lumière et d'une chaleur auprès desquelles une conception purement naturelle et terrestre de ce lien sacré ne paraît répandre qu'une ombre froide et une lumière de crépuscule. Vous qui vous êtes unis dans les noces chrétiennes, vous êtes, par la foi et le baptême, enfants de Dieu. Non pas au même titre que le Christ, Fils de Dieu que le Père engendre de toute éternité dans l'unité de la même nature divine, mais enfants d'adoption, régénérés par la grâce de l'Esprit-Saint dans l'eau du salut. L'époux auquel vous avez, jeune épouse, donné votre consentement devant l'autel, est frère du Christ et son cohéritier de la gloire éternelle (cf. Rom. Rm 8, 17, 29). Et l'épouse à laquelle vous avez, jeune époux, donné votre main, est sœur de Marie et doit vous être, pour l'amour de la Mère de Dieu, sacrée et vénérable. C'est à vous aider mutuellement que vous êtes appelés, c'est à marcher ensemble, l'un et l'autre pèlerins et guidés l'un par l'autre, vers la céleste et éternelle patrie.<br />
<br />
Les enfants que Dieu vous donnera n'auront pas d'autre destinée que la vôtre : à leur naissance, l'eau du baptême les attend pour en faire comme vous des enfants de Dieu et un jour des citoyens du ciel. A supposer que votre nouveau-né meure tout de suite après sa mise au monde, mais baptisé, ne dites point que les espérances, les douleurs, les soucis et les soins de sa mère sont perdus. O mère dans l'affliction, mère qui gémissez sur la disparition de votre petiot, ne pleurez pas sur ce petit corps : vous pleurez un ange du paradis, un ange qui vous sourit du haut du ciel et qui vous sera éternellement reconnaissant de la vie de béatitude dont il jouira devant la face de Dieu, dans l'attente de sa mère, de ses petits frères, de toute la famille. N'est-ce pas là les suprêmes consolations de la foi, les grandes vérités qui soulagent dans les peines de l'âpre et douloureux chemin d'ici-bas ? N'est-ce pas là les espérances qui ne déçoivent point et qui conduisent au port de la bienheureuse éternité ?<br />
<br />
Grandissez dans la foi, chers époux, non seulement pour vous-mêmes mais aussi pour vos enfants : soyez leurs premiers maîtres de vérité par la parole et par l'exemple.<br />
<br />
Bienheureux le foyer qu'éclairent ces divines vérités, le foyer qui en vit et duquel elles rayonnent, le foyer qui, à chaque fois qu'une vie dans ses murs arrive à son déclin, voit se lever l'aube d'une éternelle aurore.<br />
<br />
Quels vœux plus beaux, plus élevés, plus saints, quelle meilleure prière ferons-Nous jamais monter pour vous vers le Père des cieux ? Dans l'espérance et la confiance que le Seigneur exaucera Notre supplication, Nous vous donnons de grand cœur Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_vertus_du_foyer_domestique_:_Cultiver_les_vertus_%E2%80%93_14_avril_1943_%E2%80%93&diff=2179Les vertus du foyer domestique : Cultiver les vertus – 14 avril 1943 –2012-02-01T16:25:26Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 14 avril 1943<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
De tous les trésors que vous vous êtes apportés l'un à l'autre, chers jeunes époux, et que vous mettez en commun pour en embellir votre foyer domestique et pour les transmettre aux enfants et aux générations qui naîtront de vous, il n'en est point qui enrichisse, féconde et orne autant la demeure et la vie familiales que le trésor des vertus : bonnes dispositions naturelles héritées de vos parents, de vos aïeux, et transformées en vertus par des actes répétés ; vertus surnaturelles reçues au baptême où vos parents vous portèrent après votre naissance.<br />
<br />
Ces vertus, qu'on aime à comparer aux fleurs — le lis de la pureté, la rose de la charité, la violette de l'humilité — il faut les cultiver dans le foyer et pour le foyer.<br />
<br />
Mais voici que certains esprits peu instruits ou superficiels, ou simplement indolents et uniquement soucieux de s'épargner tout effort, vous diront : « Pourquoi tant se fatiguer à cultiver les vertus ? Elles sont surnaturelles, elles sont un don gratuit de Dieu : quel besoin ont-elles du travail de l'homme et de quelle efficacité peut être son action, du moment que l'œuvre est divine et que nous n'avons sur elle aucun pouvoir ? »<br />
<br />
C'est là un faux raisonnement ; vous le sentez vous-mêmes, et vous répondrez avec saint Paul : « C'est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis, et sa grâce envers moi n'a pas été vaine » (I Co 15, 10). Sans doute, c'est Dieu seul qui verse dans l'âme les vertus essentiellement surnaturelles de foi, d'espérance et de charité ; c'est lui seul qui peut greffer sur les vertus naturelles la vertu du Christ, laquelle leur communique sa vie divine et en fait autant de vertus surnaturelles. Mais qui voudrait comparer ces fleurs divines aux pauvres fleurs artificielles, fleurs de papier ou de soie, fleurs sans vie, sans parfum, sans fécondité ? Ces dernières, il est vrai, ne se fanent pas ; elles restent telles qu'elles ont été faites ; elles ne meurent pas, puisque pour mourir il faut d'abord avoir la vie. Au contraire, les fleurs naturelles de nos jardins sont bien autrement délicates : le vent les dessèche, le gel les brûle, elles sont sensibles aussi bien à l'excès qu'au manque de soleil ou de pluie. Il faut que le jardinier mette un soin vigilant à les protéger. Elles ont besoin qu'il les cultive.<br />
<br />
Pareillement — puisque les choses terrestres sont une image, toujours bien imparfaite sans doute, des choses divines — les fleurs surnaturelles dont le Père céleste orne le berceau du nouveau-né exigent, elles aussi, des soins empressés pour ne pas mourir — à plus forte raison pour vivre, pour éclore et pour produire leurs fruits. Mais, bien qu'elles soient exposées à la mort, elles ont sur les fleurs naturelles des jardins d'ici-bas l'avantage d'être destinées à une vie d'immortalité, à un épanouissement sans limite, à une fécondité sans la triste rançon de la flétrissure, à une croissance qui ne s'arrêtera qu'au moment où il plaira au divin jardinier de les cueillir pour en orner et en parfumer le jardin du paradis.<br />
<br />
Comment faut-il donc cultiver les vertus ? De la même manière que les fleurs. Il faut les défendre, ces fleurs, contre les causes de mort, seconder leur éclosion et leur développement ; une sage et habile culture va jusqu'à faire passer en elles les qualités et les beautés des autres fleurs. Il en va de même de la culture des fleurs surnaturelles que sont les vertus. N'avez-vous pas, jeunes maris, depuis le jour de vos fiançailles jusqu'à celui de vos noces, n'avez-vous pas eu soin d'offrir des fleurs à vos fiancées ? Fleurs brillantes ou modestes, détachées de la plante et mises en un vase d'eau limpide, où, malgré tout, elles se fanaient bien vite, et vous apportiez alors d'autres fleurs plus fraîches. Demain, dans votre foyer, dans un coin du jardin, peut-être seulement à votre fenêtre, dans une humble caissette, vous remuerez un peu de terre, vous y déposerez la graine et vous l'arroserez ; puis, avec une curiosité presque anxieuse, vous guetterez la sortie d'une légère pointe verte, de la tige, des fleurs, le sourire du premier bouton, enfin l'éclosion de la fleur. Et cette fleur, de quels soins vous l'entourerez !<br />
<br />
Sans doute, à l'infidèle non plus Dieu ne refuse pas sa grâce ; bien plus, Seigneur et maître de ses dons, il peut même lui donner de quoi accomplir des actes extraordinaires de vertu. Mais, selon l'ordre normal de sa Providence, la vraie vie vertueuse fleurit et mûrit là où le baptême a infusé les vertus dans l'âme de l'enfant et c'est dans cette bonne terre qu'elles se développeront progressivement, pourvu qu'on les y cultive avec soin.<br />
<br />
De même que Dieu a créé la terre avec ses matières nutritives, avec le soleil pour éclairer et réchauffer les plantes, avec la pluie et la rosée pour la rafraîchir, ainsi il a créé la nature humaine, c'est-à-dire l'âme unie au corps formé dans le sein maternel ; et cette nature est un terrain riche de bonnes dispositions et de ressources. Dans cette nature il met la lumière de l'intelligence, la chaleur et la vigueur de la volonté et du sentiment ; il dépose dans cette terre, sous cette lumière et cette chaleur, les vertus surnaturelles comme des germes cachés qu'il anime de la vie divine ; et il enverra le soleil, la pluie et la rosée de sa grâce, afin que l'exercice des vertus, et par là les vertus elles-mêmes, s'affirment et se développent. Seulement, il faut aussi que le travail de l'homme coopère avec les dons et avec l'action de Dieu. Ce sera tout d'abord et dès le premier instant, l'éducation de l'enfant par le père et la mère ; ce sera ensuite, au fur et à mesure qu'il devient un adolescent et un homme, la coopération personnelle de l'enfant lui-même.<br />
<br />
Si la collaboration des parents avec la puissance créatrice de Dieu dans le don de la vie à un futur élu du ciel, est une des plus admirables dispositions de la Providence pour l'honneur de l'humanité, leur collaboration dans la formation d'un chrétien n'est-elle pas encore plus admirable ? Cette coopération est si réelle et si efficace qu'un auteur catholique a pu écrire un délicieux ouvrage sur les mères des saints. Quels parents dignes de ce nom hésiteraient à apprécier un si grand honneur et à y correspondre ?<br />
<br />
Mais en vous-mêmes aussi, ou plutôt avant tout en vous-mêmes, il faut que vous cultiviez les vertus. Votre mission, votre dignité l'exige. Plus l'âme des parents est parfaite et sainte, plus est, à coup sûr, délicate et riche l'éducation qu'ils donnent à leurs enfants. Les enfants sont « comme un arbre planté près d'un cours d'eau, qui donne son fruit en son temps et dont le feuillage ne se flétrit point » (Ps 1, 3). Mais quelle influence n'aura pas sur eux, chers époux, votre propre conduite, cette vie qu'ils auront sous les yeux dès leur naissance ! N'oubliez pas que l'exemple agira sur ces petites créatures dès avant l'âge où elles pourront comprendre les leçons qu'elles recevront de vos lèvres. Même à supposer que Dieu supplée par des faveurs exceptionnelles au défaut d'éducation, comment seraient-elles vraiment des vertus du foyer, ces vertus qui seraient, au moment même où elles fleurissent dans le cœur de l'enfant, fanées ou desséchées dans le cœur du père ou de la mère ?<br />
<br />
Or le jardinier a une double tâche : il doit mettre la plante en état à la fois de tirer profit des conditions extérieures et de n'en pas souffrir, et il doit travailler la terre et la plante elle-même pour en favoriser la croissance, les fleurs et les fruits.<br />
<br />
Par conséquent, vous avez le devoir de préserver votre enfant, et de vous préserver vous-mêmes, de tout ce qui pourrait porter atteinte à votre vie honnête et chrétienne, et à la vie de vos enfants, de tout ce qui pourrait obscurcir ou ébranler votre foi et la leur, de tout ce qui pourrait ternir la pureté, l'éclat, la fraîcheur de votre âme et de leur âme. Qu'ils sont à plaindre, ceux qui n'ont pas conscience de cette responsabilité, ceux qui ne considèrent point le mal qu'ils se font à eux-mêmes et à ces innocentes créatures mises par eux à la lumière d'ici-bas. Ils méconnaissent le danger de tant d'imprudences dans les lectures, les spectacles, les relations, les usages ; ils ne se rendent pas compte qu'un jour l'imagination et la sensibilité feront revivre dans l'esprit et dans le cœur de l'adolescent ce que ses yeux avaient entrevu dans son enfance, sans le comprendre ! Mais il ne suffit pas de préserver : il faut aller délibérément au soleil, à la lumière, à la chaleur de la doctrine du Christ, il faut chercher la rosée et la pluie de sa grâce pour en recevoir la vie, le développement, la vigueur.<br />
<br />
Davantage encore. Sans le péché originel, Dieu aurait demandé aux pères et mères de famille, comme à nos premiers parents, de travailler la terre, de cultiver les fleurs et les fruits, de telle sorte toutefois que le travail eût été agréable et non pénible à l'homme1. Mais le péché, que l'on oublie si souvent et que pratiquement on nie effrontément, a rendu le travail austère. La nature humaine demande comme la terre à être labourée, à la sueur de notre front : il faut la travailler sans cesse, il faut sarcler, déraciner les mauvaises inclinations et les germes de vices, il faut combattre les influences nocives, il faut émonder et tailler, c'est-à-dire redresser les déviations même des meilleures tendances ; il faut tantôt stimuler l'inertie et l'indolence dans la pratique de certaines vertus, tantôt freiner ou régler l'élan naturel, la spontanéité dans l'exercice des autres, afin d'assurer l'harmonieux développement de l'ensemble.<br />
<br />
C'est une œuvre de tous les instants de la vie ; elle s'étend même à l'accomplissement des autres travaux journaliers, qui en reçoivent la seule valeur qui compte, et leur beauté, leur charme, leur parfum. Que grâce à vos soins, votre foyer se rapproche de plus en plus de celui de la sainte famille de Nazareth et qu'il soit un jardin intime où le Maître aime à venir cueillir des lys (Ct 6, 1). Nous souhaitons que sur votre foyer descende la féconde rosée de la bénédiction divine et Nous vous en donnons de grand cœur un gage dans Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_vertus_du_foyer_domestique_:_Les_vertus_infuses_qui_nous_dirigent_de_la_pl%C3%A9nitude_de_vigueur_spirituelle_%C3%A0_la_participation_%C3%A0_la_b%C3%A9atitude_divine_%E2%80%93_7_avril_1943_%E2%80%93&diff=2178Les vertus du foyer domestique : Les vertus infuses qui nous dirigent de la plénitude de vigueur spirituelle à la participation à la béatitude divine – 7 avril 1943 –2012-02-01T16:24:42Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 7 avril 1943<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Soyez les bienvenus, chers jeunes époux, vous que la foi et l'espérance font accourir à Nous afin de recevoir, avec Notre bénédiction, la bénédiction du Christ sur le foyer que vous avez fondé dans l'amour. Vous le rêvez beau, ce foyer ; non pas que vous l'imaginiez à l'abri des épreuves et des larmes, car vous savez bien que ce serait une vaine attente ici-bas, mais vous le rêvez beau parce que, au milieu même des épreuves et des larmes, vous le voulez chaste, saint, aimable, attirant, rayonnant : vous le voulez tel en un mot que nous avons essayé de le décrire dans Notre dernière allocution aux jeunes mariés qui vous ont précédés ici. Mais comment réaliser, dans la mesure du possible, un si haut idéal ? Durant le temps de vos fiançailles, vous avez pris de sages résolutions et fait de fervents préparatifs pour construire, aménager et asseoir votre maison, et pour la rendre vivante et riante. C'était là un commandement de la prudence et de la prévoyance ; mais par dessus tout, un dessein vous possédait l'un et l'autre : le dessein de vous aider l'un l'autre à vous perfectionner, à grandir dans toutes les vertus, à rivaliser dans le bien et la concorde, parce que ce sont là les éléments nécessaires à la constitution du foyer tel que le souhaite votre cœur.<br />
<br />
Il est vraiment malheureux que ce terme si noble de vertu ait été profané, non pas tant, il est vrai, par mépris ou par moquerie que par une extension abusive de ce mot qui en a affaibli la signification jusqu'à le rendre équivoque, mesquin et malsonnant aux oreilles mêmes de personnes véritablement vertueuses. Au sens propre, le mot de vertu — du latin virtus, qui dérive de vir — signifie force1 et désigne une force apte à produire un effet bon2. Ainsi par exemple, dans l'ordre purement physique, où les puissances naturelles opèrent par nécessité et selon des règles fixes, on parle des vertus de certaines plantes médicinales. Cependant, dans l'ordre humain, juridique et social, où les êtres raisonnables sont libres dans leurs actions, le supérieur commande en vertu de son autorité, tandis que l'inférieur se sent obligé en vertu de la loi divine ou humaine, naturelle ou positive ; ici, chacun peut être tenu d'accomplir un acte qu'il serait libre d'omettre s'il ne se savait lié en vertu de son serment ou de sa parole d'honneur. De même l'ordre intellectuel a ses vertus, sagesse, intelligence, science, prudence, qui guident la volonté ; notre mémoire a la vertu de conserver les connaissances acquises qui lui ont été confiées ; l'imagination a la vertu de nous rendre sensibles les formes des choses absentes, lointaines ou passées, de nous représenter les choses spirituelles ou abstraites ; l'intelligence a la vertu de nous élever au-delà des sens et aussi de nous ouvrir ce que nous percevons par eux. Mais plus communément le terme de vertu s'applique à l'ordre moral, où les vertus du cœur, de la volonté et de l'esprit font la dignité, la noblesse et la vraie valeur de la vie.<br />
<br />
C'est de ces vertus d'ordre moral que Nous Nous proposons de vous entretenir. Nous en parlerons en tant qu'elles sont des vertus du foyer et qu'elles ont de l'importance pour l'intimité et le rayonnement de la famille. C'est d'elles en effet que naît et découle la vraie vie d'un bon foyer domestique ; où plutôt elle naît du concours de ces vertus très variées, mais solides et charmantes, que les deux fiancés aiment à trouver l'un dans l'autre et dont ils voudraient se parer comme des joyaux les plus précieux.<br />
<br />
Représentez-vous un de ces foyers modèles. Vous y verrez chacun plein d'ardeur dans l'accomplissement consciencieux et efficace de son propre devoir, plein d'ardeur à faire plaisir à tous, à pratiquer la justice, la franchise, la douceur, l'abnégation le sourire aux lèvres et le sourire au cœur, la patience dans le support et dans le pardon mutuels, la force à l'heure de l'épreuve ou sous le poids du travail. Vous y verrez les parents éduquer leurs enfants dans l'amour et la pratique de toutes les vertus. En un foyer pareil, Dieu est honoré et servi avec fidélité ; le prochain y est traité avec bonté. Y a-t-il, peut-il y avoir, rien de plus beau, rien de plus édifiant ?<br />
<br />
En vérité, y aura-t-il jamais rien de meilleur qu'un si beau foyer, si Dieu s'était contenté lors de la création d'enrichir l'homme des facultés destinées à acquérir, à perfectionner et à pratiquer toutes les vertus et à faire fructifier tous les dons que Nous venons de mentionner ? Mais Dieu avait des desseins bien plus hauts de bienfaisance et de générosité : il a voulu communiquer à l'homme une vie qui fît de lui son fils adoptif, une vie divine, la grâce ; et il a voulu lui infuser avec la grâce des facultés, des puissances nouvelles de caractère divin, des secours qui dépassent infiniment la nature humaine et les aptitudes de n'importe quelle nature créée. C'est pourquoi ces vertus sont appelées surnaturelles, et elles le sont en effet essentiellement. Quant aux autres vertus, les vertus naturelles et humaines d'ordre moral, si la nature n'en donne pas à l'homme la perfection, elle lui donne cependant une inclination, une disposition à ces vertus, et l'homme pourra les acquérir et les développer par ses forces personnelles3 ; mais l'adoption divine va en surnaturaliser les actes par l'influence de la charité qui en devient l'âme, et elle leur donnera un éclat, une efficacité, une valeur de vie éternelle4.<br />
<br />
Ces vertus surnaturelles portent le nom de vertus infuses, parce que, unies à la grâce sanctifiante, elles sont en quelque sorte versées dans l'âme dès l'instant que l'homme est élevé à la vie divine et à la dignité de fils de Dieu.<br />
<br />
Comme nos organes, en vertu de leurs fonctions et de leurs constitutions physiologiques, assurent la conservation, le développement, la santé de notre vie corporelle ; comme notre esprit, en vertu de sa liberté éclairée et surveillée par la conscience, affermit et dirige notre vie morale dans les sentiers de la justice, vers le bien et la félicité de notre nature humaine, ou du moins vers ce qui semble tel ; ainsi l'activité de la vie surnaturelle de la grâce, par ces facultés supérieures que sont les vertus infuses, nous dirige vers la plénitude de vigueur spirituelle ici-bas et vers la participation, un jour, à la béatitude divine dans la céleste éternité.<br />
<br />
Les vertus infuses surnaturelles, voilà le « cadeau de baptême » du Père céleste à ses enfants.<br />
<br />
Comment donc ? Ce petit être caché pour l'instant dans le sanctuaire du sein maternel, ce petit être que vous verrez d'ici à quelques mois répandre ses premières larmes, dans l'attente de ses premiers sourires qui ne viennent qu'après les pleurs ; le jour où fiers de votre paternité, vous le rapporterez de l'église régénéré dans les eaux du baptême, et vous irez le présenter à sa mère qui lui donnera un baiser plus tendre encore qu'à son départ de la maison ; cet enfant aurait donc déjà des vertus si hautes, si sublimes qu'elles dépassent la nature ? Oui, n'en doutez point.<br />
<br />
N'avait-il pas, dès le moment de sa naissance, dès le premier instant de son existence, reçu de vous une empreinte où l'on pourra bientôt reconnaître facilement la marque de sa double ascendance paternelle et maternelle ? Les premiers jours, il est vrai, le petit enfant ne diffère guère des autres nouveau-nés. Mais dans la suite, avant même qu'il ne parle ou raisonne, vous découvrirez, dans ses grâces ou dans ses caprices, l'un ou l'autre trait de votre caractère à vous, et cela, lorsque son intelligence et sa volonté s'éveilleront, ou plutôt se manifesteront, car, bien que ces facultés paraissent jusqu'alors endormies et inactives, elles recueillent déjà du dehors, par les regards inquiets et avides de l'enfant, par ses mouvements et par ses pleurs, de si nombreuses idées et convoitises des choses, et vous n'aurez pas attendu le jour où se manifesteront son intelligence et sa volonté pour la première fois, pour transmettre à votre enfant ces traits de physionomie corporelle, intellectuelle et morale.<br />
<br />
Il en sera de même des vertus surnaturelles, dans l'ordre de la grâce. Ces facultés divines que sont les vertus de foi, d'espérance et de charité, Dieu les infuse en l'enfant par le sacrement de baptême qui le fait naître à la vie spirituelle ; par là, les germes rationnels et individuels qui porteront l'enfant aux vertus naturelles et que vous lui aurez communiqués par la génération, seront, par la puissance de la régénération, comme protégés et gardés jusqu'à l'usage de la raison.<br />
<br />
<br />
Vous pouvez dès lors comprendre en quel sens Nous entendons parler des vertus du foyer : en ce sens que la grâce veut s'unir dans la famille aux bonnes dispositions de la nature qui portent à la vertu et en vaincre les mauvaises, celles dont il est écrit que « les pensées du cœur humain sont inclinées au mal dès l'adolescence » (Gn 8, 21). Mais la grâce ne s'arrête pas au niveau de la nature : elle monte au-dessus de la nature, et elle exalte la nature, en donnant le pouvoir de devenir enfants de Dieu à ceux qui croient dans le nom du Christ, à ceux « qui sont nés, non pas du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme, mais de Dieu » (Jn 1, 12-13). N'oubliez pas que nous naissons tous avec le péché originel et que, si la nouvelle famille réunit en elle-même les vertus naturelles et chrétiennes déjà cultivées dans les jeunes époux par la saine et pieuse éducation qu'ils ont reçue à leurs foyers et qui, passée en tradition, s'est maintenue et transmise de génération en génération, les jeunes époux eux-mêmes constituent par là un foyer où ils continuent à l'envi la sainte et vertueuse beauté des ancêtres et des familles qui leur ont communiqué la vie. Si le baptême fait du nouveau-né un enfant de Dieu et suffit pour en faire un ange avant l'usage de la raison et la juste connaissance du bien et du mal, néanmoins son éducation doit commencer dès l'enfance, parce que les bonnes inclinations naturelles peuvent s'égarer quand elles ne sont pas bien dirigées et développées par des actes bons qui, à force de répétition, les transforment en vertus sous la conduite de l'intelligence et de la volonté, une fois passé l'âge de l'enfance. N'est-ce pas la vigilante discipline des parents qui forme et informe le caractère des enfants ? N'est-ce pas l'exemple de leur conduite vertueuse qui marque aux enfants eux-mêmes le chemin du bien et de la vertu et qui garde en eux le trésor de la grâce et de toutes les vertus reliées à la grâce ? Seulement remarquez bien que rade volte risurge per Ii rami l'umana probitate ; e questo vuole quei che la dà, perché da lui si chiami. – il est rare que renaisse dans les rameaux l'humaine probité ; c'est ainsi que le veut Celui qui nous la donne, afin que nous sachions la lui demander5.<br />
<br />
Par conséquent, lors même que les enfants ont reçu en partage un bon naturel, il faut de grands soins pour qu'ils se développent heureusement et qu'ils tournent à l'honneur du foyer domestique, à l'honneur du nom de leurs parents.<br />
<br />
Jeunes époux, héritiers des foyers chrétiens de vos parents et de vos aïeux, élevez donc vers Dieu vos humbles prières, afin que dans vos enfants renaissent vos vertus et qu'elles répandent sur tous ceux qui vous entourent le reflet de leur lumière et de leur chaleur. Quel magnifique exemple vous pouvez donner ! Quelle mission, et en même temps quelle auguste responsabilité ! Assumez-la, cette responsabilité, avec courage, avec joie, avec humilité, dans la sainte crainte de Dieu, car c'est la sainte crainte de Dieu qui fait les héros des vertus conjugales et qui attire du ciel l'abondance des plus précieuses grâces.<br />
<br />
Chers jeunes époux, Nous vous donnons de grand cœur, pour qu'elle vous accompagne tous les jours de votre vie et qu'elle vous aide à parvenir à cette si haute fin religieuse du foyer chrétien, Notre Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_vertus_du_foyer_domestique_:_Qu%27est-ce_qu%27un_foyer_%3F_%E2%80%93_27_janvier_1943_%E2%80%93&diff=2177Les vertus du foyer domestique : Qu'est-ce qu'un foyer ? – 27 janvier 1943 –2012-02-01T16:24:30Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 27 janvier 1943<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
La joie que Nous éprouvons toujours à accueillir auprès de Nous les jeunes mariés désireux de Notre bénédiction naît en particulier de l'espérance que suscite en Nous l'affectueuse considération de la sainte et vaste tâche que Dieu leur confie : la tâche de restaurer et de promouvoir une société saine, forte, animée d'un esprit et de sentiments profondément et pratiquement chrétiens. N'est-ce donc pas là ce qui découle du simple fait qu'ils sont appelés à fonder un foyer ?<br />
<br />
Le foyer ! Que de fois, chers jeunes époux, spécialement depuis le jour où vous avez eu la pensée de vos noces, depuis le temps de vos fiançailles, que de fois n'avez-vous, dans le chœur des félicitations et des vœux que vous présentaient vos parents et amis, entendu de vos oreilles le son de cette parole ! Que de fois n'est-elle pas montée spontanément de votre cœur à vos lèvres ! Que de fois ne vous a-t-elle pas remplis d'indicible douceur, cette parole qui renferme tout un rêve, tout un idéal, toute une vie ! Parole d'amour, parole d'enchantement que toute âme bien née comprend et entend avec délices, soit qu'elle en savoure la présente intimité, soit qu'elle y pense dans l'absence, dans la captivité, au loin, avec douleur, soit qu'elle salue la joyeuse espérance d'y retourner bientôt.<br />
<br />
Cet enchantement toutefois peut vous porter à vous faire du foyer une image vague et comme noyée dans un nuage rose, dans un nuage d'or. Aussi voudrions-Nous ce matin vous en exposer la signification profonde. La précision n'en diminuera point la poésie, et elle en manifestera mieux la beauté, la grandeur et la fécondité.<br />
<br />
<br />
''' I.<br />
'''<br />
Le foyer, voilà un terme riche de sens et qui peut se rapporter à des choses bien nombreuses et bien diverses. Il désigne la maison, lorsque nous disons : le foyer paternel, conjugal, domestique ou, dans un sens plus large, le foyer du soldat, de l'artiste, de l'étudiant. On dit aussi : un foyer d'étude, de science, de prière, d'action, d'apostolat. Dans l'ordre de la matière, il y a le foyer avec un vrai feu où l'on va pour se réchauffer ou pour cuire les aliments ; le foyer des fourneaux qui travaillent le fer et les autres métaux ; le foyer de la chaudière à vapeur qui fournit sa force motrice à la machine. Le médecin ne découvre-t-il pas dans le malade le foyer d'infection qui met sa vie en danger, ou le foyer d'épidémie, quand une maladie frappe à la fois plusieurs personnes d'une même maison ou d'une même région ? L'antiquité païenne tenait pour sacré le culte du foyer domestique, auquel Vesta servait de déesse ; l'antiquité célébrait l'héroïsme des braves qui combattaient pour les autels et les foyers — pro aris et focis1. Tous ces divers usages ou significations doivent avoir pour fondement un élément commun à même de justifier ce terme commun de foyer. La légende — Nous ne voulons pas dire l'histoire — raconte qu'au siège de Syracuse le grand Archimède se servit de puissants miroirs concaves pour incendier à distance la flotte de Marcellus. Sans recourir à de pareils exemples, ne vous est-il jamais arrivé, dans les jeux de votre enfance, de faire brûler à l'aide d'une loupe que vous teniez juste au point voulu, un bout de papier ou un peu d'étoupe ? Les rayons du soleil convergeaient vers un même point fixe pour en repartir avec une puissance de chaleur et de lumière considérablement accrue, comme si ce point de « feu » avait été, pour ainsi dire, un petit soleil. C'est cela, le foyer : que ce mot s'emploie pour une chose ou pour une autre, c'est toujours le point où tout se concentre pour de là rayonner ensuite.<br />
<br />
<br />
''' II.<br />
'''<br />
Le foyer dont Nous voulons parler maintenant, c'est le foyer de la famille, ce foyer que vous avez fondé et allumé par votre mariage. Mais la gloire de ce beau nom ne se méritera qu'à la double condition de concentrer et de rayonner chaleur et lumière. Forment-ils un foyer, ces jeunes époux dont l'unique satisfaction est de vivre le plus souvent possible hors de leur maison et que seuls peuvent mettre de bonne humeur les jours de fêtes, les visites, les voyages, les stations de plaisir, les spectacles mondains ou plus que mondains ? Non, ce n'est pas un foyer que l'habitation délaissée, froide, déserte, muette, obscure, vide de la sereine et chaude lumière de la vie commune, de la vie familiale. Ce ne sont pas non plus de vrais foyers, les demeures trop fermées, verrouillées et pour ainsi dire inaccessibles, vers lesquelles ni lumière ni chaleur ne convergent du dehors pour en rayonner ensuite : n'est-ce pas plutôt des prisons, ou des solitudes d'ermites ?<br />
<br />
Et pourtant c'est si beau un foyer à la fois intime et rayonnant ! Qu'il en soit ainsi du vôtre, bien-aimés fils et filles, à la fidèle imitation du foyer de Nazareth. Jamais foyer ne fut plus recueilli, mais en même temps plus cordialement accueillant, plus affectueux, plus pacifique dans la pauvreté, plus rayonnant : pourquoi donc la société chrétienne ne vit-elle pas dans la lumière de son rayonnement ? Voyez : plus le monde s'en éloigne, plus l'envahissent les ténèbres et la froidure.<br />
<br />
<br />
''' III.<br />
'''<br />
Quels sont donc les rayons qui doivent se réunir et se concentrer dans votre foyer pour y trouver la force de se répandre ensuite en de puissants faisceaux de lumière et de chaleur ? Ils sont des plus variés, comme les rayons qui émanent du soleil avec leur gamme infinie de couleurs et de nuances, les uns plus lumineux, les autres plus chauds. Ce sont les grâces et les attraits de l'esprit et du cœur ; on les appelle qualités, dons, talents, qui sont les uns l'héritage d'une double lignée d'ancêtres, et les autres le fruit du travail, de l'effort, de la lutte. Les plus précieux sont les vertus que la charité du Saint-Esprit, pure bienveillance, infuse dans la nature humaine et qui se développent par la pratique de la vie chrétienne.<br />
<br />
Hier encore, vos familles étaient l'une à l'autre étrangères : chacune avait ses traditions, ses souvenirs, ses traits particuliers d'esprit et de cœur qui lui donnaient sa physionomie propre ; chacune avait ses relations de parenté et d'amitié ; et voilà que, le jour de vos noces, ces deux cœurs se sont réunis en une harmonie nouvelle qui se prolongera dans votre descendance et qui déjà commence à résonner autour de vous.<br />
<br />
Riches de ce double héritage, vous vous enrichissez encore par la mise en commun de vos apports personnels : les événements et les rencontres de votre vie professionnelle, domestique et sociale, vos conversations et vos lectures, vos études littéraires, scientifiques, philosophiques peut-être, religieuses surtout, vous ramènent, aux heures d'intimité, l'un vers l'autre, chargés de nectar comme les abeilles de retour à la ruche, et dans vos entretiens intimes vous en distillez un miel des plus doux et des plus nourrissants dont vous ferez part, peut-être à votre insu, à tous ceux qui approcheront de vous. Dans le contact de chaque jour, dans l'accord mutuel des pensées et de la conduite, fruit d'innombrables petites concessions, d'innombrables petites victoires, vous acquerrez et porterez à un degré plus haut toutes les vertus morales, force et douceur, ardeur et patience, franchise et délicatesse. Ces vertus vous uniront dans une affection toujours croissante ; elles mettront votre empreinte sur l'éducation de vos enfants ; elles donneront à votre demeure un charme attrayant, et ce charme ne cessera pas de rayonner dans la société qui vous fréquente ou qui vous entoure.<br />
<br />
Telles sont les vertus du foyer domestique. Chez les époux chrétiens et dans la famille chrétienne, elles sont sanctifiées, elles sont élevées à l'ordre surnaturel, et par là d'une valeur incomparablement supérieure à toutes les capacités naturelles ; car la grâce de votre baptême a greffé dans votre âme des facultés d'ordre divin, des facultés que les plus héroïques efforts purement humains ne parviendraient point à créer, ne fût-ce qu'au moindre degré.<br />
<br />
De ces vertus, Nous parlerons aux jeunes mariés, chrétiens comme vous, qui vous suivront ici. Nous espérons que vous lirez les enseignements que Nous leur donnerons ; Nous espérons aussi qu'ils seront lus, non sans profit, même par des âmes droites et nobles mais qui n'ont pas comme vous le bonheur de vivre de cette vie divine. Par la loyauté et la générosité de leurs efforts à cultiver et à développer leurs vertus naturelles, elles attireront sur elles-mêmes la lumière et le secours de Dieu ; elles aspireront avec une sainte envie à ces dons surnaturels de foi, d'espérance et de charité qui confèrent à la vie de l'homme, dès ici-bas, une incomparable dignité et qui le mettent, dans l'éternité, en participation du bonheur même de Dieu. Dans leur désir fervent de ces dons sublimes, elles tendront leur regard vers le ciel, elles invoqueront le Père des lumières, elles se tourneront vers la croix du Rédempteur, leur unique espérance, elles s'ouvriront à l'Esprit qui est amour et elles en seront remplies, car à celui qui fait son propre devoir avec droiture, tel qu'il le connaît, sans pécher contre la lumière, à celui-là Dieu donne une plus grande abondance de lumière pour aller à lui et il ne lui refuse jamais sa grâce.<br />
<br />
Cette grâce, Nous l'implorons de tout cœur sur vous et sur tous ceux à qui le rayonnement de votre foyer portera Notre parole paternelle et Nous vous accordons, en gage des dons divins et avec une particulière affection, la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Trois_%C3%A9preuves_de_la_fid%C3%A9lit%C3%A9_%E2%80%93_9_d%C3%A9cembre_1942_%E2%80%93&diff=2176Trois épreuves de la fidélité – 9 décembre 1942 –2012-02-01T16:22:49Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 9 décembre 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Nous parlions récemment des écueils où il arrive que vienne se heurter la fidélité des jeunes époux et Nous les mettions en garde contre les imprudences où ils peuvent facilement tomber. Mais en même temps ces écueils ne sont que des occasions d'épreuves. Or c'est de ces épreuves de la fidélité que Nous voulons vous entretenir aujourd'hui, chers jeunes époux, en pensant à la fois aux douleurs qui peuvent s'abattre sur la partie elle-même restée fidèle et aux tentations que peuvent éveiller en elle ces douleurs. Ces épreuves peuvent provenir d'une faute ou d'une imprudence de l'autre partie sans que celui ou celle qui en souffre y ait la moindre responsabilité ; elles peuvent aussi se produire sans la moindre faute de la part d'aucun des époux. Mais il en va toujours de ces épreuves comme de toutes celles que la Providence permet dans ses insondables desseins : avec la grâce et l'effort il est toujours possible d'en sortir plus fort et plus grand.<br />
<br />
Ne soyez pas surpris, jeunes époux, de Nous entendre traiter en votre présence des épreuves dont l'un des époux porte la responsabilité. Nous ne doutons pas de vous : bien mieux, Nous avons confiance que votre vie chrétienne et votre humble prudence vous obtiendront de Dieu par la prière, la grâce de persévérer et de grandir dans les saintes dispositions qui vous animent à cette heure. Si Nous Nous adressons à vous, c'est comme à de charitables messagers qui se feront auprès des autres les hérauts du réconfort et de la paix et qui, Nous l'espérons, porteront au loin l'écho de Notre parole. Puisse ainsi Notre parole consoler et soutenir ceux qui vivent dans l'épreuve ! Et puissiez-vous devenir vous-mêmes, quand vous rencontrerez au cours de votre vie des âmes en de pareilles épreuves, des anges de réconfort et de soutien, pour guérir et apaiser les cœurs meurtris, pour sauver de leur profonde angoisse et de leurs violentes tentations les âmes découragées ! Quelle splendide œuvre de charité vous accomplirez en les secourant !<br />
<br />
<br />
''' I.<br />
'''<br />
La première de ces épreuves, et la plus sensible, c'est la trahison. Hélas ! elle n'est pas rare. Il y a certes bien loin de la simple fréquentation superficielle et passagère à l'abandon du foyer ; mais l'écart le plus léger blesse profondément un cœur loyal qui s'était donné pleinement et sans réserve aucune. Et puis c'est toujours là le premier pas sur une pente glissante ; d'autre part, pour l'époux, ou l'épouse, blessé et trompé, c'est la pente de la tentation, peut-être le prétexte du premier pas de la descente. Et s'il manque de force pour supporter l'épreuve et en triompher, il tombe lui-même plus bas encore, et voilà que toute la trame de la tragédie se forme et s'achève.<br />
<br />
Mais si un premier instant d'égarement a conduit à l'infidélité ; s'il s'en est suivi un lien qui s'est peu à peu resserré ; si enfin, loin des siens, l'infidèle mène une vie de légèreté ou fonde un foyer illégitime, c'est le comble de l'épreuve, le comble de la souffrance, le comble de la tentation ; veuvage plus triste que la mort, puisqu'il ne laisse ni la consolation des larmes répandues sur une tombe aimée, ni la possibilité de rebâtir le nid. La vie est brisée, mais non éteinte, et elle continue dans une épreuve qui a quelque chose de terrible. Et pourtant, comme cette épreuve grandit celui ou celle qui la porte dignement, saintement ! Grande, héroïque dans son affliction, admirez-la, cette femme, cette mère, qui doit à elle seule élever et éduquer sa famille ! Mais celle du père trahi est une angoisse plus vive encore et plus amère : il ne peut donner une seconde mère à ses enfants qui sont encore petits et ont besoin de caresses, il ne peut remplacer celle qui les a abandonnés. Oh ! que le cœur saigne à la pensée que ces petits finiront avec les ans — sans même qu'on ait besoin de leur révéler les désordres d'un père ou d'une mère qui vit au loin — par comprendre leur malheur.<br />
<br />
Quelle horrible tentation alors d'en finir avec la vie ou de se faire une existence nouvelle et un foyer nouveau ! Mais, si la tempête fait rage dans le cœur, le phare du devoir demeure immobile sur le rivage de la vie : devoir rigoureux qui de ses rayons de lumière travaille la conscience et commande de rester fidèle au serment réciproque violé et foulé aux pieds par l'autre conjoint.<br />
<br />
L'époux coupable ne rompt pas toujours la vie commune ; mais son infidélité, surtout si elle s'accompagne de manières rudes et grossières, rend la vie commune de plus en plus difficile et pour ainsi dire intolérable. Certes, il y a des cas où le droit, sans porter atteinte au lien conjugal, permet à l'époux innocent de se séparer du coupable. Mais, à moins que le danger de scandale ou l'intérêt supérieur des enfants ou quelque autre raison grave n'exigent la séparation, la charité, qui s'accommode de tout (I Co 13, 7), invite et porte au silence et à la patience, pour reconquérir un cœur égaré. Que de fois, cette attitude eût rendu possible la réconciliation ! A l'égarement passager eût pu succéder l'amendement, la réparation, le rachat du passé par une vie exemplaire qui eût enfoui toutes choses dans l'oubli. Mais si la partie innocente ne se laisse pas gagner par la charité, si elle s'emporte, un cœur près de se repentir ou déjà repentant se voit repoussé dans un abîme plus profond encore que celui d'où il cherchait à remonter. On connaît de sublimes pardons !<br />
<br />
Il arrive quelquefois, vous le savez bien, que le mari resté fidèle à une épouse toujours bien-aimée rentre d'une longue absence, peut-être d'un camp de prisonniers de guerre, à son cher foyer, et qu'il y voie le sourire ou qu'il y entende le vagissement d'un de ces berceaux qu'on a justement et douloureusement appelés « les berceaux tragiques ». Il se laisse émouvoir par la pitié : après un moment d'hésitation et de lutte intérieure, il s'approche et se penche sur ce berceau, il baise au front le bébé, victime innocente lui aussi, il l'adopte comme son enfant. Certes, le devoir n'oblige pas cet héroïsme. Il y a même des cas où la raison peut le déconseiller. Mais comment refuser son admiration à ces héros de la fidélité et de la charité ?<br />
<br />
<br />
''' II.<br />
'''<br />
Une autre épreuve menace la fidélité, une épreuve plus fréquente encore que la trahison : c'est la méconnaissance, par l'un des époux, de la sainteté du devoir conjugal. De peur de voir se multiplier les charges de famille, par crainte de la fatigue, de la souffrance, d'un danger qu'on exagère parfois, par la crainte incomparablement plus futile de sacrifier quelque ligne de son élégance, quelque lambeau de sa vie de plaisir et de liberté, quelquefois aussi par sécheresse de cœur ou étroitesse d'esprit, par mauvaise humeur ou par l'illusion d'une vertu mal comprise, l'un des époux se refuse à l'autre ou ne se prête qu'en marquant son mécontentement et ses appréhensions. Nous ne parlons évidemment pas ici du coupable accord de deux époux qui veulent fermer leur foyer à la bénédiction des enfants.<br />
<br />
Cette épreuve est bien dure pour une épouse ou un époux attaché à son devoir. Qu'elle se renouvelle, qu'elle se prolonge, qu'elle devienne permanente et comme définitivement décrétée, la tentation naîtra facilement de chercher ailleurs une compensation illicite. Saint Paul le dit expressément : « Ne vous soustrayez pas l'un à l'autre, si ce n'est d'un commun accord, pour un temps, afin de vaquer à la prière ; puis remettez-vous ensemble, de peur que Satan ne vous tente par suite de votre incontinence » (I Co 7, 5). Si accablante que soit l'épreuve, il en faut sortir victorieux. C'est un malheur que de succomber. Ne fallait-il pas lutter et prier ? « Priez, afin que vous n'entriez pas en tentation ! » (Mt 26, 41). Si la volonté n'en est pas moins vaincue, ce malheureux a-t-il fait, avec la lutte et la prière, tout ce qu'il devait, tout ce qu'il pouvait ? Il lui restait encore une grande et belle tâche. Ce mari, cette femme qu'on aime et à qui on a lié sa propre vie est une âme bien chère et cette âme est en danger ; elle est même plus qu'en danger, puisqu'elle vit habituellement en état de péché mortel, d'où elle ne sortira que par le repentir et la volonté d'accomplir son devoir à l'avenir. Et n'aurait-on pas à cœur de faire tout, absolument tout, coûte que coûte, pour la sauver ?<br />
<br />
N'est-ce pas là un des premiers devoirs de la fidélité et le plus urgent des apostolats ? Apostolat difficile, mais qu'un amour puissant et fort rendrait efficace. Sans doute, il y faut de la constance, une douce et patiente énergie, il y faut de la persuasion, il y faut la prière, une prière fréquente et intense, suppliante et confiante ; il y faut l'amour, l'amour de tous les instants, un amour délicat, tendre, prêt à tous les sacrifices, à toutes les concessions qui ne soient pas contre la conscience, un amour prompt à satisfaire, à prévenir les désirs, ne s'agirait-il que d'un innocent caprice, pour reconquérir le cœur égaré et le reconduire sur le sentier du devoir.<br />
<br />
Tout cela, objectera-t-on peut-être, ne réussira pas toujours. Quand même cela ne réussirait qu'une fois, une seule, il vaudrait la peine de s'y mettre résolument. Aussi longtemps qu'on n'a pas accompli cet effort à fond, de toutes façons, avec persévérance, on ne peut pas dire qu'on a tout fait. Et aussi longtemps qu'on n'a pas tout tenté, on n'a pas le droit de désespérer du succès. Il y va d'une âme, d'une âme si précieuse ! Et même si on ne parvient pas à triompher de l'obstination ou de la pusillanimité du coupable, la lutte n'en aura pas moins l'avantage de tremper la volonté de l'époux innocent et de le maintenir, à travers l'épreuve, dans une irréprochable fidélité.<br />
<br />
''' III.<br />
'''<br />
Nous rangions récemment les séparations forcées parmi les ennemis de l'union conjugale, Nous devons aujourd'hui les compter parmi les épreuves de la fidélité. Ici, aucun des deux époux n'est coupable, mais l'épreuve n'en est pas moins dure et périlleuse. Nous ne revenons maintenant à ce sujet que pour vous signaler une forme particulière de ces séparations, séparations partielles et dont aucun étranger ne s'aperçoit, mais qui n'en est pas moins grave et pénible. Nous voulons parler des maladies, des infirmités qui imposent, parfois pour longtemps, une continence parfaite, tandis qu'on continue à vivre ensemble, à s'aimer comme le premier jour et à vouloir vivre chrétiennement. Pour conserver alors à la fidélité son indéfectible perfection et son exquise délicatesse, il faut un amour fort et une foi vive. Il faut alors veiller, lutter, prier, fortifier l'âme, le cœur, les sens par la divine nourriture de l'Eucharistie. Il faut alors élever l'esprit vers l'idéal du vrai et noble amour qui dépasse incomparablement le pauvre amour purement humain, toujours plus ou moins égoïste. Quelle épreuve, quelle heure que celle-là ? C'est l'épreuve et l'heure où l'amour conjugal se confond avec l'amour du prochain envers le pauvre blessé sur la route de Jéricho, pour le secourir, pour le soigner, pour le consoler, pour l'aimer comme on s'aime soi-même. Et quel prochain est plus proche du mari que sa femme, et plus proche de l'épouse que son mari ? L'un devient alors pour l'autre le bon Samaritain ou la bonne Samaritaine, et l'affectueuse assistance, les soins et la prière mettent un nouveau sceau à la fidélité jurée devant Dieu et devant les hommes. A ceux qui savent ainsi s'élever, lutter et prier, vivre de Dieu, la grâce ne sera jamais refusée.<br />
<br />
Nous prions le Seigneur qu'il vous épargne de semblables épreuves ; mais si la Providence de son amour en disposait autrement, Nous la supplions de ne point permettre que vous soyez tentés ou éprouvés au-delà de vos forces, et de vous ménager avec la tentation, le pouvoir de la supporter et une heureuse issue (cf. I Co 10, 13). C'est avec ce vœu que Nous vous accordons de cœur Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Imprudences_et_mis%C3%A8res_par_o%C3%B9_l%27on_fraie_inconsciemment_le_chemin_du_p%C3%A9ril_:_l%C3%A9g%C3%A8ret%C3%A9,_l%27excessive_aust%C3%A9rit%C3%A9_et_la_jalousie_%E2%80%93_18_novembre_1942_%E2%80%93&diff=2175Imprudences et misères par où l'on fraie inconsciemment le chemin du péril : légèreté, l'excessive austérité et la jalousie – 18 novembre 1942 –2012-02-01T16:21:15Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 18 novembre 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
C'est un si beau spectacle que la parfaite félicité de deux époux, que cette félicité qui, loin de diminuer avec les ans, se fait plus discrète et plus calme, mais aussi plus vigoureuse, plus riche de dévouement et d'harmonie, et jusqu'en pleine vieillesse, pour s'achever par-delà cette vie terrestre dans la radieuse gloire du ciel ! C'est un spectacle si beau que Nous Nous sentons le devoir de vous mettre en garde contre certaines imprudences dont vous n'avez peut-être pas conscience, mais qui menacent de compromettre facilement la solidité de votre bonheur, ou du moins de laisser s'étendre une ombre angoissante sur son exquise délicatesse telle que Nous avons eu à cœur de la décrire dans Nos dernières allocutions aux jeunes époux.<br />
<br />
Point n'est besoin d'une vaste connaissance ou d'une riche expérience de l'histoire et des événements de la vie familiale pour savoir combien sont fréquentes les lamentables chutes qui renversent et tuent de sincères et ingénues amours, ni surtout pour comprendre ces faiblesses volages comme la passion, mais dont la meurtrissure laisse, même après le pardon, même après la réparation, une brûlante cicatrice au fond des deux cœurs. Nous Nous proposons de vous parler aujourd'hui non pas tant du chemin qui conduit peu à peu à la faute et à l'abîme, que des imprudences et des misères par où l'époux fidèle fraie inconsciemment à son conjoint le chemin du péril. Imprudences et misères que Nous pouvons réduire à trois chefs : la légèreté, l'excessive austérité, la jalousie.<br />
<br />
<br />
''' I.<br />
'''<br />
La légèreté est l'écueil des premiers mois surtout alors que le sourire et les vagissements des bébés ne sont pas encore venus épanouir et mûrir l'esprit des parents. Mais ce danger se prolonge bien au-delà, quand il est, plus encore que par l'ardeur de la jeunesse, favorisé et entretenu par le manque de caractère. Dans l'illusion gardée et cultivée avec complaisance que dans le mariage tout est permis, les époux prennent parfois les libertés les plus imprudentes. Voici un mari qui conduit, sans le moindre scrupule, sa jeune femme à des divertissements scabreux, pour ne pas dire coupables ; il croit la récréer sans malice et il pense peut-être l'initier ainsi à l'expérience de la vie. A moins que la femme n'ait ce fervent sérieux chrétien qui donne l'indépendance de caractère, elle se laissera entraîner sans résistance et, si elle oppose un semblant de réaction, elle sera, au fond d'elle-même, heureuse de ne pas réussir à dissuader son mari. Supposez que jusqu'au mariage son innocence ait été entourée et gardée, plutôt que véritablement formée dans son cœur par la vigilante sollicitude de parents chrétiens, vous la verrez accepter volontiers, encore qu'elle rougisse un peu de satisfaire une certaine curiosité dont elle ne sent pas clairement l'inconvenance et le danger. Si au contraire sa vie de jeune fille a été mondaine, dissipée, elle s'estimera heureuse de pouvoir se libérer — honnêtement, pense-t-elle, puisqu'elle se trouve en compagnie de son mari — de ce reste de retenue que son jeune âge lui imposait naguère.<br />
<br />
D'une excessive liberté dans les spectacles et les divertissements à un relâchement d'esprit et de conscience dans les lectures, il n'y a qu'un pas. Ici, outre les attraits que Nous venons de relever, entre en scène un appas plus subtil encore : l'amour tel que le décrivent les romans, cet amour qui semble si bien rendre les sentiments, légitimes certes, qu'éprouvent l'un pour l'autre les époux. Le romancier, ses héros et ses héroïnes disent avec tant de vivacité, en des phrases si ferventes et si raffinées, ce qui même dans les entretiens les plus confidentiels ne saurait ou n'oserait s'exprimer avec pareille efficacité et avec la même flamme ! Si ces lectures apparemment avivent l'amour, en réalité elles excitent l'imagination et les sens, et l'esprit n'en est que plus faible encore et plus désarmé en face des immanquables tentations. Ces récits tour à tour d'infidélités, de fautes, de passions illégitimes ou violentes, il n'est pas rare qu'ils enlèvent à la mutuelle affection des époux quelque chose de sa pureté, de sa noblesse, de sa sainteté ; les vues et les sentiments chrétiens en sont faussés et l'amour conjugal se change en un amour purement sensuel et profane, oublieux de la haute fin des noces chrétiennes.<br />
<br />
Lors même qu'ils n'auraient rien d'immoral ou de scandaleux, le fait de se nourrir habituellement de lectures et de spectacles romanesques établit la sensibilité, le cœur et l'imagination dans une atmosphère de fantaisie, dans une atmosphère étrangère à la vie réelle. Episodes romanesques, aventures sentimentales, vie galante, facile, commode, capricieuse, brillante, qu'est-ce que tout cela, sinon des inventions fantaisistes d'auteurs qui ne surveillent point leur talent, ne se soucient nullement des difficultés économiques et ne se gênent pas de mettre leurs œuvres en contradiction sur d'innombrables points avec la réalité pratique et concrète ?<br />
<br />
L'abus de pareilles lectures et de pareils spectacles, quand même, pris en particulier, ils ne seraient pas répréhensibles, finit par fausser le jugement et par tuer le goût de la vie réelle ; il ôte aux époux cette sagesse que développe en eux une vie délicieusement austère de travail, de sacrifice et d'attentive vigilance parmi les soucis d'une famille florissante et nombreuse.<br />
<br />
Considérez, d'une part, le mari qui n'arrive point à gagner à la sueur de son front de quoi suffire à toutes les dépenses d'une vie de luxe ; et de l'autre, la femme qui, chargée d'enfants et de soucis, limitée dans ses moyens, ne saurait changer d'un coup de baguette magique son modeste foyer en un château de cartes de fées : dites si, à côté de ces fantaisies romanesques, ces journées toujours égales, vides d'événements extraordinaires, ne sembleront pas bien mesquines à ces époux. Pour celui qui ne cesse de vivre dans un rêve doré, le réveil est trop amer, et la tentation trop vive de le prolonger, ce rêve, et de le continuer dans la vie réelle. Que de drames d'infidélité ont leur origine là et pas ailleurs ! Et si, demeuré fidèle, l'un des époux pleure sans y rien comprendre les égarements du coupable toujours cher et toujours aimé, il est loin de soupçonner toute la part de responsabilité qui lui revient à lui-même dans ce glissement qui a fini par amener la chute. Il ignore que, dès que l'amour conjugal vient à perdre sa sérénité, gage de sa santé, sa forte tendresse et sa sainte fécondité, pour ne plus ressembler qu'aux amours égoïstes et profanes, il est facilement tenté de rechercher ailleurs sa pleine jouissance.<br />
<br />
Non moins imprudents les maris qui, pour faire plaisir à leur femme ou pour satisfaire leur propre vanité, l'encouragent à s'abandonner dans les vêtements et la conduite de la vie aux extravagances les plus hardies de la mode. Ces jeunes femmes irréfléchies, lancées par là à l'aventure, ne se figurent peut-être point à quels dangers elles exposent leur propre conduite et celle des autres. N'allez pas chercher ailleurs l'origine de nombreux scandales dont s'étonnent beaucoup de gens, mais non pas ceux qui réfléchissent sur les cheminements du mal, non pas les sages amis qui avaient à temps signalé le danger, et qu'on n'a pas écoutés.<br />
<br />
<br />
''' II.<br />
'''<br />
La vertu tient le juste milieu ; l'excès d'indulgence a pour pendant l'excès de rigueur. L'excès de rigueur se présente certes rarement, mais il s'en rencontre des exemples. La rigueur excessive, qui ferait du foyer domestique une triste demeure sans lumière ni joie, sans saines et honnêtes récréations, sans vastes horizons d'action, pourrait provoquer les mêmes désordres que la légèreté. Qui ne voit que plus la contrainte est rigoureuse, plus la réaction risque d'être violente ? La victime de cette tyrannie — l'homme ou la femme, et peut-être l'oppresseur lui-même — sera tôt ou tard tenté de briser la vie conjugale. Mais si les ruines et les effets de la légèreté ne tardent pas à ouvrir les yeux et à ramener les coupables à de meilleurs sentiments et à une vie plus sérieuse, c'est à un défaut de rigueur qu'on a coutume d'imputer les égarements causés par une austérité exaspérante ; la rigueur se fera alors plus âpre encore et on verra croître le mal qu'il a causé et la réaction qu'il provoque.<br />
<br />
Gardez-vous de ces deux extrêmes, de cet excès d'indulgence et de cet excès de rigueur, et pratiquez la modération, qui est le sens de la mesure et de l'à-propos. Que le mari soit heureux de voir sa femme s'habiller et paraître avec une élégance décente, conforme à ses moyens et à sa condition sociale ; qu'il l'y encourage, qu'il lui fasse le plaisir, au besoin, de quelques gracieux cadeaux, qu'il la complimente aimablement sur son charme et sa grâce. Qu'à son tour, la femme bannisse de son foyer tout ce qui heurte l'esprit ou le sens de la beauté, qu'elle évite toute sévérité qui pèserait sur le cœur de son mari. Qu'ils aiment à lire ensemble des livres beaux, bons et utiles, qui les instruisent, étendent leurs connaissances générales et professionnelles, les tiennent au courant des événements, augmentent leurs connaissances religieuses et les maintiennent fermes dans la foi et la vertu. Qu'ils s'accordent avec générosité et mesure les sains et honnêtes divertissements qui donnent le repos et maintiennent dans la joie. Ils trouveront toujours dans ces livres et ces plaisirs matière à d'agréables conversations et discussions. Que chacun aime à voir son conjoint exceller dans son activité professionnelle ou sociale, se faire aimer par sa souriante amabilité dans le cercle de leurs communs amis ; qu'ils ne prennent jamais ombrage l'un de l'autre.<br />
<br />
<br />
''' III.<br />
'''<br />
Un dernier écueil à éviter est la jalousie qui peut provenir de la légèreté ou de la rigueur. C'est un péril dangereux entre tous pour la fidélité. L'incomparable psychologue que fut saint Jean Chrysostome l'a décrite avec une magistrale éloquence : « Tout ce qu'on peut dire de ce mal, explique-t-il, n'en exprimera jamais assez la gravité. Une fois qu'un homme commence à soupçonner celle qu'il aime plus que toute chose sur terre et pour laquelle il donnerait volontiers sa vie, où pourra-t-il trouver quelque réconfort ?... Mais tandis que sans fondement ni raison le mari s'agite anxieusement parmi ses soupçons, sa pauvre et malheureuse femme est encore plus gravement tourmentée. Celui qui devrait être le consolateur de toutes ses peines et son appui, se montre cruel et n'a pour elle que des sentiments hostiles... Un homme jaloux est prêt à tout croire, à accueillir toutes les dénonciations sans discerner le vrai du faux, plus porté qu'il est à écouter celui qui confirme ses soupçons que celui qui voudrait les dissiper... Les sorties, les entrées, les paroles, les regards, les moindres soupirs, tout est épié ; la pauvre femme doit supporter tout cela en silence ; enchaînée pour ainsi dire au lit conjugal, elle ne peut se permettre le moindre pas, la moindre parole, le moindre soupir.1 » Faut-il s'étonner qu'une pareille vie devienne intolérable ? Faut-il s'étonner que, faute de la lumière et de la force que donne une véritable vertu chrétienne, on s'évade de cette vie, qu'on la fuie, pour le naufrage de la fidélité ?<br />
<br />
Jeunes époux, l'esprit chrétien est joyeux sans frivolité, sérieux sans rigueur excessive ; il ne se laisse pas aller aux soupçons téméraires, il fait confiance au mutuel amour fondé sur l'amour de Dieu : cet esprit assurera votre fidélité mutuelle, votre fidélité sincère et sacrée. C'est le vœu que Nous formons pour vous, le vœu que Nous prions Dieu de daigner réaliser, et Nous vous accordons à cet effet, de tout cœur, Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_vraie_fid%C3%A9lit%C3%A9_a_pour_objet_et_pour_fondement_le_don_mutuel_non_seulement_du_corps_des_deux_%C3%A9poux,_mais_de_leur_esprit_et_de_leur_c%C5%93ur&diff=2174La vraie fidélité a pour objet et pour fondement le don mutuel non seulement du corps des deux époux, mais de leur esprit et de leur cœur2012-02-01T16:19:54Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 4 novembre 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Vous avez bien raison, chers jeunes époux, après avoir célébré vos noces, de venir solliciter pour vous-mêmes, pour votre amour et votre fidélité, la bénédiction du Vicaire du Christ. La loi du divin Rédempteur, qui est une loi d'amour, est aussi une loi qui protège et conserve le véritable amour et la vraie fidélité. C'est une loi d'amour qui ne se confine pas dans l'étroitesse des prescriptions minutieuses et extérieures d'un code, mais qui pénètre l'esprit, le cœur, jusqu'à exclure le simple péché de désir (cf. Mt 5, 27-28).<br />
<br />
Est-ce qu'il y aurait donc sous des apparences de fidélité une secrète infidélité cachée au plus profond du cœur ? Sans aucun doute, puisque c'est du cœur que viennent, dit Notre-Seigneur Jésus-Christ, les mauvaises pensées et les autres iniquités (cf. Matth. Mt 15, 19). Hélas ! ce péché d'infidélité secrète est même si fréquent que le monde n'y fait plus attention et que la conscience s'y habitue, comme assoupie dans le charme d'une illusion.<br />
<br />
Toutefois contre ces charmes trompeurs se dresse la vraie fidélité, laquelle a pour objet et pour fondement — Nous l'avons expliqué dans Notre dernière allocution — le don mutuel non seulement du corps des deux époux, mais de leur esprit et de leur cœur. N'est-il pas vrai que la moindre infraction à cette exquise et intime fidélité conduit facilement, tôt ou tard, aux grandes faillites de la vie et du bonheur conjugal ?<br />
<br />
<br />
''' I.<br />
'''<br />
C'est une vertu délicate entre toutes que la fidélité symbolisée par l'anneau nuptial. Avant d'être formulée et promulguée par le Christ, elle avait été inscrite par le Créateur au cœur des justes. D'où la mémorable et célèbre parole de Job sur le pacte conclu avec ses yeux de s'abstenir de tout regard impur (cf. Jb 31, 1).<br />
<br />
A cette austère réserve, privilège d'un cœur maître de soi-même, comparez la conduite de tant de chrétiens qui ont été dès leur naissance lavés dans l'eau de la régénération et élevés dans la rayonnante lumière de l'Evangile. Pareils aux enfants toujours portés à découvrir une exagération dans les angoisses de la sollicitude maternelle, ils sourient des anxiétés morales de leur Mère l'Eglise. Et pourtant, elle n'est pas seule à s'inquiéter : tous les honnêtes gens, même éloignés du christianisme, jettent un cri d'alarme. Dans les rues, sur les plages, aux spectacles, femmes et jeunes filles se présentent et s'exposent sans pudeur aux regards indiscrets et sensuels, aux contacts déshonnêtes, aux familiarités d'indécentes promiscuités. Comme les passions bouillonnent dans ces rencontres ! A supposer même que par une sorte de miracle on n'aille pas jusqu'à l'extrême, jusqu'à la chute dans l'infidélité consommée, quelle différence discernez-vous entre de pareilles mœurs et la conduite des malheureux qui foulent ouvertement aux pieds toute pudeur ?<br />
<br />
Il y a des hommes qui ont le sentiment de l'honneur, et qui tolèrent que leur fiancée ou leur épouse accepte de la part d'autres hommes l'audace de pareils regards et de pareilles familiarités ; il y a des fiancées et des épouses qui ont une haute conscience de leur dignité, et qui en viennent à permettre à leur fiancé ou à leur mari ces libertés et ces familiarités à l'égard d'autres femmes : voilà qui ne peut s'expliquer que par un fléchissement du sens moral. Pour se révolter contre ces graves outrages à la fidélité sacrée d'un légitime et chaste amour, ne suffit-il point de la moindre étincelle d'honnêteté ?<br />
<br />
<br />
''' II.<br />
'''<br />
Mais Nous en avons assez dit là-dessus : laissons ces inconvenantes, ces déconcertantes bassesses. Dans le domaine des pensées et des affections, il est plus délicat de discerner le bien du mal. Certes, il y a des sympathies naturelles en soi irréprochables et les conditions de la vie actuelle en offrent de plus faciles et plus fréquentes occasions. Il peut arriver que ces sympathies soient dangereuses, mais en soi elles ne blessent point la fidélité. Nous devons néanmoins vous mettre en garde contre certaines intimités secrètement voluptueuses, contre un amour que l'on dit platonique, mais qui souvent n'est que le prélude ou le voile discret d'un amour moins licite et moins pur.<br />
<br />
Tant que la sympathie intellectuelle ne dépasse pas le cadre d'une harmonie entre les vues sincères et spontanées de l'esprit, tant qu'elle s'en tient à la jouissance et à l'admiration qu'inspirent l'élévation et la noblesse d'une âme, il n'y a jusque-là rien de blâmable. Toutefois, saint Jean de la Croix1 met en garde les personnes spirituelles elles-mêmes contre les déviations où peut mener cette sympathie. Il n'est pas rare qu'on en vienne insensiblement à déranger l'ordre des choses. Voici ce qui se passe : l'harmonie des pensées, des inclinations et des caractères a éveillé pour une personne une honnête sympathie et voilà que, par un consentement inconscient, on en arrive à mettre ses propres idées et ses propres vues en accord avec les idées et les vues de la personne admirée. L'influence de cette personne se fait sentir dans des questions futiles ; puis dans des choses plus sérieuses, dans la vie pratique, dans des questions d'art et de goût qui ont déjà quelque chose de plus intime ; ensuite dans le domaine proprement intellectuel ou philosophique, et enfin dans les idées morales et religieuses, au point de renoncer à son jugement personnel pour ne plus penser et juger que sous l'influence à laquelle on s'est soumis. C'est un renversement de ses propres principes, un bouleversement de ses normes de vie. Et pourtant, l'esprit humain est naturellement, et même jusqu'à l'excès, orgueilleux dans l'attachement au jugement propre : comment donc expliquer une soumission aussi servile, un aussi parfait assujettissement à la pensée d'autrui ?<br />
<br />
Cependant, à mesure que l'esprit se modèle ainsi sur celui d'un étranger ou d'une étrangère, il s'éloigne tous les jours un peu plus du cœur de l'époux ou de l'épouse. On en arrive à éprouver pour tout ce que dit ou pense l'époux ou l'épouse, un instinctif et irrésistible sentiment de répugnance, d'irritation et de mépris. Le fait que ce sentiment peut être inconscient ne le rend pas moins dangereux : il marque que l'intelligence est conquise, accaparée, qu'elle est remise à des mains étrangères, alors que le jour des noces on en avait fait l'irrévocable don à son conjoint. Est-ce là la fidélité ?<br />
<br />
Quelle illusion subtile et difficile à saisir ! Il a pu arriver que, sous l'influence d'âmes élevées, ardentes, poussées par le zèle le plus pur, une sympathie intellectuelle soit devenue l'aurore d'une conversion, oui, mais le plus souvent ce ne fut qu'une aurore et rarement la lumière du matin monta jusqu'au plein midi. Combien même y perdirent la foi et le sens chrétien ! D'illustres et bien rares exemples suffisent à rassurer ceux qui se prennent pour un Dante ou une Béatrice. Bien souvent, au contraire, ils en viennent, dans leur commun aveuglement, à s'engager sur la pente glissante et à tomber tous les deux dans la fosse (cf. Mt 15, 14).<br />
<br />
<br />
''' III.<br />
'''<br />
Supposons même que l'esprit n'ait pas été, comme on l'a dit2 « la dupe du cœur », la victime d'une illusion qui vient du cœur : le cœur, aveuglé lui aussi, n'en accompagne pas moins l'esprit et il ne tarde pas dans son élan à le dépasser, pour l'entraîner à son tour. C'est à la suite de l'esprit que le cœur se donne, mais il ne se donne qu'en devenant parjure à la personne à qui, le jour des noces, il avait fait l'irrévocable don de lui-même.<br />
<br />
Le monde a beau proclamer fidèle l'épouse qui n'a pas matériellement consommé sa chute ; il a beau célébrer la fidélité de celle qui, par un sacrifice héroïque peut-être, mais d'un héroïsme tout humain, continue de vivre sans amour aux côtés de l'époux auquel elle a lié sa vie, alors que son cœur, tout son cœur, appartient définitivement, passionnément, à un autre : la morale du Christ est plus austère et plus sainte. On a beau exalter la noblesse d'une prétendue union de cœurs chastement unis « comme les astres avec les palmiers » ; on a beau entourer cette passion de l'auréole d'une vague religiosité, pure rêverie alimentée par la poésie et le roman et non point par l'Evangile et la fidélité chrétienne ; on a beau se flatter de maintenir cet amour à de sereines hauteurs : la nature, depuis le péché originel, n'est point si docile aux aphorismes ingénus et vaniteux de ceux qui se font de pareilles illusions, et c'est déjà violer la fidélité que d'accepter en son cœur une passion défendue.<br />
<br />
Jeunes époux, gardez-vous de pareilles illusions ! Eclairés par la lumière divine, placés sous la protection de Marie la Mère très pure, aimez-vous l'un l'autre saintement et resserrez de plus en plus l'union de vos vies, de vos esprits, de vos cœurs, cette union sur laquelle Nous implorons de toute Notre âme de Père, en vous accordant la Bénédiction apostolique, les plus abondantes grâces de Dieu.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Fid%C3%A9lit%C3%A9_:_religieux_respect_du_don_de_son_corps,_de_son_esprit,_de_son_c%C5%93ur,_de_tout_soi-m%C3%AAme_pour_la_vie_toute_enti%C3%A8re_sans_autre_r%C3%A9serve_que_les_droits_sacr%C3%A9s_de_Dieu&diff=2173Fidélité : religieux respect du don de son corps, de son esprit, de son cœur, de tout soi-même pour la vie toute entière sans autre réserve que les droits sacrés de Dieu2012-02-01T16:18:19Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 21 octobre 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
La lumière si pure qui brille dans vos yeux, chers jeunes époux, manifeste à tous les regards la joie sainte qui inonde vos cœurs, la joie de vous être donnés l'un à l'autre pour toujours. Pour toujours ! Nous avons insisté sur cette pensée lorsque Nous avons parlé de l'indissolubilité du mariage à d'autres jeunes mariés qui vous ont précédés dans cette salle. Mais, loin d'avoir épuisé le sujet, Nous n'avons fait que l'effleurer. Aussi voudrions-Nous entrer dans le fond, dans l'intime de ce sujet, et vous parler de cette perle de la fidélité conjugale, Nous bornant aujourd'hui à vous en faire apprécier la beauté et goûter le charme.<br />
<br />
Par sa puissance de contrat indissoluble, le mariage constitue et lie les époux dans un état social et religieux de caractère légal et perpétuel, et il est élevé au-dessus de tous les autres contrats en vertu de ce privilège qu'aucun pouvoir de ce monde — dans le sens et les limites que Nous avons exposés naguère — ne peut l'annuler. C'est en vain qu'une des parties prétendrait le résilier : vidé, renié, déchiré, le pacte ne desserre point son étreinte ; il continue à obliger avec la même vigueur qu'au jour où le consentement des contractants le scella devant Dieu ; la victime elle-même ne saurait être libérée du lien sacré qui l'unit à celui ou à celle qui a trahi. Ce lien ne se dénoue qu'avec la mort.<br />
<br />
Toutefois, la fidélité a le sens de quelque chose d'encore plus fort, d'encore plus profond, de quelque chose aussi de plus délicat et d'infiniment plus doux. Le contrat matrimonial unissant les époux en une communauté de vie sociale et religieuse, il faut que soient exactement déterminées les limites des obligations qu'il impose et que soit garantie à chacune des parties la possibilité de recourir à une contrainte extérieure pour réduire le conjoint à l'accomplissement des devoirs librement assumés. Mais, tandis que ces déterminations d'ordre juridique, qui en sont comme le corps matériel, donnent nécessairement au contrat un froid aspect de formalité, la fidélité en est l'âme et le cœur, la preuve manifeste, l'éclatant témoignage.<br />
<br />
Tout en étant plus exigeante, la fidélité change en douceur ce que la précision juridique semblait imprimer de rigoureux et d'austère au contrat. Oui, tout en étant plus exigeante, car la fidélité tient pour infidèle et parjure non seulement celui qui attente à l'indissolubilité du mariage par le divorce — vainement d'ailleurs et sans effet — mais encore celui qui, sans détruire matériellement le foyer qu'il a fondé et sans abandonner la communauté de vie conjugale, se permet de contracter et de maintenir parallèlement une autre liaison, une liaison criminelle ; elle tient pour infidèle et parjure celui qui, sans même contracter une liaison illicite durable, dispose pour le plaisir d'autrui ou pour la coupable satisfaction de son égoïsme, ne fût-ce qu'une seule fois, d'un corps sur lequel, pour user d'une expression de saint Paul, n'a de droit que l'époux ou l'épouse légitime (I Co 7, 4). Plus exigeante encore et plus délicate que cette fidélité purement naturelle, la vraie fidélité chrétienne va plus loin : elle règne et commande, souveraine d'amour, sur toute l'étendue du royal domaine de l'amour.<br />
<br />
Qu'est-ce en effet que la fidélité, sinon le religieux respect du don que chacun des époux a fait à son conjoint de son corps, de son esprit, de son cœur, de tout soi-même, pour la vie tout entière et sans autre réserve que les droits sacrés de Dieu ?<br />
<br />
<br />
''' I.<br />
'''<br />
La fraîcheur de la jeunesse en fleur, l'honnête élégance, la spontanéité et la délicatesse des manières, la bonté du cœur, tous ces bons et beaux attraits qui composent le charme indéfinissable de la jeune fille candide et pure, ont conquis le cœur du jeune homme et l'ont porté vers elle dans l'ardent élan d'un chaste amour. C'est en vain que vous chercheriez dans la nature entière une image pour exprimer un charme si exquis. De son côté, la jeune fille a aimé la beauté virile, le regard fier et droit, le pas ferme et résolu de l'homme au bras duquel elle appuiera sa main délicate tout au long du rude voyage de la vie.<br />
<br />
En ce radieux printemps, l'amour savait exercer sur les yeux son pouvoir enchanteur, il savait donner aux actions les plus insignifiantes un éclat plein de charme, voiler ou transfigurer les plus manifestes imperfections. Par l'échange de leur promesse, les époux se sont donnés l'un à l'autre dans la joie de s'unir naturelle mais sanctifiée et dans la noble ambition d'une riche fécondité. Serait-ce là déjà la fidélité dans tout son éclat ? Non, car elle n'a pas encore fait ses preuves.<br />
<br />
Mais les années, en passant sur la beauté et sur les rêves de la jeunesse, lui ont ravi quelque chose de sa fraîcheur pour lui donner en échange une dignité grave et réfléchie. En se développant, la famille a rendu plus lourde la charge qui pèse sur les épaules du père. La maternité, avec ses tourments, ses souffrances et ses risques, réclame, exige du courage : l'épouse ne doit pas se montrer moins héroïque au champ d'honneur du devoir conjugal que l'époux au champ d'honneur des devoirs civiques où il fait à la patrie le don de sa vie. Surviennent les absences, les séparations — Nous en avons parlé récemment1 — ou d'autres délicates circonstances qui obligent à vivre dans la continence : conscients que le corps de l'un est la propriété de l'autre, les époux accomplissent leur devoir sans hésitation ; ils en acceptent les exigences et les conséquences ; ils portent sans faiblesse, d'un cœur généreux, l'austère discipline qu'impose la vertu.<br />
<br />
Enfin, lorsque la vieillesse multiplie les maladies, les infirmités, les signes d'une humiliante et pénible décrépitude, bref tout le cortège de misères qui, sans la force et le soutien de l'amour, rendraient répugnant ce corps jadis si séduisant, c'est le sourire aux lèvres que les époux se donneront sans compter les soins de la tendresse la plus délicate.<br />
<br />
Telle est la fidélité dans le don mutuel des corps.<br />
<br />
<br />
<br />
''' II.<br />
'''<br />
Lors des premières rencontres, au temps des fiançailles, tout était souvent plein de charmes. Avec non moins de sincérité que d'illusion candide, chacun apportait à l'autre son tribut d'admiration, au point de provoquer chez les témoins un sourire de bienveillante indulgence. Ne vous arrêtez pas trop à ces petites querelles, qui sont plutôt, au dire du poète latin, des marques d'amour : ''non bene, si tollas prœlia, datur amor''. C'était alors la pleine, l'absolue communauté des idées et des sentiments dans tous les domaines, matériel et spirituel, naturel et surnaturel, l'harmonie parfaite des caractères. La force expansive de leur joie et de leur amour donnait à leurs conversations un entrain, une vivacité, une verve qui faisait étinceler leur esprit et aimablement briller le trésor de connaissances qu'ils pouvaient posséder, trésor parfois peu étendu, mais que tout contribuait à mettre en valeur. Cela, c'est l'attrait, c'est l'enthousiasme : ce n'est pas encore la fidélité.<br />
<br />
Mais elle ne dure pas toujours, cette saison : les défauts ne tardent point à se montrer, les différences de caractère à devenir plus sensibles et plus nombreuses, peut-être même la pauvreté intellectuelle à devenir plus manifeste. Les feux d'artifice se sont éteints, l'amour aveugle ouvre les yeux, et il est déçu. Alors, c'est pour le véritable et fidèle amour le temps de l'épreuve qui commence, et le temps de son enchantement. Sans doute, les yeux bien ouverts, il s'aperçoit de toutes les imperfections, mais il met à les supporter une affectueuse patience, conscient qu'il est de ses propres défauts ; bien plus, sa clairvoyance l'amène même à découvrir et à apprécier sous la rude écorce les qualités de jugement, de bon sens, de solide piété, riches trésors qui se cachent dans l'obscurité, mais qui sont d'authentiques valeurs. Soucieux de mettre ces dons et qualités de l'esprit en pleine lumière et valeur, il n'a pas moins d'habileté et d'empressement à dissimuler aux yeux des autres en son conjoint les lacunes et les ombres de l'intelligence ou du savoir, les bizarreries ou les rudesses de caractère. Aux expressions fautives ou impropres, l'amour sait chercher une interprétation indulgente et favorable, et il est toujours heureux d'en trouver une ou l'autre. Voyez sa promptitude à discerner ce qui rapproche et unit, et non pas ce qui divise, sa promptitude à rectifier quelque erreur ou à dissiper quelque illusion avec une bonne grâce qui sait ne pas heurter ni n'offenser jamais. Loin d'étaler sa supériorité, il a la délicatesse d'interroger son conjoint, de lui demander conseil, de lui laisser entendre que, s'il est heureux d'avoir à donner, il se réjouit aussi de recevoir. De cette manière, ne le voyez-vous pas ? s'établit entre les époux une union d'esprit, une collaboration intellectuelle et pratique qui les fait monter l'un et l'autre vers cette vérité où réside l'unité, vers la vérité suprême, vers Dieu. Est-ce donc là autre chose que la fidélité dans le don mutuel de leurs esprits ?<br />
<br />
<br />
''' III.<br />
'''<br />
Les cœurs se sont donnés pour toujours. C'est pour le cœur, pour le cœur avant tout, qu'a été puissant l'élan qui a conduit les jeunes époux à leur union ; et c'est aussi avant tout pour le cœur que la désillusion, quand elle vient, est amère, parce que le cœur est l'élément le plus sensible, et le plus aveugle de l'amour. Lors même que l'amour survit intact aux premières épreuves de la vie conjugale, la sensibilité peut diminuer et baisser, elle perd même parfois nécessairement de son ardeur et de sa prédominance excessive et facilement illusoire. Or, c'est la constance et la persévérance dans l'amour, dans la réalisation quotidienne du don réciproque de soi-même, et, au besoin, dans l'empressement et la plénitude du pardon, qu'est la pierre de touche de la fidélité.<br />
<br />
S'il y a eu dès le début un amour sincère et non pas seulement une égoïste recherche de satisfactions sensuelles, cet amour au fond des cœurs ne change pas et, en dépit des années qui passent, cet amour demeure. Rien d'aussi édifiant, rien d'aussi charmant, rien ne vous émeut autant que le spectacle de ces vénérables époux dont les noces d'or ont en leur fête quelque chose de plus calme, mais aussi de plus profond, Nous voudrions dire quelque chose de plus tendre, que les noces de leur jeunesse. Cinquante ans ont passé sur leur amour, et par une vie commune de travail, d'affection, de souffrance, de prière, ils ont appris à se mieux connaître, à se découvrir l'un en l'autre la vraie bonté, la vraie beauté, le véritable battement d'un cœur dévoué, à mieux deviner encore ce qui peut faire plaisir à l'autre. De là ces empressements exquis, ces petites surprises, ces innombrables petits riens que seuls prendront pour des enfantillages ceux qui ne savent point y découvrir la grande et belle dignité d'un immense amour. Et voilà la fidélité dans le don mutuel des cœurs.<br />
<br />
Quel bonheur est le vôtre, chers jeunes époux, si vous avez eu, si vous avez encore la faveur de contempler de pareilles scènes chez vos aïeuls ! Vous les avez peut-être dans votre enfance délicatement et affectueusement taquinés ; mais maintenant, au jour de vos noces, vos regards s'arrêtent avec émotion à ces souvenirs, avec une sainte envie, avec l'espérance de donner un jour, vous aussi, un pareil spectacle aux enfants de vos enfants. Nous vous le souhaitons et, en vous donnant du fond du cœur Notre paternelle Bénédiction apostolique, Nous prions Dieu qu'il vous accorde la grâce de cette indéfectible, de cette exquise fidélité.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_responsabilit%C3%A9s_r%C3%A9ciproques_des_patrons_et_domestiques_ont_des_cons%C3%A9quences_sur_le_devenir_des_soci%C3%A9t%C3%A9s_%E2%80%93_19_ao%C3%BBt_1942_%E2%80%93&diff=2168Les responsabilités réciproques des patrons et domestiques ont des conséquences sur le devenir des sociétés – 19 août 1942 –2012-01-31T18:02:43Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 19 aout 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
La visite, chers jeunes époux, que vous nous faites à l'aurore de votre vie conjugale, Nous est une bien agréable marque du désir que vous portez en vous de recevoir la bénédiction du Vicaire du Christ et d'écouter ses exhortations pour en faire une lumière qui guide vos pas sur le chemin où vous venez de vous engager. Notre cœur se plaît à contempler et à exalter la famille chrétienne, fondement du salut de la société et de sa grandeur morale : il se plaît à en analyser et à en marquer les vrais biens, les aspects sacrés et nobles, non moins que les points les plus exposés aux pièges et aux périls. Dans nos dernières allocutions, parlant des rapports mutuels entre patrons et domestiques et des devoirs qui en découlent, Nous avons montré de quelle religieuse beauté les revêtent la clarté de la foi et la brûlante flamme de la charité. Ces rapports et ces devoirs, loin d'être stériles, sont les fécondes racines de responsabilités réciproques dans la vie familiale.<br />
<br />
Considérez en effet comment s'exerce et rayonne à l'intérieur du foyer l'influence de ceux qui entrent à son service. S'il s'agissait d'un simple contrat de travail entre deux personnes, il n'en résulterait que des responsabilités limitées. Ce serait alors, il est vrai, un désagrément pour le patron que d'être mal servi ou de subir quelque dommage dans ses biens ; seulement, d'ordinaire, le déplaisir et la perte n'en seraient pas considérables et personne d'autre n'en serait atteint. Ici, au contraire, nous avons un rapport qui, en général, ne concerne pas uniquement patron et serviteur, mais qui s'étend à toute une famille, et c'est en réalité plus qu'un simple louage de travail : c'est l'entrée d'un étranger dans la vie de la famille, au point de faire en quelque sorte partie du foyer, non pas une heure ou deux de la journée, mais jour et nuit.<br />
<br />
Vous avez beau supposer le maître le plus prudent, le plus vigilant, le plus habile à prendre toutes les précautions ; vous avez beau supposer la plus discrète des servantes et des femmes de chambre, elle n'en vivra pas moins continuellement avec ses patrons, aux heures d'obscurité comme aux heures de lumière ; de jour en jour, elle en viendra nécessairement à connaître le caractère, le tempérament, les dispositions, les habitudes de chaque membre de la famille, et les faiblesses même, les passions, les humeurs et les préférences qui parfois touchent à la manie. Comment pourrait-il en être autrement ? N'entre-t-elle pas comme bon lui semble dans toutes les pièces de la maison, dans les chambres, dans les offices, au salon, pour y tout arranger et mettre en ordre ? L'œil de la servante découvre toutes les ombres, traverse toutes les vitres, aperçoit ou devine sous les voiles toutes choses. Chargée de servir à table, elle est présente aux repas : elle saisit au vol les bribes de conversation, le va et vient des arguments ; elle note les réflexions et les répliques, les plaisanteries et les disputes, les échanges de souvenirs et d'anecdotes plus ou moins intimes et ces mille riens qui sont plus révélateurs encore des sentiments que les confidences volontaires. Vous la voyez ouvrir la porte et introduire les visiteurs et les visiteuses, les parents, les amis et les personnes de connaissance. Elle finit par connaître tous ceux qui fréquentent la maison, par savoir avec quel visage et quels propos il faut recevoir et traiter chacun d'eux : rien, pas même les traits d'un créancier importun qui revient à la charge, rien ne lui échappe.<br />
<br />
C'est dire quelle importance revêt pour la vie et les destinées d'une famille le fait d'accueillir au foyer domestique celle ou celui qui, hier encore, y étaient étrangers. Cette admission ne rend-elle pas le père de famille responsable du domestique comme il l'est, toute proportion gardée, de ses enfants ? Et sa première responsabilité ne provient-elle point par hasard du choix qu'il a fait du domestique ?<br />
C'est une responsabilité plus vaste qu'il ne semble peut-être tout d'abord et la gravité n'en apparaît souvent que lorsque le temps en révèle les conséquences, soit au foyer, soit parmi les personnes de la parenté ou de connaissance, soit dans la société.<br />
<br />
<br />
''' I.<br />
'''<br />
Au foyer, ces conséquences se remarquent en premier lieu chez les enfants. Chez les adolescents et les jeunes gens, les fillettes et les jeunes filles, il arrive que d'amères déceptions, pareilles à des révélations imprévues et inattendues, frappent de stupeur le cœur des parents. On pardonnera bien quelque caprice ou colère à la vivacité de leur âge, mais on ne s'explique point leurs tendances mauvaises, leur caractère difficile, indépendant, critiqueur, fermé. On est surpris, étonné de voir soudain apparaître en l'enfant certains instincts malsains qui répandent leurs ravages avec plus de violence que la crise morale de la puberté. Que font alors les parents ? Que pensent-ils ? Pleins d'alarmes, désolés, ils s'interrogent l'un l'autre, s'examinent, cherchent dans le passé : ont-ils tout mis en œuvre pour bien éduquer leurs enfants ? Oui, car rien n'a manqué, semble-t-il, ni les bons exemples, ni les bons conseils, ni les avis opportuns, ni la fermeté, ni la bonté ; on a surveillé les lectures, les amitiés, les sorties, les divertissements : rien n'avait jusque-là inspiré le moindre soupçon. Mais pendant qu'à la recherche des racines du mal on fouille en tous sens l'histoire du présent et l'histoire du temps qui vient de s'écouler, voilà que se présentent soudain à l'esprit des souvenirs restés dans l'ombre ; voilà qu'ils se précisent, s'entremêlent, se fondent ; souvenirs dont les premières traces remontent à l'enfance du fils ou de la fille : paroles, gestes, manières, libertés incorrectes ou même simplement trop familières d'une personne de service qui manquait de prudence ou de délicatesse. N'allez pas dire que ces enfants, encore petits, n'étaient pas à même de comprendre. Peut-être bien, mais qui sait ? n'ont-ils pas compris sur le moment : plus âgés, ils se souviennent et comprennent. Parents, jeunes époux, n'oubliez pas que la nature a donné aux sens de l'enfant une grande puissance d'observation et de mémoire et que l'homme est porté dès sa naissance à imiter les paroles et les mouvements des autres. Quelle responsabilité naît donc pour le père et la mère du fait que les serviteurs de la maison sont en contact permanent avec leurs enfants !<br />
<br />
Notez bien que Nous ne parlons pas des enfants que la négligence, comme il arrive trop souvent, abandonne aux soins de bonnes plus assidues à les garder et à se dévouer pour eux que leur propre mère, laquelle est retenue ailleurs par le travail, les divertissements ou la frivolité. Il n'est pas non plus besoin que Nous pensions à des domestiques — que Dieu vous en préserve ! — corrompus et corrupteurs. Nous parlons de ce qui se passe dans les cas ordinaires : qu'est-il arrivé ? Il a été planté au foyer un arbre mauvais qui produit des fruits de sa valeur. Comment fallait-il donc choisir le domestique ou la servante ? Comment fallait-il les surveiller, les reprendre ? Que les patrons ne cherchent point à s'excuser en alléguant un manque de discernement dans le choix ou une insuffisance d'informations, ni un caprice ou une impression trompeuse.<br />
<br />
C'est là une responsabilité délicate pour les parents, et qui grandit avec les enfants. Pour innocent que vous supposiez votre enfant, pour innocent qu'il soit de réputation ou de fait, son innocence — pas plus d'ailleurs que les personnes, encore jeunes peut-être, qui l'entourent de leurs soins — n'empêchera pas l'éveil de la nature aux heures ardentes de l'adolescence ; l'inexpérience de l'enfant lui voilera et masquera le danger jusqu'au jour où le mystérieux frémissement du cœur et des sens l'avertira de la lutte imminente, qui le trouvera désarmé. Quelle terrible responsabilité envers les enfants et les domestiques que les inévitables contacts de la vie quotidienne !<br />
<br />
Envers les enfants, c'est clair. Et ce n'est pas moins clair envers les domestiques. Cette jeune gouvernante que les besoins de son service obligent à tout observer autour d'elle, remarquera les tableaux, les gravures qui pendent aux murs, les revues et les illustrés abandonnés en désordre ou étalés sur les tables et les meubles ; elle entendra les récits et les aventures plus ou moins licencieuses que content les aînés et leurs amis, dont l'un ou l'autre lui adressera à la dérobée, en passant, un sourire ou une plaisanterie quelque peu libre dont la nouveauté rendra pour elle le danger plus subtil et plus insidieux, surtout si elle manque d'expérience. Supposez que la suite des choses impose un jour aux parents, pour le bien des enfants, l'éloignement de cette domestique, alors qu'il ne faut pas rejeter sur elle des inconvénients et des dangers dont elle n'est devenue l'occasion qu'involontairement : le chef de famille qui la verra humiliée et consciente de son innocence, ne sentira-t-il pas le remords d'avoir été, et d'autres avec lui, moins prudent qu'elle, moins vigilant, moins ferme et moins fort ? Ne devra-t-il pas se reprocher à lui-même la souffrance de cette employée et le fait que son avenir est compromis ?<br />
<br />
Lorsqu'une famille compte de nombreux domestiques, surtout s'ils diffèrent de sexe, d'âge, d'éducation morale et religieuse, leur présence dans la communauté familiale impose au patron des responsabilités plus nombreuses et plus étendues. Nous ne parlerons pas des cas où le mauvais esprit d'un seul bouleverse toute une maison et gâte l'esprit et le cœur des autres domestiques. Mais que de fois un scandale éclate soudain, ou n'est étouffé et couvert que par la malice plus coupable d'un séducteur ou par le désarroi d'une pauvre créature imprudente ou trop faible !<br />
<br />
<br />
''' II.<br />
'''<br />
Si entre patrons et serviteurs ou parmi les domestiques eux-mêmes, surviennent parfois des heures de déception et de méfiance, de mécontentement et de désordre, de blâme et d'altercation, il n'est pas rare de voir les parents et les amis séparés ou troublés par des malentendus, des heurts, des brouilles qui n'ont pas d'autre cause que les propos ou les jugements rapportés ou divulgués, sans malice souvent, par des personnes de service. Elles ont entendu ou cru entendre une remarque désobligeante, un bon mot ou une pointe, un trait d'esprit, certaines conversations animées, et elles en parleront au-dehors. Si ces choses restaient à l'intérieur du foyer, elles ne causeraient pas grand mal ; mais, dès qu'elles en franchissent le seuil, lors même qu'elles se transmettent sans exagération aucune et sans commentaire, elles deviennent blessantes et provoquent des ressentiments. Et que dire de ces paroles, quand il arrive que, passant de bouche en bouche, elles se gonflent d'amertume ? Ajoutez quelques racontars, quelques chuchotements en de fortuites rencontres de magasins, ou bien entre chauffeurs ou domestiques qui attendent leurs patrons aux mêmes portes, peut-être même à la porte de l'église. Là, les langues se délient, les domestiques parlent, peut-être sans plus de malice dans le cœur que les patrons eux-mêmes. Mais le tort est là, le mal est fait, un mal irréparable parfois. Il est impossible, direz-vous, de compter et peser toutes les paroles qui vous viennent sur la langue. Et pourtant, c'est ce qu'on aurait fait si l'on en avait prévu, mesuré et calculé les conséquences.<br />
<br />
Parfois, le mal est plus grand encore. A table, au salon, dans une réunion, une critique anodine, une légère plainte, une innocente boutade — Nous ne voudrions pas dire une insinuation mensongère — pique ou égratigne quelque personne respectable et, de fait, profondément respectée. C'est une flèche décochée contre un professeur, contre le curé, contre les diverses autorités, jusqu'aux plus hautes, jusqu'aux plus sacrées. Les maîtres qui ont ainsi parlé ou, comme on dit, pensé à haute voix, n'en portent pas moins de respect et d'estime à la personne que vise leur sourire inconsidéré. Mais les domestiques ont relevé ces paroles ou ce sourire et ils n'ont plus pour ces dignes personnes la même vénération. N'est-il pas vrai qu'un bruit sans fondement se répand et qu'il tourne en rumeur ? Quand on en déplore les fâcheux effets dans ceux qu'on estimait et qu'on aimait, on accusera le monde toujours méchant et mauvais ; on en souffrira, on s'en plaindra, au lieu d'en rechercher les origines et d'examiner si sa propre conscience ou sa propre langue sont innocentes et sans reproche.<br />
<br />
<br />
''' III.<br />
'''<br />
Vous voyez donc qu'elle source de discorde et de maux devient la langue qui ne se surveille point ; vous voyez comment elle peut causer des bouleversements qui ébranlent, et pour longtemps parfois, la société. Ne vous faites pas d'illusion : la maison, le salon, la table sont, eux aussi, des écoles, et les discours qui s'y tiennent deviennent un enseignement pour les enfants, les domestiques et tous ceux qui les écoutent. Des esprits réfléchis sont allés jusqu'à affirmer que les imprudences de langage et de jugement ont contribué dans une large mesure à provoquer les violences qui accompagnèrent le mouvement si complexe de la Révolution française, et cela en aidant les principes et les doctrines où se complaisait l'incroyable légèreté du monde élégant d'alors, à pénétrer dans le peuple. C'est par là que s'échappait, pour inonder de sa boue les routes du pays, le torrent d'immoralité et d'irréligion où la haute société, avec ses désordres et avec le honteux étalage de son luxe démesuré, s'était plongée sans pudeur. Le spectacle d'une pareille société était continuellement sous les yeux des serviteurs : l'envie et la jalousie rongeaient leur cœur. Ils écoutaient dans les salons mondains ces audacieuses conversations philosophiques, sociales, politiques, assaisonnées de plaisanteries et de moqueries qui raillaient la religion et la tournaient en ridicule, exaltant dans l'enflure de la déclamation une liberté sans frein. L'esprit des serviteurs s'ouvrait à ces théories avec enthousiasme et leur cœur se remplissait de haine pour les théoriciens raffinés qui s'en faisaient les propagateurs. Les résultats, qui étaient en quelque sorte le produit même de ces discours et de ces leçons, vous les connaissez : ils sont écrits en lettres ineffaçables dans les pages de l'histoire.<br />
<br />
Ce serait une erreur de croire que le monde actuel n'est plus celui d'il y a un siècle et demi. Si, au-dehors, les apparences ont changé, l'humanité est restée substantiellement la même. Les appétits de la nature corrompue, la concupiscence de la chair et des yeux et l'orgueil de la vie (I Jn 2, 16) n'ont pas cessé de s'enflammer et de s'irriter, et les sains principes qui les réprimaient ont perdu de leur clarté et de leur vigueur en bien des âmes. L'incendie des idées se propage en tous lieux ; les rumeurs, pareilles à l'éclair, se répandent plus vite et plus loin que dans le passé. Si peu que le peuple garde un jugement droit, il est d'une logique impitoyable : tandis qu'il écoute, qu'il voit, qu'il lit, il sent en lui le frémissement de son cœur et de sa raison, et aujourd'hui, peut-être plus qu'autrefois, il soupèse les hommes et les choses et les confronte avec ses vraies aspirations et avec ses besoins.<br />
<br />
Ces considérations vous paraîtront bien graves ; mais pour reconnaître sur quelle vérité elles reposent, songez que c'est la famille tout entière qui concourt à bâtir la société ; songez que le bien et le mal de la famille sont comme l'onde, pure ou troublée, d'un ruisseau qui va se jeter dans le grand fleuve de la vie publique et sociale. Or quand donc entrez-vous dans cette vie sociale, chers jeunes époux ? N'est-ce pas le jour de vos noces, ce jour qui vous unit en une nouvelle famille, en une famille qui dans la marche de la communauté humaine a son chemin bien à elle et sa propre destinée au regard de Dieu, de l'Eglise et de la patrie ?<br />
<br />
A vous donc qui venez d'inaugurer un jeune foyer, Nous disons avec toute la tendresse de Notre sollicitude : marquez profondément dans votre esprit et votre cœur le sens et la portée morale de ces responsabilités ; assumez-les avec cette intime gravité qui est le devoir et la fierté de l'esprit chrétien. Mais Nous ajouterons : assumez-les sans crainte, parce que la grâce céleste qui vous fait serviteurs de Dieu et fils de l'Eglise dans la vie et la charité du Christ, ne manquera pas de vous aider à les porter. Qu'une telle puissance de grâce descende sur vous, voilà ce que Nous demandons au Seigneur en vous accordant de cœur Notre Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Patrons_et_domestiques_partagent_une_triple_dignit%C3%A9_laquelle_cr%C3%A9e_une_communaut%C3%A9_de_relations_et_de_devoirs_r%C3%A9ciproques_%E2%80%93_5_ao%C3%BBt_1942_%E2%80%93&diff=2167Patrons et domestiques partagent une triple dignité laquelle crée une communauté de relations et de devoirs réciproques – 5 août 1942 –2012-01-31T18:01:10Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 5 aout 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
I. Dans Notre dernière allocution aux jeunes mariés réunis autour de Nous, Nous avons essayé de mettre en lumière quelle religieuse beauté revêtent les relations entre maîtres et domestiques, lorsque les uns et les autres sont animés de cet esprit chrétien qui rend les « domestiques » en quelque sorte membres de la famille de leurs « patrons ». Ces belles relations familiales, observions-Nous, plus rares de nos jours que jadis, n'ont pas entièrement disparu, et Nous formions le vœu que de si antiques et si saintes traditions refleurissent dans les nouvelles familles que créent les jeunes époux par la mise en commun de leurs vies. N'est-ce pas aussi votre désir, bien-aimés fils et filles ? Ne souhaitez-vous pas ce soutien, ce précieux réconfort, pour la paix et la joie de votre foyer ? Mais un désir, une bonne volonté encore vague ou une admiration purement idéale ne suffisent point à pareille réalisation. Il faut que l'un et l'autre, et celui qui commande et celui qui sert, tiennent chacun sa place et accomplissent chacun son devoir, place et devoir qui, dans leur diversité, découlent de ce qui est commun aux maîtres et aux domestiques, de ce qui constitue leur lien. C'est ce que saint Augustin proclame en ces termes très heureux : « La première autorité de l'homme sur l'homme, une autorité que nous rencontrons chaque jour, c'est celle du maître sur son serviteur... Patrons et domestiques, voilà deux titres divers ; mais hommes et hommes, voilà deux noms égaux. » Pénétrons ces paroles du saint Docteur : elles renferment une pensée qui, tirant son origine de l'unité de la nature humaine, rejoint le domaine de la foi et nous élève vers Dieu. Cette pensée, c'est que ces hommes, patrons et domestiques, sont les uns et les autres également serviteurs de Dieu ; c'est que, comme enfants de Dieu, ils sont frères ; c'est que, comme chrétiens, ils sont, dans leur diversité même, membres et organes d'un même corps, du corps mystique de Jésus-Christ. Cette communauté de triple dignité crée une communauté de relations et de devoirs réciproques.<br />
<br />
Le premier de ces caractères rend les hommes semblables et semblablement serviteurs de Dieu, parce que, bon gré mal gré, le genre humain ne peut nullement se soustraire au service de Dieu et à l'accomplissement de ses secrets desseins. Patrons et domestiques sont donc là égaux devant Dieu, sans que s'effacent pour autant les différences sociales de condition, de fortune et de besoin que Dieu dispose et règle et que la libre volonté de l'homme choisit et réalise. Ce caractère commun de serviteurs de Dieu impose aux patrons et aux domestiques l'obligation de concilier et d'harmoniser leurs rapports mutuels dans la justice et dans l'humanité. N'en doutez point, même entre Dieu et ses serviteurs c'est la justice et l'humanité qui règnent ; cette souveraine justice qui se doit tout à elle-même et rien à personne, parce qu'elle n'a pas d'égale, et qui couronne le trône de Dieu, le juste juge des mérites et des démérites de ses serviteurs dans l'observance de ses commandements et de sa loi ; cette humanité qui prend dans son cœur le nom de miséricorde et qui s'élève, rayonnante, au-dessus de toutes les œuvres divines. C'est par la sagesse de Dieu que règnent les rois (cf. Prov. Pr 8, 15), et c'est par la même sagesse que Dieu soumet les peuples aux rois (cf. Ps 143, 2). Dans la famille doit de même se refléter le divin gouvernement de justice et d'humanité par lequel Dieu ordonne à son service le genre humain universel. On parle souvent de justice, et c'est avec raison, puisque rendre à chacun son dû est l'affaire de tous et de chacun. Mais cette justice se réduit trop souvent à la rigueur d'une formule, au fait que l'un fournit strictement le travail convenu et que l'autre paye ponctuellement le salaire promis. Mais vous vous élèverez à une plus haute conception de la justice et de l'équité, si vous réfléchissez que les noms différents de maître et de serviteur recouvrent une même réalité : l'homme. Ce sont l'un et l'autre des hommes ; ce sont l'un et l'autre des créatures de Dieu, des créatures élevées au-dessus de la matière et de la nature ; de sorte que ces deux hommes sont l'un et l'autre, et au même titre, serviteurs de Dieu, le même, le seul, l'éternel Patron et Seigneur. En tant qu'hommes, ils possèdent l'un et l'autre — outre les biens, les droits et les intérêts du monde matériel — les biens, les droits et les intérêts plus sacrés de leur corps et de leur esprit, de leur cœur et de leur âme. Il ne s'agit donc pas des seules relations mutuelles de la simple justice qui se réduit, selon la froide signification de ce mot, à donner et à recevoir : à la justice il faut joindre l'humanité, cette humanité qui ressemble à la miséricorde et à la bonté de Dieu et qui élève la justice humaine plus haut que la matière, jusque dans les régions spirituelles.<br />
<br />
Représentez-vous, si vous le pouvez, l'isolement d'une pauvre domestique qui, le soir, au terme d'une journée de labeur, se retire dans sa petite chambre, peut-être obscure et triste et dépourvue de tout confort. Elle n'a pas manqué de recevoir, comme il peut arriver, quelques réprimandes, faites peut-être sur un ton dur, aigre, hautain ; il lui a été donné des ordres, peut-être avec un visage qui semblait trahir l'amer plaisir de ne se montrer jamais content. Du moins, on l'a regardée comme une de ces personnes qui ne viennent à l'esprit que lorsque manque ou tarde, ne serait-ce qu'un instant, une chose attendue, tant il paraît naturel à certains d'exiger que tout soit parfait, que tout arrive à point. On ne songe aucunement à la fatigue, au dévouement, aux soins, à la peine que lui a coûtés la diligence qu'elle a mise à son travail ; jamais une bonne parole ne vient l'encourager, jamais un sourire réconfortant la soutenir et la guider, jamais un regard aimable ranimer la flamme. Dans la solitude de sa petite chambre, quelle récompense, plus précieuse que l'or, ne serait pas en ce moment, n'eût pas été durant la journée une parole, un regard, un sourire vraiment humain ! Comme par là son âme sentirait le lien que la nature a établi même entre serviteurs et patrons ! La nuit, attendant le retour de ses maîtres, la petite servante veillera sur les enfants qui dorment, tandis que sa pensée et son cœur s'envoleront à son village pour estimer et proclamer plus heureux les serviteurs qui travaillent sur le bien de son père (Lc 15, 17). Si elle est avancée en âge, elle pensera peut-être avec un nostalgique regret au foyer qu'elle eût pu fonder, elle aussi, modeste foyer où elle eût de ses chants et de ses caresses égayé ses enfants au berceau.<br />
<br />
Pénétrez dans l'âme de cette domestique chez qui vient se joindre à la lassitude du corps l'angoisse d'un cœur qui évoque le passé. Les maîtres de la maison, s'ils sont mondains, y feront bien rarement attention : songeront-ils même peut-être qu'elle a une âme ? On n'osera pas, Nous voulons le croire, lui interdire d'accomplir ses devoirs de chrétienne : mais voilà, souvent on ne lui en laissera ni la possibilité ni le temps ; moins encore on lui permettra de suivre les appels intimes de sa piété et de pourvoir aux intérêts de sa vie morale et spirituelle.<br />
<br />
La maîtresse de maison, sans doute, n'est pas toujours dure et méchante de caractère ; au contraire, elle est souvent pieuse, elle visite les pauvres de l'endroit, elle secourt les nécessiteux et soutient les bonnes œuvres ; mais, sans vouloir généraliser, elle voit mieux la pauvreté qui est au-dehors que la pauvreté qui est à son foyer : elle ignore qu'une pauvreté plus triste encore, la pauvreté du cœur, loge sous son propre toit. Elle ne s'en doute même pas ; jamais elle ne s'est approchée de sa servante avec un cœur de femme, avec un cœur de mère, après les travaux de la journée. Ces travaux de la servante, comment la patronne les connaîtrait-elle, si elle ne les a jamais faits de sa vie ? Aurait-elle donc cette courtoise et noble dignité de maîtresse qui sait, sans avoir à craindre de se diminuer, user de bonté envers une jeune servante ? Pourquoi n'irait-elle pas vers ce pauvre cœur qui reste ferme dans l'humilité de sa tâche, dans les peines de sa vie, dans une obéissance plus que respectueuse envers celle qui n'est pas sa mère ? Maîtresse et servante, deux noms différents, mais en l'une et l'autre de ces deux personnes c'est la même nature humaine, lors même que l'une, sur cette terre, est, du moins en apparence, plus heureuse que l'autre, et plus fortunée. Devant Dieu leur Créateur, elles sont l'une et l'autre servantes, et pourquoi donc oublie-t-on que la plus petite est d'abord servante de Dieu par son âme, et ensuite seulement servante des hommes par son travail ? Grâce au ciel, bien-aimés fils et filles, vous avez d'autres sentiments et Nous voulons croire que le tableau que nous venons de tracer n'est point celui que vous avez sous les yeux dans vos propres familles.<br />
<br />
Mais, s'il faut que les patrons traitent leurs domestiques avec honnêteté et bienveillance, les domestiques n'ont-ils pas à leur tour des devoirs spéciaux envers les patrons ? La justice et l'humanité ne sont-elles pas des vertus qu'ils doivent, eux aussi, pratiquer ? Se comporteraient-ils selon la justice et l'humanité, les domestiques qui manqueraient aux règles de l'honnêteté, tromperaient leurs patrons, divulgueraient les secrets de la famille où ils demeurent, tiendraient sur elle des propos qui pourraient lui nuire, ne prendraient pas un soin vigilant de ce qu'on leur confie ? Que dire de ces domestiques et de ces servantes qui s'occupent et s'acquittent de leur travail avec négligence, ne l'accomplissant que dans la mesure du strict nécessaire, ni plus ni moins, et qui se tiennent à l'écart de la vie familiale au point de n'éprouver et de ne manifester rien d'un cœur humainement délicat et prêt à se dévouer aux heures de maladie, de fatigue, de malheur, de deuil des patrons et de leurs enfants ? Et s'ils étaient irrévérencieux — Nous ne voudrions pas dire insolents — d'une attitude froide, indifférente à tout ce qui a trait au foyer, si par leurs propos, leurs murmures, leurs procédés, ils devenaient parmi les autres domestiques et peut-être même parmi les enfants, des semeurs de mécontentement, de mauvais esprit, ou — ce qu'à Dieu ne plaise ! — de scepticisme, d'impiété, d'impureté, de débauche, quel nom donner à ces serviteurs et à ces servantes qui font le déshonneur de leur classe, pourtant si méritante ? A vous-mêmes de le penser et d'en juger.<br />
<br />
Mais si, revêtus de la même nature humaine que Dieu a formée en nos premiers parents, patrons et domestiques ont un commun Seigneur et Patron qui est Dieu, ils se distinguent chacun devant Dieu par le libre arbitre que le Créateur a remis aux mains et au conseil de l'homme. C'est ainsi que vous trouverez de bons et de mauvais maîtres, de bons et fidèles serviteurs, et des domestiques inutiles et mauvais. Mais les uns et les autres, Dieu les jugera, et il leur rendra à tous selon leurs mérites ou selon leurs démérites, non pas seulement pour ce qui regarde son service, mais encore pour ce qui regarde le service des hommes. Que les maîtres ne s'enorgueillissent point de leur autorité, car toute autorité vient d'en haut. C'est pourquoi le regard du chrétien sait contempler dans toute autorité, dans tout supérieur et jusque dans le patron, le reflet de l'autorité divine, l'image du Christ, qui, bien qu'il fût dans la condition de Dieu, a bien voulu prendre la condition de serviteur et devenir notre frère en la nature humaine. Ecoutez ce que nous enseigne l'apôtre Paul : « Serviteurs, obéissez à vos maîtres selon la chair avec respect et crainte et dans la simplicité de votre cœur, comme au Christ, ne faisant pas seulement le serviteur sous leurs yeux, comme pour plaire aux hommes, mais en serviteurs du Christ, qui font de bon cœur la volonté de Dieu. Servez-les avec affection, comme servant le Seigneur, et non des hommes, assurés que chacun, soit esclave, soit libre, sera récompensé par le Seigneur de ce qu'il aura fait de bien. Et vous, maîtres, agissez de même à leur égard et laissez là les menaces, sachant que leur Seigneur et le vôtre est dans les cieux et qu'il ne fait pas acception de personnes » (Ep 6, 5-9). — « Vous, maîtres, rendez à vos serviteurs ce que la justice et l'équité demandent, sachant que vous aussi vous avez un maître dans le ciel » (Col 4, 1). Levons donc les yeux au ciel et, à la lumière de cette pensée que patrons et serviteurs doivent se considérer comme égaux en face de leur commun Maître et Seigneur, admirons l'évangéliste saint Jean, qui, dans son ravissement céleste, se prosterne aux pieds de l'ange qui l'a guidé et instruit, pour l'adorer. Mais que lui dit l'ange ? — « Garde-toi de le faire ! Je suis serviteur au même titre que toi et que tes frères les prophètes, et que ceux qui gardent les paroles de ce livre. Adore Dieu » (Ap 22,8-9).<br />
<br />
<br />
''' II.<br />
'''<br />
Adorons Dieu dès ici-bas, nous aussi, élevons-nous au-dessus de la nature. Selon la nature, les hommes et les anges sont naturellement les serviteurs de Dieu ; mais dans l'ordre de la grâce nous sommes élevés plus haut que la condition de serviteurs, nous sommes élevés jusqu'à la dignité d'enfants de Dieu. La foi chrétienne monte plus haut que la nature. « Voyez, s'écriait le même apôtre saint Jean, voyez quel amour le Père nous a témoigné, que nous soyons appelés enfants de Dieu et que nous le soyons en effet ! » (I Jn 3, 1). Ainsi, fils d'un même Père, nous crions vers lui : « Notre Père, qui êtes aux cieux. » Ainsi, patron et serviteur se retrouvent et sont frères. Ecoutez l'apôtre et Docteur des nations, saint Paul, recommander à son cher Philémon un esclave fugitif, Onésime, qu'il avait entre temps converti à la foi, écoutez ses paroles : « Reçois-le non plus comme un esclave, mais comme un frère très cher » (Ph 16).<br />
Qu'entre patron et domestique règne la douceur, règne la patience, règne la fraternité !<br />
<br />
On dira qu'il faut aussi maintenir son rang à l'égard des domestiques. Oui, maintenez votre rang, mais aussi votre dignité de frères, à la suite du Fils de Dieu, le Verbe fait chair qui nous donna l'exemple de l'humilité et de la douceur et ne vint pas sur la terre pour être servi, mais pour servir (Mt 20, 28). Ne vous récriez point : pareille attitude ne portera atteinte ni à votre dignité, ni à votre autorité de chef de famille ou de maîtresse de maison. Dans son commentaire à la lettre de saint Paul que Nous venons de vous citer, saint Jean Chrysostome expose en peu de mots toute cette doctrine : « Ne nous emportons pas contre nos serviteurs, mais apprenons à leur pardonner leurs manquements ; ne soyons pas toujours durs avec eux ; s'ils sont bons, ne rougissons pas de vivre avec eux. Pourquoi aurions-nous à en rougir, quand saint Paul ne rougit point d'appeler Onésime son fils et son frère bien-aimé ? Que dis-je Paul ? Le Maître de Paul ne rougit point d'appeler nos esclaves ses frères, et nous, nous en rougirions ? Considérez plutôt l'honneur qu'il nous fait à nous-mêmes d'appeler nos serviteurs ses frères, ses amis et ses cohéritiers »1.<br />
<br />
''' III.<br />
'''<br />
Elevons-nous de lumière en lumière. C'est la gloire de notre foi que les mystères se révèlent toujours d'autant plus hauts et plus profonds qu'ils resplendissent davantage de secrète et divine vérité. Serviteurs de Dieu, enfants de Dieu par la régénération baptismale dans l'eau et l'Esprit-Saint, frères devant le Père des cieux, voilà ce que nous sommes tous dans la communauté chrétienne. Mais le grand apôtre Paul s'élève encore plus haut et nous fait contempler la doctrine de Jésus-Christ dans la lumière d'une admirable figure, affirmant que, en tant que chrétiens, nous sommes plus que frères, nous sommes membres d'un même corps, le Corps mystique du Christ. Cette doctrine ne met-elle point la diversité des conditions et fonctions humaines en lumineuse harmonie avec l'union plus intime, plus vibrante, plus sensible qui doit régner entre chrétiens comme entre les divers membres d'un même corps vivant ? Ne jette-t-elle pas une vive lumière sur la condition de service des plus nobles et sur la noblesse des plus humbles ? « Comme le corps est un et a plusieurs membres, écrit l'Apôtre, et comme tous les membres du corps, malgré leur nombre, ne forment qu'un seul corps, ainsi en est-il du Christ. Tous, en effet, nous avons été baptisés dans un seul Esprit pour former un seul corps... et nous avons tous été abreuvés d'un seul Esprit... L'œil ne peut pas dire à la main : Je n'ai pas besoin de toi, ni la tête dire aux pieds : Je n'ai pas besoin de vous... Et si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui ; si un membre est honoré, tous les membres s'en réjouissent avec lui » (I Co 12, 12-13).<br />
<br />
L'image est si transparente qu'elle n'a besoin ni de commentaires, ni d'explications. Elle peut utilement s'appliquer aux rapports entre maîtres et domestiques. Celui qui a la dignité et le nom de patron vraiment chrétien ne pourra pas, s'il a l'esprit du Christ, ne pas ressentir les souffrances et les nécessités de ses subordonnés ; il ne pourra point ne pas remarquer non seulement leurs besoins et leurs soucis d'ordre matériel et temporel, mais aussi, alors que souvent les domestiques eux-mêmes les ignorent ou n'y comprennent rien, les besoins et soucis de la vie de leur âme. S'élevant au-dessus du bas monde des intérêts, il s'appliquera à encourager et à promouvoir la vie chrétienne de ses subordonnés et serviteurs ; il veillera que durant les heures dangereuses des loisirs, servantes et domestiques trouvent un refuge dans les œuvres instituées pour eux et que leur esprit et leur cœur y reçoivent une solide formation et instruction surnaturelles. De leur côté, le bon serviteur, la fidèle servante mettront leur propre honneur dans tout ce qui honore la famille où ils vivent, puisqu'ils concourent par leur humble travail, leur amour et leur vertu, à la dignité, à la splendeur et à la sainteté de la maison.<br />
<br />
Un tel spectacle familial rappelle à Notre esprit l'exclamation de louange que poussa la reine de Saba en présence de Salomon, après tout ce qu'elle avait vu dans le palais royal : « Heureux tes gens, heureux tes serviteurs, qui sont continuellement devant toi ! » (III Rois, 10, 8).<br />
<br />
Afin que Nos paroles paternelles, chers jeunes époux, soient pour vous, par la faveur de la grâce divine, un gage fécond de bonheur dans le sage gouvernement des familles chrétiennes que vous venez de fonder, Nous vous accordons de tout Notre cœur la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Un_grand_myst%C3%A8re_divin_se_cache_dans_la_modeste_condition_de_%C2%AB_serviteur_%C2%BB_%E2%80%93_22_juillet_1942_%E2%80%93&diff=2166Un grand mystère divin se cache dans la modeste condition de « serviteur » – 22 juillet 1942 –2012-01-31T17:59:27Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 22 juillet 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Cette maison du Père commun des fidèles où vous êtes réunis, chers jeunes époux, est une maison de foi. La colline où elle s'élève, ses murs, ses tableaux, ses souvenirs, son histoire vous parlent de foi ; et c'est la foi qui vous a inspirés de venir ici, c'est la foi qui vous y a conduits. C'est dans la foi du Christ que vous avez scellé votre union ; c'est dans la foi du Christ que vous êtes venus auprès de Nous, non pas dans la simple pensée d'accomplir un acte de piété filiale, mais aussi dans l'espoir que Notre parole vous éclairera sur la route de vos nouvelles obligations et que le secours de Notre bénédiction vous donnera la force d'en porter dignement les charges. Parmi les nombreuses responsabilités qui vous incombent dans la vie conjugale et familiale, il y en a plusieurs que Nous avons déjà examinées et exposées, et d'autres le seront plus tard. Ce que Nous avons dit aux jeunes époux qui vous ont précédés à ces audiences, Nous voudrions vous exhorter à le méditer en esprit de foi et de confiance ; et Nous vous exhortons de même à lire ce que Nous dirons, s'il plaît à Dieu, à ceux qui viendront après vous. Pour aujourd'hui, Nous avons l'intention de vous entretenir d'un sujet trop souvent méconnu de notre temps, mais qu'il est important et nécessaire de considérer en lui-même et dans ses conséquences.<br />
<br />
Vous êtes jeunes, vous appartenez plus au présent et à l'avenir qu'au passé : c'est là le privilège, la fierté des jeunes. Vous contemplez le présent, mais l'histoire avant vous a fait bien du chemin. Depuis plus d'un siècle, les conditions et les relations sociales ont changé et se sont transformées avec une rapidité toujours croissante : le retour périodique des guerres et des bouleversements universels en a précipité l'évolution, et cette évolution a pénétré jusque dans les foyers. D'une part, il est plus rare de rencontrer des familles qui ont un nombre considérable de personnes à leur service ; d'autre part, les familles que la nécessité contraint de recourir au travail d'autrui se sont multipliées. Sans vouloir parler des maisons nobles et aisées, vous voyez bien des mères de famille que leurs occupations retiennent une grande partie du jour loin de leur foyer et qui sont obligées de solliciter, au moins pour quelques heures, le service et la vigilance d'autrui.<br />
<br />
N'allez pas croire, bien-aimés fils et filles, que la nature humaine doive considérer ces travaux au service d'autrui comme une vie d'humiliations et de mépris. Il se cache dans la modeste condition de serviteur un grand mystère divin. Dieu est le souverain et unique maître de l'univers : nous sommes tous ses serviteurs, sans en excepter Jésus-Christ. En effet, « bien qu'il fût dans la condition de Dieu, il s'est anéanti lui-même en prenant la condition d'esclave, en se rendant semblable aux hommes, et reconnu pour homme par tout ce qui a paru de lui ; il s'est abaissé lui-même, se faisant obéissant jusqu'à la mort et à la mort de la croix. C'est pourquoi Dieu l'a souverainement élevé et lui a donné un nom qui est au-dessus de tout nom et qui est notre salut » (Ph 2, 7 et ss. ; Actes iv, 12). Aussi le Christ n'a-t-il pas hésité à affirmer que le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir (Mt 20, 28). Ne voyez-vous pas en lui la sublime réalisation de cette parole que « celui qui s'humilie sera exalté » ? Mais pourquoi donc ? Parce que servir Dieu, c'est régner, et que la vie, c'est de le connaître. Connaître, aimer et servir Dieu, n'est-ce point là, comme l'enseigne le catéchisme, le but de toute notre vie ? Nous sommes tous des serviteurs de Dieu. Nous-même Nous ne sommes dans cette haute charge que le servus servorum Dei, le serviteur des serviteurs de Dieu. Et vous, à votre foyer domestique, vous servez Dieu par la propagation du genre humain, par la propagation des enfants de Dieu, et votre service va même jusqu'à l'héroïsme de la maternité. On sert Dieu, on sert le Christ, on sert la religion, on sert la patrie, on sert les supérieurs, on sert les inférieurs, on sert le prochain. Nous sommes tous les serviteurs de la Providence, qui dirige et ordonne dans le gouvernement du monde toute chose à sa divine gloire, même le mal ici-bas qui bouleverse l'homme, les peuples et les nations. Qu'est-ce que le monde, sinon le champ où sur tous ses travailleurs, serviteurs obéissants ou rebelles, Dieu fait briller son soleil et descendre sa pluie ? (cf. Matth. Mt 5, 45). Qu'est-ce que l'Eglise, sinon la maison de Dieu où, selon l'expression de saint Paul, « vous n'êtes plus des étrangers ni des hôtes de passage, mais des concitoyens des saints et des familiers de Dieu », et domestici Dei ! (Ep 2, 19).<br />
<br />
La famille chrétienne est une image de l'Eglise, un sanctuaire domestique. Les enfants y vivent avec leurs parents, les domestiques et servantes avec les enfants, mais dans une situation spéciale envers leurs patrons et patronnes. Par l'origine et par le sang, ils ne sont certes pas de la famille ; ils ne le sont point non plus par une adoption légale proprement dite ; on peut toutefois considérer comme une sorte d'adoption leur admission dans la même maison pour vivre sous le même toit et devenir les continuels témoins de l'intimité familiale. Mais la vie d'un domestique ou d'une servante chrétienne n'a-t-elle pas, dans un foyer chrétien, sa modeste et discrète beauté ? Cette vie même, il est vrai, est devenue plutôt rare, mais elle n'est pas entièrement disparue de l'histoire et de notre temps. Il est donc opportun de vous la signaler, afin que vous appreniez à l'admirer et à l'aimer et que s'éveille ainsi en votre cœur le noble désir de la faire refleurir dans la société.<br />
<br />
Il n'est pas dans Notre intention d'évoquer la dure histoire des esclaves de l'antiquité. Il suffit de rappeler, croyons-Nous, que dans l'empire romain lui-même — malgré les adoucissements que la législation et le sens pratique de ce grand peuple avaient au cours des âges introduits dans les mœurs publiques — la condition et la vie des esclaves étaient souvent bien misérables. Dans la littérature de cette époque résonne encore comme un écho la voix irritée des matrônes et les lamentations de leurs esclaves. On connaît l'épisode de l'élégante dame qui, pour une seule boucle trop hardie, frappe du nerf de bœuf la malheureuse Psecas qui lui arrangeait les cheveux1. On connaît aussi l'épisode de Lallagé : pour une seule boucle — unus de toto peccaverat orbe cornarum anulus — pour une pauvre petite boucle que rendait disgracieuse une épingle mal fixée, elle frappa du miroir qui lui révélait ce défaut la coiffeuse Plecusa, laquelle en mourut2. Si la colère de la femme païenne fut plus tard adoucie, c'est avant tout l'œuvre du christianisme, qui a pour Chef et pour Maître un Dieu doux et humble de cœur.<br />
<br />
Seulement la distinction entre patrons et serviteurs n'a pas disparu de la société familiale. Entrant pour la première fois en service — et souvent cette prise de contact avec une vie nouvelle revêtait une importance particulière — ces jeunes gens, ces jeunes filles, qui n'étaient encore parfois que des adolescents, appartenaient peut-être à une famille paysanne nombreuse, honnête, estimée dans sa région. Ils avaient vu dans le domaine paternel des domestiques et des servantes respectueux et respectés aider leurs parents dans des travaux encore trop pénibles pour leur âge. En attendant, on avait jugé bon de les envoyer en ville et de les y mettre en service : il y gagneraient leur vie, ce milieu élargirait leur horizon, leur vie s'ouvrirait à un avenir plus favorable, à une situation meilleure. Le cœur gros et inquiet, quittant leur maison, leur paroisse, ils ont écouté les conseils et les admonitions pleines de sagesse et de foi de leurs parents ; on leur a recommandé la fidélité à Dieu et à leurs maîtres. Et ils sont venus chez ces patrons, en compagnie parfois de leur père ou de leur mère, qui déléguaient en quelque sorte à ces maîtres une part de leur propre autorité et de leur sollicitude paternelle ou maternelle.<br />
<br />
Cet accueil d'adolescents, de jeunes gens, dans une nouvelle famille, n'est-ce pas, ainsi que Nous l'avons déjà dit, une sorte d'adoption ? Mais quelle responsabilité assument les patrons à qui un père ou une mère viennent confier leur enfant ! C'est une responsabilité qui engage leur conscience devant Dieu et devant les hommes et qui leur impose l'obligation de concilier une autorité paternelle douce et pleine de sollicitude avec une fermeté suffisante pour maintenir, comme il convient, ces « domestiques » dans l'attitude et dans l'esprit particuliers à leur condition.<br />
<br />
Est-il chose plus émouvante que la scène du serviteur malade du centurion, relatée dans l'Evangile ? Un centurion avait un serviteur malade et sur le point de mourir, un serviteur très cher. Ayant entendu parler de Jésus, il lui envoie des anciens pour le prier de venir guérir son serviteur. Jésus s'en va donc avec eux. Mais alors qu'il n'était déjà plus éloigné de la maison, le centurion lui envoie dire par des amis : « Seigneur, ne vous dérangez point, je ne suis pas digne que vous entriez sous mon toit. Mais dites seulement une parole et mon serviteur sera guéri. » Et en effet, à leur retour chez le centurion, ils trouvèrent le serviteur guéri (cf. Luc, Lc 7, 2 et ss.). Admirez la sollicitude du centurion pour son serviteur, mais admirez surtout l'amour du Christ, qui console tous ceux qui recourent à lui dans la peine et dans l'angoisse.<br />
<br />
Si un païen nous donne un si bel exemple, quels lumineux modèles ne nous fournirait pas l'histoire des familles chrétiennes ! Parcourez-en les pages, et vous verrez au cours des siècles, plus fréquemment que vous ne pensez, la maîtresse de maison accueillir la petite servante inexpérimentée, maladroite, hésitante et rude, avec une sollicitude toute maternelle, comme si c'était sa propre fille ; vous la verrez l'aider, la développer, l'affiner et l'éclairer, sans toucher en rien à cette simplicité, à cette ingéniosité, à cette innocence qui font toute la grâce d'une enfant qui vient de la campagne et qui franchit le seuil d'une famille aisée de la ville. Vous verrez le soir cette enfant répondre avec les autres aux prières que récite le père de famille ; vous la verrez, dans sa timidité, tout émue au souvenir des prières que les siens adressent à Dieu à la même heure dans son village.<br />
<br />
Lorsque, dans un dévouement à toute épreuve, l'esprit chrétien des serviteurs correspond à l'esprit chrétien des patrons, c'est un spectacle à ravir les anges. En cette mutuelle attitude chrétienne, la foi élève le patron sans abaisser le serviteur : elle les met sur le même pied devant Dieu, en cette communion d'esprit que manifeste le soin de chacun à remplir ses devoirs propres. Rien qu'à voir, non seulement dans les pièces les plus fréquentées, mais jusque dans les dernières chambres de service, briller toute chose, rien qu'à voir l'ordre et la propreté la plus soigneuse marquer d'un cachet de noblesse les plus obscurs recoins que personne ne distingue, mais qui n'en font pas moins partie de la maison, on se représente avec quelle amoureuse attention la servante accomplit son humble et pénible travail, sa tâche monotone, tous les jours la même, et reprise tous les jours avec la même ardeur, car c'est le propre de son labeur de recommencer à chaque fois que le jour se lève. Vingt fois peut-être interrompue dans son travail, vingt fois appelée, elle courra à la porte pour l'ouvrir et pour accueillir tout le monde avec le même empressement, la même déférence, le même respect, prête à rentrer dans l'ombre, sereine et joyeuse, et à poursuivre sa tâche avec une tranquille fierté et un zèle assidu. Regardez-la, et vous verrez resplendir en ses vertus les vertus de ses maîtres. Est-ce que par hasard la vertu n'aurait point, elle aussi, sa splendeur ? Cette jeune fille, cette servante, qui retrouve et goûte dans la paix d'une bonne famille chrétienne le parfum d'un sanctuaire domestique, se sentira à son tour puissamment encouragée au bien par l'affectueuse bienveillance qui l'entoure, et les années ne feront que développer et renforcer son dévouement et attachement à ses maîtres et à leur maison.<br />
<br />
Qu'il est beau de voir plus tard ces domestiques et ces servantes qui ont grandi au foyer de leurs patrons, prodiguer leurs soins et leur respectueuse tendresse aux berceaux qui viennent égayer la maison ! Alors, la sollicitude et la bienveillance des patrons deviennent de la confiance envers le domestique et la servante qui exercent sur les enfants, sans jamais en abuser, sans jamais se départir d'une discrète réserve, la surveillance qu'on leur a confiée. Et ces enfants une fois devenus des adolescents, devenus des hommes, vous les trouverez pleins de reconnaissance et d'égards pour ces domestiques âgés et chenus qui ont déjà été au service des aïeuls et des parents et qui ont vu naître une ou deux générations.<br />
<br />
Elles s'envolent, les années : patrons et serviteurs vieillissent, les rides sillonnent les fronts, les cheveux tombent ou blanchissent, les épaules se voûtent, et voici l'âge des infirmités et des épreuves. Il semble alors qu'entre patrons et serviteurs les liens se resserrent toujours davantage et que le service se change en une sorte d'amitié, comme entre deux voyageurs fatigués qui s'appuient l'un sur l'autre afin de poursuivre leur marche ensemble sur le chemin de la vie.<br />
<br />
Nous-même gardons le souvenir de plusieurs exemples de ce genre que Nous avons connus ou dont Nous avons eu l'occasion de lire le récit, et il ne vous déplaira peut-être pas que Nous en évoquions l'un ou l'autre. Une servante qui avait été durant cinquante ans au service de la même famille et qui voyait ses patrons tombés dans l'indigence, estima que sa longue fidélité lui avait conféré non pas des droits, mais des devoirs de parenté, et elle leur offrit, sans accepter en retour aucune garantie, toute son épargne pour les tirer d'embarras. Une autre servante, qui avait également à son actif un demi-siècle de services, résolut de n'être plus à charge à une famille durement éprouvée par la guerre : elle se dévoua entièrement au service de « Madame » devenue pauvre et malade ; et lorsque mourut sa maîtresse, elle voulut pour sa patronne d'hier un monument funéraire digne de la fortune perdue et elle donna à cette fin la somme qu'elle avait reçue d'une société de bienfaisance3.<br />
<br />
Des exemples plus hauts encore, des exemples où resplendit avec la charité chrétienne l'union des patrons et des serviteurs dans la confession de la foi, dans le martyre, vous en trouverez dans l'histoire des premiers siècles du christianisme. Voici Agathodore, domestique de saint Papilus et de sa sœur Agathonica, martyrisés ensemble à Pergame4. Voici, à Alexandrie, le vieillard saint Julien que l'infirmité empêche de marcher et qui se fait porter au tribunal par deux serviteurs ; si l'un d'eux malheureusement renia sa foi, l'autre, Enus, fut l'héroïque compagnon de son maître dans les tourments du martyre5. Voici les illustres martyres de Carthage, . Vibia Perpétue et sa servante Félicité : exposées toutes deux aux bêtes, toutes deux grièvement blessées, elles moururent ensemble d'un coup de poignard à la gorge, victimes pour le Christ6. Nous ne pouvons non plus passer sous silence l'héroïque servante Blandine, morte durant la persécution de Lyon en 177 : alors que sa patronne craignait que cette tendre et frêle enfant fût incapable de persévérer dans la confession de la foi chrétienne, Blandine non seulement supporta avec joie les plus cruels supplices, mais exhorta et encouragea à la constance dans la foi le jeune Ponticus, âgé de 15 ans7.<br />
<br />
Les guerres, les révolutions, les privations mettent aujourd'hui sous nos yeux des héros et des héroïnes non moins admirables de foi et de charité. Si ces nobles héroïsmes se sont faits plus rares, il faut qu'ils revivent. Priez, veillez, travaillez ; faites de votre maison un foyer où ceux qui entrent et qui vous offrent leurs services respirent et boivent l'air le plus pur. Votre œuvre alors resplendira comme le joyau d'un diadème, dans la restauration de la société chrétienne, dans cette société où l'apôtre Paul nous dit qu'il n'y a plus, sous le nom de patrons et de serviteurs, que la sainte et immense famille des enfants de Dieu (cf. Gal., ni, 26-28).<br />
<br />
Afin que vous adressiez à Dieu d'humbles prières pour l'accomplissement d'une œuvre aussi méritoire et que vous lui présentiez vos vœux avec la conviction qu'il n'y a que lui qui vous puisse éclairer et guider, Nous vous donnons, chers jeunes époux, de toute l'affection de Notre cœur la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_s%C3%A9parations_forc%C3%A9es_%E2%80%93_15_juillet_1942_%E2%80%93&diff=2164Les séparations forcées – 15 juillet 1942 –2012-01-31T17:58:08Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 15 juillet 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
C'est un spectacle de joie sereine que vous offrez, chers jeunes époux, aux regards des foules qui vont et viennent et circulent par les rues et les places de Rome ; un spectacle auquel donnent âme et vie, non pas tant la majestueuse grandeur des souvenirs et des monuments de cette antique cité, mais bien plutôt la foi et la religion chrétienne, dont ses hypogées, ses amphithéâtres et ses cirques, ses collines et ses admirables basiliques reçoivent leur consécration. Les passants qui vous voient sortir des églises, ou gagner Saint-Pierre pour accomplir votre pieux pèlerinage et demander Notre Bénédiction apostolique, s'arrêtent un instant à vous regarder : leur sourire vous exprime leur joie et leurs vœux de bonheur et, dans vos cœurs serrés l'un contre l'autre, dans vos cœurs où bat une vie nouvelle, ils admirent la confiance, la joyeuse assurance de l'avenir. Cependant, chez plus d'un qui vous contemple et vous enveloppe de sa sympathie, le sourire semble se voiler d'une ombre d'inquiétude.<br />
<br />
Et pourtant vos cœurs, ni les inquiétudes ni les doutes ne les tourmentent. Unis que vous êtes par le sacrement de mariage, vous avancez sur le chemin où vient de s'engager votre vie pour une union indissoluble jusqu'à la mort, et vous aimeriez ne connaître jamais aucune séparation. Telle est la résolution des époux chrétiens, tel est leur fervent désir. A l'un des groupes qui vous ont précédés ces jours derniers, Nous avons donné dans une allocution les paternels avis dont ils avaient besoin pour conserver la tendre et forte union de leur amour à tout jamais, pour la mettre et garder à l'abri des faiblesses humaines qui conduisent si souvent à la séparation des cœurs.<br />
<br />
Cependant, les cœurs ont beau rester fermes dans leur union, il n'est pas rare qu'ils aient à porter le poids pénible d'autres séparations, de séparations moins pernicieuses et moins amères, si vous voulez, mais non moins douloureuses, qui ne sont la faute ni de l'un ni de l'autre conjoint : ce sont les séparations forcées, sortes de veuvage temporaire plus ou moins prolongé. Considérez ce temps de guerre et les divers théâtres de combats sur terre, sur mer et dans les airs. Que de jeunes couples a séparés l'appel de la patrie ! Combien ont avancé le jour de leurs noces pour être définitivement unis devant Dieu avant de se quitter, avant que l'homme ait passé pour ainsi dire de l'autel au champ de bataille ou à la caserne ! Combien de cœurs résolus, mais déchirés, attendent d'un jour à l'autre l'appel de l'austère et pénible devoir ! Combien voient se prolonger à n'en pas finir leur lointain exil ou leur captivité ! Ce sont des séparations qui atteignent les époux dans les profondeurs de leur âme, là où l'amour vrai gagne des batailles non moins glorieuses que celles qui se livrent les armes à la main.<br />
<br />
Mais même en temps de paix bien des couples se voient contraints à de brusques séparations qui sont libres en un sens, mais que leur imposent des raisons majeures, par exemple une fonction, un métier, un indispensable gagne-pain. La profession, qui est en certains cas une véritable vocation et une impulsion de l'esprit, retient loin du foyer, pour des mois ou des ans, le pilote, le marin, le colon, le voyageur, l'explorateur des terres et des mers, le chercheur de métaux ou de retraites humaines pour ainsi dire inaccessibles. La nécessité, cette impérieuse compagne des chemins de la vie, oblige et souvent contraint le père à gagner le pain de sa famille dans une charge, un emploi ou un service à une distance qui ne lui permet pas, sinon rarement et pour peu de temps, une visite au foyer domestique. Et que dire de l'émigré que sépare des siens l'immensité de l'océan ?<br />
<br />
De telles séparations sont un thème douloureux : pourquoi donc, à votre avis, en parlons-Nous à des jeunes mariés ? Est-ce peut-être pour assombrir votre joie sereine ? Ou pour troubler vos doux rêves d'avenir ? Certes non. Mais votre présence pourrait-elle Nous faire oublier les absents et les séparations ? Vous éprouvez maintenant la joie de vous trouver côte à côte ; mais votre joie comme celle que Nous avons à vous voir ensemble ici, doit, sans se laisser arrêter par la crainte, éveiller en vous aussi le souvenir compatissant de ceux qui sont privés d'une si grande liesse. Du reste — mais que le ciel vous en préserve ! — ces épreuves de la séparation ne pourraient-elles pas un jour vous atteindre aussi ? Souffrez donc, puisque Nous le croyons profitable pour vous, que Nous donnions quelques avis et exhortations qui dépassent le cercle de cet auditoire et parviennent à ceux-là même que les circonstances et les vicissitudes de la vie ont éloignés l'un de l'autre ou qu'elles tiennent encore dans l'angoisse d'une si cruelle séparation.<br />
<br />
C'est une épreuve, c'est une douleur, certes ; mais c'est encore un danger : le danger que l'éloignement prolongé accoutume peu à peu le cœur à la séparation et que l'amour se refroidisse et baisse, selon le triste proverbe « loin des yeux, loin du cœur » ; le danger que, durant l'absence de l'époux légitime, s'insinue dans l'âme affligée la tentation de rechercher ou d'accepter certaines compensations illégitimes du cœur et des sens ; le danger, en un mot, de céder aux assauts plus ou moins ouverts, plus ou moins masqués, d'être importuns, passionnés ou intéressés.<br />
<br />
Ce danger pour le moment est loin de vous menacer et la seule pensée que pareille chose puisse arriver vous remplit d'horreur. Votre cœur vous semble si sûr et vous le sentez si résolu, que vous le croyez inaccessible à la tentation, plus fort que les flatteries, plus vigilant et plus avisé que les fourberies des passions. Et pourtant l'expérience vous apprend que d'autres sont tombés, qui se sentaient tout aussi sûrs d'eux-mêmes, qui se croyaient tout aussi inébranlables. Leur cœur resta longtemps fidèle et leur volonté ferme, mais un jour, matin ou soir, quelle tempête sur le lac de leur cœur ! Quelle agonie pour ne pas sombrer dans les flots de l'angoisse, pour remporter la victoire sur les passions ! Sur les bords de l'abîme ils ont été saisis par l'horreur du vertige. A quoi bon par conséquent dissimuler le péril ? Nous vous le signalons pour le seul but de vous aider à vous en défendre, à y échapper, le rendant ainsi moins menaçant pour vous et votre vertu.<br />
<br />
Ne vous étonnez donc pas, si vous Nous entendez dire que ce péril peut surgir du fond de vous-mêmes ou qu'il peut, s'il vient du dehors, trouver en vous une porte trop faiblement gardée. Le cœur sensible et délicat est source pour vous des chastes joies de l'amour conjugal que Dieu et l'Eglise ont béni et ratifié ; mais ce cœur peut-il jamais cesser de battre et d'éprouver la faim inassouvie d'aimer et d'être aimé ? Cet amour réclame l'union de présence et l'union d'affection1. L'absence tourne donc pour lui en langueur et en plaintes, la séparation devient le tourment de l'âme, la privation de ce pur amour la jette dans la tristesse de l'abandon, et la douleur l'égaré. Alors si cet amour ne se garde pas jalousement et ne reste pas vigilant, un secret instinct l'invitera et l'inclinera à rêver, à désirer, à rechercher, à goûter peut-être — sans commettre encore de véritables infidélités et sans franchir les bornes des honnêtes convenances — certaines compensations, certains échanges ou du moins certaines consolations qui le laisseront plus faible encore et plus chancelant, sinon parfaitement désarmé en face de la tentation. Et la tentation viendra.<br />
<br />
Elle viendra sous le voile des divertissements, sous l'apparence d'un remède à la mélancolie de l'absence, mais qui en réalité distraira de l'absent lui-même. Par la fourberie de l'amour impur, la langueur de l'amour le plus chaste deviendra un piège. Les sentiers du mal prennent à l'ordinaire tout près des routes fleuries du bien. La tentation viendra de ceux qui vous entourent : on voudra, dans une intention louable et sans éveiller le moindre soupçon, vous consoler, vous réconforter ; cette compassion sincère et votre courtoise reconnaissance soumettront votre tendresse à une dangereuse épreuve, la feront fléchir et grandir ; les intérêts matériels ou moraux du foyer, des enfants, de l'absent lui-même, uniront leurs voix pour vous presser de recourir à des conseils, à des appuis, à des aides. Cette rencontre de l'empressement le plus loyal et le plus désintéressé et de votre confiance la plus sincère et la plus honnête pourra furtivement insinuer l'affection dans votre tendre cœur.<br />
<br />
Une question se pose ici : faudra-t-il, sous la menace de ce danger, rompre et exclure les relations irréprochables que le devoir peut rendre utiles ou nécessaires ? Non. Mais celui qui connaît le terrain dangereux doit savoir l'éviter ou s'élever au-dessus, par la fermeté et générosité de son amour. Pareil amour, sans nul doute, peut sembler austère, il impose une certaine dignité de vie, de mœurs, de manières, d'habitudes ; mais cette attitude même marquera aux yeux des étrangers l'invisible présence de l'absent. Parlant du vêtement — et l'observation vaut pour tout le reste — saint François de Sales note avec finesse : « La femme mariée se peut et doit orner auprès de son mari, quand il le désire ; si elle en fait de même en étant éloignée, on demandera quels yeux elle veut favoriser avec ce soin particulier2. » Ne vous disions-Nous pas tout à l'heure que l'état de séparation forcée met les époux dans une sorte de veuvage temporaire ? Ecoutez donc la leçon de saint Paul aux veuves chrétiennes : il les met en garde contre l'abus des relations et des visites, contre l'oisiveté, les bavardages et les commérages ; il veut au contraire qu'elles se vouent au soin de la famille et de la maison, aux bonnes œuvres, à la prière, et que le sérieux de leur conduite ne donne à personne une occasion de médisance (I Tim., v).<br />
<br />
Si donc Nous vous mettons en garde contre de tels dangers, vous en voyez la raison : c'est qu'ils sont une menace pour votre fidélité conjugale et pour la vigilance assidue dont vous devez l'entourer. Si l'amour conjugal est un sentiment que la nature elle-même inspire au cœur de l'homme et de la femme, réfléchissez bien qu'il faut à la nature la règle de la raison. Or, quand vivez-vous selon la raison ? Quand vous dominez vos passions, quand la grâce et le sacrement, en élevant et perfectionnant la nature, gouvernent vos passions. Que les époux n'oublient point que la vertu tient le juste milieu entre deux extrêmes, et ils sauront ainsi éviter cette excessive sensibilité, cette « sentimentalité », qui recherche en dehors du foyer des satisfactions et des consolations étrangères et désordonnées, ils sauront maintenir vivant et solide, immuable et tendre, leur mutuel souvenir.<br />
<br />
Mais en quoi et comment conserveront-ils ce précieux lien du souvenir ? Ils le conserveront et ils le défendront dans tous les secteurs de leur existence. Au foyer, tout parlera de l'absent : les parois avec les photographies et les souvenirs des divers événements et du cours de la vie, baptême, première communion, mariage, succès scolaires, témoignages de mérite et de travail ; les chambres avec les images pieuses, les livres, les objets familiers et chers. Pour celui qui demeure loin du foyer, la mansarde, la cabine et jusqu'à l'angle le moins éclairé apparaîtront comme illuminés par les portraits et les souvenirs des personnes que l'on a laissées avec l'espoir de les retrouver, et qui, elles, attendent le retour de l'être aimé. Dans cette intime et secrète lumière, à l'heure silencieuse du soir, les deux cœurs séparés se retrouveront, ils uniront leurs battements dans la prière, en ce surnaturel rendez-vous où veillent sur l'un et l'autre le regard et la protection de Dieu.<br />
<br />
Néanmoins, la distance demeure. Qui en dominera l'amertume, qui en franchira l'espace ? Qui la supprimera en quelque sorte entre les époux ? Les lettres échangées, si possible, qui seront les messagères des mutuelles confidences. Les lettres, quel réconfort elles apporteront au cœur, quel soutien à l'âme ! Elles rendent communes à tous les deux toutes les heures de la journée, avec son ciel serein et ses nuages : non seulement les grandes choses, les grands événements, mais aussi les petits détails de la vie quotidienne, ne taisant rien que les petits embarras et les fâcheux ennuis, ceci pour épargner au conjoint d'inutiles angoisses que la distance a coutume de grossir. Les vraies peines, on se les communique pour se soutenir l'un l'autre, et les vraies joies, pour les partager et les goûter ensemble ; on échange les projets et les vues ; et surtout on veille et on travaille en commun à l'éducation des enfants. En un mot, chacun rend sa journée présente à l'autre, si bien que, lorsqu'ils se retrouveront l'un et l'autre au foyer, ils croiront n'avoir jamais été séparés. Cette correspondance n'est-elle pas plus bienfaisante qu'un simple énoncé de choses ou de faits ? Ne reconnaissez-vous pas dans l'écriture de la lettre les traits bien connus de la main qui a mille fois serré la vôtre ? Ne sentez-vous pas l'esprit et le cœur s'exprimer eux-mêmes et confier à la plume leurs pensées, leurs mouvements et leurs battements, leurs idées et leurs sentiments ? Ainsi les âmes se rencontrent, se revoient, se rejoignent pour monter, pour franchir les distances, pour s'élever parfois très haut, là où l'on trouve, dans les tempêtes de la vie, toute consolation et toute tranquillité, c'est-à-dire jusqu'en Dieu, qui mesure les joies aux angoisses.<br />
<br />
<br />
Or, si Dieu est — et il doit l'être — le lien de votre amour, il le marquera en retour de son sceau, l'affermissant à tel point que rien au monde n'aura la force de le gêner ou de l'affaiblir. Ecoutez encore saint François de Sales : « Le premier effet de cet amour, c'est l'union indissoluble de vos cœurs. Si on colle deux pièces de sapin ensemble, pourvu que la colle soit fine, l'union se fera si forte qu'on fendrait beaucoup plus tôt les pièces aux autres endroits qu'en l'endroit de leur conjonction ; mais Dieu conjoint le mari à la femme en son propre sang ; c'est pourquoi cette union est si forte que plutôt l'âme se doit séparer du corps de l'un ou de l'autre, que non pas le mari de la femme. Or, cette union ne s'entend pas principalement du corps, ains (mais) du cœur, de l'affection et de l'amour3. » Mais souvenez-vous que, si Dieu a élevé le lien nuptial à la dignité de sacrement, de source de grâce et de force, il ne vous y donne pas la persévérance sans votre propre et constante coopération. Or, vous coopérez à l'action de Dieu par la prière quotidienne, par la maîtrise de vos penchants et de vos sentiments (surtout s'il vous fallait vivre quelque temps séparés l'un de l'autre), par une étroite union au Christ dans l'Eucharistie, le pain des forts, de ces forts qui savent, au prix de n'importe quels sacrifices et renoncements, maintenir sans tache la chasteté et la fidélité conjugales.<br />
<br />
Que nulle séparation de temps ou de lieux, chers jeunes époux, ne relâche le lien de votre amour, ce lien que Dieu a béni, que Dieu a consacré. Restez fidèles à Dieu, et Dieu gardera votre amour immaculé et fécond. C'est ce que Nous vous souhaitons, en vous accordant avec toute l'affection de Notre cœur paternel la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Lettre_au_R._P._Mateo_Crawley-Boevey_Ap%C3%B4tre_de_l%27Intronisation_du_Sacr%C3%A9-C%C5%93ur_dans_les_Familles_%E2%80%93_13_juillet_1942_%E2%80%93&diff=2163Lettre au R. P. Mateo Crawley-Boevey Apôtre de l'Intronisation du Sacré-Cœur dans les Familles – 13 juillet 1942 –2012-01-31T17:57:17Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 13 juillet 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
<br />
Nous avons appris avec une paternelle satisfaction que vous deviez célébrer prochainement le cinquantième anniversaire de votre profession religieuse dans la Congrégation des sacrés Cœurs de Jésus et de Marie et de l'Adoration perpétuelle du Très Saint Sacrement de l'autel.<br />
<br />
Nous savons aussi — et Nos vénérés prédécesseurs l'avaient eux-mêmes volontiers reconnu — le zèle exceptionnellement fécond avec lequel vous avez, au cours de ce demi-siècle d'apostolat, exercé le ''ministerium Verbi'', tendant surtout à l'intronisation du Sacré-Cœur dans les familles.<br />
<br />
Inlassable apôtre de cette pieuse pratique, si propre à étendre dans les familles et parmi les nations le règne d'amour, de miséricorde et de paix du divin Sauveur, vous n'avez eu de cesse qu'elle ne soit connue, appréciée, adoptée dans les divers continents où la Providence conduisit vos pas et jusqu'en ce grand pays qui bénéficie actuellement de votre ardent ministère, surtout à la faveur des retraites sacerdotales.<br />
<br />
Voilà ce que Nous suggère, entre autres consolations, l'heureuse occasion des noces d'or de votre profession religieuse.<br />
<br />
Comment n'en rendrions-Nous pas avec vous de vives actions de grâces aux sacrés Cœurs de Jésus et de Marie ? Comment ne vous souhaiterions-Nous pas les meilleurs réconforts, les plus abondantes faveurs du ciel ?<br />
<br />
C'est précisément pour leur assurer encore plus d'efficacité que Nous envoyons de tout cœur, comme gage de Notre bienveillance et de Nos félicitations, la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Dominez_et_domptez_votre_amour-propre_par_un_amour_agissant,_par_un_g%C3%A9n%C3%A9reux_esprit_de_sacrifice_dans_une_union_assidue_avec_Dieu&diff=2162Dominez et domptez votre amour-propre par un amour agissant, par un généreux esprit de sacrifice dans une union assidue avec Dieu2012-01-31T17:56:20Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Mesquines exigences de l'égoïsme. L'amour-propre semble dormir aussi longtemps que les autres mettent leur pensée et leur soin, par devoir ou pure bonté, à en satisfaire les convoitises, les aspirations et les besoins. Souvent, sans presque y faire attention, les futurs époux ont vécu l'un et l'autre, jusqu'à leur mariage, du travail de leur père et des soins de leur mère, tranquillement habitués qu'ils étaient dès leur bas âge et même au temps de leur adolescence à compter sur leurs parents et sur les autres personnes de la maison. Mais voilà que maintenant l'un et l'autre doivent s'oublier un peu soi-même pour se dévouer au bien de leur communauté. Alors on commence à comprendre ce qu'il en coûtait de travaux et de fatigues à son père, quelle incessante abnégation animait le dévouement de sa mère, et avec quelle facilité celui qui écouterait la nature égoïste laisserait aux autres le soin et le souci de penser à tout. Ne voyez-vous point que c'est là le chemin par où s'insinue dans l'amour vrai l'amour désordonné de soi-même ? Ce n'est encore là qu'une légère fêlure dans l'amour, mais déjà elle l'entame. Apprenez du Cœur de Jésus la générosité dans le sacrifice, cette générosité qui bride les exigences de l'amour-propre par la complaisance et courtoisie de l'affection.<br />
<br />
Mesquines tyrannies de l'égoïsme. S'il n'y a que l'amour vrai qui conduise à une noble et profonde communauté de sentiments, l'amour-propre, lui, fait consister cette conformité dans la pleine soumission et subordination de l'autre partie à ses goûts à lui et à ses propres répugnances. Il le remarque si peu lui-même que dans le désir de faire quelque cadeau ou plaisir il consultera plutôt ses préférences personnelles que celles de celui ou de ceux qu'il entend contenter. Les échanges de vues, qui élargiraient l'horizon de l'un et l'autre, conduisent aux discussions, et les discussions cèdent bientôt la place aux définitives sentences de l'amour-propre tyrannique ; et pourtant la légère fêlure du début semblait laisser la surface parfaitement lisse. L'humilité de Jésus vous apprendra à vaincre l'orgueilleuse prétention de dominer en tout et jusque dans les petites contestations et préférences, et ce ne sera pas là une médiocre victoire sur l'amour-propre.<br />
<br />
Mesquines cruautés de l'égoïsme. Nul n'est parfait ici-bas. Souvent l'amour est aveugle durant le temps des fiançailles : il ne voyait pas les défauts ou les prenait pour des vertus. Mais l'amour-propre est tout yeux : il observe et découvre, quand même il n'a nullement à en souffrir, les plus légères imperfections, les plus inoffensives bizarreries du conjoint. Pour peu qu'elles lui déplaisent ou simplement qu'elles le gênent, il les relève aussitôt par un regard doucement ironique, puis par une parole légèrement piquante, peut-être par une cinglante raillerie en présence d'autres personnes. Il est seul à soupçonner si peu quel dard il lance, quelle blessure il ouvre ; mais lui, il s'irrite dès que les autres, même sans dire un mot, s'aperçoivent de ses défauts, si pénibles qu'ils soient à autrui. Simple fêlure encore ? Ce ne sont certes pas là ces courtoises et douces manières dont le Cœur de Jésus nous donne l'exemple, lui qui, dans son patient amour, nous pardonne tant de choses à nous-mêmes.<br />
<br />
Si l'égoïsme ne domine que dans un cœur, l'autre en garde une secrète blessure dans sa profonde et docile vertu. Mais deux égoïsmes en viennent-ils à se dresser l'un contre l'autre, c'est la tragique guerre, c'est l'entêtement farouche où s'incarne l'amour de soi et de son propre jugement. Oh ! que de sagesse dans les réflexions et les conseils de l'Imitation du Christ : « Plusieurs se recherchent secrètement dans ce qu'ils font, et ils l'ignorent. Ils semblent affermis dans la paix, lorsque tout va selon leurs désirs ; mais éprouvent-ils des contradictions, aussitôt ils s'émeuvent et tombent dans la tristesse... Appliquez-vous à supporter patiemment les défauts et les infirmités des autres, quels qu'ils soient, parce qu'il y a aussi bien des choses en vous que les autres ont à supporter... Nous aimons que les autres soient exempts de défauts, et nous ne corrigeons pas les nôtres1. »<br />
<br />
En soi, pour des époux qui unissent leurs vies, rien d'étonnant qu'il y ait des différences de tempérament et de caractère, et elles ne leur causent aucune surprise lorsqu'ils les découvrent : elles restent dans les limites et les règles de la bonne entente. Aussi arrive-t-il que des caractères pourtant divers s'allient et se complètent à merveille dans un mutuel perfectionnement. Mais dès que l'un des conjoints ou l'un et l'autre refusent de céder en des choses futiles, en des questions de pur goût, en des désirs tout à fait personnels, c'est alors que commence le malheur. C'est déjà une fêlure : l'œil ne parvient pas à la découvrir, mais, au moindre heurt, le vase ne rend plus le même son. La fêlure s'élargit ; les disputes se font plus fréquentes et plus vives ; même si la rupture n'est pas encore consommée, il n'y a plus qu'une communauté tout extérieure, au lieu de cette union de deux vies qui gagne le fond des cœurs. Qu'en penseront, qu'en diront les enfants ? Les scènes dont ils sont témoins, quels ravages ne causeront-elles pas dans leur âme et dans leur amour ! Et si la maison est déserte d'enfants, quel tourment que la vie des époux ! Qui peut voir ou prévoir à quels résultats conduisent parfois les mesquines cruautés de l'amour-propre ?<br />
<br />
Les drames et les tragédies de certaines familles vous auront sans doute avertis, car l'histoire est le témoin des temps et la maîtresse de la vie ; vous pressentez et vous préparez dans vos cœurs le moyen de ne point tomber dans une erreur si fatale, vous voulez prévenir une si déplorable évolution de votre amour, courageux et fermement résolus que vous êtes à arrêter le mal et à le couper à sa racine, si par malheur vous le sentiez lever en vous. Quel est ce moyen et quelle est cette résolution ? Cette résolution et ce moyen, c'est de vous décider, c'est d'apprendre, dès aujourd'hui, à renoncer à vous-mêmes, à dominer et à dompter votre amour-propre par un amour agissant, par un généreux esprit de sacrifice, dans une union assidue avec Dieu — secret qui ne paraît pas au-dehors — et cela dans les grandes choses et dans les grandes contrariétés autant que dans les petits incidents, ennuis, déplaisirs et fatigues de la vie quotidienne, qui ne sont quelquefois pas moins ardus et pénibles à supporter. Conquérez l'habitude de la patience, du support et du pardon mutuel, et vous deviendrez maîtres de votre amour-propre ; la victoire remportée sur vous-mêmes ne sera plus un renoncement, mais une acquisition. Alors, d'instinct, pour ainsi dire, et comme par un mouvement naturel, chacun de vous fera siens les jugements, les goûts, les inclinations de son conjoint ; et ces jugements, ces goûts, ces inclinations perdront de leur tranchant, se poliront, s'embelliront, s'enrichiront dans l'harmonie, au profit des deux époux. Aucun d'eux n'y perdra, et même il en résultera cette abondance de fruits qui naît de la collaboration, de cette collaboration dont nous avons naguère parlé à un autre groupe de jeunes mariés.<br />
<br />
Il est vrai que ces concessions, qui facilitent dans la diversité des caractères la communauté des pensées et des sentiments, ont leurs limites. Plaise à Dieu que vous n'ayez jamais à en faire la douloureuse expérience ! Ce sont des limites marquées par le devoir, la vérité, la morale, par des intérêts sacrés. Nous faisons avant tout allusion, vous le comprenez, à la sainteté du mariage, à la foi et à la pratique religieuse, à la bonne éducation des enfants. Y a-t-il conflit en ces matières, la fermeté devient une obligation indiscutable. Mais si ces grands et solennels principes ne sont pas en jeu et que votre vertu vous ait amenés à faire joyeusement ces concessions réciproques si utiles à la paix des foyers, il sera bien difficile que naisse un conflit et il n'y aura pas lieu d'une intransigeante opposition. Les occasions de conflits seront encore plus réduites, si, au lieu de se laisser séduire par des considérations toutes extérieures et secondaires ou par des intérêts vulgaires, si au lieu de s'engager à la légère et avec précipitation, les fiancés ont pris avant le mariage le temps de se mieux connaître ; s'ils n'ont pas fermé l'oreille aux sages avis ; s'ils se sont assurés que les divergences de caractère dont Nous venons de parler n'étaient pas incompatibles. En de pareilles conditions, s'il venait à se montrer en l'un des époux quelque variation ou altération, même légère, d'idées, de tendances, d'affection, le cœur de l'autre, par son dévouement inaltérable, par sa patiente longanimité, par ses attentions courtoises et délicates, saura aisément retenir ou reconduire dans l'union conjugale l'esprit hésitant et la volonté chancelante de son conjoint. Le mari verra en sa femme se développer le sérieux et disparaître la frivolité, et il n'oubliera pas avec les années le conseil du Prophète : « Ne sois point infidèle à la femme de ta jeunesse » (Ml 2, 15). La femme verra en son époux se raffermir la foi et la fidélité non moins que l'affection et elle le gagnera à une dévotion solide et aimable. Ils rivaliseront dans leurs désirs de rendre le foyer domestique paisible, gai et plaisant, de sorte qu'ils ne songeront ni l'un ni l'autre à chercher ailleurs une compensation, du repos ou des divertissements ; et l'amour-propre, source de tous les troubles, ne sera pas une menace pour l'ordre et la tranquillité de la famille. Le Cœur de Jésus y régnera en souverain et il en garantira la vraie, l'intime, l'indestructible félicité.<br />
<br />
Puisse votre union et votre amour porter leurs fruits, chers jeunes époux, puisse une frétillante couronne d'enfants, tels les rameaux de l'olivier, entourer votre table ! C'est le vœu paternel que Notre âme présente à Dieu avec effusion, tandis que Nous vous donnons de tout cœur Notre Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=L%27amour-propre_porte_%C3%A0_l%27union_sacr%C3%A9e_des_%C3%A2mes_une_blessure_invisible_et_souvent_fatale_%E2%80%93_17_juin_1942_%E2%80%93&diff=2161L'amour-propre porte à l'union sacrée des âmes une blessure invisible et souvent fatale – 17 juin 1942 –2012-01-31T17:55:45Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 17 juin 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
La tristesse de l'heure présente, si grande soit-elle, n'envahit pas les cœurs brûlants de foi, d'espérance et de charité jusqu'à éteindre ou diminuer, chers jeunes époux, la flamme d'amour chrétien qui a uni vos vies dans la joie et qui vous a conduits dans la joie en cette Rome qui est le cœur de l'Eglise, pour y implorer sur votre union, tel un sceau de votre lien sacré et indissoluble, la paternelle bénédiction du Vicaire de Jésus-Christ.<br />
<br />
Cette sainte joie ne connaît ni restrictions, ni réserves. Et pourtant, Notre cœur Nous le dit, ce n'est pas sans émotion que vous avez franchi le seuil de votre demeure paternelle pour vous mettre ensemble en chemin, côte à côte et inséparables jusqu'à la mort. Une larme sans doute a brillé à votre œil au moment du départ, alors que vous avez reçu de votre père et de votre mère le baiser des adieux. En ce baiser vibraient les plus doux souvenirs de votre enfance et de votre adolescence, et votre cœur en a senti la blessure du détachement. Qui donc pourrait vous en faire le reproche ? Quel est le cœur d'époux ou d'épouse qui pourrait en éprouver de la jalousie ? Votre mutuel amour, qui doit avoir le courage de sacrifier à la vie commune sans hésitation les douceurs de la tendresse filiale, devrait-il aller jusqu'à renier cette affection, jusqu'à briser dans les enfants tous les liens de la nature ?<br />
<br />
Si c'est un commandement de Dieu que de quitter la maison paternelle, c'en est un également d'aimer et d'honorer ses père et mère, et ce commandement-ci ne s'oppose pas à l'autre. C'est le même Dieu qui impose au fils un devoir d'affectueux amour envers ceux qui lui ont donné la vie, et qui lui enjoint, dans sa profonde et sage Providence, de quitter ses parents pour s'unir à son épouse (cf. Gn 2, 24), comme il ordonne à l'épouse de suivre son époux dans toutes les vicissitudes de la vie. Ces deux amours sont voulus de Dieu et ils se contrarient d'autant moins que la piété filiale est une des plus fermes garanties de la concorde et de la félicité conjugales. Quelle confiance pourriez-vous bien mettre dans l'union et la fidélité réciproque de ces malheureux qui ne voient et ne recherchent dans le mariage que le moyen de se débarrasser et libérer des liens si doux, du joug si suave de la vie familiale au foyer paternel ? De pareilles dispositions d'âmes, car il n'en manque pas d'exemples, déshonorent le jeune homme et la jeune fille ; c'est le triste présage que, de même qu'ils n'ont pas agi en enfants respectueux et affectueux, ils ne sauront pas être non plus des époux vertueux et fidèles. Ce n'est pas un amour plus puissant que l'affection filiale qui les a portés l'un vers l'autre, mais l'égoïsme, ce sinistre égoïsme à deux, beaucoup moins avide de trouver un conjoint que « de vivre sa vie » parallèlement, avec le pacte tacite, explicite même parfois, d'une affection conjugale menteuse et indifférente et d'une mutuelle indépendance sous le manteau d'une union apparente, stérile et révocable. Est-ce là le mariage sacré auquel le sens chrétien et la bénédiction divine destinent les époux ?<br />
<br />
Que vous êtes heureux, chers jeunes mariés, d'avoir obéi à la loi divine, d'en avoir compris et goûté la douceur ! Par la réception du sacrement vous n'avez pas hésité à sceller devant Dieu et devant les hommes le pacte de la donation réciproque de vous-mêmes pour la vie ; le pacte d'une tendresse dévouée jusqu'au sacrifice, jusqu'à l'oubli de vous-mêmes ; le pacte d'une tendresse féconde qui aspire à porter les fleurs et les fruits d'une famille nombreuse et bénie. C'est la loi de Dieu qui proclame l'indissolubilité du mariage, et c'est dans la fidélité à la loi de Dieu que vous avez commencé la route de votre vie nouvelle. C'est dans cette loi que vous avez juré d'avancer et de cheminer, parce que vous l'avez accueillie non pas comme un joug pénible, mais comme un joug d'amour ; non pas comme une contrainte pour votre volonté, mais comme la sanction céleste de votre mutuel et immuable amour ; non pas comme l'imposition d'un esclavage moral, mais comme une divine garantie, comme une source d'inébranlable confiance en face de tout péril qui viendrait à menacer le roc de votre union.<br />
<br />
Cette confiance, vous avez bien raison de la nourrir en votre cœur ; mais elle veut avoir comme compagnes de route l'humilité et la prudence, avec la protection de Dieu. L'histoire des familles offre l'exemple de jeunes époux entrés dans la vie conjugale avec les mêmes dispositions qui vous animent aujourd'hui, et qui ont, au fur et à mesure que le temps passait sur une union si intime et si tendre, laissé naître et grandir un ver corrupteur, et ce ver a dévoré et emporté chaque jour un peu de la fraîcheur et de la force de leur union. C'est le même danger qui te guette, toi aussi, ô beauté de l'univers, comme l'a chanté un grand poète italien :<br />
<br />
''... il Tempo edace, fatal nemico, colla man rugosa ti combatte, ti vince et ti disface. Egli il color dei giglio e délia rosa toglie aile gote più ridenti, estende dappertutto la falce ruinosa.<br />
''... le Temps vorace, fatal ennemi, de sa main calleuse te frappe, te renverse et te défait. Il ôte la couleur du lys et de la rose aux plus riants visages, abat sur toutes choses sa sinistre faux1.<br />
<br />
C'est ainsi que ces époux sont venus peu à peu à considérer leur lien comme une espèce d'esclavage et ils ont songé et cherché, sinon à le briser, du moins à le relâcher, parce qu'il n'était plus pour eux un lien d'amour. Des exemples si douloureux vont-ils peut-être vous décourager, vont-ils troubler la joie de vos cœurs ? Oh non !<br />
<br />
La connaissance que vous avez de vous-mêmes, l'expérience que vous ferez de l'inconstance du pauvre cœur humain, loin d'affaiblir votre confiance, la rendront plus discrète, plus vigilante, plus humble, plus prudente, plus vraie, moins présomptueuse, moins trompeuse, et porteront vos cœurs à recevoir dans un esprit filial les paternels avis où Nous voudrions, pour vous préserver de cette misère conjugale, vous découvrir les racines et les causes d'un aussi déplorable affaissement de la vie commune, et les moyens de prévenir cette chute, de vous en garder et, au besoin, de l'arrêter à temps.<br />
<br />
Bien-aimés fils et filles, d'où peut donc provenir ce changement, cette malheureuse évolution ? Cette évolution a-t-elle commencé subitement, par un caprice, par la découverte inattendue d'une incompatibilité de caractère, par quelque tragique incident ? D'ordinaire les cœurs qui étaient, le jour des noces, si fermement et si amoureusement résolus de vivre ensemble, n'entrent pas de cette manière dans cette voie de désaffection et de froide indifférence qui mène pas à pas à l'antipathie, à la désunion et à la séparation morale, triste prélude, trop souvent, d'une rupture plus réelle et plus grave encore. Ces caprices, ces découvertes, ces tragiques incidents qui semblent marquer les débuts de cette évolution, n'ont été de fait que l'occasion qui la révèle et qui en précipite le cours. Sous la cendre perfide couvaient les charbons ardents.<br />
<br />
Pénétrez et sondez le fond de ces cœurs. Les séparations morales conscientes, plus ou moins connues du public, ou dissimulées dans le secret du foyer pour sauver jalousement les apparences, ont toujours été précédées d'une dissonance, peut-être imperceptible tout d'abord aux époux eux-mêmes et semblable à l'invisible fêlure d'un beau vase d'albâtre. Si l'amour avait été total, s'il avait été absolu, s'il avait été cet amour qui consiste dans le don de soi, s'il n'avait connu d'autres limites que l'amour de Dieu, ou mieux, si cet amour humain s'était élevé au-dessus des sens pour se fonder sur un commun amour de Dieu total et absolu et pour se fondre en un pareil amour, aucun tumulte du dehors n'en eût alors troublé l'harmonie, aucun heurt ne l'eût brisé, aucun nuage n'en eût obscurci le ciel. La vie d'amour peut elle-même connaître la douleur, mais, saint Augustin le dit en la vigueur coutumière de sa langue, « là où règne l'amour, il n'y a pas de peine, ou si la peine est là, la peine est aimée »2.<br />
<br />
Qui donc a porté à cet amour, à cette union sacrée des âmes, une blessure invisible et souvent fatale ? N'allez pas chercher bien loin. Cherchez tout près, cherchez dans les cœurs : c'est là que se tient l'ennemi, c'est là que se tient le coupable. Aussi divers que sournois dans ses manifestations, c'est l'amour-propre, c'est cet amour de soi qui naît et vit avec l'homme, et qui meurt tout juste avec lui.<br />
<br />
« Mais, direz-vous peut-être, faut-il donc nous haïr nous-mêmes ? La nature elle-même ne nous pousse-t-elle point à aimer et à rechercher notre bien ? » Certes, la nature dispose l'homme à s'aimer lui-même, mais c'est en vue de son bien d'homme, en vue d'un bien conforme à la raison. Or, la raison montre à l'homme et à la femme non seulement le bien de l'individu, mais aussi le bien de la famille, lequel devient, grâce à l'union et à la fidélité des époux, le bien même des enfants. Vous pouvez avoir, chers jeunes mariés, un juste amour de vous-mêmes, et vous pouvez en avoir un mauvais : l'amour-propre, ce synonyme le plus décent de l'égoïsme, et qui ne vaut pas mieux. C'est Dieu qui a créé l'homme et la femme. Mais si c'est Dieu qui a fait la nature, ce n'est pas Dieu qui en a fait la corruption : la corruption de la nature vient de la faute d'Eve et d'Adam. Nous devons nous aimer selon la nature que Dieu nous a faite, et non pas selon la corruption que nos premiers parents y ont causée. Nous devons aimer notre âme et notre corps de cet amour de charité que nous portons aux choses de Dieu et à Dieu lui-même, de cet amour qui veut se répandre et qui vous lie à votre conjoint et à votre prochain. Mais quel est cet amour ? C'est un amour qui sauve notre âme, qui sauve l'union des cœurs dans la vie commune et dans la famille ; c'est un amour qui hait la corruption de l'âme en ce monde afin de sauver l'âme pour la vie éternelle, selon cette parole de Jésus : Qui odit animam suam in hoc mundo, in vitam aeternam custodit eam, « celui qui hait sa vie en ce monde, la conservera pour la vie éternelle » (Jn 12, 25).<br />
<br />
Contre cet amour sacré et si salutaire se dresse un autre amour, un amour pervers, et « celui qui aime sa vie » d'un pareil amour « la perdra » : Qui odit anima suam, perdet eam (ibid.). Cet amour, quel est-il ? C'est l'amour de corruption, c'est l'égoïsme, c'est l'amour-propre, source de tout mal, et l'angélique saint Thomas dit avec raison que « l'amour de soi est la racine de toute iniquité »3. Nous vous dénonçons cet amour, chers jeunes époux, comme le plus grand ennemi de votre union, comme le venin de votre amour sacré. Ce double égoïsme des conjoints a horreur du sacrifice de soi et il ne saurait établir entre les époux cette sainte amitié où ils veulent l'un et l'autre les mêmes choses et où ils mettent tout en commun, joie et douleur, peine et réconfort, besoin et secours. L'amour-propre désunit la vie commune ; et si l'égoïsme du mari n'égale pas toujours l'égoïsme de la femme, il arrive que les deux égoïsmes font alliance dans la faute.<br />
<br />
L'amour-propre est un grand séducteur, c'est l'aliment de toutes les passions humaines. Centre de toutes les pensées, de tous les désirs, de tous les mouvements, il en vient souvent à se dresser comme une idole et à recevoir le culte du beau dont l'œil se repaît, de l'harmonie qui flatte les oreilles, de la douceur qui délecte le goût, du parfum qui charme l'odorat, de la mollesse qui caresse le toucher, de la louange et de l'admiration qui finissent par engluer le cœur. C'est vers son propre plaisir, son propre avantage, ses propres commodités que l'amour désordonné tourne la pensée, l'action, la vie ; il obéit aux appétits déréglés, et non pas à la raison, non pas aux inspirations de la grâce ; il n'a que dédain pour ses devoirs envers Dieu, pour ses devoirs envers le compagnon ou la compagne de sa vie. Or la vie conjugale, le lien indissoluble du mariage exigent des époux qu'ils sacrifient l'amour-propre au devoir, à l'amour de Dieu — à cet amour qui a élevé et consacré le battement de vos deux cœurs — et à l'amour des enfants, pour lesquels vous avez reçu la bénédiction du prêtre et du ciel.<br />
<br />
Epouses, ne fuyez pas la douleur : elle peut assombrir un instant votre visage, mais elle vous conduira à la joie du berceau. Pensez donc à la joie du berceau, à ce vagissement qui fait tressaillir votre cœur, à ces lèvres d'enfant qui cherchent votre sein, à cette menotte qui vous caresse, à ce sourire d'ange qui vous met en paradis. Que devant le berceau de votre enfant, chers jeunes époux, votre amour reçoive une nouvelle consécration dans l'immolation de votre amour-propre et de tous ses rêves, et que votre amour de père et de mère chasse tous les nuages, ainsi que le brouillard se disperse et s'évanouit au soleil levant.<br />
<br />
Cet amour-propre, bien-aimés fils et filles — Nous Nous sommes contenté aujourd'hui d'en montrer en traits généraux les dangers dont il menace votre union indissoluble, et Nous Nous réservons d'en parler avec plus de détails lors de la prochaine audience — cet amour-propre, c'est par le sacrifice que vous le vaincrez. Le sacrifice doit accompagner jour par jour votre communauté de vie conjugale ; la peine et la joie se mêlent dans le sacrifice, et il trouve son réconfort et son soutien dans la prière et dans la grâce de Dieu, dans cette grâce dont Nous implorons sur vous la puissance et l'abondance en vous accordant de toute l'effusion de Notre âme Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_nature_r%C3%A9clame_l%27indissolubilit%C3%A9_du_mariage_%E2%80%93_29_avril_1942_%E2%80%93&diff=2160La nature réclame l'indissolubilité du mariage – 29 avril 1942 –2012-01-31T17:54:39Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 29 avril 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Chers jeunes époux, lorsque vous vous rassemblez dans cette maison du Père commun des fidèles, que vous veniez de telle région ou de telle autre, jamais vous n'êtes étrangers à Notre cœur, à qui l'immense bonté divine a donné de battre pour tous, sans distinction de visage et d'aspect, ni de haut lignage ou d'humble naissance, ni de cieux et de pays. A vous voir, à vous compter, Notre cœur se dilate ; il répond de toute son ardeur à votre affection filiale ; il Nous met sur les lèvres à l'adresse de Dieu de vifs accents de louange et Nous Nous écrions : qu'elles sont belles et rayonnantes de foi les tentes que dressent par le monde les familles chrétiennes ! En vous resplendit à Notre regard la dignité des époux chrétiens, dignité particulière, puisque vous n'avez pas seulement été marqués du chrême mystique commun à tous les fidèles pour être avec eux, selon la parole de l'apôtre Pierre, une nation sainte et un sacerdoce royal (I P 2, 9), mais qu'en outre, dans l'acte sacré de vos épousailles, votre libre et mutuel consentement vous a élevés au plan de ministres du sacrement de mariage ; mariage qui, représentant la très parfaite union du Christ et de l'Eglise, ne saurait être qu'indissoluble et perpétuel.<br />
<br />
Mais la nature, que pense-t-elle de cette perpétuité ? Se peut-il que la grâce, dont l'opération ne change pas la nature, mais bien la perfectionne en tout et toujours, se peut-il que la grâce rencontre ici en la nature une ennemie véritable ? Non : Dieu agit avec un art merveilleux et suave, et cet art s'harmonise toujours avec la nature dont il est l'auteur. Cette perpétuité et indissolubilité qu'exigent la volonté du Christ et la mystique signification du mariage chrétien, la nature elle-même la réclame. Les aspirations intimes de la nature, la grâce les accomplit et elle accorde à la nature la force d'être ce dont les profondeurs humaines de sa sagesse et de sa volonté lui donnent le désir.<br />
<br />
Interrogez votre cœur, chers époux. Les autres ne sauraient y pénétrer, mais vous, vous le pouvez. Essayez de vous rappeler le moment où vous avez senti qu'à votre affection répondait un autre amour pleinement : ne vous semble-t-il pas que depuis cet instant jusqu'au oui que vous alliez ensemble prononcer à l'autel, vous avanciez d'heure en heure, à pas comptés, l'âme tourmentée par l'espérance et la fièvre de vos attentes ? Maintenant cette espérance n'est plus une « fleur en herbe », mais une rose épanouie et votre attente se porte vers d'autres joies. Votre rêve d'alors se serait-il évanoui ? Non, il est devenu réalité. Quel est donc ce qui l'a transformé devant l'autel en la réalité de votre union ? L'amour, qui, loin de disparaître, a persévéré ; l'amour, qui a trouvé plus de force, plus de fermeté, et qui dans sa vigueur vous a fait pousser ce cri : « Notre amour doit rester inchangé, intact, inviolable, à tout jamais ! L'affection conjugale a ses aubes et ses aurores ; il faut qu'elle ne connaisse ni déclin ni automne, ni journées tristes et grises, car l'amour veut garder sa jeunesse et rester inébranlable dans le souffle de la tempête. » Vous conférez par là à votre amour nuptial, sans vous en rendre compte, par une jalousie sacrée, allions-Nous dire, cette marque que l'apôtre Paul assignait à la charité en un hymne de louanges : Caritas nunquam excidit, « la charité ne passe jamais » (I Co 13, 8). Le pur et véritable amour conjugal est un limpide ruisseau qui, sous l'impétueuse poussée de la nature, jaillit de l'infrangible roche de la fidélité, s'écoule tranquille parmi les fleurs et les ronces de la vie et va se perdre au fond de la tombe. L'indissolubilité est donc l'assouvissement d'une aspiration du cœur pur et intègre, d'une aspiration de « l'âme naturellement chrétienne », et elle ne disparaît qu'avec la mort. Dans la vie future, il n'y aura pas d'épousailles et les hommes vivront au ciel comme les anges de Dieu : In resurrectione neque nubent, neque nubentur, sed erunt sicut angeli dei in caelo (Mt 22, 30). Mais si l'amour conjugal comme tel, en sa nature propre, finit lorsque cesse le but qui le détermine et l'oriente ici-bas, toutefois, en tant qu'il a battu dans le cœur des époux et qu'il les a étreints dans ce plus grand lien d'amour qui unit les âmes à Dieu et entre elles, cet amour reste dans l'autre vie, ainsi que demeurent les âmes elles-mêmes au fond desquelles il aura habité ici-bas.<br />
<br />
Mais c'est encore pour une autre raison que la nature réclame l'indissolubilité du mariage : c'est qu'elle en a besoin pour protéger la dignité de la personne humaine. La vie de communauté conjugale est une institution divine dont les racines plongent dans la nature humaine ; elle réalise l'union de deux êtres que Dieu a formés à son image et à sa ressemblance et qu'il appelle à continuer son œuvre par la conservation et la propagation du genre humain. Cette vie apparaît jusque dans ses expressions les plus intimes comme une chose extrêmement délicate : elle rend les âmes heureuses, elle les sanctifie, lorsqu'elle s'élève au-dessus des choses sensibles sur l'aile d'une donation simultanée, désintéressée et spirituelle des époux l'un à l'autre, par la volonté consciente, enracinée dans les profondeurs de l'un et l'autre, d'appartenance totale de l'un à l'autre, de mutuelle fidélité dans tous les événements de la vie, dans la joie et dans la tristesse, dans la santé et dans la maladie, dans les jeunes années et dans la vieillesse, sans limite et sans condition, jusqu'à ce qu'il plaise à Dieu de les appeler à lui dans l'éternité. Cette conscience, cette volonté bien arrêtée, rehausse la dignité humaine, rehausse le mariage, rehausse la nature, qui se voit respectée, elle et ses lois ; l'Eglise se réjouit de voir resplendir en une telle communauté conjugale l'aurore du premier ordre familial établi par le Créateur et le midi de sa divine restauration dans le Christ. Otez cette conscience, cette volonté bien arrêtée, la vie conjugale courra le danger de glisser dans la fange d'appétits égoïstes qui ne cherchent rien d'autre que leurs propres satisfactions et qui ne se soucient ni de la dignité personnelle ni de l'honneur du conjoint.<br />
<br />
Jetez un regard sur les pays qui ont admis le divorce et demandez-vous : le monde y a-t-il bien souvent la claire conscience que la dignité de la femme y est outragée et blessée, bafouée et en décomposition, ensevelie, faudrait-il dire, dans l'avilissement et l'abandon ?<br />
<br />
Que de larmes secrètes ont baigné le seuil de certaines portes, de certaines chambres ! Que de gémissements, que de supplications, que d'appels désespérés lors de certaines rencontres, par certains chemins ou sentiers, à certains angles de rue, à certains passages déserts ! Non, la dignité personnelle du mari et de la femme, mais surtout de la femme, n'a pas de plus solide rempart que l'indissolubilité du mariage. C'est une funeste erreur de croire qu'on puisse maintenir, protéger et promouvoir la digne noblesse de la femme et sa culture féminine sans en prendre pour fondement le mariage un et indissoluble. Si, par fidélité à la mission qu'elle a reçue de son divin Fondateur, l'Eglise a toujours affirmé et répandu à travers le monde, dans un gigantesque et intrépide déploiement de saintes et indomptables énergies, le mariage indissoluble, rendez-lui gloire d'avoir ainsi hautement contribué à la défense des droits de l'esprit contre les impulsions des sens dans la vie matrimoniale, d'avoir sauvegardé avec la dignité des noces la dignité de la femme, non moins que celle de la personne humaine.<br />
<br />
Lorsqu'il manque à la volonté la ferme et profonde résolution de fidélité perpétuelle et inviolable au lien conjugal, le père, la mère et les enfants voient vaciller et se perdre cette conscience d'un avenir tranquille et sûr, ce sentiment précieux et bienfaisant de confiance réciproque absolue, ce lien d'étroite et immuable communauté intérieure et extérieure qu'aucun événement ne saurait menacer, cette terre où plonge et s'alimente une puissante et indispensable racine du bonheur familial.<br />
<br />
Pourquoi, demanderez-vous peut-être, étendre ces conséquences jusqu'aux enfants ? Parce qu'ils reçoivent de leurs parents trois biens précieux : l'existence, la nourriture et l'éducation1 et qu'ils ont besoin pour leur développement normal d'une atmosphère de joie ; or, la sérénité de la jeunesse, l'équilibre de la formation et de l'instruction ne se conçoivent pas tant qu'il peut subsister un doute sur la fidélité des parents. Les enfants ne renforcent-ils point le lien de l'amour conjugal ? Mais la rupture de ce lien devient une cruauté à leur égard : c'est méconnaître leur sang, avilir leur nom et couvrir leur front de honte ; c'est diviser leur cœur, leur enlever leurs petits frères et le toit domestique ; c'est empoisonner le bonheur de leur jeunesse et c'est leur donner, chose grave entre toutes pour leur esprit, un scandale moral. Que de blessures dans l'âme de millions d'enfants ! Et souvent quelles tristes et lamentables ruines ! Que d'implacables remords, quels déchirements dans les consciences ! Les hommes sains d'esprit, moralement purs, joyeux et contents, les hommes intègres de caractère et de vie, en qui l'Eglise et la Cité mettent leurs espérances, ne sortent pas pour l'ordinaire de foyers troublés par la dissension et par l'inconstance de l'amour, mais de familles où règnent, profonde, la crainte de Dieu et, inviolable, la fidélité conjugale. Si vous recherchez aujourd'hui les vraies causes de l'affaissement des mœurs, l'origine du poison qui travaille à corrompre une part importante de la famille humaine, vous ne tarderez pas à en découvrir une des sources les plus fatales et les plus coupables dans la législation et la pratique du divorce. Les œuvres et les lois de Dieu exercent toujours une heureuse et puissante action ; mais quand la légèreté ou la malice des hommes interviennent, elles y apportent le trouble et le désordre, et alors les bienfaisants effets cèdent la place à une somme incalculable de maux, comme si la nature elle-même se révoltait, indignée, contre l'œuvre des hommes. Et parmi les institutions et les lois de Dieu, qui donc oserait nier ou contester qu'il y ait l'indissolubilité du mariage, cette colonne de la famille, de la grandeur nationale, de la patrie ? Car c'est bien dans le courage de ses hardis garçons que la patrie trouvera toujours le rempart et l'instrument de sa prospérité.<br />
<br />
Pour vous, chers jeunes mariés, remerciez Dieu d'appartenir à une famille sans tache où vous avez eu la faveur de vivre dans l'affection de parents craignant Dieu et de parvenir à votre pleine maturité chrétienne et catholique. En un temps si enclin à une excessive liberté à l'égard des lois divines, mettez votre honneur et votre gloire à développer, à réaliser et à professer la haute conception du mariage tel que le Christ l'a établi. Elevez dans vos prières communes de chaque jour vos cœurs vers Dieu et demandez-lui qu'après avoir bien voulu vous accorder un bon départ, il daigne, dans la puissante efficacité de sa grâce, vous conduire heureusement au terme.<br />
<br />
C'est avec ce vœu et en gage des plus exquises faveurs du ciel que Nous vous accordons de cœur Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=L%27inviolable_dignit%C3%A9_du_mariage_un_et_indissoluble_%E2%80%93_22_avril_1942_%E2%80%93&diff=2159L'inviolable dignité du mariage un et indissoluble – 22 avril 1942 –2012-01-31T17:53:48Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 22 avril 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Il ne vous sera point difficile, chers jeunes mariés, d'élever votre esprit à une haute conception de la vie conjugale, si vous repassez attentivement, à l'aide de votre missel, les émouvantes cérémonies des épousailles, où toute la liturgie sacrée se concentre sur un point : sur le lien qui se crée alors entre l'époux et l'épouse. Quelles douces pensées, quels désirs intimes vous ont accompagnés au saint autel ! Quelles espérances, quelles visions de bonheur ont illuminé votre marche ! Mais ce lien est un et indissoluble : Ego conjungo vos, « je vous unis au nom de Dieu », a dit le prêtre, témoin qualifié de l'union que vous avez fondée ; et ce lien, que vous avez créé en la consécration et la force d'un sacrement, l'Eglise le prend sous sa protection : elle inscrit vos noms dans le grand livre des mariages chrétiens, après avoir, achevant le rite nuptial, prié Dieu, ut quod te auctore funguntur, te auxiliante serventur, « que ceux qui s'unissent par votre autorité, vous les gardiez par votre secours » 2.<br />
<br />
Le lien conjugal est un. Regardez le paradis terrestre, première image du paradis familial ; voyez-y ce premier lien établi par le Créateur entre l'homme et la femme, ce lien dont le Fils de Dieu, le Verbe incarné, dira un jour : Quod Deus coniunxit, homo non separet, « ce que Dieu a uni, que l'homme ne s'avise pas de le séparer » ; parce que nam non sunt duo, sed una caro, « ils ne sont plus deux, mais une seule chair » (Mt 19, 6). Dans cette union de nos premiers parents au jardin de délices il y a tout le genre humain, tout le cours des générations à venir qui rempliront la terre, lutteront pour sa conquête et en tireront de force à la sueur de leur front un pain trempé dans l'amertume de la première faute des humains. Pourquoi donc Dieu a-t-il uni au paradis l'homme et la femme ? Non seulement pour leur confier la garde de ce jardin de félicité, mais aussi, comme s'exprime le grand théologien d'Aquin, parce que le mariage les destine à la procréation et à l'éducation des enfants, et à la vie de communauté familiale.<br />
<br />
L'unité même du lien conjugal porte le sceau de l'indissolubilité. Certes oui, c'est un lien auquel incline la nature ; toutefois il ne s'impose point par une nécessité de nature : il résulte du libre arbitre, mais avec cette particularité que la simple volonté des contractants, si elle peut le réaliser, ne peut le défaire. Cela ne vaut pas seulement pour les noces chrétiennes, mais en général pour tout mariage valide conclu sur terre par le mutuel consentement des époux. Le oui que votre volonté a commandé à vos lèvres vous unit par le lien conjugal et unit en même temps vos volontés à tout jamais. Son effet est irrévocable. Le son, expression sensible de votre consentement, passe ; mais le consentement lui-même est essentiellement immuable : il ne passe point, il est perpétuel, parce que c'est un consentement donné à la perpétuité du lien, tandis que le consentement qui ne porterait que sur une vie commune de quelque temps, ne suffirait point à constituer le mariage. L'union de vos oui est indissoluble, de sorte qu'il n'y a pas de mariage véritable sans indissolubilité, ni d'indissolubilité sans mariage véritable.<br />
<br />
Elevez donc votre pensée, chers époux, et rappelez-vous que le mariage n'est pas seulement une œuvre de la nature, mais qu'il est pour les âmes chrétiennes un grand sacrement, un grand signe de la grâce, le signe d'une réalité sacrée : l'union du Christ avec l'Eglise, Eglise qu'il a faite sienne, qu'il a conquise de son sang afin de régénérer pour une vie nouvelle, pour la vie de l'esprit, les enfants des hommes qui croient en son nom, qui ne sont nés ni du sang, ni d'un vouloir charnel, ni d'un vouloir d'homme, mais de Dieu (Jn 1, 12-13). Le sceau et la lumière du sacrement qui surélève et pour ainsi dire « transnature » l'œuvre de la nature, donne au mariage une noblesse d'honnêteté sublime qui comporte non seulement l'indissolubilité, mais encore tout ce qui est signifié par le sacrement.<br />
<br />
Mais si la volonté des époux qui ont passé le contrat ne peut rompre le lien du mariage, l'autorité supérieure aux époux que le Christ a établie pour la vie religieuse des hommes en aura-t-elle peut-être les moyens ? Le lien du mariage est si fort que, lorsque l'usage des droits conjugaux l'a porté à sa pleine stabilité, nulle puissance au monde — pas même la Nôtre, qui est celle du Vicaire du Christ — ne saurait le trancher. Nous pouvons, il est vrai, reconnaître et déclarer qu'un mariage, jugé valide lors du contrat, était nul en réalité, du fait de quelque empêchement dirimant, ou par un vice essentiel du consentement, ou par défaut de forme substantielle. Nous pouvons aussi, en certains cas déterminés et pour de graves raisons, dissoudre des mariages dépourvus de caractère sacramentel. Nous pouvons enfin, pour une raison juste et proportionnée, trancher le lien d'époux chrétiens, annuler leur oui prononcé devant l'autel, quand il est prouvé qu'il n'a pas été consommé par la pratique de la vie conjugale. Mais une fois consommé, le mariage demeure soustrait à toute ingérence humaine. Le Christ n'a-t-il pas ramené la communauté matrimoniale à cette dignité fondamentale que lui avait donnée le Créateur au matin du genre humain dans le paradis, à la dignité inviolable du mariage un et indissoluble ?<br />
<br />
Jésus-Christ, le Rédempteur de l'humanité déchue, n'est pas venu supprimer, mais bien accomplir et restaurer la loi divine ; il est venu réaliser, avec plus d'autorité que Moïse, avec plus de Sagesse que Salomon, avec plus de lumière que les prophètes, ce qui avait été prédit de lui, à savoir qu'il serait semblable à Moïse, que Dieu le susciterait d'entre ses frères, que la parole du Seigneur serait mise dans sa bouche et que quiconque ne l'écouterait pas serait exterminé du milieu du peuple choisi (Dt 18, 15 et ss. ; Ac 3, 22-23). C'est pourquoi le Christ a dans le mariage, par sa parole qui ne passe point, élevé l'homme et relevé la femme — la femme, que l'antiquité avait ravalée au rang d'esclave et que le plus austère censeur de Rome avait assimilée à « un être sans frein, à un animal indomptable »1 — comme il avait, en lui-même déjà, relevé non seulement l'homme, mais encore la femme, puisque c'est d'une femme qu'il tient sa nature humaine, et qu'il a fait de sa Mère, bénie entre toutes les femmes, et couronnée Reine des anges et des saints, un miroir immaculé de vertus et de grâces pour les familles chrétiennes à travers les siècles.<br />
<br />
Jésus et Marie sanctifièrent de leur présence les noces de Cana : c'est là que le divin Fils de la Vierge accomplit son premier miracle, comme pour annoncer qu'il inaugurerait sa mission dans le monde et le règne de Dieu par la sanctification de la famille et de l'union conjugale, source de vie. C'est là que commença l'ennoblissement du mariage, qui allait monter au rang des signes visibles producteurs de la grâce sanctifiante et devenir le symbole de l'union du Christ et de l'Eglise (Ep 5, 32) ; union indissoluble et inséparable, nourrie de l'amour absolu et sans limite qui jaillit du Cœur du Christ. Comment l'amour conjugal pourrait-il symboliser pareille union, s'il était délibérément retenu dans des limites, restreint par des conditions, sujet à dissolution, flamme d'amour qui ne brûle qu'un temps ? Non, porté à la haute et sainte dignité de sacrement, si intimement lié à l'amour du Rédempteur et à l'œuvre de la Rédemption, si fortement marqué de cet amour et de cette œuvre, il ne peut être et on ne peut le dire qu'indissoluble et perpétuel.<br />
<br />
En face de cette loi d'indissolubilité, les passions, bridées et réprimées dans la libre satisfaction de leurs appétits désordonnés, ont cherché de tout temps et de toutes manières à en secouer le joug, n'y voulant voir qu'une dure tyrannie qui charge arbitrairement la conscience d'un poids insupportable, qu'un esclavage qui répugne aux droits sacrés de la personne humaine. C'est vrai, un lien peut constituer parfois un fardeau, une servitude, comme les chaînes qui entravent le prisonnier. Mais il peut être aussi un puissant secours, une garantie de sécurité, comme la corde qui lie l'alpiniste à ses compagnons, ou comme les ligaments qui unissent les parties du corps humain et le rendent libre et dégagé dans ses mouvements ; et tel est bien le cas de l'indissoluble lien conjugal.<br />
<br />
Cette loi d'indissolubilité apparaîtra à la réflexion comme une manifestation de vigilant amour maternel, surtout si vous la considérez dans la lumière surnaturelle où le Christ l'a placée. Parmi les difficultés, les heurts, les convoitises que peut-être la vie sèmera sur vos pas, vos deux âmes unies sans possibilité de séparation ne se trouveront ni isolées ni désarmées ; la toute-puissante grâce divine, fruit spécial du sacrement, sera toujours avec vos deux âmes, pour soutenir à chaque pas leur faiblesse, pour alléger leurs sacrifices, pour leur donner force et consolation jusque dans les épreuves les plus dures et les plus longues. Lorsque l'obéissance à la loi divine exigera de repousser les flatteries des joies terrestres entrevues à l'heure de la tentation et de renoncer à « refaire sa vie », la grâce encore sera là pour rappeler dans tout leur relief les enseignements de la foi, à savoir : que la seule vraie vie qui ne doive jamais être exposée est celle du ciel, celle précisément que garantissent ces renoncements, si pénibles soient-ils ; que ces renoncements, comme tous les événements de la vie présente, sont provisoires et simplement destinés à préparer l'état définitif de la vie future ; que cette vie future sera d'autant plus heureuse et radieuse que les époux auront accepté avec plus de courage et de générosité les inévitables afflictions du pèlerinage d'ici-bas.<br />
<br />
« Voilà, serez-vous peut-être tentés de dire, des considérations bien austères en cette heure où tout nous sourit dans le sentier qui s'ouvre devant nous. Est-ce que notre mutuel amour, dont nous sommes tellement sûrs, ne nous garantit par l'indéfectible union de nos cœurs ? »<br />
<br />
Bien-aimés fils et filles, rappelez-vous l'avertissement du Psalmiste : « Si le Seigneur ne prend pas la cité sous sa garde, c'est en vain que veille la sentinelle » (Ps., cxxvi, 1). Même cette cité si belle et si forte de votre présente félicité, il n'y a que Dieu qui puisse la maintenir intacte, par sa loi et par sa grâce. Tout ce qui est simplement humain est trop fragile, trop précaire, pour se suffire à soi-même : c'est votre fidélité aux commandements de Dieu qui assurera l'inviolable fermeté de votre amour et de votre joie parmi les vicissitudes de la vie.<br />
<br />
C'est ce que Nous implorons pour vous du Seigneur, en vous accordant de grand cœur Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Le_g%C3%A9n%C3%A9reux_concours_de_l%27homme_au_bonheur_et_%C3%A0_la_s%C3%A9curit%C3%A9_de_la_famille_%E2%80%93_15_avril_1942_%E2%80%93&diff=2158Le généreux concours de l'homme au bonheur et à la sécurité de la famille – 15 avril 1942 –2012-01-31T17:52:35Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 15 avril 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Que de merveilles l'homme découvre dans l'univers de la création, chers jeunes époux, soit qu'il contemple l'extrême variété des êtres inanimés avec les minéraux et les terrains, ou l'immensité du règne végétal avec les herbes, les fleurs, les fruits, les blés et les arbres, ou le vaste empire des animaux qui lui apparaissent dans les airs et dans les eaux, sur les monts, dans les plaines et dans les forêts. Vous remarquerez en outre, au sein de cette diversité, comment les individus d'une même espèce se différencient par leurs caractères morphologiques et physiologiques, par leur vigueur, par la beauté de leurs couleurs et de leurs formes. Et vous-mêmes, dans les enfants qu'il plaira au Seigneur de vous donner, vous pourrez également observer et discerner les inclinations qui distinguent un garçon d'une fille et qui, par des dispositions diverses, orientent l'homme et la femme vers la vie particulière que Dieu prépare à l'un et l'autre.<br />
<br />
Il en va de même de l'union conjugale : l'homme est chef de la femme (I Co 2, 3) et il la surpasse d'ordinaire en force et en vigueur. Cependant cette différence n'abaisse point la femme ; car, si elle met souvent la main à des tâches apparemment insignifiantes, elle n'en réalise pas moins de grandes et puissantes choses par la responsabilité qui lui incombe de procurer le bien-être de son foyer et de mériter la reconnaissance de son mari. Toutefois, hommes mariés, pour affectueuse que soit votre gratitude, vous pouvez et devez faire davantage. Si votre perfection de chef de famille vous impose d'accomplir votre devoir professionnel soit dans votre foyer soit au-dehors, elle vous demande davantage encore : dans votre maison aussi, dans le royaume même de votre épouse, vous avez une tâche à accomplir. Vous êtes plus forts et souvent plus habiles à manier les instruments ou les outils, et nombre de menus travaux que demande le confort de votre logement vous offriront des occupations qui conviennent mieux à l'homme qu'à la femme. Ce ne sera pas des tâches et entreprises comparables à celles du bureau, de l'usine ou du laboratoire où vous allez travailler, ni des occupations incompatibles avec votre dignité ; il s'agira de prendre part à la sollicitude de votre compagne, souvent accablée de soucis et de travaux ; il s'agira de donner un coup de main qui vienne bien à propos, ce qui sera pour elle une aide, un soulagement, et pour vous une distraction et un délassement. Pour cultiver un jardin — si la Providence vous a fait la grâce d'en avoir un — pour divers embellissements ou réparations, pour tant de choses plus ou moins faciles à enlever, à placer, à arranger, comme il s'en présente continuellement, n'avez-vous pas des mains mieux faites et plus alertes que celles de votre épouse ? Et en général lorsqu'un travail exigera plus de force, n'aurez-vous pas la délicatesse et la précaution de vous le réserver ? Pourrait-il se rencontrer dans une maison chrétienne rien de plus triste et de plus opposé au sens chrétien que des scènes de vie qui rappelleraient un spectacle trop fréquent autrefois chez certains peuples que n'avait pas encore éclairés ni adoucis le divin mystère de Nazareth : le spectacle d'une femme qui chemine ployée, telle une bête de somme, sous un pesant fardeau, tandis que son seigneur la suit et la surveille en fumant tranquillement ?<br />
<br />
Un des grands bienfaits sociaux des temps passés, c'était le travail à domicile, que bien des hommes eux-mêmes pratiquaient alors, et qui unissait en un même labeur, en un même foyer, l'homme et la femme côte à côte, tous les deux auprès de leurs enfants. Mais les progrès de la technique, le gigantesque développement des usines et des bureaux, la multiplication des machines de toute sorte, ont rendu aujourd'hui ce genre de travail fort rare, excepté dans les campagnes, et les époux sont contraints par leurs occupations de se séparer et de passer de longues heures de la journée loin de leurs enfants.<br />
<br />
'' Oh tiranno signore De' miseri mortali,... Bisogno, e che non spezza Tua indomita fierezza !'' – O maître tyrannique des misérables mortels,... labeur, quand donc se brisera ton indomptable férocité ?1<br />
<br />
Toutefois, si absorbante que soit l'occupation qui vous tienne loin des vôtres une bonne partie de la journée, vous trouverez encore à votre retour, Nous n'en doutons pas, la force de rendre à votre compagne de menus services, vous conciliant par là sa reconnaissance. Une reconnaissance bien affectueuse, car il n'échappera point à votre épouse qu'il vous aura fallu, pour l'aider, vaincre la fatigue et un légitime besoin de repos, grâce à cette complaisance qui se dévoue jusque dans les humbles circonstances du foyer et qui associe la famille entière à la réalisation du bonheur domestique et à la joie qui en découle.<br />
<br />
Mais la vie de la famille connaît encore des circonstances plus difficiles, des heures mélangées de joies et de douleurs, des temps de peines et d'angoisses, de privations et de larmes : les naissances, les maladies, les deuils. Il s'agit alors de faire davantage. La mère ne pourra point ou ne pourra guère vaquer à ses diverses occupations : il faudra que tous à la maison, jusqu'aux petits, y mettent du leur, dans la mesure de leurs forces. Mais qui donc sera le premier à l'ouvrage, sinon le père, le chef de la famille ? N'est-ce pas lui qui se dépensera aussitôt à tous les instants pénibles, donnant l'exemple du dévouement et de la prévoyance ? N'est-ce pas en de pareilles circonstances que se révéleront sa digne sagesse de père et l'énergie de son gouvernement familial ?<br />
<br />
Epoux, préparez-vous à ces graves et inévitables épreuves par un raffermissement de votre courage. Ne comptez point que l'avenir qui vous attend échappe au sort commun des foyers. Tirez lumière et profit des épreuves d'autrui. Ne vous arrêtez point à calculer les peines et les fatigues de votre personne, la générosité de vos efforts, pour les comparer au dévouement de votre épouse. Le véritable amour ne connaît pas de ces calculs ni de ces comparaisons : il se donne, estimant que ce qu'il fait pour la personne qu'il aime n'est jamais assez. Ce que l'Imitation du Christ2 affirme de l'amour de Dieu vaut aussi pour l'amour si profond et si saint qu'est l'amour conjugal : « Rien ne lui pèse, rien ne lui coûte, il essaie plus qu'il ne peut, il ne prétexte jamais l'impossibilité... il peut tout et il accomplit en perfection beaucoup de choses où celui qui n'aime pas défaille et succombe. » Il ne faut donc point s'étonner que l'Apôtre des gentils — qui avait l'esprit et le cœur pleins de charité, au point d'exalter cette vertu au-dessus des prophéties, des mystères et de la foi miraculeuse, au-dessus du don des langues et de la science, au-dessus du martyre et de la libéralité envers les pauvres (cf. I Co 13,1 et ss.) — il ne faut point s'étonner qu'il ose assimiler l'amour de l'époux pour son épouse à l'amour du Christ pour son Eglise (cf. Ep 5,25-29).<br />
<br />
Oh ! oui, aimez vos épouses : vous leur devez en conscience le don le plus haut et le plus nécessaire, le don de l'amour. C'est dans l'amour que la chasteté conjugale et la paix de la famille trouvent leur sauvegarde ; c'est l'amour qui affermit la fidélité, qui remplit de fierté les enfants, qui perpétue, inviolable, le sacrement qui a uni l'homme et la femme devant la face de Dieu. Epoux, sanctifiez vos épouses par l'exemple de vos vertus ; donnez-leur la gloire de pouvoir vous imiter dans la pratique du bien et dans la piété, dans l'assiduité au travail, dans la vaillance à supporter les lourdes épreuves et les cruelles souffrances auxquelles nulle vie humaine ne saurait échapper. D'où vient à l'époux sa joie, sa fierté de père, sinon de la maternité de la femme ? Pourra-t-il donc jamais oublier les peines et les douleurs de son épouse, les dangers où l'expose la maternité et les sublimes sacrifices alors parfois exigés de la mère ? Et là où l'instinct et l'amour maternels ont tout accepté sans compter, se permettra-t-il, lui, dans son amour d'époux et de père, de marchander son dévouement ?<br />
<br />
Jetez un regard sur l'histoire de l'Eglise, l'Epouse du Christ. Que de héros, que d'héroïnes dans le secret du sanctuaire familial ! Que de vertus connues de Dieu seul et de ses anges ! Au moyen âge, à cette époque si rude parfois, le peuple, les châteaux, les cours, sans parler des monastères, savaient rendre à la femme l'hommage d'une vénération mêlée de tendresse. Adolescentes, fiancées, épouses, mères, toutes semblaient couronnées d'une auréole céleste, soit que rejaillît sur toutes les filles d'Eve l'amour qu'inspirait au cœur des croyants la nouvelle Eve, la Mère du Christ et des hommes, soit qu'une autre pensée de foi sortie des profondeurs de l'esprit chrétien épanouît alors ce sentiment de déférente et affectueuse courtoisie ignorée des païens, anciens ou modernes, qui marchent toujours la tête haute dans leur orgueil d'homme, comme aussi dans les révoltes de l'orgueil féminin. La considération de la femme exaltait le poète croyant, dont l'enthousiasme éclatait en cantiques de louanges à « la Vierge Mère, fille de son Fils », à « la Vierge belle, de soleil revêtue », la priant de « le recommander à son Fils, vrai Dieu et vrai homme, pour qu'il daignât recueillir son dernier souffle dans la paix ».<br />
<br />
Maris, tournez vos regards vers Nazareth ; entrez dans cette demeure. Considérez ce charpentier, ce très saint dépositaire des secrets de Dieu, cet ouvrier qui nourrit de son labeur une famille sans éclat, mais plus noble que la famille des Césars romains ; observez avec quelle dévotion, avec quel respect, il aide et vénère cette Mère, épouse immaculée et sans tache. Admirez celui qui passe pour « le fils du charpentier », lui, le Verbe, la Sagesse toute-puissante qui a créé le ciel et la terre, sans qui rien n'a été fait ni ne saurait se faire, et qui ne dédaigne point de se soumettre à Marie et à Joseph dans les services de la maison et de l'atelier ; contemplez ce modèle de sainteté dans la vie familiale, objet de l'admiration et de l'adoration des hiérarchies angéliques.<br />
<br />
Puisse cette contemplation cultiver en vos cœurs les sentiments de reconnaissante et tendre donation de vous-mêmes, afin qu'ils se traduisent dans votre vie quotidienne par votre généreux concours au bonheur et à la sécurité de la famille. Dans votre vie professionnelle, vous mettez, maris, votre honneur à n'éluder aucune de vos responsabilités : mettez de même dans votre vie chrétienne le noble courage et la fierté de votre conscience, mettez votre générosité et votre amour à prendre, en collaboration avec votre épouse, la part de travail et de soucis qui vous revient dans l'édification du bonheur de votre foyer.<br />
<br />
Implorant donc, bien-aimés fils et filles, pour vous tous, époux ou épouses, les grâces nécessaires à cette féconde et sainte collaboration, Nous vous accordons de cœur Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_responsabilit%C3%A9_de_l%27homme_dans_le_bonheur_du_foyer_domestique_%E2%80%93_8_avril_1942_%E2%80%93&diff=2157La responsabilité de l'homme dans le bonheur du foyer domestique – 8 avril 1942 –2012-01-31T17:51:31Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 8 avril 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Ne vous étonnez point, chers jeunes mariés, si Nous aimons, dans ces audiences générales, à vous adresser, à vous, la parole en particulier : c'est que dans les mouvements si divers de Notre pensée, elle en vient pour l'ordinaire à graviter dans l'orbite de la nouvelle famille que vous inaugurez. La famille humaine est le suprême prodige de la main de Dieu dans l'univers, la merveille suprême dont il a couronné le monde visible au dernier et septième jour de la création, lorsqu'il forma et établit au paradis de délices qu'il avait aménagé et planté lui-même, l'homme et la femme, leur ordonnant de le cultiver et de le garder (cf. Gen. Gn 2, 8, 15) et leur donnant autorité sur les oiseaux du ciel, les poissons de la mer et les animaux de la terre (cf. Gen. Gn 1, 28). N'est-ce point là la royale grandeur dont l'homme conserve les signes même après sa chute aux côtés de la femme, et qui l'élève au-dessus de ce monde qu'il contemple au firmament et dans les étoiles, au-dessus de ce monde dont il parcourt hardiment les océans, au-dessus de ce monde qu'il foule et qu'il dompte par son travail et sa sueur pour en tirer le pain qui restaure et soutient sa vie ?<br />
<br />
Epouses qui Nous écoutez, lorsque vous avez lu les paroles que Nous avons récemment prononcées sur la responsabilité de la femme dans le bonheur de la famille, vous avez peut-être dit en votre cœur que cette responsabilité ne concerne pas uniquement la femme, bien loin de là, qu'elle est mutuelle, qu'elle incombe non moins au mari qu'à l'épouse. Et votre pensée aura revu l'image de plus d'une femme que vous connaissez ou dont vous avez entendu parler : femme et épouse exemplaire, dévouée aux soins de la famille jusqu'au-delà de ses forces, elle se trouve encore, après plusieurs années de vie commune, en face de l'égoïsme indifférent, grossier, violent même peut-être, de son mari, et cet égoïsme, loin de diminuer n'a fait que se développer avec l'âge.<br />
<br />
Ces héroïques mères de famille, filles d'Eve, oui, mais femmes fortes, généreuses imitatrices de la seconde Eve qui a écrasé la tête du serpent tentateur et gravi le douloureux calvaire jusqu'au pied de la croix, Nous ne les ignorons point. Nous n'ignorons pas non plus les procédés des maris, leurs manières parfois affectueuses et délicates, parfois sans égards et dures. Ils ont, eux aussi, leurs responsabilités dans le gouvernement de la famille. Ces responsabilités, Nous Nous étions réservé de les exposer dans une allocution spéciale et c'est ce que Nous faisons aujourd'hui même en ce bref discours.<br />
<br />
La responsabilité de l'homme à l'égard de sa femme et de ses enfants a sa première origine dans les devoirs qui lui incombent envers leur vie, devoirs dont il s'acquitte la plupart du temps par sa profession, son art ou son métier. Son travail doit procurer aux siens un gîte et une nourriture quotidienne, leur assurer la subsistance et les vêtements convenables. Sous la protection qu'offrent et donnent à la famille la prévoyance et l'activité de l'homme, il faut qu'elle puisse se sentir heureuse et tranquille. Le mari ne vit pas dans la condition de l'homme sans famille : il doit subvenir à l'entretien de son épouse et de ses enfants. Il doit penser à eux, lorsqu'il se trouve parfois devant des entreprises aventureuses qui attirent par l'espérance de gains élevés, mais qui facilement, par des sentiers insoupçonnés, mènent à la ruine. Les rêves de richesse trompent souvent la pensée plus encore qu'ils ne satisfont les désirs, et la modération du cœur et de ses rêves est une vertu qui jamais ne saurait nuire, parce qu'elle est fille de la prudence. Aussi, même en l'absence d'autres difficultés d'ordre moral, il y a des limites déterminées que l'homme marié n'a pas le droit de franchir, des limites tracées par l'obligation qui lui incombe de ne pas mettre en danger sans motif très grave la subsistance assurée, tranquille et nécessaire de son épouse et de ses enfants actuels ou à venir. Autre chose, si, sans faute ni coopération de sa part, des circonstances indépendantes de sa volonté et de son pouvoir compromettent le bonheur de son foyer, comme il arrive aux époques de bouleversements sociaux ou politiques, où les flots de l'angoisse, de la misère et de la mort se répandent par le monde et submergent des millions de foyers. Seulement, avant de passer à l'action ou d'y renoncer, avant d'entreprendre ou de risquer quoi que ce soit, que l'homme se demande toujours : est-ce que je peux assumer cette responsabilité devant ma famille ?<br />
<br />
Mais, si des liens moraux lient l'homme marié à sa famille, il y en a aussi qui le lient à la société : la fidélité dans l'exercice de sa profession, de son art ou de son métier, l'honnêteté sur laquelle ses supérieurs doivent pouvoir compter absolument, la droiture et l'intégrité de vie qui lui gagnent la confiance de tous ceux qui traitent avec lui. Ces liens ne sont-ils pas d'éminentes vertus sociales ? Ces vertus si belles ne forment-elles pas le rempart du bonheur domestique, de la paix de la famille, dont la sécurité est le premier devoir d'un père chrétien ?<br />
<br />
Nous pourrions ajouter, puisque l'estime publique du mari tourne à l'honneur de sa femme, que l'homme doit, par égard pour elle, chercher à se signaler et à exceller parmi ses collègues. Toute femme, en général, désire pouvoir être fière de son compagnon de vie. Louons donc le mari qui, par un noble sentiment d'affection pour sa femme, s'efforce d'accomplir sa tâche de son mieux et de se distinguer.<br />
<br />
La digne et honnête élévation que sa profession et son labeur procurent à l'homme dans la société, tourne donc à l'honneur et à la consolation de son épouse et de ses enfants, puisque, « les pères sont, au dire de l'Ecriture (Pr 17, 6), la gloire de leurs enfants ». Cependant, l'homme n'a pas non plus le droit d'oublier combien il importe au bonheur de la vie familiale qu'il porte en son cœur et témoigne sans cesse à la mère de ses enfants, à son épouse, par son attitude et ses paroles, le respect et l'estime qu'elle mérite. Si la femme est le soleil de la famille, elle en est aussi le sanctuaire, elle est le refuge du tout petit en pleurs, le guide des plus grands, le réconfort de leurs peines, l'apaisement de leurs doutes, la confiance de leur avenir. Maîtresse de douceur, elle est aussi maîtresse de maison. La considération que vous lui portez, chefs de famille, il faut que vos enfants et vos domestiques la discernent, la sentent et la voient dans votre attitude, dans votre conduite, dans vos regards, dans vos paroles, dans votre voix, dans votre salut. On dit que les couples mariés se distinguent des autres par les manières indifférentes, moins délicates ou parfaitement impolies et grossières de l'homme envers sa femme : qu'il n'en soit jamais ainsi. Au contraire, toute l'attitude du mari à l'égard de son épouse doit s'inspirer sans cesse d'une cordialité empressée, naturelle, noble et digne qui convient à un homme intègre et craignant Dieu, à un homme conscient de l'inestimable influence qu'exerce sur l'éducation des enfants la bonne entente vertueuse et délicate des époux. L'exemple du père a beaucoup de puissance sur les enfants : c'est pour eux une vivante et pressante invitation à entourer leur mère, et leur père lui-même, de respect, de vénération et d'amour.<br />
<br />
Cependant la coopération de l'homme au bonheur du foyer domestique ne saurait s'arrêter ou se limiter à de respectueux égards envers sa compagne de vie : il faut encore qu'il sache voir, apprécier et reconnaître l'œuvre et les efforts de celle qui, silencieuse et assidue, se dévoue à rendre la commune demeure plus confortable, plus charmante et plus gaie. Avec quels soins affectueux cette jeune femme n'a-t-elle pas tout disposé pour fêter aussi joyeusement que le permettent les circonstances, l'anniversaire du jour où elle s'est unie devant l'autel à celui qui devenait son compagnon de vie et de bonheur, et qui va maintenant rentrer du bureau ou de l'usine ! Regardez cette table : des fleurs délicates la parent et l'égaient. Elle a soigneusement préparé le repas : elle a choisi ce qu'il y avait de meilleur, ce qu'il aime le plus. Mais voici que l'homme, épuisé par les longues heures d'un travail plus fatigant peut-être que d'habitude, agacé par des contrariétés imprévues, rentre plus tard que de coutume, sombre, préoccupé d'autres pensées. Les paroles de joie et d'affection qui l'accueillent tombent dans le vide et le laissent muet ; il ne semble rien remarquer sur la table que sa femme a ornée avec amour ; il ne s'aperçoit que d'une chose : un plat, apprêté cependant pour lui faire plaisir, est resté trop longtemps sur le feu, et voilà qu'il se plaint, sans songer que c'est la longue attente, son propre retard, qui en est la cause. Il mange à la hâte, parce que, dit-il, il doit sortir tout de suite. La pauvre jeune femme avait rêvé d'une douce soirée passée côte à côte dans la joie, une soirée toute pleine de souvenirs, et le repas est à peine fini qu'elle se retrouve seule dans les chambres désertes : elle a besoin de toute sa foi, de tout son courage, pour refouler les larmes qui lui montent aux yeux.<br />
<br />
Bien rares sont les foyers qui ne connaissent point de temps à autre des scènes de ce genre. Un principe proclamé par le grand philosophe Aristote veut que nous jugions des faits d'après ce que nous sommes en nous-mêmes1 ou, en d'autres termes, que les choses plaisent ou déplaisent à l'homme selon ses dispositions naturelles ou ses passions du moment2. Et vous voyez comment les passions, même innocentes, les affaires et les événements font, à l'égal des sentiments, changer d'idées et de préoccupations, oublier les convenances et les égards, refuser ou négliger les gentillesses et amabilités. Sans doute le mari pourra-t-il faire valoir comme excuse l'accablante fatigue d'une journée de travail intense, aggravée par les contrariétés et les ennuis. Croit-il toutefois que sa femme ne ressente jamais de fatigue, n'éprouve jamais de déplaisirs ?<br />
<br />
L'amour véritable et profond des époux devra se montrer dans l'un et l'autre plus fort que la fatigue et les déplaisirs, plus fort que les événements et les contrariétés de chaque jour, plus fort que les changements de temps et de saison, plus fort que les variations d'humeur et les malheurs inattendus. Il faut se dominer soi-même, il faut dominer les événements, sans se laisser influencer ni balloter par eux. Il faut savoir donner le sourire et le merci de l'affection mutuelle, apprécier les attentions de l'amour, procurer la joie à ceux qui vous consacrent leurs peines. Quand donc, maris, vous vous retrouverez à la maison, où la conversation et le repos restaureront vos forces, ne vous attachez pas à voir et à rechercher les petits défauts inévitables en toute œuvre humaine. Regardez plutôt toutes les bonnes choses, grandes ou petites, qui vous sont offertes comme le fruit de pénibles efforts, de soins diligents, d'affectueuses attentions féminines qui vont faire de votre demeure, même modeste, un petit paradis de bonheur et de joie. Ne vous contentez point de considérer ces bonnes choses et de les aimer dans le secret de votre pensée et de votre cœur : témoignez votre reconnaissance à celle qui n'a ménagé aucun effort pour vous les procurer et qui ne trouvera pas meilleure ni plus douce récompense que l'aimable sourire, la parole gracieuse, les regards d'attention et de complaisance qui lui traduiront votre gratitude.<br />
<br />
Nous vous avons promis d'être bref et, les quelques autres conseils qu'il Nous reste à donner aux maris, Nous les réservons pour un prochain discours.<br />
<br />
Chers jeunes mariés, la Bénédiction apostolique que Nous allons vous accorder, Nous demandons qu'elle s'étende à tous ceux qui Nous écoutent et à tous les leurs. Cependant, Nous avons une pensée spéciale pour ces hommes qui, outre la charge souvent bien lourde que leur impose le gouvernement et l'entretien de leur famille, ont conscience de leurs devoirs envers la société et le bien public, surtout en ces temps de graves épreuves ; qui acceptent de s'acquitter de ces obligations souvent bien loin de leur foyer, dans les privations et les sacrifices ; qui savent, dans l'accomplissement de ces devoirs, unir à l'héroïsme un amour conjugal que l'éloignement ne fait que rendre plus intense et plus noble, dans une vie fervente de fidélité et de vertu. C'est à eux tout particulièrement que Nous donnons la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_part_de_Dieu,_Loin_de_craindre_la_vocation_d%27un_fils_ou_d%27une_fille,_demandez-la_%C3%A0_Dieu_%E2%80%93_25_mars_1942_%E2%80%93&diff=2156La part de Dieu, Loin de craindre la vocation d'un fils ou d'une fille, demandez-la à Dieu – 25 mars 1942 –2012-01-31T17:50:16Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 25 mars 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Nous Nous proposons, chers jeunes mariés, de vous adresser aujourd'hui une parole qui a toujours chanté la gloire de la famille et des époux chrétiens, et Nous souhaitons qu'elle se grave dans vos cœurs et qu'elle parvienne aussi à tous les autres époux, proches ou lointains. Cette parole, c'est la « part de Dieu » à la table de famille, cette part qu'il arrive à Jésus de vouloir se réserver comme un ami, ou pour ainsi dire comme un nécessiteux. Dans le beau livre de Tobie, que Dieu a inspiré pour enseigner aux hommes les vertus de la vie domestique, il est raconté que Tobie, ayant un jour de fête préparé un grand repas, dit à son fils : « Va et amène quelques hommes de notre tribu, craignant Dieu, afin qu'ils mangent avec nous » (Tb 2, 2). C'était jadis en de nombreuses familles chrétiennes, surtout à la campagne, la pieuse et chère coutume de réserver dans les repas de fêtes une part pour le pauvre qu'enverrait la Providence et qui ainsi participerait à l'allégresse commune. C'est ce qui s'appelait, en certaines régions, la « part de Dieu ».<br />
<br />
Le Seigneur, qui sait ? ne pourrait-il pas venir demander un jour une part semblable à votre foyer, à votre table de famille, alors qu'y fleurira déjà la joie de vos enfants, parmi les visages graves et fervents de grands fils ou de grandes filles qu'animent des pensées et des sentiments secrets, présages d'une vie, d'une voie qui les rapproche des anges ? Jésus, qui a béni votre union, qui rendra fécond votre mariage, qui fera croître autour de votre olivier les joyeux rameaux de vos espérances, Jésus passera, peut-être, à l'heure qu'il est seul à savoir, pour frapper à la porte de l'une de vos maisons, comme il a un jour, sur les rives du lac de Tiberiade, appelé à le suivre les deux fils de Zébédée (Mt 4, 21), comme il a, à Béthanie, laissé Marthe aux besognes du ménage pour accueillir Marie à ses pieds et lui donner là à entendre et à goûter cette parole que le monde n'entend point (Lc 10, 38 et ss.). Il est celui qui dit aux apôtres : « La moisson est grande, mais les ouvriers sont en petit nombre. Prions donc le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers à la moisson » (Mt 9,37-38). Lui, le Rédempteur, qui contemple du regard le champ immense des âmes rachetées de son sang, ne cesse de passer par le monde, dans les campagnes et les cités, le long des lacs et des mers, et il ne cesse de répéter à ses élus, par les secrètes inspirations de sa grâce, le « viens et suis-moi » (Mt 19, 21) de l'Evangile, les appelant à défricher et à labourer des terres encore incultes ou à moissonner les blés jaunissants.<br />
<br />
Le champ du Christ, sa vigne, vivante image du peuple de Dieu que les pasteurs de l'Eglise doivent cultiver, cette Eglise universelle dans le temps et dans l'espace, qui, au dire de saint Grégoire le Grand, depuis le juste Abel jusqu'au dernier élu, produit, à la manière de la vigne, autant de sarments qu'elle engendre de saints1 ; cette Eglise, bien-aimés fils et filles, vous savez qu'elle est aussi le champ de Notre sollicitude de Vicaire du Christ. De la sorte, son zèle et sa prière, son amour et sa douleur deviennent Notre amour et Notre douleur, Notre zèle et Notre prière, et Nous sentons l'élan de « la charité du Christ » qui « Nous presse » (II Co 5, 14), tandis que les merveilleux progrès du génie humain rapprochent les mers, les terres et le ciel et semblent rendre notre globe plus petit et plus étroit. Quand Nous voyons s'ouvrir sans cesse de nouvelles voies à la prédication de l'Evangile parmi les peuples lointains encore païens, ou à l'apostolat parmi les âmes agitées, troublées, affamées — peut-être à leur insu, par un instinct divin — de vérité éternelle, une des grandes tristesses de Notre cœur, c'est de savoir que le nombre des ouvriers généreux que Notre amour leur envoie pour les secourir est si loin de suffire à la tâche. Qui sait si l'un ou l'autre élu, perdu à cette heure dans le peuple chrétien ou errant dans les terres infidèles, ne dépend point, dans les desseins de Dieu, de la parole et du ministère d'un de ces enfants que Dieu voudra bien vous accorder ? Qui pourrait scruter les profondeurs du conseil de Dieu notre Sauveur, « qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (I Tm 2, 4) ?<br />
<br />
Pensez-y, bien-aimés fils et filles, c'est dans la famille chrétienne, établie selon la volonté de Dieu sur l'union légitime de l'homme et de la femme, que le Christ et l'Eglise universelle choisissent les ministres et les apôtres de l'Evangile, les prêtres et les hérauts qui paissent le peuple chrétien et qui traversent les océans pour aller illuminer et sauver les âmes. Que ferez-vous, si le divin Maître vient à vous demander la « part de Dieu », l'un ou l'autre des fils ou des filles qu'il aura daigné vous accorder, pour en faire son prêtre, son religieux ou sa religieuse ? Que répondrez-vous, lorsque vous recevrez leurs confidences filiales et qu'ils vous manifesteront les saintes aspirations que suscite en leur cœur la voix de Celui qui murmure avec amour : Si vis ? « Veux-tu ? » Nous vous en supplions, au nom de Dieu : ne fermez pas alors cette âme, par un geste brutal et égoïste, à l'accueil et à l'acceptation de la voix divine. Vous ne connaissez point les aurores et les couchers du soleil divin sur le lac d'un jeune cœur, ses angoisses et ses soupirs, ses désirs et ses espérances, ses flammes et ses cendres. Le cœur a des abîmes insondables même à un père et à une mère ; mais l'Esprit-Saint qui soutient notre faiblesse, prie pour nous avec des gémissements inénarrables, et Celui qui scrute les cœurs connaît quels sont les désirs de l'Esprit (Rm 8, 26-27).<br />
<br />
Sans doute, lorsqu'ils découvrent en leur enfant un désir de vie sacerdotale ou religieuse, les parents ont le droit et même, dans certains cas, le devoir, de s'assurer qu'il n'agit point simplement sous l'influence de l'imagination, sous l'influence d'un cœur qui rêve de s'évader du foyer, mais à la suite de réflexions sérieuses, mûries, surnaturelles, qui ont été examinées et approuvées par un sage et prudent confesseur ou directeur spirituel. Cependant, ce serait lutter contre les desseins de Dieu que de vouloir imposer des retards arbitraires, injustes, déraisonnables à la réalisation de ce désir ; à plus forte raison, si l'on prétendait en tenter, en contrôler la solidité et la fermeté par des épreuves inutiles, dangereuses, téméraires, qui risqueraient non seulement de décourager la vocation, mais de mettre en péril le salut de l'âme.<br />
<br />
Si Dieu vous fait un jour l'honneur de vous demander un de vos fils ou une de vos filles pour son service, sachez, en vrais chrétiens à qui n'échappent point la grandeur et l'élévation de la foi au gouvernement divin des familles et de l'Eglise, sachez donc apprécier la valeur et le privilège d'une telle grâce, soit pour le fils ou la fille qu'il se choisit, soit pour vous-mêmes et votre famille. C'est un grand don du ciel qui entre dans votre maison ; c'est une fleur issue de votre sang, abreuvée de la rosée du ciel et qui exhale un parfum virginal, une fleur que vous offrirez en hommage à l'autel du Seigneur, pour qu'elle s'y épanouisse en une vie consacrée à Dieu et aux âmes, en une vie — pour celui qui répond loyalement à l'appel divin — comme il n'y en a pas de plus belle ni de plus réellement heureuse ici-bas, en une vie qui est, même pour vous et pour les vôtres, une source de bénédictions. Il Nous semble voir ce fils ou cette fille que vous avez donnés à Dieu se prosterner devant lui et invoquer sur vous l'abondance des faveurs célestes en récompense du sacrifice qu'il vous a imposé en vous demandant de lui offrir ces enfants. Que de vœux, que de prières ils adresseront au ciel pour vous, pour leurs frères, pour leurs sœurs ! Ces prières, chaque jour, accompagneront vos pas, vos actions, vos besoins ; elles se multiplieront, plus ardentes, aux heures difficiles et tristes ; elles vous suivront et vous réconforteront tout au cours de votre vie, jusqu'au dernier soupir, et au-delà, dans ce monde qui n'appartient qu'à Dieu.<br />
<br />
N'allez pas croire que ces cœurs qui se seront entièrement donnés à Notre-Seigneur et à son service, en viennent à vous aimer d'un amour moins fort et moins tendre : l'amour de Dieu ne renie ni ne détruit la nature, mais il la perfectionne et il l'élève à un plan supérieur où la charité du Christ et les battements du cœur humain se rencontrent, où la charité sanctifie les battements de notre cœur, où ils s'unissent et s'embrassent. Que si la dignité et l'austérité de la vie sacerdotale et religieuse exigent le renoncement à l'un ou l'autre témoignage d'affection filiale, n'en doutez point, l'affection elle-même n'en sera pas diminuée ni attiédie, elle puisera dans le renoncement une ardeur plus intense et plus profonde, elle sera plus franche de tout égoïsme et de toute division humaine (I Co 7, 32-34) lorsque Dieu seul partagera ces cœurs avec vous.<br />
<br />
Elevez-vous dans l'amour de Dieu et dans le véritable esprit de foi, chers époux, et ne craignez point le don d'une vocation sainte qui descend du ciel parmi vos enfants. Pour celui qui a la foi et qui grandit dans la charité, n'est-ce pas, lorsqu'il entre dans une église ou un monastère, n'est-ce pas un réconfort, une fierté, un bonheur de voir à l'autel son propre fils revêtu des ornements sacerdotaux, offrant le sacrifice non sanglant et rappelant à Dieu le souvenir de son père et de sa mère ? N'est-ce pas une intime consolation pour un cœur maternel que de contempler une fille qui aime et sert le Christ, son Epoux, dans les masures des pauvres, dans les hôpitaux, dans les asiles, dans les écoles, dans les missions et jusque sur les champs de batailles, auprès des blessés et des mourants ? Rendez gloire à Dieu et remerciez-le de se choisir dans votre sang des héros et des héroïnes pour son service, et mettez-vous au rang de ces parents chrétiens qui le supplient de venir prendre sa part dans la belle couronne de leur foyer et qui sont prêts à lui offrir même l'unique rameau de leurs espérances.<br />
<br />
Mais votre prière de parents chrétiens doit se laisser guider par les hautes pensées de l'Esprit-Saint. En d'autres temps, et aujourd'hui encore, là où les conditions de vie du clergé sont moins incertaines, lorsque la vie sacerdotale ou religieuse peut apparaître aux yeux profanes comme une profession désirable, des motifs plus ou moins humains et intéressés ont pu ou peuvent pousser des parents à la souhaiter pour leurs enfants : le développement ou le relèvement de la situation de la famille par l'influence et les avantages d'un fils prêtre ; l'espoir de trouver auprès de lui, après une vie laborieuse, un tranquille repos dans leurs vieux jours. Si de pareils sentiments, jadis trop fréquents, ne portent plus habituellement de nos jours le caractère de bas calculs d'ambition ou d'intérêts, ils n'en restent pas moins toujours fort terre à terre et n'ont pas de valeur dans nos prières à l'adresse de Dieu.<br />
<br />
Sursum corda. C'est plus haut que doivent monter vos pensées et vos intentions. Pour vous comme pour les familles qui réservent la « part de Dieu » sur les biens qu'elles ont reçus de lui et dont elles ont la jouissance, ce qui doit par-dessus tout exciter en vous la sainte ambition d'une vocation aussi belle pour l'un de vos fils, c'est la pensée des richesses de vie spirituelle que le Christ vous distribue avec tant d'abondance par le moyen de son Eglise, de ses prêtres, de ses religieux. Vous vivez en pays de vieille foi catholique où le zèle des ministres de Dieu veille sur vous et vous réconforte dans vos épreuves et dans vos peines, où les églises et les orateurs sacrés offrent à votre piété et à votre dévotion la nourriture des sacrements, des offices et des messes, des sermons et des œuvres saintes, tous les secours que la sollicitude maternelle de l'Eglise multiplie pour le bien de vos âmes en toutes les circonstances joyeuses ou tristes de votre vie. Que de souci pour vous, pour vos enfants, pour votre bonheur, dans le cœur du prêtre pieux qui vous visite et prend soin de tous ceux qui lui sont confiés ! De quelle famille est-il sorti ? D'où vient-il à vous ? Qui vous l'envoie ? De qui tient-il son amour paternel pour vous, sa parole et son conseil d'ami ? C'est l'Eglise, c'est le Christ qui l'envoie. N'y aura-t-il que les autres, par la donation à Dieu de leurs fils et de leurs filles, à vous procurer et assurer sans cesse pareille abondance de bienfaits spirituels ? Auriez-vous assez peu de fierté patriotique pour rester à ne rien faire et laisser aux autres le poids des sacrifices qu'exigent la prospérité et la grandeur de votre pays ? Et où serait la fierté de votre sens chrétien, si vous vouliez vous soustraire à l'honneur de concourir et de coopérer, vous aussi, non seulement par quelque don matériel, mais par l'offrande plus précieuse des enfants que Dieu pourrait vous demander à l'exaltation et la diffusion de la foi et de l'Eglise catholique, en un mot, à l'accomplissement de sa divine mission dans le monde au profit des âmes de vos frères ? Aidez l'Epouse du Christ, chers époux, aidez le Christ, le Sauveur des hommes, en donnant les enfants mêmes de votre propre sang. Aidez-Nous, Nous qui sommes son indigne Vicaire, mais qui portons tous les hommes en Notre cœur comme Nos propres fils, soit que l'unique bercail les réunisse déjà, soit qu'ils errent encore dans d'arides pâturages : à tous Nous devons la voie, la vérité et la vie, c'est-à-dire le Christ. Elevez vos fils et vos filles dans la foi qui remporte la victoire sur le monde (I Jn 5, 4) ; n'étouffez pas en leur âme l'esprit qui vient du ciel ; enracinez-y cette foi loyale et sincère dont l'apôtre Paul avait la certitude qu'elle était dans son bien-aimé disciple Timothee, comme elle avait été constante dans Lois, l'aïeule de Timothee, et dans sa mère Eunice (II Tm 1, 5). Ne soyez pas avares, ne manquez pas de générosité envers Dieu, remettez-lui cette part bénie qu'il pourrait venir un jour demander à votre foyer.<br />
<br />
Chers époux, avec toute l'effusion de Notre cœur de Père, Nous vous donnons la Bénédiction apostolique ; et Nous avons la certitude de ne pas vous importuner, si Nous y ajoutons la prière que le divin Maître daigne vous accorder l'honneur et la grâce de se choisir sa part dans votre famille et qu'il daigne en même temps vous accorder la foi et l'amour qu'il vous faut pour ne pas lui refuser ou contester cette part, mais au contraire pour l'en remercier comme du meilleur de ses bienfaits et surtout comme du gage le plus sûr de ses prédilections pour vous et de la récompense qu'il vous prépare dans le ciel.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_collaboration_des_%C3%A9poux_qui_se_r%C3%A9alise_dans_l%27esprit,_dans_la_volont%C3%A9_et_dans_l%27action_%E2%80%93_18_mars_1942_%E2%80%93&diff=2154La collaboration des époux qui se réalise dans l'esprit, dans la volonté et dans l'action – 18 mars 1942 –2012-01-31T17:49:39Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 18 mars 1942<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
C'est un joug pesant, chers jeunes époux, que la vie de l'homme sur la terre. Le Saint-Esprit le proclame bien haut dans l'Ecriture Sainte : « Un joug pesant est sur les enfants des hommes, depuis le jour où ils sortent du sein de leur mère, jusqu'au jour de la sépulture dans le sein de la mère commune. Ce qui trouble leurs pensées et fait craindre leurs cœurs, c'est la pensée de leur attente, c'est la crainte de la mort. Depuis l'homme qui siège sur un trône, dans la gloire, jusqu'au malheureux assis par terre et sur la cendre, depuis celui qui porte la pourpre et la couronne, jusqu'au misérable couvert d'une toile grossière, la colère, l'envie, le trouble, l'agitation, la crainte de la mort, l'aigreur et les querelles sont le partage de tous, et, dans le temps où chacun repose sur sa couche, le sommeil de la nuit bouleverse ses idées » (Si 40,1-5).<br />
<br />
Mais ce joug de misère, ce fardeau d'angoisse dont nous a chargés la faute d'Adam, Notre-Seigneur Jésus-Christ, le nouvel Adam, l'a allégé pour nous par le joug de sa grâce et de son Evangile : « Venez à moi, nous dit-il, vous tous qui êtes fatigués et ployez sous le fardeau, et je vous soulagerai. Prenez sur vous mon joug et recevez mes leçons, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos de vos âmes. Car mon joug est doux et mon fardeau léger » (Mt 11, 28-30). O bienheureux joug du Christ, qui ne trouble pas l'esprit ni le cœur, qui ne nous humilie pas, mais nous exalte à ses yeux, et qui nous apaise dans la sérénité de l'amitié divine ! C'est pour vous aussi, bien-aimés jeunes époux, un joug de grâce que le grand sacrement de mariage ; il vous a, devant le prêtre et l'autel, unis par un lien indissoluble dans la communauté d'une même vie, afin que vous cheminiez ensemble ici-bas et que vous vous aidiez l'un l'autre, portant en commun le poids de la famille, des enfants et de leur éducation.<br />
<br />
Dans la vie familiale, autres sont les devoirs particuliers à l'homme, autres les devoirs qui regardent l'épouse ; mais ni la femme ne peut demeurer complètement étrangère au travail de son mari, ni le mari aux soucis de sa femme. Tout ce qui se fait dans la famille doit être de quelque manière le fruit de la collaboration, l'œuvre commune des époux.<br />
<br />
Mais qu'est-ce que collaborer ? Est-ce simplement l'addition de deux forces dont chacune travaille pour son propre compte, comme lorsque deux locomotives unissent leurs énergies pour tirer un train trop pesant ? Non, il n'y a point là de véritable collaboration. Par contre, le mécanicien et le chauffeur de chacune de ces deux machines (comme le mécanicien et son aide sur une de ces modernes locomotives électriques), font, eux, œuvre de véritable collaboration matérielle et consciente, pour assurer la bonne marche du convoi. Chacun, il est vrai, accomplit un travail bien à soi, mais non sans se préoccuper de son compagnon, réglant au contraire son action sur la sienne, selon que celui-ci en a besoin et qu'il est en droit de l'attendre.<br />
<br />
La collaboration humaine se réalise à la fois dans l'esprit, dans la volonté et dans l'action. Nous disons bien : dans l'esprit, parce que seules les créatures intelligentes peuvent conjuguer leur libre activité, collaborer entre elles. Collaborer, ce n'est pas seulement joindre ses efforts pour son propre compte, mais les adapter à ceux d'autrui afin de les seconder et afin de fusionner, pour ainsi dire, en une commune réalisation. Collaborer, c'est donc subordonner organiquement l'œuvre particulière de chacun à une pensée commune, en vue d'une fin commune, qui déterminera le sens, la place et la mesure de toute chose dans la hiérarchie des moyens, et qui, dès que plusieurs personnes la désireront en commun, rapprochera leurs intelligences dans un même intérêt et unira leurs cœurs étroitement dans une affection réciproque, les portant à renoncer à leur propre indépendance pour se plier à toutes les nécessités qu'imposera la recherche de cette fin. C'est dans une seule pensée, dans une seule foi, dans une commune volonté que prend naissance toute collaboration véritable, et elle sera d'autant plus étroite et féconde que cette pensée, cette foi et cet amour agiront avec plus d'intensité et exerceront une influence plus forte sur l'action elle-même tout entière.<br />
<br />
Dès lors vous comprenez qu'une collaboration parfaite qui engage l'intelligence, la volonté et l'action, ne soit pas toujours chose aisée. Avec cette grande idée de l'union et de la collaboration des forces, avec cette intime conviction de la fin à atteindre, avec cette ardente volonté d'y arriver coûte que coûte, la collaboration suppose encore une mutuelle compréhension, l'estime sincère et le sens de l'indispensable concours que les autres apportent et qu'ils doivent apporter à la même fin, une large et sage bienveillance à prendre en considération les inévitables diversités entre collaborateurs et à les admettre, résolu, bien loin de s'en irriter, à en tirer profit. La collaboration exige donc une certaine abnégation personnelle qui sache se vaincre et céder, au lieu de vouloir faire prévaloir en tout ses propres vues, de se réserver toujours les travaux qui plaisent et conviennent le mieux et de se refuser à entrer dans l'ombre parfois et à voir le fruit de son propre labeur se perdre, pour ainsi dire, dans le vague anonymat de l'intérêt commun.<br />
<br />
Cependant, pour difficile qu'apparaisse une aussi harmonieuse et intime collaboration, elle est indispensable au bonheur que Dieu destine à la famille. Ils sont deux, l'homme et la femme, à marcher de pair, à se donner la main, à s'unir par le lien d'un anneau, lien d'amour que le paganisme lui-même n'hésitait pas à appeler « lien conjugal », vinculum jugale1. Qu'est-ce donc que la femme, sinon l'aide de l'homme ? N'est-ce pas à elle que Dieu a accordé le privilège sacré de mettre l'homme au monde ? N'est-ce point une de ses sœurs — la plus grande de toutes, « plus humble et plus haute que ne le fut jamais nulle créature, et fruit des éternels décrets de Dieu » — qui devait nous donner le Rédempteur du genre humain et mettre en liesse par le premier miracle de son Fils le « lien conjugal » des noces de Cana ?<br />
<br />
Dieu a établi que coopèrent à la fin essentielle et primaire du mariage — qui est la procréation des enfants — le père et la mère, et cela par une collaboration librement consentie, dans une commune soumission à tout ce qu'un but si magnifique pourra imposer de sacrifices. But vraiment magnifique, puisque le Créateur fait participer les parents à la suprême puissance par laquelle il forma le premier homme du limon de la terre, tandis que lui se réserve d'infuser le spiraculum vitae, le souffle d'immortelle vie, et qu'il devient par là le souverain collaborateur du père et de la mère, de même qu'il est cause de toute activité et qu'il agit en tous ceux qui agissent2. Votre joie, ô mères, est donc aussi la sienne, lorsque vous oubliez toutes vos peines pour vous écrier, joyeuses, à la naissance de votre enfant : Natus est homo in mundum ! « Un homme est né dans le monde ! » (Jn 16, 21). Elle s'est accomplie en vous cette bénédiction que Dieu avait déjà donnée au paradis terrestre à nos premiers parents et qu'il renouvela après le déluge à Noé, le second père du genre humain : « Croissez et multipliez, et remplissez la terre » ( Gn 1, 28 Gn 8, 17). Mais il ne suffit pas de collaborer pour la naissance de l'enfant à la vie et à la santé corporelles : vous devez collaborer à son éducation spirituelle. En cette âme tendre, les premières impressions laissent de puissantes traces ; la fin principale du mariage ne se limite pas à la procréation des enfants : elle comprend leur éducation3 et leur progrès dans la crainte de Dieu et dans la foi, de sorte que vous retrouviez et goûtiez dans cette collaboration qui doit pénétrer et animer toute votre vie conjugale, la félicité dont Dieu a déposé tant de semences fécondes dans la famille chrétienne.<br />
<br />
Mais la pensée et le souci de l'enfant dont la naissance a couronné et consacré l'union des deux époux, ne suffiraient pas encore à créer entre eux la collaboration spontanée d'une vie entière, si venaient à manquer ou à défaillir la volonté de collaborer et la science cordiale de la collaboration. La volonté de collaborer en suscite la résolution, mais cette résolution suppose la conviction de la nécessité de collaborer.<br />
<br />
A-t-il vraiment conscience de cette nécessité de la collaboration, celui qui entre dans la vie conjugale avec la prétention d'y apporter et d'y maintenir jalousement sa propre liberté sans rien sacrifier de son indépendance personnelle ? N'est-ce point là marcher au devant des pires conflits, rêver contre toute justice d'une situation impossible et chimérique dans la réalité de la vie commune ? Il faudra donc comprendre et accepter sincèrement et pleinement, avec un amour cordial, et non seulement avec résignation, une condition si essentielle de la voie choisie ; il faudra embrasser avec générosité, courage et joie, tout ce qui rendra possible, sincère et courtoise cette collaboration, que ce soit le sacrifice de goûts, préférences, habitudes ou désirs personnels, ou que ce soit la monotonie des humbles, obscurs et pénibles travaux de la vie quotidienne.<br />
<br />
<br />
La volonté de collaborer. Qu'est-ce donc que vouloir collaborer ? Vouloir et chercher la collaboration : c'est aimer à travailler ensemble sans attendre que votre conjoint le propose, le demande ou l'exige ; c'est prendre les devants, c'est savoir faire les premiers pas, s'il le faut, pour mettre soi-même l'œuvre en train ; c'est souhaiter ces premiers pas, c'est en avoir le désir vif et tenace, c'est avoir, dans une vigilante sollicitude, la persévérance nécessaire pour trouver le moyen d'une liaison réelle de vos deux activités, sans découragements et sans impatiences quand l'aide que vous apporte votre conjoint pourra ne vous sembler pas suffisante ni proportionnée à vos propres efforts, fidèles que vous restez toujours à votre résolution de ne reculer, coûte que coûte, devant aucun sacrifice qui puisse contribuer à la réalisation de cette harmonie si désirable, si indispensable et si profitable dans la recherche commune du bien de la famille.<br />
<br />
La « science cordiale » de la collaboration. Nous voulons dire cette science qui ne s'apprend pas dans les livres, mais est enseignée par le cœur, qui aime, lui, l'active collaboration dans le gouvernement et la marche du foyer ; cette science, cet art qui est affection réciproque, mutuelle prévenance et sollicitude dans le même nid familial ; cet art, enfin, qui est une longue et mutuelle éducation et formation des époux nécessaire à deux âmes qui s'instruisent l'une l'autre pour parvenir à réaliser une vraie et intime collaboration. Si, avant de vivre sous le même toit, les futurs époux ont vécu et se sont formés chacun pour soi ; si l'un et l'autre viennent de familles qui, malgré leurs ressemblances, ne seront jamais pareilles si donc chacun apporte au foyer commun des manières de penser, de sentir, d'agir et de frayer que les premiers contacts ne trouveront jamais en pleine et parfaite harmonie ; vous voyez bien que, pour s'accorder, il faudra avant tout se connaître mutuellement plus à fond que ne l'a permis le temps des fiançailles : il faudra profiter de toutes les circonstances pour chercher et discerner les vertus et les défauts, les capacités et les lacunes de son conjoint, non pas afin de se lancer dans des critiques ou des querelles, ou de se juger supérieur à lui, ne voyant que les faiblesses de celui ou de celle à qui on a lié sa propre vie, mais afin de se rendre compte de ce qu'on ne peut en attendre, de ce qu'on devra suppléer ou compenser soi-même.<br />
<br />
Une fois connu le pas sur lequel il vous faudra régler le vôtre, vous aurez dans un travail généreux à modifier, ajuster et harmoniser vos pensées et vos habitudes. Ce travail s'accomplira insensiblement, par l'affection mutuelle, et ne se laissera point troubler par les transformations, les changements et les sacrifices, qui ne doivent pas peser sur un seul conjoint, mais dont chacun doit porter sa part avec amour et confiance, en songeant que se lèvera bientôt le jour où la joie de l'harmonie de leurs âmes parfaitement réalisée dans la pensée, la volonté et l'action, leur donnera la récompense et le soulagement de leurs peines, dans la satisfaction bien douce d'une pleine et féconde collaboration à la prospérité et au bonheur de leur famille.<br />
<br />
Tous les hommes ici-bas sont pèlerins de Dieu (cf. II Co 5, 6) et s'acheminent vers lui dans la voie des vivants ; mais sur le chemin battu de la vie conjugale, plus d'une fois la diversité de caractère des deux pèlerins change pour l'un ou l'autre la marche en un exercice de vertu bien capable de l'élever dans la lumière de la sainteté. Lisez la vie de la bienheureuse Anne-Marie Taïgi, et vous verrez avec stupéfaction quelle différence d'origine, de tempérament, d'éducation, d'inclination et de goûts il y avait entre elle et son mari ; elle avait néanmoins réalisé entre leurs deux âmes si diverses un admirable accord. Puisse cette héroïque mère de famille obtenir à chacun et à chacune d'entre vous, bien-aimés fils et filles, l'abondance des grâces célestes, afin que réussisse et fleurisse dans toutes vos familles une aussi véritable et chrétienne collaboration au service de Dieu. Ce sont ces mêmes grâces que Nous demandons pour vous à Notre-Seigneur, en vous accordant de toute Notre paternelle affection la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Parole_de_Dieu_:_pain_des_familles_%E2%80%93_21_Janvier_1942_%E2%80%93&diff=2150Parole de Dieu : pain des familles – 21 Janvier 1942 –2012-01-31T17:30:27Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 21 janvier 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Votre aimable présence, chers jeunes époux, rappelle à Notre pensée et Nous remet sous les yeux en une vivante image les groupes nombreux d'autres époux venus, comme vous-mêmes aujourd'hui, demander Notre Bénédiction apostolique sur la tendre aurore et les ardentes espérances de leurs nouvelles familles. Au cours de ces audiences, Nous leur avons adressé la parole à plusieurs reprises, et sans doute est-il arrivé que Nos allocutions, parues dans les journaux catholiques ou en petits volumes, vous sont aussi tombées sous les yeux. Aujourd'hui toutefois, outre le désir de Notre Bénédiction apostolique, vous portez peut-être, Nous semble-t-il, cachée dans vos cœurs, une question : vous aimeriez savoir pourquoi Nous avons tant à cœur de prodiguer, chaque fois qu'il s'en présente l'occasion, Nos enseignements aux chers nouveaux mariés. Que pouvons-Nous, que devons-Nous vous répondre ? Vous voulez pénétrer dans Notre cœur, en surprendre les battements, les pensées qui en montent et qui s'enflamment sur les lèvres du Père universel de la famille chrétienne ; d'un Père qui brûle, à l'exemple de Pierre dont il est le successeur, de charité pour le Christ et l'Eglise, son Epouse, de cette charité pleine d'affection pour les brebis et les agneaux ; d'un Père qui voit, dans les jeunes rameaux de la famille chrétienne, se régénérer les fils de Dieu, s'étendre le jardin de la foi et de la grâce, s'élever et se multiplier les fleurs du ciel ; d'un Père qui parle à ses enfants, c'est-à-dire à vous-mêmes, des choses de la famille, et qui voudrait à ce propos ressusciter un vieux et beau souvenir de famille, un souvenir qui remonte aux temps apostoliques, aux origines mêmes de l'Eglise, la puissante Mère de la famille chrétienne.<br />
<br />
Un jour, les chefs de cette famille — c'étaient les Douze et à leur tête ils avaient Pierre, dont Nous occupons, quoique indigne, la place — constatèrent, au milieu des fatigues de leur apostolat, que, du fait du nombre sans cesse croissant des disciples, ils n'arriveraient plus à subvenir aux besoins de leur troupeau, spécialement dans l'assistance quotidienne des veuves et dans le service des tables. Ils convoquèrent donc les fidèles et les invitèrent à choisir dans leur foule sept hommes de bonne réputation, pleins de l'Esprit-Saint et de sagesse — les diacres — afin de leur confier cet office, tandis que Pierre et les autres apôtres continueraient à vaquer « à la prière et au ministère de la parole » (Ac 6, 14). Choisis par le Christ et envoyés pour enseigner toutes les nations, les apôtres ne devaient-ils pas, avant tout, rendre témoignage à sa mission divine et transmettre la bonne nouvelle ? De fait, ils ne se dispensèrent jamais de témoigner, soit de vive voix, soit par écrit, au milieu des périls et des persécutions, dans tout l'Empire romain et au-delà, prêts à sceller de leur sang la parole que leur infatigable courage annonçait aux peuples.<br />
<br />
Dix-neuf siècles se sont écoulés, et leur parole de voie, de vérité et de vie a passé, d'âge en âge, de pays en pays, de montagne en montagne, de mer en mer, de continent en continent, de peuple en peuple, de bouche en bouche, des terres de Palestine jusqu'aux extrémités du monde, portée par les vaillants hérauts de la foi. Le petit grain de sénevé jeté à Jérusalem a grandi jusqu'à devenir un arbre immense : ses rameaux couvrent la terre et dans sa ramure habitent près de quatre cents millions de croyants.<br />
<br />
C'est là ce royaume de Dieu dont l'oraison dominicale nous fait demander l'avènement. Royaume spirituel, sans doute, mais qui se développe et qui travaille en ce monde où nous marchons en pèlerins vers une patrie située plus haut que les étoiles. Royaume immense où s'est épanouie, avide et sûre d'un avenir qui ne se terminera qu'avec les siècles, la petite famille des premières années. Composée d'hommes unis entre eux par des liens visibles et pareille à un immense troupeau sous un souverain Pasteur unique, elle ne peut se passer d'un organisme de gouvernement, d'une subordination de personnes, d'une administration de choses, et nombreux sont les émules des premiers diacres, à Rome et à travers le monde, qui secondent le pape avec un zèle admirable dans l'accomplissement de sa lourde tâche.<br />
<br />
Mais, si les soucis du gouvernement de l'Eglise sont bien vastes et bien nombreux, le Souverain Pontife ne saurait oublier pour autant le « ministère de la parole » que saint Pierre considérait comme le principal de ses devoirs d'apôtre avec la prière. Le Christ ne lui avait-il pas dit, à lui et aux autres disciples : « Allez, prêchez à toutes les nations ce que je vous ai enseigné » ? (cf. Matth. Mt 28, 19). Saint Paul ne s'écriait-il pas : « Je dois ma parole aux savants et aux ignorants » ? (cf. Rom. Rm 1, 14). N'est-ce pas par l'ouïe que la foi entre dans les cœurs ? La parole de Dieu n'est-elle point la voie, la vérité et la vie ? Elle est vivante et efficace, plus acérée qu'une épée à deux tranchants, si pénétrante qu'elle va jusqu'à séparer l'âme et l'esprit, les jointures et les moelles ; elle démêle les sentiments et les pensées du cœur (He 4, 12). Nous aimons la parole de Dieu parce qu'en elle c'est le Verbe divin qui resplendit, se manifeste et en quelque sorte s'incarne une seconde fois pour nous.<br />
<br />
Sans doute, c'est avant tout lorsque, dans les occasions solennelles, Nous Nous adressons à toute l'Eglise, aux évêques, Nos Frères dans l'épiscopat, que Nous exerçons ce ministère ; cependant, Nous sommes le Père de tous, même des plus humbles ; Nous sommes le Pasteur des brebis, mais aussi des agneaux : comment donc pourrions-Nous renoncer au simple et saint exercice du ministère de la parole et ne point porter à Nos enfants directement, de Notre propre voix, l'enseignement que Nous a confié le Christ Notre Maître ? Dieu n'a-t-il pas mis et allumé dans le cœur de tout prêtre, de tout évêque, par la grâce même de l'ordination sacerdotale et de la consécration épiscopale, la soif inextinguible de ce saint ministère au milieu du peuple chrétien ?<br />
<br />
Vous comprenez donc, bien-aimés fils et filles, quelle joie intime et quel profond réconfort possèdent et enflamment Notre âme quand, au milieu des graves soucis de l'Eglise universelle, Nous pouvons venir parmi vous avec la joie d'un Père heureux de parler à ses enfants, avec la joie d'un prêtre qui rompt aux auditeurs que Dieu lui envoie le pain vivant et nourrissant de la parole évangélique et qui coopère ainsi directement à l'œuvre de la grâce pour fortifier, accroître et affermir dans leur esprit la foi, la confiance et l'amour, ces vertus qui sanctifient pour le ciel le cours — joyeux ou triste, selon que Dieu voudra — de leur vie d'ici-bas.<br />
<br />
Voilà pourquoi, et c'est ici le fond de Notre cœur que Nous vous ouvrons, voilà pourquoi Nous aimons à Nous entretenir avec vous et Nous ne vous laisserons point partir aujourd'hui sans ajouter quelque enseignement pour vos âmes. A vrai dire, ces confidences que Nous vous avons faites ne renferment-elles pas un enseignement ? Ne vous montrent-elles pas la grande valeur de la parole de Dieu ? Ne vous manifestent-elles pas l'estime où vous devez la tenir lorsqu'elle vous est distribuée même sous une forme des plus simples et des plus sobres et dans la plus humble de vos paroisses ? Saint Paul remerciait le Seigneur de ce que ses chers Thessaloniciens avaient reçu la parole de Dieu non comme parole des hommes, mais, ainsi qu'elle l'est véritablement, comme une parole de Dieu qui déploie sa puissance en ceux qui croient (cf. I Th 2, 13).<br />
<br />
Si, en ces temps de vie difficile, un de vos premiers soucis lors de la fondation d'un foyer a été de connaître et de trouver le moyen d'assurer à votre famille le pain quotidien, ne mettez pas moins de sollicitude à procurer aussi à vos âmes l'assurance du pain spirituel. Le plus grave des châtiments dont Dieu menaçait le peuple d'Israël, par la bouche du prophète Amos, était d'envoyer la famine sur la terre : « Non une faim de pain, non une soif d'eau, mais d'entendre les paroles de Dieu... Ils iront de côté et d'autre pour chercher la parole de Dieu, et ne la trouveront pas » (Am 8, 11-12). Plus encore que toutes les difficultés d'approvisionnement matériel auxquelles les circonstances actuelles peuvent vous exposer, craignez, bien-aimés fils et filles, craignez par-dessus tout la faim, la disette de la parole de Dieu. Aimez, recherchez le pain de vos âmes, la parole de la foi, la connaissance de la vérité nécessaire au salut de l'homme, afin que votre intelligence ne se laisse point obscurcir par les erreurs et l'ignorance des fabricants de sophismes et d'immoralité. Que vos âmes, que les âmes de vos fils et de vos filles, ne défaillent point sur le chemin de la vertu, du devoir et du bien, faute de s'être suffisamment nourris de la parole de Dieu, de cette nourriture supersubstantielle qui donne force et vigueur sur le sentier de cette vie et nous permet ainsi de gagner la cité bienheureuse où les élus « n'auront plus ni faim ni soif » (Ap 7, 16).<br />
<br />
Ne vous montrez point à l'égard de la parole de Dieu négligents, paresseux ou sourds. L'heure douloureuse que nous vivons est l'heure où Dieu parle sur les terrains sanglants de ce cruel conflit et dans la désolation des cités plus que dans les pieux tressaillements de la joie. Dieu est maître des nuages et des tempêtes, et il les gouverne par sa parole. Dans les nuages, les éclairs et les tonnerres, il parla un jour sur le Sinaï pour promulguer le Décalogue de sa loi que les hommes, par la suite, ont gravement violée. Aujourd'hui, il donne la parole aux vents et aux tempêtes ; il semble se taire alors qu'il passe sur les flots mouvants des mers et des océans, et que grondent les tempêtes, secouant les nacelles que la main des hommes a construites dans leurs arsenaux terrestres. Adorons son passage et son silence. Cette heure de tempête est l'heure du retour à Dieu et du souvenir de Dieu (cf. Ps., lxxvii, 34-35) ; c'est l'heure de la prière, l'heure d'invoquer le Très-Haut ; c'est l'heure où, réalisant une parole de vérité, le Seigneur « renverse les desseins des nations et réduit à néant les pensées des peuples » (Ps 32, 12). Il tient et manœuvre le gouvernail de chaque navire pour le guider à travers les flots vers le bien qu'il a choisi.<br />
<br />
En ces moments de graves épreuves, la parole de Dieu accueillie dans l'humilité et méditée dans la ferveur de la prière, est la seule voix qui pénètre le cœur pour en apaiser les craintes et les angoisses et pour l'animer à la confiance et à la résignation. C'est la seule voix qui éclaire l'esprit sur les mystères des insondables desseins de Dieu ; c'est l'unique parole qui réconforte, soutienne et réchauffe vos âmes, chers enfants, l'unique parole qui conserve et stimule la foi, l'espérance et l'amour. Ecoutez-la donc, recueillez-la avidement et docilement des lèvres de vos pasteurs. Afin qu'elle trouve en vous des cœurs bien disposés et qu'elle y produise, selon la parabole de Notre-Seigneur (Mt 13, 8, 23), des fruits en abondance, du trente, du soixante, du cent pour un, Nous demandons au divin Maître que la richesse de sa grâce féconde en vous la bonne semence et Nous vous en donnons le gage, de tout cœur, dans Notre Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Le_c%C5%93ur_de_l%27homme_et_de_la_femme_lorsqu%27ils_s%27unissent_leur_vie_enti%C3%A8re_%E2%80%93_12_novembre_1941_%E2%80%93&diff=2149Le cœur de l'homme et de la femme lorsqu'ils s'unissent leur vie entière – 12 novembre 1941 –2012-01-31T17:29:36Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 8 novembre 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
C'est quelque chose de grand que le cœur de l'homme et de la femme, lorsqu'ils s'unissent leur vie entière pour fonder une famille. C'est du fond du cœur que naissent les premiers désirs, les premiers regards, les premières paroles qui montent aux lèvres pour rencontrer dans un échange mutuel d'autres paroles jaillies d'un autre cœur, tandis que l'un et l'autre se dilatent dans le rêve d'un foyer heureux.<br />
<br />
Mais qu'est-ce donc que le cœur ? Le cœur est la source de la vie : en lui se forme et naît, croît, mûrit et s'épanche, vieillit et finit le mouvement de la vie ; mais il ressent aussi toutes les vicissitudes, toutes les alternatives et fluctuations de la vie, soit que les mouvements des passions le fassent bondir et palpiter, soit que les fibres en tressaillent sous le coup de ces sentiments contraires que sont l'amour et la haine, le désir et l'aversion, la joie et la tristesse, l'espérance et l'abattement, l'humilité et l'orgueil, la crainte et l'audace, la douceur et la colère.<br />
<br />
Le cœur ouvert est une source de bonheur dans la vie commune des époux, tandis que le cœur renfermé en diminue la joie et la paix. Comprenez bien ce que signifie le cœur : c'est le symbole et l'image de la volonté. Comme le cœur physique est le principe de tous les mouvements corporels, ainsi la volonté est le principe de tous les mouvements spirituels. La volonté meut l'intelligence, elle meut les facultés inférieures et les passions, elle meut les forces extérieures vers l'œuvre où visent l'intelligence, les sens internes et externes 2. Pauvre cœur humain, insondable à celui même qui le porte en sa poitrine, qui le connaîtra jamais ? Et pourtant, beaucoup s'efforcent de le pénétrer dans les autres et d'en faire connaître les sentiments et les mouvements.<br />
<br />
Le cœur fermé, ennemi de la foie et de la paix<br />
<br />
A plus d'une reprise, des écrivains renommés ont représenté dans leurs récits, leurs nouvelles ou leurs drames ce paradoxe parfois tragique : la position morale de deux excellents époux faits pour s'entendre en perfection, et qui n'ont pas su s'ouvrir l'un à l'autre. Ces époux restent dans leur vie commune pour ainsi dire étrangers l'un à l'autre ; ils laissent s'élever et grandir en eux des incompréhensions et des malentendus, qui peu à peu troublent et menacent leur union et qui souvent les mettent sur le chemin des pires catastrophes. Hélas ! ces conditions morales ne se trouvent pas seulement dans les œuvres des romanciers : elles se rencontrent, à des degrés divers, dans la vie de chaque jour et même parmi les bons chrétiens. Quelle en est la cause ? Ce sera parfois une sorte de timidité naturelle qui inspire à certains hommes et à certaines femmes une répugnance instinctive à manifester leurs sentiments intimes et à les communiquer à qui que ce soit. Une autre fois ce sera un manque de simplicité qui naît d'une vanité, d'un orgueil caché, inconscient peut-être. D'autres fois encore, il faudra en chercher la cause dans une éducation défectueuse, excessivement dure et par trop extérieure, qui a habitué l'âme à se replier sur elle-même, à ne pas s'ouvrir et à ne pas se donner, par crainte de se voir blessée en ce qu'elle a de plus profond et de plus délicat.<br />
<br />
Et pourtant, bien-aimés fils et filles, cette confiance mutuelle, cette ouverture réciproque des cœurs, cette simplicité de l'un et l'autre à mettre en commun vos pensées, vos aspirations, vos préoccupations, vos joies et vos tristesses, cette confiance est une condition nécessaire, un élément, un aliment même, et substantiel, de votre félicité.<br />
<br />
En face de vos nouveaux devoirs et de vos nouvelles responsabilités, une union purement extérieure de vos vies ne suffira jamais pour mettre vos cœurs à la hauteur de votre mission — de cette mission que Dieu vous a confiée en vous inspirant de fonder une famille — de manière à demeurer dans la bénédiction du Seigneur, à persévérer dans sa volonté, à vivre dans son amour. Pour vous, vivre dans l'amour de Dieu, c'est élever jusqu'à son amour votre amour mutuel ; car votre amour mutuel n'est pas une simple bienveillance, mais cette souveraine amitié conjugale de deux cœurs qui s'ouvrent et se joignent l'un à l'autre afin de vouloir l'un et l'autre, ou de ne pas vouloir, les mêmes choses, et qui vont se rapprochant et s'unissant de plus en plus dans le sentiment qui les anime et qui les meut. Vous devez vous prêter un mutuel secours et marcher côte à côte, la main dans la main, pour affronter les besoins matériels de la vie, occupés l'un à diriger la famille et à travailler pour subvenir à ses nécessités, l'autre à veiller et pourvoir à tout à l'intérieur du foyer ; à plus forte raison convient-il que vous vous souteniez l'un l'autre et que vous vous prêtiez une aide mutuelle pour parer aux nécessités morales et spirituelles de vos âmes et des âmes que Dieu va confier à votre sollicitude, les âmes de vos chers petits anges. Or ce soutien et ce secours mutuels, comment pourrez-vous les donner si vos âmes restent étrangères l'une à l'autre et que chacune garde jalousement ses secrets particuliers, qu'il s'agisse d'affaires, d'éducation ou de contribution à la vie commune ? N'êtes-vous point comme deux ruisseaux qui, jaillis de deux familles chrétiennes, courent dans la vallée de la société humaine confondre leurs eaux limpides et féconder le jardin de l'Eglise ? N'êtes-vous point semblables à deux fleurs qui joignent leurs deux corolles et qui, à l'ombre de la paix domestique, s'ouvrent et s'entretiennent dans la langue de leurs couleurs et l'épanchement de leurs parfums ?<br />
<br />
Nous ne dirons point que cette ouverture mutuelle des cœurs doive être sans limite ; Nous ne dirons point que vous ayez, sans restriction aucune, à révéler et à manifester tout haut tout ce qui vous est passé ou qui vous passe par l'esprit, ou qui préoccupe votre pensée et votre attention. Il est des secrets inviolables que la nature, une promesse ou une confidence ne permettent pas de révéler. Vous pouvez devenir l'un et l'autre le dépositaire de secrets qui ne vous appartiennent point : un époux médecin, avocat, officier, fonctionnaire d'Etat ou employé d'une administration, saura ou apprendra nombre de choses que le secret professionnel ne lui permettra de communiquer à personne, pas même à son épouse, et, si elle est sage et prudente, elle lui témoignera sa propre confiance en respectant scrupuleusement et en admirant son silence, sans rien faire ni rien tenter pour le pénétrer. Souvenez-vous que dans le mariage, votre responsabilité et votre personnalité ne sont point supprimées. Bien plus, même en ce qui vous concerne personnellement, il est des confidences qui se feraient sans utilité et non sans dangers, et qui pourraient devenir nuisibles et troubler l'union au lieu de la rendre plus étroite, plus harmonieuse, plus joyeuse. Le mari et la femme ne sont point des confesseurs : les confesseurs, vous les trouverez à l'église, au tribunal de la pénitence. Le caractère sacerdotal élève là les prêtres à une sphère qui dépasse la vie de la famille, à la sphère des réalités surnaturelles, et il leur confère le pouvoir de guérir les plaies de l'âme ; là, les prêtres peuvent recevoir n'importe quelle confidence et se pencher sur n'importe quelle misère : ils sont les pères, les maîtres et les médecins de vos âmes.<br />
<br />
A part ces secrets personnels et sacrés de la vie intérieure ou extérieure, vous devez mettre vos âmes en commun pour qu'elles se fondent en une seule âme. N'est-il pas d'une souveraine importance que deux fiancés s'assurent que leurs vies s'accordent et s'harmonisent parfaitement ? Si l'un des deux est sincèrement, profondément chrétien, et l'autre, ce qui, hélas ! peut arriver, peu croyant ou nullement, peu ou nullement soucieux des devoirs et pratiques de la religion, vous comprenez bien qu'il restera entre ces âmes, malgré leur intime amour, une douloureuse dissonance, qui ne s'harmonisera entièrement que le jour où se réalisera pleinement cette parole de saint Paul : « Le mari infidèle est sanctifié par la femme, et la femme infidèle est sanctifiée par le mari » (I Co 7, 14).<br />
<br />
Quand, au contraire, dans un foyer un commun idéal de vie unit déjà les deux époux et qu'ils sont l'un et l'autre, par la grâce sanctifiante, enfants de Dieu et temples de l'Esprit-Saint, il devient aisé et doux de se confier mutuellement les joies et les tristesses, les craintes et les espérances, les pensées et les projets concernant l'ordre intérieur de la maison, l'avenir de la famille et l'éducation des enfants : tout cela, l'un et l'autre le rêveront, le prévoiront, le réaliseront dans une intime concorde. Alors, l'amour mutuel et la foi commune dissiperont tout désaccord et se transformeront en force et en secours, lorsqu'il faudra vaincre les doutes et les hésitations d'une timidité naturelle incertaine en ses démarches, ou ces tendances et habitudes d'isolement et de repliement sur soi-même qui sont bien propres à créer et à alimenter un silence mécontent ; et l'on n'hésitera point, en de pareilles circonstances, à agir avec la vigueur nécessaire pour cette victoire dont on comprend toute l'importance. Cet amour d'où naît le désir d'une intime fusion de vos vies vous donnera l'ardeur et le courage qu'il faudra pour modifier et adapter vos goûts, vos habitudes, vos préférences et prédilections naturelles selon les besoins de votre union et pour résister aux suggestions de l'égoïsme et de la nonchalance. Tout cela, la Providence de Dieu qui vous a unis, ne le demande-t-elle point à la générosité de votre cœur, à cet esprit de véritable communauté de vie qui fait sien tout ce qui plaît à la personne avec laquelle on vit ? N'est-il pas conforme aux intentions de Dieu sur votre union que vous preniez intérêt à ce qui intéresse votre mari, votre épouse ?<br />
<br />
L'indifférence et l'insouciance, voilà peut-être, parmi les innombrables formes de l'égoïsme humain, les pires de toutes. Rien ne facilitera entre vous les mutuelles confidences autant que l'intérêt véritable, simple, sincère, cordial, manifesté, pour tout ce qui tient à cœur à celui ou à celle dont vous partagez la vie. Cette carrière, ces études, ce travail, cet emploi ne seront point les vôtres, épouses, et d'eux-mêmes ils ne vous diront rien ; mais c'est la carrière, les études, le travail, l'emploi de votre mari. Il y donne son ardeur passionnée, ses sueurs ; il y attache ses rêves d'avenir, l'espoir d'améliorer sa situation familiale et personnelle : pourraient-ils donc vous laisser indifférente ? Maris, vous ne manquez certes point de graves préoccupations professionnelles ; mais les mille soins de votre femme pour rendre votre intérieur plus confortable et plus tranquille, toutes ses industries pour vous plaire de plus en plus en toutes choses, toutes ses sollicitudes pour l'éducation de vos enfants, pour les œuvres de bienfaisance et d'utilité religieuse et sociale, tout cela vous laissera-t-il froids, distraits, maussades même, peut-être, et grognons ?<br />
<br />
N'oubliez pas non plus que la famille que vous venez de fonder est fille de deux familles qui vous ont éduqués et instruits ; vous êtes, en un sens, entrés dans la famille l'un de l'autre : la famille de l'un, dorénavant, ne sera plus étrangère à l'autre et chacun pourra l'appeler sienne, puisque c'est à ce foyer qu'il a trouvé son compagnon ou sa compagne. Ne négligez donc point ces proches, ce père, cette mère qui vous ont donné leur fille chérie ou leur fils ; prenez part à tout ce qui les intéresse, à leurs joies comme à leurs deuils ; employez-vous à comprendre leurs idées, leurs goûts, leurs manières ; montrez-leur par votre affection le lien qui vous unit à eux. Dans cette famille aussi il faut que votre cœur sache s'ouvrir bien grand à la confiance et aux confidences. Quel chagrin pour votre mari ou pour votre épouse, si vous vous montriez dédaigneux, indifférent envers les personnes et le foyer où sont les siens.<br />
<br />
Le cœur ouvert, tous les écrivains qui ont décrit et chanté les louanges de l'amitié, l'exaltent comme le fondement du lien qui unit deux amis dans l'affection ; mais au foyer de la vie conjugale il s'élève plus haut encore : jusqu'au faîte du sanctuaire de la paix et de la joie domestiques. Là un cœur s'ouvre à vous et il vous est donné à tout instant de lui ouvrir le vôtre, quel que soit le matin, le midi ou le soir de votre journée ; il est toujours source et aliment de la félicité que l'on goûte dans le mariage chrétien chrétiennement vécu plus encore que dans la simple amitié.<br />
<br />
Que Dieu, chers jeunes époux, vous donne la grâce d'affronter avec une générosité croissante les petits sacrifices si souvent nécessaires à qui veut goûter pleinement pareille félicité. C'est ce que Nous demandons pour vous, en vous donnant de cœur Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Allocution_aux_M%C3%A8res_de_famille_de_l%27Action_Catholiques_Italienne_%E2%80%93_26_octobre_1941_%E2%80%93&diff=2148Allocution aux Mères de famille de l'Action Catholiques Italienne – 26 octobre 1941 –2012-01-31T17:28:34Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 26 octobre 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
<br />
En présence de cette magnifique assemblée, qui groupe aujourd'hui autour de Nous un aussi grand nombre de mères de familles avec des religieuses, des maîtresses, des délégués des enfants de l'Action catholique italienne, des apôtres de l'enfance, des surveillantes et des assistantes de colonies, Notre regard et Notre pensée franchissent le seuil de cette salle et se transportent aux frontières de l'Italie et du monde, embrassant dans Notre affection de Père commun tous les chers petits enfants, fleurs de l'humanité et joie de leurs mères (Ps., cxii, 9). Cependant, Notre pensée émue évoque l'immortel pape Pie XI, qui, dans son encyclique Divini illius Magistri du 31 décembre 1929, a traité d'une façon si profonde de l'éducation chrétienne de la jeunesse. Sur ce sujet important, le pape, après avoir sagement déterminé le rôle qui revient à l'Eglise, à la famille et à l'Etat, remarque avec douleur comment, trop souvent, les parents ne sont pas ou sont peu préparés à remplir leur fonction d'éducateurs ; mais, n'ayant pu, dans ce document précis et étendu, s'occuper d'une façon spéciale des points qui regardent l'éducation familiale, il conjurait, au nom du Christ, les pasteurs des âmes, « de mettre tout en œuvre, dans les instructions et les catéchismes, par la parole et les écrits largement répandus, pour que les parents chrétiens connaissent bien, non seulement d'une façon générale, mais encore en détail, leurs devoirs relativement à l'éducation religieuse, morale et civique de leurs enfants, et aussi les méthodes les plus propres à réaliser efficacement cette éducation, en plus du bon exemple de leur propre vie »1.<br />
<br />
Par les pasteurs des âmes, le grand pontife adressait son exhortation aux parents, pères et mères ensemble ; mais Nous croyons aussi répondre au désir de Notre vénéré prédécesseur en réservant cette audience spéciale aux mères de famille et aux autres éducatrices des petits enfants. Si Notre parole est pour tous, même quand Nous parlons aux nouveaux mariés, il Nous est agréable, en cette occasion favorable, de Nous adresser particulièrement à vous, chères filles, parce que, dans les mères de famille — et aussi dans les pieuses et compétentes personnes qui les aident — Nous voyons les premières et les plus intimes éducatrices des âmes des petits enfants qui doivent être élevés dans la piété et dans la vertu.<br />
<br />
Nous ne Nous arrêterons pas ici à rappeler la grandeur et la nécessité de cette œuvre d'éducation au foyer domestique ni l'obligation stricte pour une mère de ne pas s'y soustraire, de ne pas l'accomplir à moitié, de ne pas s'y adonner avec négligence. Parlant à Nos chères filles de l'Action catholique, Nous savons bien que dans cette obligation elles voient le premier de leurs devoirs de mères chrétiennes et une fonction dans laquelle personne ne pourrait les remplacer complètement. Mais il ne suffit pas d'avoir la conscience et la volonté d'accomplir ce devoir ; il faut, en outre, se mettre en mesure de bien le remplir.<br />
<br />
Nécessité d'une sérieuse préparation pour l'œuvre difficile de l'éducation<br />
<br />
Aujourd'hui, voyez cette chose extraordinaire que Pie XI déplorait déjà dans son encyclique : « alors qu'il ne viendrait à l'esprit de personne de se faire subitement, sur-le-champ, sans apprentissage ni préparation, ouvrier mécanicien ou ingénieur, médecin ou avocat, eh bien, chaque jour, de nombreux jeunes gens et jeunes filles s'épousent et s'unissent sans avoir pensé un seul instant aux devoirs ardus qui les attendent dans l'éducation des enfants ». Pourtant, si saint Grégoire le Grand n'hésite pas à appeler ars artium, l'art des arts2, tout gouvernement des âmes, c'est certainement un art malaisé et laborieux que celui de bien former les âmes des petits enfants, âmes fraîches, flexibles et donc faciles à se déformer par suite d'une impression imprudente ou d'une incitation trompeuse, âmes parmi les plus difficiles et les plus délicates à conduire, âmes sur lesquelles, souvent, plus que sur la cire, une funeste influence ou une coupable négligence sont capables d'imprimer des traces indélébiles et perverses. Heureux ces bambins qui dans leur maman trouvent près de leur berceau un second ange gardien pour leur inspirer le bien et leur en indiquer le chemin. Dès lors, tout en Nous réjouissant avec vous de tout ce que vous avez déjà heureusement accompli, Nous ne pourrons, par de nouveaux et plus chaleureux encouragements, que vous pousser à développer toujours davantage les belles institutions qui, comme la Semaine de la mère, s'emploient efficacement à former, à tous les degrés et dans toutes les classes sociales, des éducatrices qui, dans leur esprit et leur attitude, aient conscience de la grandeur de leur mission et soient pleines de retenue en face du mal, hardies et empressées pour le bien. C'est dans ce sentiment de femme et de mère que se trouvent toute la dignité et la vénération de la fidèle compagne de l'homme, laquelle est, ainsi qu'une colonne, le centre, le soutien et le phare de la maison familiale ! Aussi, sa lumière devient, dans une paroisse, un exemple et un modèle, et s'étend jusque-là où des groupements féminins spéciaux s'en trouvent à leur tour éclairés.<br />
<br />
Action éducatrice de la mère durant l'enfance<br />
<br />
C'est une particulière et opportune lumière que répand votre Union d'Action catholique par le moyen des organisations de l'Apostolat du berceau et de la Mère des petits enfants, par lesquelles vous prenez soin de former et d'aider les jeunes épouses dès avant la naissance de leurs enfants et ensuite durant la première enfance. A l'imitation des anges, vous vous faites gardiennes de la mère et de l'enfant qu'elle porte dans son sein3, et quand le bébé est venu, vous approchez du berceau où il vagit et assistez la maman qui, de son sein et de ses sourires, alimente le corps et l'âme de ce petit ange du ciel. Dieu a confié à la femme la mission sacrée et douloureuse, mais aussi source de joie très pure, de la maternité (cf. Jean, Jn 16, 21) ; à la mère plus qu'à toute autre personne est confiée la première éducation du tout petit enfant durant les premiers mois et années. Nous ne parlerons pas des hérédités secrètes transmises par les parents aux enfants, qui ont une influence si considérable dans la future formation de leur caractère : hérédités qui parfois dénoncent la vie déréglée des parents si gravement responsables de rendre avec leur sang la pratique d'une vraie vie chrétienne peut-être bien difficile à leur progéniture. Pères et mères, chez lesquels la foi du Christ sanctifie l'amour mutuel, préparez dès avant la naissance du bébé la pureté de l'atmosphère familiale dans laquelle ses yeux et son âme s'ouvriront à la lumière et à la vie ; atmosphère qui imprégnera de la bonne odeur du Christ tous les pas de son progrès moral.<br />
<br />
Vous, ô mères, parce que plus sensibles et aussi plus tendrement aimées, vous devrez, durant l'enfance de vos bébés, les suivre à tout moment de votre regard vigilant, veiller sur le développement et la santé de leur petit corps, qui est la chair de votre chair et le fruit de votre sein maternel. Songez que ces petits enfants, devenus par le baptême enfants de Dieu par adoption, sont les préférés du Christ et que leurs anges voient la face du Père céleste (Mt 18, 10) : vous aussi, en gardant ces petits, en les fortifiant, en les éduquant, vous devez être d'autres anges qui, en donnant vos soins et en exerçant votre surveillance, regardent toujours vers le ciel. Dès le berceau, vous avez à commencer leur éducation non seulement corporelle, mais spirituelle ; parce que si vous ne les éduquez pas, ils s'éduqueront eux-mêmes, bien ou mal. Rappelez-vous que beaucoup de comportements même moraux que vous voyez dans l'adolescent et dans l'homme mûr ont vraiment pour origine les façons et les circonstances de la première croissance physique dans l'enfance ; des habitudes purement organiques, contractées par les tout petits deviendront peut-être plus tard un rude obstacle à la vie spirituelle d'une âme. Vous mettrez donc toute votre application à ce que les soins que vous donnez à vos bambins s'accordent avec les exigences d'une parfaite hygiène, de façon à préparer en eux et à fortifier, pour le moment où s'éveillera l'usage de leur raison, des facultés corporelles et des organes sains, robustes, sans déviation de tendances ; voilà pourquoi il est si désirable que, sauf le cas d'impossibilité, la mère nourrisse elle-même son enfant. Qui peut sonder les mystérieuses influences qu'exerce sur la croissance de cette petite créature la nourrice dont elle dépend entièrement dans son développement ?<br />
<br />
N'avez-vous jamais observé ces petits yeux ouverts et interrogateurs, sans cesse en mouvement, qui glissent sur mille objets, se fixent sur celui-ci ou sur celui-là, qui suivent un mouvement ou un geste, qui déjà manifestent la joie et la peine, la colère et l'entêtement, et ces indices des petites passions qui se nichent dans le cœur humain, avant que les petites lèvres aient appris à articuler un mot ? Ne vous en étonnez pas. On ne naît pas, comme l'ont enseigné certaines écoles philosophiques, avec les idées d'une science innée ni avec les pensées d'un passé déjà vécu. L'esprit d'un petit enfant est une page sur laquelle rien n'est écrit dès le sein de la mère : là s'écriront les images et les idées des choses que rencontrent d'heure en heure, du berceau à la tombe, ses yeux et ses autres sens, externes et internes qui, à travers sa vie, lui transmettent la vie du monde. Un irrésistible instinct du vrai et du bien porte 1'« âme simplette qui ne sait rien » 8 sur les choses sensibles ; toute cette sensibilité, toutes ces sensations de l'enfant, par le chemin desquelles l'intelligence et la volonté vont lentement se manifester et s'éveiller, ont besoin d'une éducation, d'une instruction, d'une direction vigilante et indispensable pour éviter que ne soient compromis ou faussés l'éveil normal et le fonctionnement régulier de si nobles facultés spirituelles. Dès lors, le tout-petit, sous un regard de tendresse, sur une parole qui commande, devra apprendre à ne pas céder à toutes ses impressions, à discerner avec le développement de sa raison et à dominer la mobilité de ses sensations, à commencer, en un mot, sous la direction et les avertissements maternels, l'étape et le travail de son éducation.<br />
<br />
Etudiez le bambin dans son jeune âge. Si vous le connaissez bien, vous l'éduquerez bien ; vous ne prendrez pas sa nature à rebours ou de travers ; vous saurez le comprendre et céder mais pas mal à propos : les petits enfants des hommes n'ont pas tous en partage un bon naturel !<br />
<br />
Education de l'intelligence<br />
<br />
Eduquez l'intelligence de vos petits enfants. Ne leur donnez pas des idées fausses ni de fausses raisons des choses ; ne répondez pas à leurs questions, quelles qu'elles soient, par des badinages ou des affirmations menteuses auxquelles leur esprit se rend rarement ; mais profitez de ces interrogations pour diriger et soutenir, avec patience et amour, leur esprit qui ne désire pas autre chose que s'ouvrir à la possession de la vérité et apprendre à la conquérir par la marche encore naïve des premiers raisonnements et de la réflexion à leurs débuts. Qui ne saura jamais dire tout ce que tant de magnifiques intelligences humaines doivent à ces lointaines et confiantes questions et réponses de l'enfance, échangées au foyer domestique ?<br />
<br />
Education du caractère<br />
<br />
Eduquez le caractère de vos fils ; atténuez-en ou corrigez-en les défauts ; faites grandir et cultivez les bonnes qualités et rattachez-les à cette fermeté qui prélude à la solidité des résolutions dans le cours de la vie. Les bambins, en grandissant, sentant au-dessus d'eux, au fur et à mesure qu'ils commenceront à penser et à vouloir, une volonté paternelle et maternelle bonne, ignorant la violence et la colère, constante et forte, exempte de faiblesse ou d'incohérences, apprendront de bonne heure à voir en elle l'interprète d'une volonté plus haute, celle de Dieu, et, de cette façon, inscriront et enracineront dans leur âme ces premières et puissantes habitudes morales qui forment et soutiennent un caractère, prompt à se dominer dans les incommodités et les contrariétés les plus diverses, intrépide pour ne pas reculer ni devant la lutte ni en face du sacrifice, pénétré d'un profond sentiment du devoir chrétien.<br />
<br />
Education du cœur<br />
<br />
Eduquez le cœur. Quels destins, quelles dépravations, quels périls préparent trop souvent dans le cœur des enfants qui grandissent les admirations béates et les louanges, les sollicitudes imprudentes, les fades condescendances de parents aveuglés par un amour mal compris, qui habituent ces petits cœurs volages à voir toute chose se mouvoir et graviter autour d'eux, se soumettre à leurs volontés et à leurs caprices, et greffer ainsi en eux la racine d'un égoïsme effréné, dont les parents eux-mêmes seront plus tard les premières victimes ! Punition non moins fréquente que juste de ces calculs égoïstes qui poussent à refuser à un fils unique la joie de petits frères qui, participant avec lui à l'amour fraternel, l'auraient détourné de penser seulement à lui.<br />
<br />
Que de profondes et puissantes capacités d'affection, de bonté et de dévouement ou d'obéissance dorment dans le cœur du petit enfant ! Vous, ô mères, vous les éveillerez, les cultiverez, les dirigerez, les élèverez vers ceux qui doivent les sanctifier, vers Jésus, vers Marie ; la Mère céleste ouvrira ce cœur à la piété, lui enseignera à offrir au divin Ami des petits enfants, avec la prière, ses sacrifices et ses victoires pleins de candeur et d'innocence, à éprouver aussi dans sa main de la compassion pour les pauvres et pour les malheureux. O heureux printemps de l'enfance sans vents ni tempêtes !<br />
<br />
Education de la volonté pendant l'adolescence<br />
<br />
Mais poindra le jour où ce cœur d'enfant sentira s'éveiller en lui de nouvelles impulsions, de nouvelles inclinations qui troubleront le beau ciel du premier âge. Dans cette épreuve, rappelez-vous, ô mères, qu'éduquer le cœur c'est éduquer la volonté, pour qu'elle s'oppose aux pièges du mal et aux embûches des passions ; dans ce passage à la pureté consciente et victorieuse de l'adolescence, votre rôle est capital. Il vous appartient de préparer vos fils et vos filles à traverser avec hardiesse, comme celui qui passe au milieu des serpents, cette période de crise et de transformation physique sans rien perdre de la joie de l'innocence, mais en conservant ce naturel et spécial instinct de pudeur dont la Providence veut entourer leur front, comme un frein imposé aux passions trop portées à dépasser la mesure et à s'égarer. Ce sentiment de pudeur, frère plein de suavité du sentiment religieux, dans sa modestie spontanée, auquel on pense peu aujourd'hui, vous éviterez qu'il soit enlevé à vos enfants par le vêtement, par la façon de s'habiller, par une familiarité peu bienséante, par les spectacles et les représentations immorales ; au contraire, vous le rendrez toujours plus délicat et vigilant, sincère et pur. Vous tiendrez les yeux ouverts sur leurs démarches : vous empêcherez la candeur de leurs âmes de se souiller et de se corrompre au contact de compagnons déjà corrompus et corrupteurs ; vous leur inspirerez une haute estime et un amour jaloux de la pureté, en leur indiquant pour gardien fidèle la maternelle protection de la Vierge immaculée. Enfin, avec votre perspicacité de mères et d’éducatrices, grâce à la confiante ouverture de cœur que vous aurez su infuser à vos enfants, vous ne manquerez pas de chercher et de découvrir l'occasion et le moment où, certaines questions secrètes s'étant présentées à leur esprit, auront produit dans leurs sens des troubles particuliers. Alors, il appartiendra à vous pour vos filles, au père pour vos fils, de soulever — autant que cela vous apparaîtra nécessaire — avec précaution et délicatesse le voile de la vérité ; de donner une réponse prudente, juste et chrétienne à leurs questions et à leurs inquiétudes. Les révélations sur les mystérieuses et admirables lois de la vie, reçues de vos lèvres de parents chrétiens à l'heure opportune dans la mesure qui s'impose et avec toutes les précautions requises, seront écoutées avec respect et reconnaissance ; elles éclaireront les âmes des adolescents avec beaucoup moins de danger que s'ils les apprenaient au hasard des rencontres louches, des conversations clandestines, à l'école de compagnons peu sûrs et déjà trop au courant, par le moyen de lectures faites en cachette et d'autant plus dangereuses et pernicieuses que le secret enflamme davantage l'imagination et les sens. Vos paroles, si elles sont dites à propos et prudentes, deviendront une sauvegarde et un conseil au milieu des tentations de la corruption environnante, « une flèche qui est prévue arrive plus lentement »4.<br />
<br />
L'aide puissante de la religion<br />
<br />
Mais vous comprenez aussi que dans cette œuvre magnifique de l'éducation chrétienne de vos fils et de vos filles, la formation familiale, pour aussi sage et profonde quelle soit, ne suffit pas : elle doit se compléter et se parfaire par le puissant secours de la religion. Vous devez vous faire coopérateurs du prêtre dont, depuis le baptême, la paternité et l'autorité spirituelle et pastorale sur vos enfants se situent à vos côtés pour enseigner les premiers rudiments de piété et de catéchisme qui sont le fondement de toute éducation solide et dont il convient que vous, les premiers maîtres de vos bambins, ayez une connaissance suffisante et sûre. Comment pourriez-vous enseigner ce que vous ignorez ? Enseignez à aimer Dieu, Jésus-Christ, l'Eglise notre mère, les pasteurs de l'Eglise qui vous guident. Aimez le catéchisme et faites-le aimer à vos petits enfants : le catéchisme est le grand livre de l'amour et de la crainte de Dieu, de la sagesse chrétienne et de la vie éternelle.<br />
<br />
Précieux coopérateurs dans l'éducation des enfants<br />
<br />
Dans votre œuvre éducatrice qui s'étend à un grand nombre de choses, vous sentirez le besoin et l'obligation de recourir à d'autres auxiliaires ; choisissez-les chrétiens comme vous et avec tout le soin que mérite le trésor que vous leur confiez, c'est-à-dire la foi, la pureté, la piété de vos enfants. Mais quand vous les aurez choisis, ne vous regardez pas, par cela même, libres et dégagées de vos devoirs et de votre vigilance ; vous devrez collaborer avec eux. Que ces maîtres et maîtresses soient autant que vous voulez les éminents éducateurs que vous désirez ; ils ne réussiront à faire que peu de choses pour la formation de vos enfants si vous ne joignez pas votre action à la leur. Qu'obtiendrez-vous, dès lors, si votre action, au lieu d'aider et de fortifier l'œuvre de ces maîtres, venait à se dresser pour la contrarier et se mettre en travers ? Si vos faiblesses, si vos partis pris, par un amour qui ne sera que fait d'un égoïsme mesquin, détruisent au foyer familial ce qui a été bien fait à l'école, au catéchisme, dans les associations catholiques pour former le caractère et guider la piété de vos enfants ?<br />
<br />
Mais, dira peut-être quelque mère de famille, les enfants d'aujourd'hui sont si difficiles à gouverner ! Avec mon fils, avec ma fille, il n'y a rien à faire, on ne peut rien obtenir. C'est vrai ; à 12 ou 15 ans, beaucoup de garçons et de filles se montrent intraitables. Mais pourquoi ? Parce que, quand ils avaient 2 ou 3 ans, tout leur fut accordé et permis, tout leur fut passé comme bon. Il y a, il est vrai, des tempéraments ingrats et rebelles ; mais quel petit, fermé, têtu, insensible, cesse en raison de ces défauts d'être votre enfant ? L'aimeriez-vous moins que ses frères s'il était infirme ou estropié ? Dieu vous l'a confié aussi ; gardez-vous de le laisser devenir le rebut de la famille. Personne n'est si farouche qu'il ne s'adoucisse grâce aux soins, à la patience, à l'affection ; bien rare sera le cas où, sur ce terrain rocailleux et sauvage, vous ne réussirez pas à faire naître quelque fleur de soumission et de vertus, pourvu que vous ne risquiez pas de décourager dans cette petite âme orgueilleuse, par des sévérités partiales et déraisonnables, le fond de bonne volonté cachée en elle. Vous dénatureriez toute l'éducation de vos enfants, si jamais ils découvraient chez vous – et Dieu sait s'ils ont des yeux pour être capables de le faire – des prédilections pour des frères, des préférences dans les faveurs, des antipathies à l'égard de l'un ou de l'autre ; pour votre bien et celui de la famille, il est nécessaire que tous sentent, que tous voient dans vos sévérités pondérées comme dans vos doux encouragements et dans vos caresses, un égal amour qui ne fait pas de distinction entre eux, sinon pour corriger le mal et pour promouvoir le bien ; ne les avez-vous pas reçus également tous de Dieu ?<br />
<br />
Les éducatrices à côté des mères chrétiennes<br />
<br />
O mères de familles chrétiennes, c'est particulièrement à vous que se sont adressées Nos paroles. Mais avec vous, Nous voyons aujourd'hui autour de Nous une couronne de religieuses, de maîtresses, de déléguées, d'apôtres, de gardiennes, d'assistantes qui consacrent leurs fatigues et leur travail à l'éducation et à la rééducation de l'enfance ; elles ne sont pas mères selon la nature, par le sang, mais par leur élan d'amour envers les tout-petits, si chers au Christ et à son Epouse, l'Eglise. Oui, vous aussi qui vous faites éducatrices à côté des mères chrétiennes, vous êtes mères, parce que vous avez un cœur de mère dans lequel palpite la flamme de la charité que l'Esprit-Saint a répandu dans vos cœurs. Dans cette charité, qui est la charité du Christ qui vous pousse au bien, vous trouverez la lumière, le secours et votre programme qui vous rapproche des mères, des pères et de leurs enfants ; des rejetons aussi vigoureux de la société, espoirs des parents et de l'Eglise, vous faites une plus grande famille de vingt, de cent, de mille et mille bambins et petits enfants dont vous éduquez plus profondément et plus noblement l'intelligence, le caractère et le cœur, en les élevant dans cette atmosphère spirituelle et morale où brillent, avec la joie de l'innocence, la foi en Dieu et le respect pour les choses saintes, la piété filiale à l'égard des parents et le patriotisme. A vous vont, avec la reconnaissance des mères, Notre louange et Notre reconnaissance. Educatrices comme les mères, sœurs d'une maternité spirituelle que les lis couronnent, vous rivalisez avec elles et vous les surpassez dans vos écoles, dans vos asiles et dans vos collèges, dans vos associations.<br />
<br />
Conclusion<br />
<br />
Quelle mission incomparable et de nos jours hérissée de graves obstacles et difficultés, mères chrétiennes et chères filles — combien vous vous fatiguez à cultiver les jeunes pousses des oliviers familiaux — est votre mission dont Nous avons à peine évoqué la beauté ! Combien paraît grande dans Notre pensée une mère dans la maison familiale, elle qui est destinée par Dieu à être auprès d'un berceau, nourrice et éducatrice de ses bébés ! Etonnez-vous de son activité que, pourtant, on serait tenté d'estimer insuffisante pour le besoin, si la grâce divine toute-puissante n'était à ses côtés pour l'éclairer, la diriger, la soutenir dans les soucis et la fatigue de chaque jour ; si, pour collaborer avec elle dans la formation de ces âmes toutes jeunes elle n'avait pas inspiré et appelé d'autres éducatrices dont le cœur et le travail rivalisent d'amour maternel. Pour cela, en implorant du Seigneur qu'il vous remplisse toutes de la surabondance de ses faveurs et qu'il développe l'œuvre multiforme qui vous est confiée au profit de l'enfance, Nous vous accordons de tout cœur, gage des meilleures grâces célestes, Notre paternelle Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Le_Rosaire_%E2%80%93_8_octobre_1941_%E2%80%93&diff=2147Le Rosaire – 8 octobre 1941 –2012-01-31T17:27:23Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 8 octobre 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Venus à Rome pour demander la bénédiction du Père commun des fidèles sur vos nouveaux foyers, il faudrait, bien-aimés fils et filles, que vous en remportiez également une dévotion accrue envers le rosaire de la Vierge Marie, à laquelle est consacré ce mois d'octobre : tant de souvenirs rattachent cette dévotion à la piété des Romains et elle s'harmonise si bien avec toutes les circonstances de la vie domestique, avec tous les besoins et les dispositions particulières de chacun des membres de la famille !<br />
<br />
Au cours de vos visites aux sanctuaires de cette Ville éternelle, il vous est arrivé dans quelqu'une de ces antiques basiliques ou près de la tombe glorieuse d'un saint, de vous sentir plus vivement émus, et, non contents d'un passage rapide, vous vous êtes arrêtés pour une fervente prière à vos intentions communes : la prière qui montait alors spontanément à vos lèvres, n'était-ce pas souvent la récitation de quelque dizaine de votre rosaire ?<br />
<br />
Rosaire des jeunes époux, que vous récitez côte à côte à l'aurore de votre nouvelle famille, en face de la vie qui s'ouvre avec ses joyeux présages, mais aussi avec ses mystères et ses responsabilités. Il est si doux, dans la joie de ces premiers jours de pleine intimité, de mettre ainsi ses espérances et ses projets d'avenir sous la protection de la Vierge toute pure et toute-puissante, de la Mère d'amour et de miséricorde, dont les joies, les douleurs et les gloires repassent devant les yeux de votre âme au rythme des dizaines d'Ave Maria, évocation des exemples de la plus sainte des familles.<br />
<br />
Rosaire des enfants. Rosaire des petits qui tiennent les grains du chapelet entre leurs doigts mignons encore malhabiles et qui lentement répètent, avec application et effort, mais déjà avec amour, les Pater et Ave que la patience de leur mère leur a enseignés ; ils se trompent, il est vrai, et parfois ils hésitent, ils confondent ; mais il y a dans le regard qu'ils attachent sur l'image de Marie, de Celle en qui ils savent déjà reconnaître leur Mère du ciel, une candeur si pleine de confiance ! Ce sera ensuite le chapelet de la première communion, qui aura sa place bien à lui dans les souvenirs de ce grand jour ; beau souvenir, à condition cependant de rester ce qu'il doit être, non pas un vain objet de luxe, mais un instrument qui aide à prier et qui évoque la pensée de Marie.<br />
<br />
Rosaire de la jeune fille déjà grande, joyeuse et sereine, mais sérieuse en même temps et soucieuse de l'avenir. Elle confie à Marie, la Vierge Immaculée prudente et douce, les aspirations de dévouement qu'elle éprouve en son cœur ; elle prie pour celui qu'elle ne connaît pas encore, mais que Dieu connaît et que la Providence lui destine et qu'elle voudrait savoir pareil à elle-même, chrétien fervent et généreux. Ce chapelet qu'elle aime tant à réciter le dimanche avec ses compagnes, elle devra peut-être la semaine le dire durant les travaux du ménage, aux côtés de sa mère, ou entre les heures de travail au bureau où à la campagne, lorsqu'elle aura le loisir de se rendre à la chapelle voisine.<br />
<br />
Rosaire du jeune homme, apprenti, étudiant ou agriculteur, qui se prépare par un travail courageux à gagner un jour son pain et celui des siens ; chapelet qu'il garde précieusement sur soi, comme une protection de cette pureté qu'il veut porter intacte à l'autel de ses noces ; chapelet qu'il récite sans respect humain dans les loisirs favorables au recueillement et à la prière ; rosaire qui l'accompagne sous l'uniforme du soldat, au milieu des fatigues et des périls de la guerre ; rosaire qu'il serrera une dernière fois le jour où peut-être la patrie lui demandera le suprême sacrifice, et que ses compagnons d'armes découvriront avec émotion entre ses doigts glacés et couverts de sang.<br />
<br />
Rosaire de la mère de famille. Chapelet de l'ouvrière ou de la paysanne, simple et solide, usé par les ans, qu'elle ne pourra prendre en main que le soir peut-être, alors que, bien fatiguée de sa journée, elle trouvera encore dans sa foi et son amour la force de le réciter en luttant contre le sommeil, pour tous les siens, pour ceux surtout qui sont le plus exposés aux dangers de l'âme ou du corps, peut-être tentés ou affligés, ou qu'avec tristesse elle voit s'éloigner de Dieu. Rosaire de la grande dame, plus riche peut-être, mais souvent accablée de préoccupations et d'angoisses plus lourdes encore.<br />
<br />
Rosaire du père de famille, de l'homme de travail et d'énergie qui ne manque jamais d'emporter son chapelet avec son stylo et son calepin ; qui, grand professeur, ingénieur renommé, clinicien célèbre, avocat éloquent, artiste de génie, agronome expert, ne rougit point de réciter son chapelet avec une dévote simplicité durant les brefs instants qu'il arrache à la tyrannie du travail professionnel pour aller retremper son âme de chrétien dans la paix d'une église, au pied du tabernacle.<br />
<br />
Rosaire des vieux. Vieille grand-mère qui égrène, infatigable, son chapelet dans ses doigts engourdis, au fond de l'église, aussi longtemps qu'elle s'y peut traîner sur ses jambes raidies, ou durant les longues heures d'immobilité forcée dans le fauteuil, au coin du feu. Vieille tante qui a consacré toutes ses forces au bien de la famille et qui, maintenant qu'approche le terme d'une vie toute dépensée en bonnes œuvres, fait alterner, inépuisable de dévouement, les petits services qu'elle trouve encore le moyen de rendre, avec des dizaines et des dizaines d'Ave qu'elle dit sans relâche sur son chapelet.<br />
<br />
Rosaire du mourant, serré aux heures suprêmes comme un dernier appui entre ses mains tremblantes, alors qu'autour de lui les siens le récitent à voix basse ; chapelet qui restera sur sa poitrine avec le crucifix, témoin de sa confiance en la miséricorde de Dieu et en l'intercession de la Vierge, de cette confiance dont était rempli ce cœur qui a fini de battre.<br />
<br />
Rosaire, enfin, de la famille tout entière. Rosaire que tous récitent en commun, petits et grands ; qui réunit le soir aux pieds de Marie ceux que le travail de la journée avait séparés et dispersés ; qui les unit, ravivant les souvenirs dans une fervente prière, aux absents et aux disparus ; qui consacre ainsi le lien qui les rassemble tous sous l'égide maternelle de la Vierge Immaculée, Reine du Saint Rosaire.<br />
<br />
A Lourdes comme à Pompéi, Marie a voulu montrer par d'innombrables faveurs à quel point cette prière lui est chère. Elle y invitait sa confidente Bernadette, elle accompagnait les Ave de l'enfant, elle égrenait avec elle lentement son chapelet, brillant comme les roses d'or qui éclataient à ses pieds. Répondez, chers jeunes époux, répondez à ces invites de votre Mère du ciel : assurez à son rosaire une place d'honneur dans les prières de vos nouvelles familles. Familles que Nous sommes heureux de bénir paternellement, et avec elles tous nos autres bien aimés fils et filles ici présents, au nom du Seigneur.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=L%27autorit%C3%A9_dans_la_Famille_%E2%80%93_suite_%E2%80%93_24_Septembre_1941_%E2%80%93&diff=2146L'autorité dans la Famille – suite – 24 Septembre 1941 –2012-01-31T17:26:35Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 24 septembre 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Chers jeunes époux, avec quelle joie et avec quelle espérance n'avez-vous pas, au pied des autels et du prêtre, inauguré votre nouvelle famille ! Or un double lien, pour l'ordinaire, enserre la famille dans sa croissance et son développement : le lien qui unit étroitement sous un même toit, d'une part l'époux et l'épouse, d'autre part les parents et les enfants. Le premier vagissement du petit au berceau ravit la mère, transporte le père, réjouit les parents et amis, et voilà qu'à cette aurore d'une première vie se manifeste pour la première fois l'autorité du père et puis de la mère : ils ont conscience de leur obligation d'assurer le baptême à leur enfant, et ils s'empressent de remplir ce devoir, afin que ce sacrement fasse de lui un fils de Dieu, efface en lui le péché originel, lui communique la vie de la grâce, lui ouvre les portes du paradis, car « le royaume des cieux est pour les petits » (Mt 19, 14). Comme une telle pensée doit ennoblir le père fier de sa foi dans le Christ, et réconforter la mère soucieuse du salut de ses enfants ! Ainsi tout enfant qui reçoit le sceau de l'adoption divine et boit à la source de l'eau surnaturelle a le bonheur de commencer dans l'Eglise le voyage de la vie, pour traverser les incertitudes et les périls de ce monde.<br />
<br />
Que deviendra cet enfant ? Quis, putas, puer iste erit (Lc 1,66). Les enfants sont des roseaux agités par le vent ; ce sont des fleurs délicates et il ne faut qu'un zéphir pour ravir un pétale à leur corolle ; ce sont des plates-bandes vierges où Dieu a jeté des semences de bonté que menacent les sens et les pensées du cœur humain, de ce cœur que portent au mal dès l'adolescence (Gn 8, 21) l'orgueil de la vie, la concupiscence de la chair et la concupiscence des yeux (cf. I Jn 2, 16). Qui donc affermira ces roseaux ? Qui donc défendra ces fleurs ? Qui donc cultivera ces plates-bandes et y fera germer, contre les embûches du mal, les semences de la bonté ? Avant tout, l'autorité qui régit la famille et les enfants : votre autorité, ô parents !<br />
<br />
Les pères et mères se plaignent souvent de nos jours de ne plus réussir à plier leurs enfants à l'obéissance. Enfants capricieux qui n'écoutent personne ; adolescents qui dédaignent toute direction ; jeunes gens et jeunes filles impatients de tout conseil, sourds à tout avertissement, ambitieux de prix dans les jeux et les concours, entêtés à n'agir qu'à leur guise et persuadés d'être seuls à bien comprendre les nécessités de la vie moderne. En un mot, dit-on, la nouvelle génération — à part tant de belles et chères exceptions ! — n'est guère disposée pour l'ordinaire à s'incliner devant l'autorité du père et de la mère.<br />
<br />
Quelle est la raison de cette attitude indocile ? Celle qu'on allègue de nos jours en général, c'est que les enfants, bien souvent, n'ont plus le sens de la soumission, du respect dû aux parents et à leurs paroles ; dans l'atmosphère d'ardente fierté juvénile où ils vivent, tout tend à détruire en eux la déférence envers les parents et à les émanciper ; tout ce qu'ils voient et entendent autour d'eux finit par accroître, enflammer, exaspérer leur inclination naturelle, et non encore domptée, à l'indépendance, leur mépris du passé, leur soif de l'avenir.<br />
<br />
Si nous parlions en ce moment à des enfants ou à des jeunes gens, notre dessein serait d'examiner et de peser ces causes de leur manque d'obéissance et de soumission. Mais c'est à vous, jeunes époux, que nous adressons la parole, à vous qui, bientôt, aurez à exercer l'autorité paternelle et maternelle, et nous voulons attirer votre attention sur un autre aspect de cette question si importante.<br />
<br />
L'exercice normal de l'autorité ne dépend pas seulement de ceux qui doivent obéir, mais aussi, et dans une large mesure, de ceux qui ont à commander. En d'autres termes : autre chose est le droit à l'exercice de l'autorité, le droit de donner des ordres, et autre chose la supériorité morale qui rend effective l'autorité et la rehausse, et qui réussit à s'imposer aux autres et à obtenir en fait leur obéissance.<br />
Le droit de donner des ordres, Dieu vous l'accorde par l'acte même qui vous rend père et mère. La seconde prérogative, la supériorité morale, il vous faut l'acquérir et la conserver ; vous pouvez la perdre, et vous pouvez l'augmenter. Or le droit de commander à vos fils n'obtiendra d'eux que fort peu de chose s'il n'est accompagné de ce pouvoir, de cette autorité sur eux de votre propre personne, autorité qui vous assurera une obéissance effective. De quelle manière, par quels sages moyens pouvez-vous acquérir, conserver et accroître ce pouvoir moral ?<br />
<br />
A certaines personnes Dieu accorde le don naturel du commandement, le don de savoir imposer leur volonté à autrui. C'est un don précieux. Réside-t-il tout entier dans l'esprit, ou pour une grande part dans la personne, le comportement, la parole, le regard, le visage ? Il est souvent difficile de le dire. Mais c'est aussi un don redoutable. N'en abusez point, si vous le possédez, dans vos rapports avec vos enfants : vous risqueriez d'emprisonner leur âme dans la crainte et d'avoir, au lieu de fils aimants, des esclaves. Tempérez cette force par l'effusion d'un amour qui réponde à leur affection, par une bonté douce, patiente, empressée et encourageante. Ecoutez le grand apôtre saint Paul vous dire : Patres, nolite ad indignationem provocare filios vestros, ut non pusillo animo fiant, « Vous, pères, n'irritez point vos enfants, de peur qu'ils ne se découragent » (Col 3, 21). Parents, souvenez-vous bien de ceci : la rigueur n'est digne d'éloge que lorsque le cœur est doux.<br />
<br />
Joindre la douceur à l'autorité, c'est vaincre et triompher en cette lutte où vous engage votre mission de parents. Au reste, pour tous ceux qui commandent, l'exercice de leur autorité ne sera bienfaisant que s'ils savent d'abord se maîtriser eux-mêmes, discipliner leurs passions et leurs impressions.<br />
<br />
L'autorité n'est forte et respectée que lorsque les subordonnés savent qu'elle n'a pour mobiles que la raison, la foi, la conscience du devoir ; ils se rendent compte alors qu'ils ont à donner au devoir de l'autorité la réponse de leur propre devoir.<br />
<br />
Si les ordres que vous donnez à vos enfants et les réprimandes que vous leur adressez procèdent des impressions du moment, d'un mouvement d'impatience, d'une imagination ou d'un sentiment aveugles ou irréfléchis, vas ordres ne manqueront point d'être la plupart du temps arbitraires, incohérents, injustes peut-être, et inopportuns. Aujourd'hui, vous serez envers ces pauvres petits d'une exigence déraisonnable, d'une impitoyable sévérité ; demain, vous laisserez tout passer. Vous commencerez par leur refuser une petite chose, et, le moment, d'après, fatigués de leurs pleurs ou de leur bouderie, vous la leur accorderez avec des démonstrations de tendresse, pressés d'en finir avec une scène qui vous irrite les nerfs.<br />
<br />
Pourquoi donc ne savez-vous pas dominer les mouvements de votre humeur, mettre un frein à vos caprices, vous conduire vous-mêmes, alors que vous entreprenez de conduire vos enfants ? Ne vous sentez-vous pas entièrement maître de vous-mêmes ? Remettez à une heure plus opportune la réprimande projetée, la punition que vous croyez devoir infliger. La fermeté apaisée et tranquille de votre esprit donnera à votre parole et au châtiment une tout autre efficacité, une influence plus heureuse et plus d'autorité réelle que les éclats d'une passion indisciplinée.<br />
<br />
N'oubliez jamais que les enfants, même les plus petits, sont tout yeux à observer et à noter, et qu'ils remarqueront bien vite les changements de votre humeur. Dès le berceau, dès qu'ils parviendront à distinguer leur maman d'une autre femme, ils se rendront compte bien vite du pouvoir qu'exercent sur des parents faibles un caprice ou des pleurs, et, dans leur innocente petite malice, ils ne craindront point d'en abuser.<br />
<br />
Gardez-vous donc de tout ce qui pourrait diminuer votre autorité auprès d'eux. Gardez-vous de gaspiller cette autorité par l'habitude des recommandations et observations continuelles et insistantes, qui finissent par les lasser ; ils feront la sourde oreille et n'y attacheront plus aucune importance. Gardez-vous de vous jouer de vos enfants et de les tromper en alléguant des raisons ou des explications fallacieuses et sans consistance, distribuées au hasard, pour vous tirer d'embarras et vous défaire de questions importunes. S'il ne vous paraît point opportun de leur exposer les vraies raisons d'un ordre ou d'un fait, il vaudra mieux pour vous faire appel à leur confiance en vous et à leur amour. Ne faussez point la vérité ; au besoin taisez-la ; vous ne soupçonnez peut-être même pas les troubles et les crises qui peuvent s'élever dans ces petites âmes, le jour où elles viennent à connaître que l'on a abusé de leur crédulité naturelle.<br />
<br />
Gardez-vous aussi de laisser transparaître le moindre signe de désaccord, la moindre divergence de vues sur l'éducation de vos enfants : ils remarqueraient bien vite la possibilité de se servir de l'autorité de la mère contre l'autorité du père, ou du père contre la mère, et ils résisteraient difficilement à la tentation de profiter de cette désunion pour satisfaire toutes leurs fantaisies. Gardez-vous enfin d'attendre que vos enfants aient grandi en âge pour exercer sur eux votre autorité, avec bonté et avec calme, il est vrai, mais aussi avec fermeté et courage, et sans vous laisser fléchir par aucune scène de pleurs ou de colère : dès le début, dès le berceau, dès les premières lueurs de leur petite raison, faites en sorte qu'ils éprouvent et sentent sur eux des mains caressantes et délicates, mais sages aussi et prudentes, vigilantes et énergiques.<br />
<br />
Que votre autorité soit sans faiblesse, mais qu'elle naisse de l'amour, qu'elle soit pénétrée d'amour et soutenue par l'amour. Soyez les premiers maîtres et les premiers amis de vos enfants. Si c'est l'amour paternel et maternel qui inspire vos ordres, — un amour chrétien à tous égards, et non pas une complaisance plus ou moins inconsciemment égoïste — vos enfants en seront touchés, et ils lui répondront du plus profond de leur cœur, sans que vous ayez besoin de beaucoup de paroles ; car le langage de l'amour est plus éloquent dans le silence de l'action que dans les accents des lèvres. Mille petits signes, une inflexion de la voix, un geste imperceptible, une légère expression du visage, un geste d'approbation leur révéleront mieux que toutes les protestations d'amour, toute l'affection qui anime un refus affligeant, toute la bienveillance qui se cache en une recommandation ennuyeuse ; et alors, la parole de l'autorité apparaîtra à leur cœur, non pas comme un fardeau pesant ou un joug odieux à secouer le plus tôt possible, mais comme la suprême manifestation de votre amour.<br />
<br />
Mais ne faut-il pas que l'amour s'accompagne du bon exemple ? Comment donc les enfants, par nature prompts à imiter, pourront-ils apprendre à obéir, s'ils voient leur mère en toute occasion ne faire aucun cas des ordres du père ou se plaindre de lui ? Comment les enfants apprendront-ils à obéir, s'ils entendent continuellement au foyer d'irrespectueuses critiques des autorités ? Comment apprendront-ils à obéir, s'ils constatent que leurs parents sont les premiers à manquer aux commandements de Dieu ou de l'Eglise ?<br />
<br />
Il faut, au contraire, qu'ils aient sous les yeux un père et une mère qui, dans leur manière de parler et d'agir, donnent l'exemple du respect des autorités légitimes et d'une constante fidélité à leurs propres devoirs. Un exemple si édifiant leur apprendra, avec plus d'efficacité que la plus étudiée des exhortations, la véritable obéissance chrétienne et la manière de la pratiquer à l'égard de leurs parents.<br />
<br />
Soyez bien persuadés, jeunes époux, que le bon exemple est l'héritage le plus précieux que vous puissiez donner et laisser à vos enfants. Il est le souvenir ineffaçable et lumineux d'un trésor d'œuvres et de faits, de paroles et de conseils, d'actes pieux et de démarches vertueuses, qui restera toujours vivant dans leur mémoire et dans leur esprit ; souvenir émouvant et cher qui, aux heures de doute et d'hésitation entre le mal et le bien, entre le danger et la victoire, leur rappellera vos personnes. Aux heures troubles, quand le ciel s'assombrira, vous leur réapparaîtrez dans une vision de lumière qui éclairera et dirigera leur chemin ; elle leur rappellera la voie que vous avez parcourue dans le travail et les soucis, rançon du bonheur d'ici-bas et de là-haut.<br />
<br />
Est-ce là un rêve ? Non ! la vie que vous commencez avec votre nouvelle famille n'est pas un rêve : c'est un sentier où vous cheminez, investis d'une dignité et d'une autorité qui doivent être pour les enfants de votre sang une école et un apprentissage.<br />
<br />
Daigne le Père céleste, qui, en vous appelant à participer à la grandeur de sa paternité, vous a aussi communiqué son autorité, daigne le Père céleste vous donner de l'exercer à son imitation, dans la sagesse et dans l'amour ! C'est en implorant de lui cette grâce, pour vous et pour tous les parents chrétiens, que Nous vous donnons avec toute l'affection de Notre cœur paternel la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Discussion:Magist%C3%A8re_pontifical_sur_la_famille&diff=2145Discussion:Magistère pontifical sur la famille2012-01-31T13:01:00Z<p>Salettensis : </p>
<hr />
<div>bonjour<br />
à propos de la liste des ''Discours aux jeunes époux par Pie XII''<br />
je vais essayer de la compléter.<br />
<br />
Faut il indiquer dans le titre un numéro d'ordre<br />
et si oui sous quelle forme : <br />
en rajoutant à la fin 50/69<br />
ou romaine : L<br />
ou au début en lettres : cinquantième discours<br />
ou discours 50 aux jeunes époux<br />
ou rien du tout.<br />
<br />
ou la date de l'audience peut être ?<br />
<br />
en attendant un avis je me conforme à ce qui est déjà fait.<br />
[[Utilisateur:Salettensis|ΦΧΦΠ -- divinæ naturæ consortes]] 30 janvier 2012 à 21:52 (CET)<br />
<br />
<br />
Je crois bien de continuer comme vous avez commencé : les discours les uns à la suite des autres, avec la date dans le titre. Le classement chronologique permet de les retrouver facilement. Un n° d'ordre ne changer pas grand'chose pour le lecteur.<br />
<br />
En revanche, vous pouvez renommer (et reclasser !) les premiers de la liste, qui ont été faits autrefois sans la date.<br />
<br />
Par ailleurs, cette page est réservée aux discours sur le thème de la famille : dans autres textes (en bas) il serait bien d'ajouter le très important discours aux sages-femmes.<br />
<br />
Le webmestre [[Utilisateur:Abbé Olivier]] 31 janvier 2012 à 11:10<br />
<br />
d'accord monsieur l'abbé<br />
je ne sais pas comment renommer les pages déjà crées.<br />
<br />
je compléterai -à l'occasion- des audiences de Pie XII tenues par la suite sur le sujet (il y a matière)<br />
[[Utilisateur:Salettensis|ΦΧΦΠ -- divinæ naturæ consortes]] 31 janvier 2012 à 13:50 (CET)</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_h%C3%A9ro%C3%AFsmes_des_%C3%A9poux_chr%C3%A9tiens_%E2%80%93_20_ao%C3%BBt_1941_%E2%80%93&diff=2144Les héroïsmes des époux chrétiens – 20 août 1941 –2012-01-31T12:58:20Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 20 aout 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
A la vue de cette foule nombreuse et pieuse de jeunes époux chrétiens réunis autour de Nous, Nous exultons et Nous rendons grâce à Dieu, auteur des dons précieux de la foi, de l'espérance et en particulier de la confiance qu'il plaît à Notre affection paternelle d'invoquer sur vos personnes et vos désirs. Si la divine pitié pour la misère humaine donne à Notre prière force et puissance, la bénédiction qui descend de Dieu, elle, est toute-puissante : à un seul mot de Dieu, voilà que du néant sortent le ciel et la terre, des ténèbres le soleil, de la terre et des eaux la multitude des vivants. Alors se lève de la poussière, par l'opération divine, l'homme, pour recevoir un esprit immortel (Gn 2, 7), comme un souffle de la bouche du Créateur, et pour écouter avec sa compagne semblable à lui et tirée de son flanc ce commandement qui est une bénédiction : « Croissez et multipliez sur la terre » (Gn 1, 28). Quant à vous, jeunes époux, qui avez cru au nom du Christ, notre Sauveur et Rédempteur, vous avez été, aux pieds des autels, bénis en ce nom, afin que par vous s'accroisse le peuple des enfants de Dieu et s'accomplisse le nombre des élus. C'est à ces hautes fins du mariage que le Seigneur a daigné vous appeler par le lien indissoluble dont il a uni vos cœurs et vos vies.<br />
<br />
Rien donc d'étonnant, selon une pensée qu'insinuait notre dernière allocution, qu'un état si noble exige des actes héroïques : héroïsmes extraordinaires de situations exceptionnelles, héroïsmes imposés par la vie quotidienne ; héroïsmes souvent cachés et qui n'en sont pas moins admirables. Nous voudrions aujourd'hui attirer votre attention plus particulièrement là-dessus.<br />
<br />
Aux temps modernes comme aux premiers siècles du christianisme, dans les pays où sévissent les persécutions religieuses ouvertes, ou sournoises et non moins dures, les plus humbles fidèles peuvent, d'un moment à l'autre, se trouver dans la dramatique nécessité de choisir entre leur foi, qu'ils ont le devoir de conserver intacte, et leur liberté, leurs moyens de subsistance ou même leur propre vie. Mais aux époques normales elles-mêmes, dans les conditions ordinaires des familles chrétiennes, il arrive parfois que les âmes se voient dans l'alternative de violer un imprescriptible devoir ou de s'exposer, dans leur santé, dans leurs biens, dans leurs positions familiale et sociale, à des sacrifices et à des risques douloureux et pressants : elles se voient mises dans la nécessité d'être héroïques et de se montrer héroïques, si elles veulent rester fidèles à leurs devoirs et demeurer dans la grâce de Dieu.<br />
<br />
Quand Nos prédécesseurs, et tout spécialement Pie XI dans son encyclique [[''Casti connubii'']], rappelaient les lois saintes et inéluctables de la vie matrimoniale, ils se rendaient parfaitement compte que dans bien des cas l'inviolable observation de ces lois exige de l'héroïsme. Qu'il s'agisse de respecter les fins que Dieu a établies pour le mariage ; qu'il s'agisse, pour un cœur inquiet, de résister aux passions et sollicitations ardentes et séductrices qui lui suggèrent de chercher ailleurs ce qu'il n'a pas ou croit n'avoir pas trouvé dans sa légitime union aussi pleinement qu'il l'espérait ; ou bien qu'il s'agisse, pour ne pas briser ou relâcher l'union des cœurs et de l'amour mutuel, de savoir pardonner, de savoir oublier un différend, une offense, ou un heurt peut-être grave : que de drames intimes déroulent leurs amertumes derrière le voile de la vie quotidienne ! Que d'héroïques sacrifices cachés ! Que d'angoisses morales pour vivre sous le même toit et garder à sa place et à son devoir une constance de chrétien !<br />
<br />
Quelle force d'âme n'est pas exigée souvent par cette vie de chaque jour ? Il faudra, chaque matin, reprendre le même travail, rude peut-être et monotone ; il conviendra, pour la paix, de supporter le sourire aux lèvres, aimablement, joyeusement, les défauts réciproques, les oppositions jamais aplanies, les petites divergences de goûts, d'habitudes, d'idées, auxquelles donne lieu souvent la vie commune ; il faudra, parmi les menues difficultés et les petits incidents, inévitables souvent, garder intacts le calme et la bonne humeur ; il s'agira, dans une froide rencontre, de savoir se taire, de savoir retenir les plaintes à temps, de savoir changer de ton et adoucir sa parole qui, si elle ne se maîtrisait, détendrait des nerfs irrités, mais créerait dans le foyer domestique une atmosphère pénible. Que de force d'âme requise en toutes ces occasions ! Ce sont là mille détails infimes de la vie quotidienne, mille instants qui passent ; chacun est bien peu de chose, presque rien ; mais ils se succèdent, ils s'accumulent, ils finissent par devenir pesants et ils contribuent pour une bonne part à entraver et à paralyser, dans une souffrance mutuelle des époux, la paix et la joie du foyer.<br />
<br />
Et pourtant, la femme, l'épouse, la mère entend être la source de la joie et de la paix de la famille, elle en veut être l'aliment et le soutien spécial. N'est-ce pas elle qui crée et resserre le lien d'amour entre le père et les enfants ? N'est-ce pas elle qui par son affection résume pour ainsi dire en elle-même la famille tout entière ? N'est-ce pas elle qui la surveille, qui la garde, qui la protège et la défend ? Elle est le chant du berceau, le sourire des bébés roses et frétillants, et le sourire des bébés en pleurs et infirmes, la première maîtresse qui montre à ses enfants le ciel, qui apprend à ses fils et filles à s'agenouiller au pied de l'autel, et qui parfois leur inspire les pensées et les désirs les plus sublimes.<br />
<br />
Donnez-Nous une mère qui sente sa maternité spirituelle non moins vivante en son cœur que sa maternité naturelle : Nous verrons en elle l'héroïne de la famille, la femme forte que vous pouvez célébrer avec le chant du roi Lemuel au livre des Proverbes : « La force et la grâce sont sa parure, et elle se rit de l'avenir. Elle ouvre la bouche avec sagesse et les bonnes paroles sont sur sa langue. Elle surveille les sentiers de sa maison et elle ne mange pas le pain de l'oisiveté. Ses fils se lèvent et la proclament heureuse ; son époux se lève et lui donne des éloges » (Pr 31,25-28).<br />
<br />
Laissez-Nous donner d'autres éloges encore à la mère et à la femme forte : l'éloge de l'héroïsme dans la douleur. L'épreuve, l'affliction et la peine la trouvent très souvent plus courageuse, plus intrépide et résignée que l'homme, parce qu'elle sait tirer de l'amour la science de la douleur. Considérez les saintes femmes de l'Evangile qui suivent le Christ et l'assistent de leur présence, qui l'accompagnent de leurs lamentations sur la voie du Calvaire et jusqu'à la croix (Lc 8, 1-13 ; Lc 23, 27). Le Cœur du Christ n'est que miséricorde pour les larmes de la femme : elles en ont fait l'expérience, les sœurs éplorées de Lazare, la veuve de Naïm, et Madeleine tout en larmes auprès de son sépulcre. Aujourd'hui même, en ces heures où le sang coule, Dieu sait à combien de veuves de Naïm le Rédempteur manifeste sa bonté : sans aller jusqu'à ressusciter leur fils tombé à la guerre, il verse au cœur de combien de mères le baume de sa parole réconfortante : ''Noli flere'', « ne pleure pas » (Lc 7, 13).<br />
<br />
Bien-aimés fils et filles, n'hésitez point : tournez-vous avec confiance vers les cimes héroïques du voyage que vous commencez. Il a toujours été vrai que c'est des menues occupations qu'on passe aux grandes entreprises et que la vertu est la fleur qui couronne une plante arrosée par les efforts assidus de chaque jour. C'est là l'héroïsme quotidien de la fidélité aux devoirs habituels et communs de la vie ordinaire ; et c'est là l'héroïsme qui forge et aguerrit les hommes, qui les élève et les trempe pour les jours où Dieu leur demandera un héroïsme extraordinaire.<br />
<br />
C'est là, et non ailleurs, qu'il faut aller chercher la source de cet héroïsme extraordinaire. Dans les événements de la vie familiale comme en toutes les circonstances de la vie humaine, l'héroïsme a sa racine principale dans le sentiment profond et souverain du devoir, du devoir qui ne souffre ni marchandage ni compromis et qui doit l'emporter en toutes choses et sur toutes choses. Ce sentiment nous enseigne comment la volonté divine clairement manifestée ne souffre aucune discussion et qu'elle exige de chacun qu'il s'incline devant elle ; ce sentiment, par-dessus tout, nous fait comprendre que cette volonté divine est la voix d'un amour infini à notre égard ; ce n'est pas en un mot le sentiment d'un devoir abstrait ou d'une loi tyrannique, inexorable, hostile, qui écraserait notre liberté de vouloir et d'agir : c'est le sentiment d'une loi qui répond et se plie aux exigences d'un amour, aux exigences d'une amitié infiniment généreuse qui domine et gouverne les multiples vicissitudes de notre vie d'ici-bas.<br />
<br />
Ce sentiment chrétien si puissant du devoir se développera et se renforcera en vous, bien-aimés fils et filles, par votre persévérante fidélité aux plus humbles tâches et obligations de chacune de vos journées. Par là, les menus sacrifices, les petites victoires sur vous-mêmes se multiplieront, affermissant de plus en plus en vous la vertueuse habitude de ne pas tenir compte des impressions, impulsions et répugnances qui peuvent se présenter sur le sentier de votre vie, lorsqu'il s'agit d'un devoir, d'une volonté de Dieu à accomplir. L'héroïsme n'est pas le fruit d'un jour et il ne mûrit pas en une matinée ; c'est par de longues ascensions que se forment et s'élèvent les grandes âmes, c'est par là qu'elles se trouvent prêtes, au moment où l'occasion s'en présente, aux gestes magnifiques et aux suprêmes triomphes qui nous remplissent d'admiration.<br />
<br />
Afin que grandissent dans vos âmes ce sentiment chrétien du devoir et cette joyeuse et courageuse confiance, Nous vous accordons de tout cœur, en gage des grâces divines les plus abondantes, Notre Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_h%C3%A9ro%C3%AFsmes_de_la_vie_chr%C3%A9tienne_%E2%80%93_13_ao%C3%BBt_1941_%E2%80%93&diff=2143Les héroïsmes de la vie chrétienne – 13 août 1941 –2012-01-31T12:57:16Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 13 aout 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Que de fois, chers jeunes époux, avez-vous entendu répéter que « la vie de l'homme sur la terre est un temps de service militaire » (Jb 7, 1) ! Si la vie de l'homme sur la terre est un temps de service militaire, l'homme étant un composé d'esprit et de corps, cette vie se déroulera sur un double terrain : lutte physique dans le domaine de la matière et combat spirituel à l'intérieur de l'esprit. Ces deux genres de combats ont l'un et l'autre leurs périls, leurs épreuves, leurs vertus, leurs héros et leurs actes héroïques, leurs triomphes et leurs couronnes d'héroïsme.<br />
<br />
Les luttes corporelles sont manifestes ; les luttes de l'esprit sont souvent cachées : batailles, victoires et couronnes secrètes que voit Dieu seul et que Dieu seul récompense. Il est seul à connaître les épreuves et les mérites qui exaltent sur les autels les héros de la vertu.<br />
<br />
Aujourd'hui, sur les champs de bataille, dans les airs et sur mer, que d'actes héroïques resplendissent d'une force d'âme qui affronte les périls de la mort ! Héroïsmes brillants de jeunes soldats et d'intrépides capitaines, de cohortes et de légions, de prêtres qui, dans la furieuse mêlée, réconfortent blessés et mourants, d'infirmiers et d'infirmières qui soignent les maladies et les plaies ! Il est vrai que toute guerre entre les peuples afflige et fait frémir tous les hommes bien nés qu'anime la charité du Christ, cette charité qui embrasse amis et adversaires et qui donne à toute une vie le mouvement et la flamme ; mais on ne saurait nier que ces cruelles et sanglantes luttes, avec les austères devoirs qu'elles imposent aux combattants et aux non-combattants, suscitent des heures et des moments d'épreuves lumineuses ; et à ces heures-là se révèle la grandeur, souvent insoupçonnée et inattendue, d'une foule d'âmes héroïques qui sacrifient tout, jusqu'à la vie, pour accomplir les devoirs de la conscience chrétienne.<br />
<br />
Mais ce serait une erreur de croire que la grandeur d'âme, que les actes héroïques sont des vertus réservées, telles des fleurs rares, aux seuls champs de bataille, aux seuls temps de guerre, de catastrophes, de cruelles persécutions, de ruines sociales et politiques. A côté de ces héroïsmes plus manifestes et plus visibles, de ces actes de magnanimité, de ces brillants coups d'audace, germent et croissent au fond des vallées et des campagnes, dans les avenues et les ombres des villes, voilés dans le train incolore de la vie quotidienne, bien des actes non moins héroïques, qui jaillissent dans le silence de cœurs non moins grands et forts, et qui ne craindraient point la comparaison avec les beaux faits d'armes proposés à l'admiration publique.<br />
<br />
N'est-il pas héroïque l'homme d'affaires, patron d'une grande industrie, qui se voit pourchassé et acculé à la ruine par des adversités imprévues, et qui refuse de chercher l'assurance du salut dans les expédients que le monde facile excuse et absout lorsque le succès les couronne, mais que la morale chrétienne n'admet point ; n'est-il pas héroïque, l'homme d'affaires qui rentre en lui-même, interroge sa conscience, n'en esquive point la réponse, et qui, en chrétien fidèle, rejette un moyen contraire à la justice, préférant la ruine et la misère plutôt que d'offenser son Dieu et son prochain.<br />
<br />
N'est-elle pas héroïque la jeune fille pauvre qui s'épuise de travail, moyennant un maigre salaire, pour donner un morceau de pain à sa vieille mère et à ses frères orphelins, mais qui repousse toute facile condescendance et qui a le courage de garder son honneur et son cœur, intrépide à refuser les faveurs d'un patron immoral et dédaigneuse des gains abondants et mal acquis qui la tireraient de la gêne ?<br />
<br />
N'est-elle pas héroïque l'adolescente qui, martyre de sa candeur et empourprée de son propre sang, offre à Dieu le lis de sa virginité ?<br />
<br />
Ce sont là des héroïsmes de justice, des héroïsmes de chrétienne dignité féminine, des héroïsmes dignes des anges, des héroïsmes secrets qui rejoignent ces héroïsmes de foi, de confiance en Dieu, de patience, de charité qui fleurissent dans les hôpitaux civils et militaires, sur les sentiers des missionnaires du Christ en terres infidèles, bref partout où la force d'âme s'unit à l'amour de Dieu et du prochain.<br />
<br />
Qui donc s'étonnerait que dans l'ombre même des foyers se cache l'héroïsme familial et que la vie des époux connaisse, elle aussi, ses secrets héroïsmes : héroïsmes extraordinaires de situations durement tragiques, et souvent ignorés du monde ; héroïsmes quotidiens de sacrifices qui se suivent en une chaîne ininterrompue et se renouvellent à chaque instant ; héroïsmes du père, héroïsmes de la mère, héroïsmes de l'un et l'autre ?<br />
<br />
Nous Nous réservons de prendre les héroïsmes des époux chrétiens comme sujet spécial d'une des prochaines allocutions, nécessairement brèves, que Nous prononcerons aux audiences générales. Mais Nous ne voudrions pas, bien-aimés fils et filles, qu'à Nous entendre parler d'héroïsmes nécessaires, de sacrifices héroïques qui vous attendent, vos cœurs se troublent, à l'heure même où l'union sacrée que vous venez de contracter devant Dieu et son ministre les remplit de joie. Nous tenons au contraire que Nos paroles augmentent votre joie par la considération même de votre union : le Christ ne l'a-t-il pas élevée à la dignité de sacrement ? N'est-elle point devenue par là une source intarissable de grâces puissantes et toujours prêtes à vous donner lumière et force en tous les sacrifices, même extraordinaires, que Dieu pourra vous imposer ? Etroit et inviolable, le lien du mariage est signe et symbole de l'union indissoluble du Christ avec l'Eglise (cf. Eph. Ep 5, 32) ; et le mariage chrétien est une source de grandeur et de pérennité non moins pour l'Eglise que pour le peuple fidèle. L'union des époux chrétiens est aussi une voie qui conduit à la sainteté, et l'Eglise, avec le peuple fidèle, en exalte et en vénère les héros dans ses temples et sur ses autels. C'est de la famille chrétienne que le divin Epoux de l'Eglise tire ses enfants pour les régénérer dans l'eau et l'Esprit-Saint ; c'est en elle qu'il choisit ses lévites, ses héros, ses héroïnes de charité, ses vierges consacrées, ses prêtres, les propagateurs de l'Evangile, les chevaliers et héros du cloître, les pasteurs et les évêques, les successeurs de son premier Vicaire dans le gouvernement universel de son troupeau.<br />
<br />
Elevez donc vos cœurs et vos pensées ! Ne laissez point, au seuil de votre vie nouvelle, tomber votre courage : virilement, héroïquement, regardez l'avenir en face, sous la bienveillante protection de la Providence de Dieu, dans les mains de qui reposent votre bonheur et l'aurore de chacune de vos journées, ordinaires ou extraordinaires, sereines ou nébuleuses. Dieu ne permettra jamais qu'une épreuve dépasse les forces que vous communique la paternelle libéralité de sa grâce, et cette grâce, si abondante et si riche en bienfaits, vous fera trouver et goûter ici-bas dans la fidélité aux devoirs les plus difficiles une des joies les plus profondes et les plus douces de votre vie.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Amour_pa%C3%AFen_et_amour_chr%C3%A9tien_%E2%80%93_30_juillet_1941_%E2%80%93&diff=2142Amour païen et amour chrétien – 30 juillet 1941 –2012-01-31T12:56:14Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 30 juillet 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
<br />
Au cours de vos promenades romaines, bien-aimés fils et filles, vous n'avez pas manqué, dans cette cité unique au monde, de constater avec étonnement à quel point les souvenirs de son passé et les monuments de son présent chrétien se mêlent, se compénètrent et se superposent. Plus particulièrement, quand apparurent à vos regards d'époux chrétiens, de futurs pères et mères chrétiens, les ruines des magnifiques palais et des temples antiques, votre pensée a dû se reporter vers les mœurs et les coutumes de la Rome païenne. A cette époque, parmi la splendeur même des arts et des lettres, s'étalait avec le déclin de l'austérité et de l'intégrité traditionnelles une telle corruption qu'Horace s'écriait : « Des générations fécondes en vices souillèrent d'abord le mariage, la race et les foyers ; de cette source jaillirent tous les maux qui ont submergé la patrie et le peuple. La jeune adolescente se complaît aux voluptueuses danses ioniennes... et, dès ses premières années, rêve d'illicites amours »1.<br />
<br />
Sans doute, votre âme s'est détournée de pareilles images pour considérer de préférence les souvenirs de ces antiques, fortes et austères familles romaines qui firent la puissance et la grandeur de Rome, dominatrice du monde : ''per quos viros... et partum et auctum imperium'', « ces hommes de qui l'empire tient sa naissance et son développement »2. Vous les avez vus tels qu'ils vivent dans les récits de Tite-Live, ces rudes pères de famille à l'autorité absolue et incontestée, gardiens fidèles de leur gens (le groupe des familles parentes), totalement dévoués au service de la chose publique ; et à leurs côtés vous les avez vues, noblement soumises, ces matrones irréprochables, consacrées aux soins de leur maison, ces matrones qui, avec Cornélie, la mère des Gracques4, présentaient leurs enfants comme leur plus belle parure, comme leurs plus précieux bijoux : ''Haec ornamenta sunt mea'', « mes parures, les voilà ! ».<br />
<br />
Ils ne manquèrent pas complètement, même sous les empereurs, les exemples de familles où les époux vivaient dans une heureuse concorde et se donnaient mutuellement la préférence, foyers où la vertu de la bonne épouse mérite d'autant plus d'éloges que les fautes des autres étaient plus graves3. Femmes qui, au milieu même de ces temps de terreur où elles se voyaient accusées et mises à mort pour la seule raison d'avoir pleuré le décès de leurs enfants4, n'étaient pas moins pour leurs maris des modèles de courage et d'esprit de sacrifice. Mères qui accompagnaient leurs enfants fugitifs, épouses qui suivaient leur mari en exil5, épouses chastes, comme cette Ostoria, dont l'éloge — ''incomparabilis castitatis femina'', « femme d'incomparable chasteté » — est gravé sur un sarcophage récemment découvert dans les grottes vaticanes.<br />
<br />
Et pourtant, lorsque votre regard passe de ces familles païennes aux familles pleinement, grandement, splendidement chrétiennes que vous connaissez tous, votre instinct vous avertit qu'il manque quelque chose aux premières. Il leur manque quelque chose de plus fort encore que l'antique force des Quirites, quelque chose de plus intimement fort, et en même temps de plus chaud, de plus pénétrant, quelque chose de meilleur et de plus profondément humain.<br />
<br />
Cette défectuosité ne consisterait-elle pas, irrémédiable misère des sociétés païennes, dans l'impuissance à rester énergique et fort tout en conservant un vrai cœur humain, un cœur capable d'affection sincère et pure, et accessible à la pitié ? Regardez ces vieilles familles romaines dont nous venons d'évoquer les austères qualités. Le jour où elles prirent contact avec les délicatesses et le raffinement de la civilisation grecque et orientale, la passion des perles, des pierres précieuses et de l'or les saisit6 ; la discipline se relâchant peu à peu — ''labente paulatim disciplina''7 — elles se précipitèrent en grand nombre — ire cœperunt praecipites — dans ces désordres dont saint Paul fut le témoin indigné (cf. Rom. Rm 1, 24 et ss.). La rigidité des mœurs ne fit point place à la véritable affection — ''sine affectione, sine misericordia'', écrit l'Apôtre pour qualifier le monde païen de son époque — tout au contraire on vit se déchaîner les passions les plus basses. Le grand empereur Auguste, justement préoccupé du bien public, tenta vainement8 d'y mettre un frein par ses lois — les lois Juliennes de ''maritandis ordinibus et de adulteris cœrcendis'' et la ''lex Papia Poppaea'' sont les plus célèbres — afin de rendre à la famille sa force et sa cohésion : seule la foi dans le Christ Jésus devait y réussir.<br />
<br />
L'affection véritable sans dureté comme sans faiblesse, l'amour vrai, inspiré et ennobli par Jésus-Christ, nous l'entrevoyons déjà dans les premières familles de convertis romains, comme les Flavius et les Acilius lors de la persécution de Domitien ; nous en admirons l'éclatante splendeur chez une sainte Paule et une sainte Mélanie.<br />
<br />
Mais pourquoi remonter à des siècles si lointains ? N'a-t-on pas vu naguère, dans ces rues mêmes de Rome, une autre épouse dont la vie est ou devrait être bien connue de toutes les mères chrétiennes, la bienheureuse Anne-Marie Taïgi ? Nous n'entendons point vous décrire ici ses visions, ni l'abondance des faveurs extraordinaires dont Dieu l'a comblée. Ne voyez maintenant en elle que la femme de Dominique — l'honnête, mais rude et colérique portefaix de la maison Chigi — la femme de Dominique toujours bonne et souriante. Jusque tard dans la nuit elle attend le retour de son époux ; et quand il rentre fatigué, impatient, mécontent de tout, elle le sert avec humilité et tendresse, supportant tout, acceptant tout avec une angélique douceur. Voyez en même temps sa fermeté à maintenir l'ordre parmi les nombreuses personnes de la maison, ses inlassables efforts pour faire perdre à son mari l'habitude des paroles grossières ; voyez-la, ménagère active et prévoyante, si pauvre soit-elle, entretenir à son foyer sa propre mère et y accueillir plus tard la famille de sa fille et de sa belle-fille ; toujours, même avec des caractères bizarres, difficiles et rudes, elle se montre fille aimante, épouse dévouée, mère, belle-mère et grand-mère admirable.<br />
<br />
Le secret d'une pareille vie ? Toujours le même, celui de toutes les vies saintes : le Christ vivant et rayonnant avec sa grâce souveraine dans l'âme docile à en suivre les inspirations et les mouvements. Notre-Seigneur Jésus-Christ a eu seul la puissance de susciter en nos pauvres cœurs humains, blessés et égarés par le péché originel, un amour qui reste pur et fort sans se raidir et se durcir, un amour assez profondément spirituel pour se débarrasser du brutal aiguillon des sens et pour les dominer, tout en conservant intacte sa chaleur et inaltérée sa délicate tendresse. Lui seul, par les exemples et l'action intime de son Cœur enflammé d'amour, a pu réaliser la promesse faite déjà à Israël : ''Auferam cor lapideum de carne vestra et dabo vobis cor carneum'', « J'ôterai de votre chair le cœur de pierre et vous donnerai un cœur de chair » (Ez 36, 26). Lui seul sait faire naître et vivre dans les âmes l'affection vraie à la fois tendre et forte, parce que Lui seul peut par sa grâce les délivrer de cet égoïsme inné, plus ou moins conscient, qui empoisonne l'amour purement humain.<br />
<br />
Voilà pourquoi, bien-aimés fils et filles, à vous comme à tous ceux qui viennent implorer Notre bénédiction sur leurs nouveaux foyers, Nous adressons cette vive et pressante exhortation : donnez toujours dans vos maisons la première place au Christ Sauveur, Roi et Seigneur de vos familles, lumière qui les éclaire, flamme qui les réchauffe et les égaie, sauvegarde toute-puissante qui en conservera la paix et le bonheur. Cet amour qui vous unit, et que Dieu a voulu marquer du sceau de son sacrement, durera dans la mesure où il restera chrétien et, loin de s'affaiblir et de se dissiper, il deviendra plus intime et plus fort, à mesure que vous avancerez ensemble dans la vie.<br />
<br />
Défendez-le contre tout ce qui tendrait à le rendre païen. Que de baptisés, hélas ! ne savent plus s'aimer qu'à la manière des païens ! Perdant de vue le vrai but de leur union tel que la foi le leur a enseigné, ils se soustraient aux devoirs austères, mais salutaires et bienfaisants, de la loi chrétienne ; ils en arrivent peu à peu à dégrader le mariage — que la bénédiction du Christ avait fait si grand et si beau — en une vulgaire association de plaisir et d'intérêt, et à tuer en eux-mêmes tout amour véritable.<br />
<br />
Il n'en sera pas ainsi de vous, chers enfants. Votre amour vivra, il durera, et, au milieu même des inévitables vicissitudes de la vie, il fera votre bonheur, parce qu'il restera chrétien, parce que vous ne cesserez point d'en conserver la force intime, cette force que vous puiserez à sa vraie source, c'est-à-dire dans un profond esprit de foi, dans l'accomplissement persévérant des pratiques religieuses que l'Eglise vous commande ou vous conseille, dans une inviolable fidélité aux devoirs de votre état, à tous les devoirs de votre état.<br />
<br />
Pour que la grâce divine, toujours plus abondante, vous aide à parcourir jusqu'au bout cette voie de salut et de vraie joie, Nous vous accordons de tout cœur, comme gage des faveurs du ciel, la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=L%27efficacit%C3%A9_de_la_pri%C3%A8re_%E2%80%93_suite_%E2%80%93_9_juillet_1941_%E2%80%93&diff=2141L'efficacité de la prière – suite – 9 juillet 1941 –2012-01-31T12:53:58Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 9 juillet 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
Ce Nous est toujours une grande consolation de Nous voir entouré d'un si beau nombre de jeunes époux chrétiens venus de toutes parts avec le désir d'ajouter à la bénédiction de leur union par le prêtre la bénédiction du Père commun de la famille chrétienne. Que de foyers, que de pieux enfants Nous voyons en vous ! Que d'espérances l'Eglise, la patrie, le ciel mettent en vous ! Nous levons le regard vers le ciel, et il Nous semble que sur vous, jeunes mariés à la foi et à la piété si vives, descend cette haute et puissante bénédiction que le Seigneur accorde à ceux qui le craignent. La crainte de Dieu n'est-elle pas le commencement de la sagesse, qui édifie le foyer, non point sur les fragiles arcs-boutants du monde, mais sur les sept colonnes des vertus théologales et morales ? Ce foyer qui devient comme un sanctuaire où règne le sacrifice de l'affection et de la patience réciproques, de la concorde et de la fidélité ; où les parents deviennent les maîtres de leurs enfants, pour leur montrer un Père et une Mère dans les cieux ; où la prière, qui console les peines et raffermit les espérances, ouvre la journée et la clôt.<br />
<br />
La prière fut le thème de Notre allocution de mercredi passé : Nous y avons parlé de son efficacité et de sa nécessité ; Nous y avons montré comment les prières adressées à Dieu ne sont point toutes faites au nom de Jésus-Christ, et par là ne sont point toutes exaucées. Ce que Nous avons dit alors, Nous désirons le reprendre et le compléter aujourd'hui en peu de mots. Ainsi la pensée et le souvenir de la prière vous accompagnera dans toute votre vie ; elle sera le guide de votre chemin et la lampe de votre maison, la bénédiction de vos joies et le réconfort de vos soucis, l'inébranlable soutien de votre confiance en Dieu.<br />
<br />
Nulle part Notre-Seigneur n'a promis de nous rendre infailliblement heureux en ce monde ; il a promis, lisons-nous dans l'Evangile, de nous exaucer comme le père qui ne donne point en nourriture à son fils, même s'il le lui demandait, une pierre, ou un serpent, ou un scorpion, mais le pain, le poisson, l'œuf, qui le nourriront et le feront grandir (cf. Luc, Lc 11, 11-13). Ce que Jésus notre Sauveur s'est engagé à nous accorder infailliblement comme fruit de nos prières, ce ne sont point ces faveurs que les hommes demandent souvent par ignorance de ce qui sert réellement à leur salut, mais cet « esprit bon », ce pain des dons surnaturels nécessaires ou utiles à nos âmes ; ce poisson symbolique que le Christ ressuscité offrit en nourriture aux apôtres sur les rives du lac de Tiberiade ; cet œuf — aliment de dévotion et de piété pour les petits — que souvent les hommes ne distinguent point des cailloux extrêmement dangereux à leur salut spirituel, des cailloux que leur offre le Tentateur. Le grand Apôtre confessait aux Romains : « Nous ne savons pas ce que nous devons, selon nos besoins, demander dans nos prières. Mais l'Esprit lui-même prie pour nous par des gémissements ineffables ; et Celui qui sonde les cœurs connaît quels sont les désirs de l'Esprit ; il sait qu'il prie selon Dieu pour les saints » (Rm 8, 26-27). Les hommes sont souvent comme des enfants ignorant ce qui leur est bon et ce qu'il leur convient de demander ; souvent malhabiles sont les prières qu'ils adressent au Père céleste. Mais le Saint-Esprit, qui par sa grâce agit dans nos âmes et nous inspire nos gémissements, sait donner à nos prières leur vrai sens et leur vraie valeur ; et au Père qui lit au fond des cœurs apparaît en pleine lumière ce qu'à travers nos prières et nos désirs demande pour nous son divin Esprit, et il exauce sans aucun doute ces demandes qui montent du plus intime de nous-mêmes.<br />
<br />
Ne voyez-vous pas dans cet Esprit qui opère en vous l'inébranlable fondement de votre confiance dans la prière, le lien vigoureux qui enchaîne la prière à sa réalisation ? Vous savez, vous croyez de toute votre âme, qu'aucune de vos prières ne reste sans effet et que, lorsque vous ne recevez pas exactement la faveur spéciale que vous demandiez, vous devez ou reconnaître votre ignorance touchant votre vrai bien ou penser que Dieu vous accordera cette grâce à l'heure qu'il a marquée ; car certaines grâces ne sont point refusées, mais simplement différées à un temps opportun, et en attendant vous recevez mieux, beaucoup mieux : cela même que l'Esprit-Saint a demandé en vous par les gémissements qu'il vous inspirait. Voilà la conviction et la sagesse du chrétien ; voilà le guide, le soutien et la lumière de votre prière au milieu des obscurités de la foi. Cette lumière, vous ne la laisserez pas s'éteindre, ni lorsque Dieu tardera ou refusera de vous exaucer, ni lorsque les infortunes et les angoisses tourmenteront votre esprit, et elle vous donnera la force de persévérer dans la prière.<br />
<br />
Pourquoi donc, peut-on se demander encore, pourquoi donc arrive-t-il si souvent que vous n'obteniez pas l'objet de vos prières ? Parce que, tandis que le Saint-Esprit continue à vous pousser à la prière, vous cessez de suivre son inspiration et le mouvement qu'il a suscité en vous : vous cessez de prier, il vous manque la persévérance, et votre prière n'obtient point l'effet désiré. Notre-Seigneur a dit et répété que la prière persévérante est infailliblement exaucée. La persévérance est cette insistance qui fait violence au cœur de Dieu et qui triomphe. Lui qui voit de plus haut et de plus loin que nous les faits de notre vie et leur enchaînement, lui qui contemple tout le bien que vos âmes retirent des prières prolongées et des désirs confiants, de vos humiliations devant lui et de votre foi courageuse et constante, il n'a pas voulu promettre de vous exaucer immédiatement. Et pourquoi donc ? Parce qu'il a un cœur plus tendre que celui d'une mère, et qu'une mère prudente n'hésite pas à faire attendre son enfant, quitte même à le laisser pleurer un peu, quand elle sait que le lait qu'il voudrait tout de suite lui sera plus profitable dans quelques instants.<br />
<br />
Prier, c'est donc demander ce qui est bon pour nos âmes, le demander avec persévérance, mais aussi le demander avec piété : c'est, selon l'enseignement de saint Thomas, la troisième des quatre conditions de la prière efficace — ''pro se, necessaria ad salutem'', pie et perseveranter1. La prière pieuse, qu'est-ce donc ? Ce n'est point la prière qui consiste à prononcer des paroles avec un esprit et un cœur distraits et avec des yeux qui se promènent partout. C'est la prière recueillie qui s'anime envers Dieu tout entière de confiance filiale, qui s'illumine de foi vive, qui s'imprègne d'amour pour lui et le prochain ; c'est la prière toujours faite en état de grâce, toujours méritoire par conséquent de la vie éternelle, toujours humble dans sa confiance ; c'est la prière qui, lorsque vous vous agenouillez devant les autels, ou devant l'image du Crucifié et de la Sainte Vierge à votre foyer, ne connaît point l'arrogance de ce pharisien qui se vantait d'être meilleur que les autres hommes, c'est la prière qui fera sentir à votre cœur, comme celle du pauvre publicain, que tout ce que vous recevrez ne sera que pure miséricorde de Dieu à votre égard (cf. Lc 18, 9-14).<br />
<br />
Pieuse, persévérante, surnaturelle, la prière que vous ferez pour vous-mêmes sera toujours exaucée, assure le Docteur angélique ; mais la prière que vous ferez pour les autres ? Pour ceux dont le salut vous est si cher et que vous désirez pour compagnons dans la béatitude éternelle, votre époux ou votre épouse, votre fils ou votre fille, votre père ou votre mère, vos amis et les personnes de votre connaissance ? Que vaut pour eux votre prière ? Quelle est son efficacité auprès du trône de Dieu ? Ici, sans doute, intervient la terrible possibilité inhérente au libre arbitre de l'homme, la possibilité de résister aux grâces puissantes et de forme si variée que vos prières auront obtenues à ces âmes ; mais la toute-puissante miséricorde de Dieu est un mystère insondable à notre pensée, un mystère infini qui permet à toutes les mères de prendre pour elles-mêmes cette parole d'un pieux évêque à Ste Monique, alors qu'elle implorait son aide avec d'abondantes larmes pour la conversion de son fils Augustin : Le fils de tant de larmes, lui disait-il, ne saurait se perdre2.<br />
<br />
Et quand même il ne vous serait point donné en cette vie de voir de vos yeux le triomphe de la grâce dans les âmes pour lesquelles vous avez prié et pleuré si longtemps, votre cœur ne devrait jamais renoncer à l'espérance : en ces instants mystérieux où, dans le silence de l'agonie d'un mourant, le Créateur se dispose à rappeler à lui une âme, œuvre de ses mains, peut-être que son immense amour a finalement remporté, loin de vos regards, la victoire pour laquelle votre reconnaissance le bénira là-haut à tout jamais.<br />
<br />
Ainsi que toute vie humaine, cette vie à deux que vous commencez rencontrera des heures dures et difficiles, des moments de désolation et d'amertume : levez alors les yeux au ciel. Le premier de vos réconforts, le plus ferme de vos soutiens sera la prière confiante ; et vous ne douterez jamais de l'amour de Dieu pour vous, sachant bien que nulle de vos prières ne restera vaine, que Dieu les exaucera toutes, sinon à l'heure et de la manière que souhaitaient les rêves de votre esprit, du moins au moment le plus opportun pour vous et de cette manière infiniment plus heureuse que savent disposer la prévoyante sagesse et la puissance du cœur de Dieu.<br />
<br />
Nous demandons avec ferveur que le Seigneur garde en vos âmes cette vive confiance et Nous vous donnons avec une paternelle affection la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=L%27efficacit%C3%A9_de_la_pri%C3%A8re_%E2%80%93_2_juillet_1941_%E2%80%93&diff=2140L'efficacité de la prière – 2 juillet 1941 –2012-01-31T12:52:47Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 2 juillet 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
<br />
<br />
Que de choses, chers jeunes époux, vous avez à demander à Dieu en ces jours où vous visitez les grands sanctuaires de Rome ! Ces visites sont comme autant de pieux pèlerinages, tout comme la vie d'ici-bas est un pèlerinage vers Dieu, dans l'alternance de la joie et de la douleur. Vous cheminez maintenant dans l'aurore de la joie. Devant les saints autels, vous avez prié pour vous-mêmes, pour le foyer que vous venez de fonder, pour les enfants qui viendront l'égayer et vous réjouir. La terre où vous avez mis le pied est une terre bien connue que des milliers de peuples, des millions de pèlerins ont foulée de leurs pieds au cours des siècles : tels les martyrs que vous avez vénérés aux catacombes, dans les basiliques et les églises, et que l'apôtre saint Jean entendit crier d'une voix forte : « Jusques à quand, ô Maître saint et véritable, ne ferez-vous pas justice et ne redemanderez-vous pas notre sang à ceux qui habitent sur la terre ? » Alors on leur répondit de se tenir en repos encore un peu de temps, jusqu'à ce que fût complet le nombre de leurs compagnons de service et de leurs frères (cf. Apoc. Ap 6, 10). Eux aussi prient ; mais pour Dieu l'heure de les exaucer n'est pas encore arrivée. Ils ont une confiance inébranlable dans la promesse de Dieu : ils seront certainement exaucés, comme ils le furent lors du triomphe de leur foi en face des tyrans.<br />
<br />
Vous aussi, vous avez prié ; et maintenant vous voyez exaucées les prières que vous avez, il y a longtemps peut-être, adressées au ciel, pour obtenir la grâce de contracter cette sainte union, qui était alors l'objet de vos désirs, et qui est maintenant le foyer de votre bonheur.<br />
<br />
Rien, en effet, ne nous aide tant à prier que notre expérience personnelle de l'efficacité de nos prières, lorsque l'amoureuse Providence nous a donné en réponse largement, pleinement, ce que nous lui demandions. Mais souvent la Providence nous dit, comme aux martyrs de l'Apocalypse, de nous tenir en repos encore un peu de temps, le temps fixé par elle.<br />
<br />
Que Dieu tarde à exaucer leurs prières, beaucoup sentent leur confiance ébranlée ; beaucoup ne savent point se tenir en repos, lorsque la Providence semble fermer l'oreille à toutes leurs supplications.<br />
<br />
Non, ne perdez jamais votre confiance en ce Dieu qui vous a créés, qui vous a aimés avant que vous fussiez capables de l'aimer, qui a fait de vous ses amis. N'est-ce pas le propre de l'amitié, que l'ami brûle de remplir le désir de son ami et qu'il veuille son bien et sa perfection ? Qu'est-ce donc qu'aimer, sinon vouloir du bien à quelqu'un ? Et le bien de la créature ne découle-t-il pas en entier de la bonté divine ?1<br />
<br />
Ayez confiance en Dieu : ses grâces, selon le mot de Pétrarque2, ne furent jamais lentes. Et pourtant, parmi ceux qui prient, il y en a, et même beaucoup, qui trouvent que les grâces divines tardent trop. Ce qu'ils demandent à Dieu leur semble bon, utile, nécessaire, bon non seulement pour le corps, mais aussi pour leur âme, et pour les âmes de ceux qui leur sont chers : avec ferveur, ils prient durant des mois, et ils constatent qu'il n'ont encore rien obtenu. La santé nécessaire pour s'occuper de sa famille n'a pas encore été accordée à telle mère. Ce fils, cette fille, qui par leur conduite mettent en péril leur salut éternel, ne sont pas encore revenus à de meilleurs sentiments. Ces soucis matériels au milieu desquels ces parents s'agitent et s'inquiètent, ne font que croître et devenir plus durs et plus menaçants. L'Eglise entière et tous les peuples avec elle multiplient les prières pour obtenir la fin des calamités qui jettent la grande famille humaine dans la douleur, et elle tarde encore, cette paix selon la justice, objet des désirs, des invocations, des soupirs et des instances de l'Eglise, cette paix qui semble si nécessaire au bien de tous et au bien même des âmes.<br />
<br />
Sous le poids de telles pensées, beaucoup regardent surpris vers les saints autels où l'on prie ; ils demeurent peut-être scandalisés et perplexes, à entendre la sainte liturgie rappeler sans cesse et proclamer les promesses du divin Sauveur : « Tout ce que vous demanderez avec foi dans la prière, vous l'obtiendrez... » (Mt 21, 22). « Demandez, et vous recevrez... Quiconque demande, reçoit... » (Mt 7, 7). « Tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il le fera. En vérité, en vérité, je vous le dis, tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous l'accordera » (Jn 14, 13 ; Jn 15, 16 ; Jn 16, 23). Les promesses du divin Sauveur pouvaient-elles être plus explicites, plus claires, plus solennelles ? Quelques-uns ne seront-ils pas tentés, en présence du silence de Dieu, d'y voir peut-être une amère dérision ?<br />
<br />
Mais Dieu ne ment ni ne peut mentir ; ce qu'il a promis, il le tiendra ; ce qu'il a dit, il le fera. Elevez vos esprits, bien-aimés fils et filles, et écoutez ce qu'enseigne le grand Docteur saint Thomas d'Aquin3, lorsqu'il explique pourquoi Dieu n'exauce pas toujours les prières. Dieu exauce les désirs de la créature raisonnable pour autant qu'elle désire le bien. Or, elle désire parfois quelque chose qui n'est pas un vrai bien, mais seulement un bien apparent, ou plutôt un vrai mal. Partant, Dieu ne saurait exaucer pareille prière. Aussi l'Ecriture sainte dit-elle : « Vous demandez, et vous ne recevez pas, parce que vous demandez mal » (Jc 4, 3). Vous désirez, vous demandez une chose qui vous semble un bien ; mais Dieu voit plus loin que vous, il voit bien au-delà de l'objet que vous demandez. Il arrive, ajoute le même saint Docteur, que quelqu'un refuse par amitié telle chose à son ami parce qu'elle lui serait nuisible, ou que le contraire de cette chose lui sera plus avantageux, comme le médecin refuse parfois ce que le patient lui demande, à la pensée que cela ne contribuerait pas à le guérir. Ainsi, c'est l'amour qu'il porte à la créature raisonnable qui pousse Dieu à exaucer les prières, et il ne faut donc point s'étonner qu'il lui arrive de ne pas exaucer les prières de ceux qu'il aime d'un amour spécial, car c'est pour leur accorder ce qui leur est en réalité le plus utile. Aussi, bien que l'apôtre lui en eût fait par trois fois la demande, il n'enleva pas à saint Paul l'écharde enfoncée dans sa chair (II Co 12, 7) — il s'agissait très probablement d'une infirmité corporelle — et cela pour le maintenir dans l'humilité. De la sorte, le grand apôtre ne fut point exaucé ad voluntatem, selon sa volonté, puisqu'il ne fut pas libéré de cette misère qui l'affligeait ; mais il fut exaucé selon son salut, ''ad salutem'', puisque Dieu l'exauça encore plus parfaitement en lui promettant le réconfort de sa grâce, moyen d'atteindre avec plus de mérite le but désiré4.<br />
<br />
Veille donc, homme de foi, avertit saint Augustin, et écoute avec vigilance ce qu'enseigne le divin Maître : quand vous demandez ce que vous désirez, ne le demandez point d'une façon quelconque, mais en mon nom, ''in nomine meo''. Et quel est son nom ? Jésus-Christ. Christ signifie roi, Jésus signifie Sauveur. Évidemment, ce n'est pas un roi quelconque qui nous sauvera, mais le Roi Sauveur. Et lorsque nous demandons une chose contraire à notre salut, nous ne la demandons point au nom du Sauveur. Or, il est notre Sauveur aussi bien lorsqu'il n'exauce pas nos prières que lorsqu'il fait ce que nous lui demandons, car, en n'exauçant pas les prières qui tourneraient contre notre salut, il agit en véritable Sauveur. N'est-il point le divin médecin du salut éternel ? Il sait, lui, ce qui nous est utile, et ce qui ne l'est pas... Il n'est pas seulement le Sauveur, mais encore le bon Maître : afin de faire ce que nous lui demanderions, il a, dans la prière qu'il nous a lui-même enseignée, indiqué ce que nous devons demander ; et par là encore, il nous avertit que ce que nous lui demandons en dehors de la règle qu'il nous a tracée, nous ne le demandons point au nom du Maître. Sauveur et Maître à la fois, Jésus connaît le temps favorable, le temps du salut, et, même lorsque nous lui demandons quelque chose en son nom, il n'exauce pas toujours notre prière tout de suite : il l'exauce à son heure, il diffère, mais ne refuse point de nous exaucer5.<br />
<br />
C'est donc au nom de Jésus que nous devons offrir à Dieu nos prières ; car il n'est point sur terre d'autre nom où nous puissions trouver le salut (Ac 4, 12). C'est le nom de Jésus qui rend nos aspirations puissantes et efficaces auprès de Dieu ; c'est ce nom qui fait que nos bons désirs soient la cause de ce que Dieu, dans sa Providence, a disposé que nous obtiendrions par la prière ; car la prière ne change point l'ordre immuable établi par Dieu, mais elle l'accomplit, en tant que dans cet ordre providentiel Dieu a lié l'octroi des biens que nous lui demandons aux prières que nous lui offrons. De là, cette parole de saint Alphonse de Liguori, que qui prie se sauve, qui ne prie point se damne6 ; et affirmer qu'il n'est pas nécessaire, puisque l'ordre de sa Providence est immuable, de prier pour obtenir une grâce de Dieu, ce serait affirmer, observe le Docteur angélique saint Thomas, qu'il n'est point nécessaire de marcher pour arriver à tel point, ni de manger pour se nourrir : assertions évidemment absurdes7.<br />
<br />
Ainsi vous voyez, chers jeunes époux, comment l'efficacité de la prière se lie à sa nécessité, et comment les prières qui se présentent à Dieu ne sont pas toutes faites au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ et, partant, ne sont pas toutes exaucées.<br />
<br />
Redites donc au Sauveur avec les apôtres : « Seigneur, apprenez-nous à prier », ''Domine, doce nos orare'' (Lc 11, 1). Que vos prières s'élèvent vers lui comme l'encens, et vos mains comme l'offrande du soir (Ps., cxii, 2). Et que la grâce de Dieu descende sur vous et vos nouvelles familles, pareille à la rosée de l'Hermon qui descend sur les sommets de Sion (Ps., cxxxiii, 3).</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Discussion:Magist%C3%A8re_pontifical_sur_la_famille&diff=2139Discussion:Magistère pontifical sur la famille2012-01-31T12:50:19Z<p>Salettensis : </p>
<hr />
<div>bonjour<br />
à propos de la liste des ''Discours aux jeunes époux par Pie XII''<br />
je vais essayer de la compléter.<br />
<br />
Faut il indiquer dans le titre un numéro d'ordre<br />
et si oui sous quelle forme : <br />
en rajoutant à la fin 50/69<br />
ou romaine : L<br />
ou au début en lettres : cinquantième discours<br />
ou discours 50 aux jeunes époux<br />
ou rien du tout.<br />
<br />
ou la date de l'audience peut être ?<br />
<br />
en attendant un avis je me conforme à ce qui est déjà fait.<br />
[[Utilisateur:Salettensis|ΦΧΦΠ -- divinæ naturæ consortes]] 30 janvier 2012 à 21:52 (CET)<br />
<br />
<br />
Je crois bien de continuer comme vous avez commencé : les discours les uns à la suite des autres, avec la date dans le titre. Le classement chronologique permet de les retrouver facilement. Un n° d'ordre ne changer pas grand'chose pour le lecteur.<br />
<br />
En revanche, vous pouvez renommer (et reclasser !) les premiers de la liste, qui ont été faits autrefois sans la date.<br />
<br />
Par ailleurs, cette page est réservée aux discours sur le thème de la famille : dans autres textes (en bas) il serait bien d'ajouter le très important discours aux sages-femmes.<br />
<br />
Le webmestre [[Utilisateur:Abbé Olivier]] 31 janvier 2012 à 11:10<br />
<br />
d'accord monsieur l'abbé<br />
je ne sais pas comment renommer les pages déjà crées.<br />
je compléterai à l'occasion des audiences de Pie XII sur le sujet (il y a matière)<br />
[[Utilisateur:Salettensis|ΦΧΦΠ -- divinæ naturæ consortes]] 31 janvier 2012 à 13:50 (CET)</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Discussion:Premier_discours_du_pape_Pie_XII_aux_jeunes_%C3%A9poux&diff=2138Discussion:Premier discours du pape Pie XII aux jeunes époux2012-01-31T12:04:49Z<p>Salettensis : Page créée avec « je n'arrive pas à remettre les paragraphes. ~~~~ »</p>
<hr />
<div>je n'arrive pas à remettre les paragraphes.<br />
[[Utilisateur:Salettensis|ΦΧΦΠ -- divinæ naturæ consortes]] 31 janvier 2012 à 13:04 (CET)</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Premier_discours_du_pape_Pie_XII_aux_jeunes_%C3%A9poux&diff=2137Premier discours du pape Pie XII aux jeunes époux2012-01-31T11:59:48Z<p>Salettensis : </p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = <br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 26 avril 1939<br />
| résumé = Ce discours aux jeunes époux est le premier d’une série de soixante-dix-neuf, que Pie XII prononcera à leur adresse depuis ce jour jusqu’au 12 mai 1943. A certaines époques de l’année, le Saint-Père a parlé aux nouveaux mariés de façon très régulière toutes les deux semaines.<br />
<br />
Il ne s’agit pas de simples paroles d’encouragement ou d’exhortation ; chaque allocution traite d’un sujet différent faisant partie d’un programme suivi, dont l’ensemble renferme toute la doctrine de l’Eglise en ce qui concerne les multiples problèmes de la vie conjugale, familiale et domestique, et de la spiritualité du foyer.<br />
| difficulté de lecture = ♦ facile<br />
| remarque particulière = <br />
}} <br />
<br />
Votre présence, chers fils et filles, remplit Notre cœur de joie, car, si les visites des enfants à leur père sont toujours belles et consolantes, il Nous est particulièrement agréable de Nous voir entouré de groupes de jeunes époux venus Nous faire participer à leur joie et recevoir de Nous une parole de bénédiction et d'encouragement.<br />
<br />
Vraiment, vous devez vous sentir réconfortés, chers jeunes époux, à la pensée que le divin Instituteur du sacrement de mariage, Notre-Seigneur Jésus-Christ, a voulu l'enrichir de l'abondance de ses célestes faveurs. Le sacrement de mariage signifie, comme vous le savez, la mystique union de Jésus-Christ avec son Epouse, en qui et de qui doivent naître les enfants adoptifs de Dieu, légitimes héritiers des divines promesses. Et comme Jésus-Christ enrichit ses noces mystiques avec l'Eglise des perles précieuses que sont les grâces divines, ainsi il lui plaît d'enrichir d'ineffables dons le sacrement de mariage. <br />
<br />
Ce sont en particulier les grâces nécessaires et utiles aux époux&nbsp;: pour conserver, accroître, perfectionner et sanctifier sans cesse leur mutuel amour&nbsp;; pour observer la fidélité conjugale&nbsp;; pour éduquer sagement leurs enfants, par leur exemple et leur vigilance&nbsp;; pour porter chrétiennement les charges de leur nouvel état. <br />
<br />
Ces vérités, vous les avez déjà comprises, approfondies, goûtées&nbsp;; et si Nous vous les rappelons en ce moment, c'est pour participer, Nous aussi, en quelque manière à cette heure solennelle de votre vie et pour donner à la sainte liesse qui vous anime un fondement toujours plus solide et plus sûr. <br />
<br />
Daigne le bon Dieu vous accorder la grâce de ne jamais ternir la grandeur de votre état, et de vivre toujours conformément à la haute dignité de vos devoirs sacrés. <br />
<br />
Nous vous donnons du fond du cœur la Bénédiction apostolique, gage des faveurs de Dieu, et Nous souhaitons qu'elle vous accompagne durant les jours tristes ou joyeux de votre vie et que, témoin perpétuel de Notre paternelle bienveillance, elle demeure toujours avec vous.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Premier_discours_du_pape_Pie_XII_aux_jeunes_%C3%A9poux&diff=2136Premier discours du pape Pie XII aux jeunes époux2012-01-31T11:55:56Z<p>Salettensis : correction mise en page</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = <br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 26 avril 1939<br />
| résumé = Ce discours aux jeunes époux est le premier d’une série de soixante-dix-neuf, que Pie XII prononcera à leur adresse depuis ce jour jusqu’au 12 mai 1943. A certaines époques de l’année, le Saint-Père a parlé aux nouveaux mariés de façon très régulière toutes les deux semaines.<br />
<br />
Il ne s’agit pas de simples paroles d’encouragement ou d’exhortation ; chaque allocution traite d’un sujet différent faisant partie d’un programme suivi, dont l’ensemble renferme toute la doctrine de l’Eglise en ce qui concerne les multiples problèmes de la vie conjugale, familiale et domestique, et de la spiritualité du foyer.<br />
| difficulté de lecture = ♦ facile<br />
| remarque particulière = <br />
}}<br />
<br />
Votre présence, chers fils et filles, remplit Notre cœur de joie, car, si les visites des enfants à leur père sont toujours belles et consolantes, il Nous est particulièrement agréable de Nous voir entouré de groupes de jeunes époux venus Nous faire participer à leur joie et recevoir de Nous une parole de bénédiction et d'encouragement.<br />
<br />
Vraiment, vous devez vous sentir réconfortés, chers jeunes époux, à la pensée que le divin Instituteur du sacrement de mariage, Notre-Seigneur Jésus-Christ, a voulu l'enrichir de l'abondance de ses célestes faveurs. Le sacrement de mariage signifie, comme vous le savez, la mystique union de Jésus-Christ avec son Epouse, en qui et de qui doivent naître les enfants adoptifs de Dieu, légitimes héritiers des divines promesses. Et comme Jésus-Christ enrichit ses noces mystiques avec l'Eglise des perles précieuses que sont les grâces divines, ainsi il lui plaît d'enrichir d'ineffables dons le sacrement de mariage.<br />
<br />
Ce sont en particulier les grâces nécessaires et utiles aux époux : pour conserver, accroître, perfectionner et sanctifier sans cesse leur mutuel amour ; pour observer la fidélité conjugale ; pour éduquer sagement leurs enfants, par leur exemple et leur vigilance ; pour porter chrétiennement les charges de leur nouvel état.<br />
<br />
Ces vérités, vous les avez déjà comprises, approfondies, goûtées ; et si Nous vous les rappelons en ce moment, c'est pour participer, Nous aussi, en quelque manière à cette heure solennelle de votre vie et pour donner à la sainte liesse qui vous anime un fondement toujours plus solide et plus sûr.<br />
<br />
Daigne le bon Dieu vous accorder la grâce de ne jamais ternir la grandeur de votre état, et de vivre toujours conformément à la haute dignité de vos devoirs sacrés.<br />
<br />
Nous vous donnons du fond du cœur la Bénédiction apostolique, gage des faveurs de Dieu, et Nous souhaitons qu'elle vous accompagne durant les jours tristes ou joyeux de votre vie et que, témoin perpétuel de Notre paternelle bienveillance, elle demeure toujours avec vous.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Premier_discours_du_pape_Pie_XII_aux_jeunes_%C3%A9poux&diff=2135Premier discours du pape Pie XII aux jeunes époux2012-01-31T11:54:05Z<p>Salettensis : supression des titre ajoutés par le traducteur</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = <br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 26 avril 1939<br />
| résumé = Ce discours aux jeunes époux est le premier d’une série de soixante-dix-neuf, que Pie XII prononcera à leur adresse depuis ce jour jusqu’au 12 mai 1943. A certaines époques de l’année, le Saint-Père a parlé aux nouveaux mariés de façon très régulière toutes les deux semaines.<br />
<br />
Il ne s’agit pas de simples paroles d’encouragement ou d’exhortation ; chaque allocution traite d’un sujet différent faisant partie d’un programme suivi, dont l’ensemble renferme toute la doctrine de l’Eglise en ce qui concerne les multiples problèmes de la vie conjugale, familiale et domestique, et de la spiritualité du foyer.<br />
| difficulté de lecture = ♦ facile<br />
| remarque particulière = <br />
}} <br />
<br />
Votre présence, chers fils et filles, remplit Notre cœur de joie, car, si les visites des enfants à leur père sont toujours belles et consolantes, il Nous est particulièrement agréable de Nous voir entouré de groupes de jeunes époux venus Nous faire participer à leur joie et recevoir de Nous une parole de bénédiction et d’encouragement.<br />
<br />
Vraiment, vous devez vous sentir réconfortés, chers jeunes époux, à la pensée que le divin Instituteur du sacrement de mariage, Notre Seigneur Jésus-Christ, a voulu l’enrichir de l’abondance de ses célestes faveurs. Le sacrement de mariage signifie, comme vous le savez, la mystique union de Jésus-Christ avec son Epouse, en qui et de qui doivent naître les enfants adoptifs de Dieu, légitimes héritiers des divines promesses. Et comme Jésus-Christ enrichit ses noces mystiques avec l’Eglise des perles précieuses que sont les grâces divines, ainsi il lui plaît d’enrichir d’ineffables dons le sacrement de mariage.<br />
<br />
Ce sont en particulier les grâces nécessaires et utiles aux époux : pour conserver, accroître, perfectionner et sanctifier sans cesse leur mutuel amour ; pour observer la fidélité conjugale ; pour éduquer sagement leurs enfants, par leur exemple et leur vigilance ; pour porter chrétiennement les charges de leur nouvel état.<br />
<br />
Ces vérités, vous les avez déjà comprises, approfondies, goûtées ; et si Nous vous les rappelons en ce moment, c’est pour participer, Nous aussi, en quelque manière à cette heure solennelle de votre vie et pour donner à la sainte liesse qui vous anime un fondement toujours plus solide et plus sûr.<br />
<br />
Daigne le bon Dieu vous accorder la grâce de ne jamais ternir la grandeur de votre état, et de vivre toujours conformément à la haute dignité de vos devoirs sacrés.<br />
<br />
Nous vous donnons du fond du cœur la Bénédiction apostolique, gage des faveurs de Dieu, et Nous souhaitons qu’elle vous accompagne durant les jours tristes ou joyeux de votre vie et que, témoin perpétuel de Notre paternelle bienveillance, elle demeure toujours avec vous.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Foi_dans_l%27amour_de_Dieu_%E2%80%93_7_mai_1941_%E2%80%93&diff=2134Foi dans l'amour de Dieu – 7 mai 1941 –2012-01-31T11:51:47Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 7 mai 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
La vie ne meurt point, chers jeunes époux, dans les variations et l'écoulement des saisons : leur succession même donne au cours de l'an sa diversité et ramène toujours le printemps. Le jour a, lui aussi, ses saisons : dans la matinée nous goûtons le printemps, et à midi l'été ; le soir nous fait l'impression de l'automne, et la nuit de l'hiver. Spectacle de vie renaissante que le printemps, cette saison de joie où tout redonne à la nature le sourire : la verte chevelure des bois, les prés et les jardins en fleurs, les légères corolles des arbres fruitiers, les harmonies des oiseaux, la douce chaleur du soleil qui s'avance sur la voûte du ciel dans la splendeur de sa majesté, en époux de la nature qu'il salue, embellit, colore et féconde de ses rayons vivifiants. Le printemps de son beau manteau recouvre la terre et il éveille dans nos âmes un hymne de louanges au Créateur, qui déploie sa bonté et libéralité dans le livre de la nature, pour nous apprendre à nous renouveler, nous aussi, dans la vie de l'esprit et dans la foi en Dieu.<br />
<br />
Notre sainte Mère l'Eglise a également son printemps, le printemps des alléluias que multiplie la liturgie pascale pour nous inviter à la joie : à la joie de la triomphante résurrection du Christ, fleur virginale de la Vierge Mère, lys divin de la rouge vallée de la Passion (cf. Cant., II, 1) ; à la joie du printemps des premières communautés chrétiennes, dont nous avons relu aux Actes des Apôtres les émouvants épisodes, présage et prémices du futur renouveau spirituel des peuples, les fleurs et les fruits de la conquête de l'apostolat catholique.<br />
<br />
Pour vous, vous êtes au printemps de la vie. Vous vivez le printemps de la famille que vous venez de fonder. Vous le vivez dans la joie et la délicieuse intimité des premiers pas que vous faites à deux, et vous respirez le parfum des espérances d'une vie féconde qui montera autour de vous comme les rejets au pied de l'olivier, d'une vie que Dieu vous appelle à multiplier par votre union, de la vie la plus belle qui soit ici-bas : la vie des âmes chrétiennes.<br />
<br />
Printemps de la nature, printemps de la joie chrétienne, printemps des noces chrétiennes : vous jouissez maintenant de ces trois printemps et vous exultez, comme si le monde qui vous entoure se réduisait pour vous à votre seule vie. Mais, si vous interrompez un instant vos doux colloques pour prendre en main un journal, vous rencontrerez dans ses colonnes une autre vie et un autre monde : faits de guerre, terribles combats sur terre, sur mer et dans le ciel ; mais vous rencontrerez aussi de magnifiques exemples de générosité envers ceux qui souffrent, de magnifiques exemples de dévouement, d'héroïsme et de sacrifice.<br />
<br />
Vous-mêmes, bien-aimés fils et filles, au milieu de ces bouleversements formidables, par un grand et bel acte de foi chrétienne, vous n'avez pas craint de fonder vos nouvelles familles. C'est que vous savez et croyez que le renouveau infaillible du printemps dans le tumulte des événements humains n'est point une dérision ou une froide indifférence d'une nature aveugle, ni la folle imagination de rêveurs ingénus, mais le témoignage et la manifestation de ce suprême et paternel « Amour qui meut le soleil et les autres étoiles »2, amour dont la constante sollicitude ne se relâche jamais, ne fût-ce qu'un instant, dans le gouvernement du monde, et dont la miséricorde domine et modère les agitations des hommes.<br />
<br />
Votre foi n'est-elle pas une confiance dans la douceur et la force de la main divine toujours vigilante et attentive et ordonnant sans cesse les événements grands et petits, joyeux et douloureux de cette vie ? Entendez la haute et belle leçon que Dieu vous donne dans le triple printemps que vous vivez ces jours-ci et qui raffermit votre confiance.<br />
<br />
Cette confiance n'est point une ingénuité puérile s'imaginant que le printemps durera toujours, que sa charmante beauté ne passera jamais, que les chaleurs torrides, les froids et les neiges ne reviendront plus. Elle n'est point l'ingénuité qui s'enivre du présent sans une pensée pour l'avenir, sans un effort pour raffermir l'âme et la préparer aux privations et aux épreuves.<br />
<br />
Cette confiance n'est point une indolente étourderie vivant au jour le jour, dans le rêve trompeur qu'aux premiers roulements du tonnerre il sera toujours temps de se réveiller pour se mettre, tant bien que mal, à l'abri de la tempête, comme si le meilleur parti à prendre actuellement était de jouir, sans aucune préoccupation, de la tranquillité présente, des rayons du soleil présent si peu durables soient-ils.<br />
<br />
Cette confiance n'est pas la triste résignation du fatalisme paralysé par la conviction que sous l'aveugle déchaînement des choses il n'y a qu'à courber le dos pour recevoir le coup le moins mal possible et pour tâcher d'en amortir le choc avec la souplesse de la balle qui se laisse rouler en tous sens et heurter de toutes parts sans résistance ni raideur inutiles.<br />
<br />
Qu'est-ce donc que votre confiance ? C'est la foi dans l'amour de Dieu. Nos cognovimus et credidimus caritati, quam habet Deus in nobis (I Jn 4, 16), « et nous, nous avons connu l'amour que Dieu a pour nous et nous y avons cru ». Elevez votre pensée au-dessus des ouragans et des tempêtes d'ici-bas. Vous croyez de toute votre âme que le cours du monde qui nous porte dans ses tourbillons, qui nous meurtrit et nous étourdit, n'est point le débordement irréfléchi ni le choc de forces aveugles qui se précipitent au hasard. Pour déconcertants et sombres que puissent en être les gouffres et les rapides, vous croyez que la toute-puissance d'un amour et d'une sagesse sans borne conduit toutes choses ici-bas, veille sur toutes choses, dirige toutes choses vers un but : le triomphe de la miséricorde de Dieu, plus encore que de sa justice.<br />
<br />
Vous savez que Dieu n'oublie jamais le but de ses œuvres et que leur sagesse brillera dans le ciel lorsqu'il nous sera donné de parcourir, dans la vision divine, les sentiers de cette vie que nos pas auront marqués de traces sanglantes, et que sa grâce aura semés de fleurs.<br />
<br />
Vous savez que rien au monde, ni l'amour d'une jeune mère, ni la mutuelle tendresse de nouveaux mariés, que rien ne ressemble, même de loin, à la tendresse d'amour infini dont Dieu entoure et embrasse toutes nos âmes et chacune d'elles en particulier.<br />
<br />
Vous savez que, dans ses éternels, grandioses et magnifiques conseils sur les destinées du monde et de l'humanité, vous savez que, si sa prévoyance daigne se pencher jusque sur les lys des champs et les oiseaux du ciel, l'amour de Dieu a des desseins particuliers sur chacune de vos âmes, fût-elle la plus ignorée et la plus chétive aux yeux des hommes. Ces desseins sont d'une si affectueuse et si sage sollicitude que vous n'en mettrez vous-mêmes jamais autant à préparer tout ce qui pourra servir à accueillir, égayer et embellir la venue des chers petits que vous attendez en une joyeuse espérance.<br />
<br />
Le cours de votre existence, les pas et les instants de votre vie sont peut-être bien humbles et bien cachés, mais Dieu ne les laissera pas à la merci du hasard. Tout est voulu ou permis par la sagesse et puissance de sa bonté, qui tourne au bien même le mal. A vos heures de travail intense, dans vos repos, dans l'inconscience de votre sommeil, à aucun instant de vos journées l'œil et la main de Dieu ne cesseront jamais de soutenir de leur vigilant amour, de guider et de conduire vos vies et la vie de vos enfants.<br />
<br />
Vous avez confiance l'un et l'autre dans votre amour réciproque et vous vous êtes confiés l'un à l'autre votre vie et votre bonheur : ayez une foi plus vive encore et plus inébranlable dans l'amour de Dieu pour vous ; ayez une foi qui s'élève à la hauteur incalculable de cet amour qui surpasse et dépasse jusqu'à l'amour humain le plus profond et le plus puissant.<br />
<br />
Vous vous êtes donnés l'un à l'autre : donnez-vous ensemble à Dieu. Pourriez-vous sauvegarder votre bonheur si vous viviez chacun pour soi, sans vous préoccuper de ce que pense et désire l'âme unie à votre âme ? Certes non. Vous auriez encore moins de succès à assurer le bonheur de votre vie commune, si vous la viviez à votre guise, loin de Dieu et de ses desseins d'amour sur vous, dans le mépris ou la négligence de ce qu'il désire et attend de vous.<br />
<br />
Laissez-vous donc guider par Dieu ; et les commandements de la loi chrétienne, la direction et les conseils de l'Eglise, les dispositions de la Providence illumineront vos pas jour par jour sur le chemin de la vie.<br />
<br />
Par la confiance en Dieu et la soumission à sa loi, la foie de votre foyer demeurera<br />
<br />
Ayez confiance en Dieu, ayez confiance dans le Rédempteur : il a vaincu le monde. N'attendez point de révélation extraordinaire des desseins de Dieu sur vous : ils se révéleront peu à peu dans la succession des faits et dans les événements de la journée et de la vie.<br />
<br />
Croyez à l'amour divin qui vous a montré la voie à parcourir ; marchez dans cette voie avec droiture et vertu, et non au gré de vos caprices ; sinon vous n'éviterez point les heurts, les dissonances d'avec les harmonies divines, et votre voix détonnera dans le doux chant dont Dieu veut faire résonner votre famille. Le refus de marcher dans le chemin de Dieu, n'est-ce pas là souvent la secrète raison, la triste origine de tant de vies qui ont commencé dans une rayonnante félicité pour finir dans les plus sombres misères ? Ne soyez point des enfants capricieux, entêtés, qui se débattent dans les bras de leur mère pourtant si pleins d'amour ; n'imitez point ces hommes, bien nombreux, qui, nouveaux Pharaons, s'endurcissent et se débattent dans les mains de Dieu, et qui, au lieu de se laisser conduire en fils, rejettent sa loi, ferment l'oreille à l'inspiration de sa grâce qui les pousse vers une vie plus intégralement chrétienne : voilà d'où viennent les désaccords, les heurts, les chutes, les maladies, les ruines.<br />
<br />
Cette foi confiante dans l'amour de Dieu, bien-aimés fils et filles, cette docile et cordiale fidélité à vous laisser guider par Dieu, à observer ses commandements, à accepter avec une filiale soumission les dispositions de sa Providence sur vous, voilà, Nous en avons l'assurance, les résolutions que vous avez prises pour cette vie commune dont le prêtre a béni les débuts.<br />
<br />
Mais ces vertus si belles et si nécessaires, où les prendrez-vous ? Vous ne les obtiendrez, vous ne les conserverez, vous ne les développerez qu'aux sources profondes et limpides de l'eau vive qui jaillit pour la vie éternelle, c'est-à-dire dans l'assiduité à écouter la parole de Dieu et à vous instruire de plus en plus dans les enseignements de l'Eglise ; dans la prière qui vous réunira matin et soir ; dans l'assistance à la sainte messe et la fréquentation des sacrements de pénitence et d'Eucharistie, en un mot dans la vie chrétienne active et vertueuse.<br />
<br />
Alors, oui, le printemps d'aujourd'hui durera, il fleurira dans vos âmes, il ne cessera que pour se transformer aux couronnes de fruits brillants et aux gerbes de moissons dorées de cet été sans automne et sans hiver qu'est l'éternelle joie des bienheureux du ciel.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Le_Myst%C3%A8re_de_la_Paternit%C3%A9_%E2%80%93_19_mars_1941_%E2%80%93&diff=2133Le Mystère de la Paternité – 19 mars 1941 –2012-01-31T11:50:15Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 19 mars 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Votre foi dans le Christ et dans l'Eglise, son Epouse, vous a conduits à Nous, chers enfants, à votre Père à tous, au Père de tous les croyants. Vous venez Nous demander de bénir au nom du Christ, de renforcer en quelque sorte par Notre prière, devant Dieu et devant le peuple chrétien, votre union sacrée et votre espérance de la voir fleurir et s'épanouir en fils et filles, car vous avez la conviction que sans les enfants manquerait le couronnement de la joie au bonheur si grand déjà que Dieu vous accorde par l'union de vos âmes.<br />
<br />
Elle ne se trompe pas, votre foi, lorsqu'elle reconnaît dans le pape avant tout le Père ; mais cette paternité spirituelle et universelle a beau être très grande, elle n'est qu'un reflet lointain de la suprême paternité, transcendante et infinie, que saint Paul, le Docteur des nations, adorait en fléchissant le genou devant le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ : « A cause de cela, je fléchis le genou devant le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de qui tire son nom ''omnis paternitas'', toute paternité, dans les cieux et sur la terre » (Ep 3,14-15). C'est le sublime mystère de la paternité qui éclate dans l'éternelle et inaccessible lumière divine, dans l'impénétrable et incompréhensible secret de la Trinité bienheureuse, où tout l'être, toute la vie, toutes les infinies perfections du Père éternellement se communiquent au Fils, pour s'épancher dans leur commun Amour infini, qui est l'Esprit-Saint. Eternelle paternité qui engendre l'éternelle sagesse et qui s'écoule avec elle dans l'éternel amour. Paternité parfaite, infinie, ineffable, dont le fruit, le terme, le Fils, est semblable, bien plus, égal au Père et un avec le Père dans l'identité de la nature indivise, ne se distinguant de lui qu'en tant que personne qui le connaît et l'aime infiniment. La vie du temps ne connaît qu'une paternité transitoire, dont le fruit, l'enfant, se libère pour vivre de sa propre vie, tandis que la paternité des siècles éternels est éternelle génération et que, dans le présent sans borne de l'éternité, elle ne cesse jamais, toujours en acte et en vie, de dominer tous les temps, ces temps que lance dans leur course à travers le monde une effusion d'immense bonté créatrice, et où le souffle divin de l'Esprit s'étend sur les eaux de l'univers en son enfance, pour répandre la vie, rayonnement de cet amour paternel sur les œuvres de la toute-puissante main divine.<br />
<br />
Ce mystère de la paternité est la gloire de Dieu, comme le Seigneur lui-même le proclame par la bouche d'Isaïe : « Moi qui fais enfanter les autres, n'enfanterai-je pas moi-même ? » (Isaïe, LXVI, 9). Aussi déclare-t-il à son Fils qui lui est égal en divinité et en éternité : « Avant l'étoile du matin je t'ai engendré » (Ps., CIX, 3).<br />
<br />
Qu'est-ce que la paternité ? Etre Père, c'est communiquer l'être ; bien plus, c'est mettre dans cet être le mystérieux rayon de la vie. Dieu est Père de l'univers : « Pour nous, il n'y a qu'un seul Dieu, le Père de qui viennent toutes choses » (I Co 8, 6). Dieu est le Père, le Créateur du ciel, du soleil, des étoiles qui brillent en sa présence et chantent sa gloire ; Dieu est le Père qui a construit et modelé cette terre où il a semé les fleurs et les bois, multiplié les féconds et gracieux nids d'oiseaux, les inaccessibles retraites des poissons et les bancs de coraux, les bercails et les troupeaux, les refuges des fauves et les tanières des lions rugissants prêts à bondir sur leur proie : toute cette vie immense et variée est fille de l'amour de Dieu, dirigée, soutenue, enveloppée dans sa croissance et dans son développement par la paternelle Providence divine.<br />
<br />
Mais la paternité s'élève plus haut ; avec l'être, avec la vie végétale et animale, elle communique encore une vie supérieure, la vie d'intelligence et d'amour. Les anges aussi sont enfants de Dieu. Esprits purs, libres du poids de la chair, sublimes images de la Trinité qu'ils contemplent et qu'ils aiment, les anges participent d'une manière spéciale à la paternité divine. Selon l'enseignement de saint Thomas 2, l'ange, par la lumière de son intelligence, éclaire et perfectionne un autre ange et devient ainsi son père, à la façon dont le maître est père de son disciple, communiquant sans cesse de nouvelles impulsions à sa vie intellectuelle.<br />
<br />
L'homme est également un enfant de Dieu, une image connaissante et aimante de la Trinité. Esprit uni à la matière, Dieu l'a créé de peu inférieur aux anges ; mais en tant que père, il est en quelque sorte supérieur à l'ange : l'ange ne communique à l'ange que la lumineuse activité de sa propre intelligence, tandis que l'homme prête à Dieu son concours dans l'acte de la création et infusion de l'intelligence même en ses enfants, par le fait qu'il engendre le corps qui la recevra.<br />
<br />
Chers époux, rappelez-vous le grand jour de la création de l'homme et de sa compagne. Avant d'unir, en une merveilleuse opération, l'esprit à la matière, la Trinité divine semble se recueillir : « Faisons, dit-elle, l'homme à notre image et ressemblance. » Mais si Dieu prend un peu de terre pour former le premier homme, la première vie humaine, vous le voyez, dès qu'il veut que cette première vie se propage et se multiplie, tirer la seconde vie non plus de la terre inerte, mais du flanc vivant de l'homme ; et ce sera la femme, sa compagne, nouveau rayon d'intelligence et d'amour, coopératrice d'Adam dans la transmission de la vie, formée de lui-même et semblable à lui dans toute sa descendance et sa prospérité. Et lorsque, conduisant Eve à Adam, Dieu la lui donne et qu'il prononce l'ordre solennel d'où jaillira la vie : « Croissez et multipliez », ne vous semble-t-il pas que le Créateur transfère à l'homme même son auguste privilège de la paternité, s'en remettant désormais à lui et à sa compagne du soin de faire couler à pleins bords dans le genre humain le fleuve de vie qui émane de son propre amour ?<br />
<br />
Mais l'amour infini d'un Dieu, qui est charité, connaît des voies plus hautes encore pour répandre sa lumière et ses flammes, pour communiquer comme père une vie semblable à la sienne. L'ange et l'homme sont les enfants de Dieu et ils manifestent Dieu par l'image et ressemblance qu'ils ont reçues de lui dans l'ordre naturel comme simples créatures ; mais Dieu possède une paternité plus sublime encore, qui engendre des fils d'adoption et de grâce en un ordre supérieur aux natures de l'homme et des anges, et qui les rend participants de la vie divine elle-même : elle les appelle à partager sa propre béatitude dans la vision de son Essence, dans l'inaccessible lumière où il se révèle, lui et l'intime secret de son incomparable paternité, avec le Fils et l'Esprit-Saint, aux enfants de grâce. En cette sublime lumière, Dieu règne, le Dieu créateur, sanctificateur et glorificateur, le Dieu riche de prédilection pour la dernière de ses créatures intelligentes, pour l'homme, enfant de colère en tant que fils d'Adam, son père coupable (cf. Eph. Ep 2, 3) ; et Dieu régénère l'homme, il le fait, par l'eau et l'Esprit-Saint, renaître enfant de grâce, frère de Jésus-Christ, nouvel Adam sans tache, pour le rendre cohéritier de sa gloire céleste. Or, dans la transmission, la conservation et le développement de cette vie surnaturelle qui nous achemine vers une telle gloire céleste, Dieu a voulu, comme pour la vie naturelle, s'assurer la collaboration de l'homme.<br />
<br />
Tel est, bien-aimés fils et filles, l'incomparable mystère dans les profondeurs duquel vous introduit votre mariage. Entrez-y comme dans un sanctuaire de la Très Sainte Trinité, pénétrés de respect, de crainte filiale et d'amour confiant, avec la conscience de vos responsabilités et de la grandeur du ministère que vous avez à remplir. « Faisons l'homme à notre image et ressemblance » : vous aussi, vous aurez à prononcer ces paroles, paroles humaines, et paroles divines qui se confondent sur vos lèvres et dans votre cœur. Pesez ces paroles de paternité qui se prononcent de la part de Dieu et de votre part à vous : vos enfants, à votre image à vous et à votre ressemblance. Oui, vos enfants vous ressembleront, ils seront tels que vous êtes, par la nature humaine qu'ils reçoivent de vous dans la génération ; mais vous ressembleront-ils aussi par la vie surnaturelle ? Oui, car vous aurez à cœur, Nous en avons l'intime persuasion, de leur procurer sans retard le baptême qui vous a régénérés vous-mêmes devant Dieu, et qui vous a faits enfants de grâce, héritiers du ciel ; et vous ne manquerez pas à ce devoir, lors même que pour franchir le seuil du paradis un petit ange réclamerait de votre foi et de votre amour une douleur ou un sacrifice.<br />
<br />
Elevez vos enfants dans la foi, dans l'amour et la crainte de Dieu ; insufflez dans leur âme cette sagesse de vie qui fait le chrétien, cette sagesse qui engage et garde le chrétien dans le sentier de la vertu, à travers même cette multitude d'ennemis qui menacent la jeunesse. Soyez-leur et restez-leur toujours des modèles de vertu, pour que vos enfants n'aient qu'à vous ressembler et qu'il leur suffise d'une louange, celle d'être votre portrait. Ainsi vous répondrez pleinement aux desseins pour lesquels Dieu leur donne par votre intermédiaire une vie semblable à la vôtre. Que votre conduite leur soit une lumineuse règle de vie. Puissent-ils, lorsque vous ne serez plus à leurs côtés, garder le souvenir de vos avis, de ces avis auxquels vous aurez su garantir un fondement et donner une confirmation par votre fidélité à tous les devoirs de la vie chrétienne, par votre conscience du devoir profonde et délicate, par une foi et une confiance en Dieu à toute épreuve, par une mutuelle affection, par une charitable et bienfaisante bonté qui se prodigue à toutes les misères.<br />
<br />
Vos enfants attendent beaucoup des soins vigilants dont vous entourez leurs premiers pas et l'éveil de leur intelligence et de leur cœur. En les remettant plus tard aux mains de maîtres qui méritent votre confiance de parents chrétiens, vous leur garderez toujours l'aide de vos conseils et de vos encouragements. Mais la voix de vos exemples résonnera plus haut que la voix de vos paroles : vos exemples traduiront continuellement aux yeux de vos enfants, durant de longues années, la réalité quotidienne de votre vie, que vous la passiez dans l'intimité ou dans l'abandon du foyer domestique ; et vos enfants examineront vos exemples, ils les jugeront, avec la terrible clairvoyance et l'inexorable pénétration de leurs jeunes regards.<br />
<br />
Comme elle est belle et mémorable, cette bénédiction que Raguel prononce sur le jeune Tobie, lorsqu'il apprend de qui il est le fils : ''Benedictio sit tibi, fili, quia boni et optimi viri filius est'', « Sois béni, mon fils, car tu es fils d'un homme de bien, du meilleur des hommes » (Tb 7, 7). Le vieux Tobie n'était plus riche des biens de la terre ; le Seigneur lui avait envoyé l'épreuve de l'exil et de la cécité ; mais il avait pour richesse quelque chose de mieux : les admirables exemples de sa vertu et les sages avis qu'il donnait à son fils. Nous aussi nous vivons en des temps difficiles ; et vous ne réussirez peut-être pas toujours à procurer à vos enfants la vie belle et aisée dont vous rêvez pour eux : la vie tranquille et contente, avec le pain quotidien — lequel, grâce à la divine Providence, ne leur manquera jamais, Nous l'espérons — et avec tous les biens que vous aimeriez leur assurer. Mais plus encore que les biens de cette terre, qui ne changent pour personne, pas même pour les puissants et les hommes de bonne chère, cette vallée de larmes en un paradis de délices, vous devez donner à vos enfants et héritiers des biens supérieurs : ce pain et cette richesse de la foi, cet esprit d'espérance et de charité, cet élan de vie chrétienne, de vaillance et de fidélité où votre tâche de père et de mère conscients de la paternité que vous avez reçue du ciel, les fera grandir et progresser, pour votre réconfort, devant Dieu et devant les hommes.<br />
<br />
Afin que se réalisent ces vœux, Nous implorons sur vous, chers nouveaux mariés, l'abondance des faveurs célestes, et la paternité spirituelle de Notre cœur vous en donne un gage dans la Bénédiction apostolique.<br />
<br />
<br />
'''S'adressant ensuite à une délégation du chapitre des saints Celse et Julien, le Saint-Père poursuivit :<br />
'''<br />
Que cette bénédiction descende — comme de coutume — et s'étende sur tous Nos autres chers fils et filles ici présents, et en particulier sur la nombreuse et à Nous bien agréable délégation de l'illustre chapitre des saints Celse et Julien avec son très digne archi-prêtre et de la paroisse romaine de Saint-Jean des Florentins. Que cette bénédiction descende plus que jamais abondante en ce jour consacré au nom et à la vénération du patriarche saint Joseph, père putatif du Rédempteur, ceint par le Père Eternel de la brillante auréole de paternité vigilante, prudente et prévoyante, dont il a voulu voiler aux yeux du monde méchant la conception virginale de son divin Fils, fait chair dans le sein de l'Epouse de Joseph, Marie, la très sainte servante du Seigneur.<br />
<br />
Dans le territoire de votre paroisse, Notre cœur a laissé de doux souvenirs. C'est là qu'il y a soixante-cinq ans, en ce même mois de mars, Nous fûmes dans la lumière de Rome appelé à la vie naturelle et, le jour suivant, régénéré par le saint baptême à la vie surnaturelle de la grâce. C'est au milieu de vous, chers paroissiens, que Nous avons grandi ; avec vous Nous avons respiré le même air ; avec vous Nous Nous sommes incliné et avons prié devant les mêmes autels ; avec vous Nous avons contemplé, de plus loin que maintenant, la coupole du plus grand temple de la chrétienté et admiré l'ange qui, à la cime du Môle d'Hadrien, remet l'épée au fourreau en signe de la cessation du châtiment divin, comme Nous voudrions que les nations aujourd'hui en conflit puissent le plus tôt possible rengainer leur épée par la conclusion d'une paix sûre dans la justice et dans la charité, dans l'honneur et la liberté de tous. C'est pourquoi Nous vous recommandons à la protection du précurseur, votre patron spécial et, en ce jour de pieuse festivité, à celle du patron universel de l'Eglise, le glorieux et très chaste gardien de Jésus et de la Vierge sa Mère, à qui, de grand cœur, Nous confions votre bonheur terrestre et votre bonheur éternel.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_deux_%C3%A9poux_ministres_du_Sacrement_de_Mariage_%E2%80%93_5_mars_1941_%E2%80%93&diff=2132Les deux époux ministres du Sacrement de Mariage – 5 mars 1941 –2012-01-31T11:48:26Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 5 mars 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Vous n'ignorez pas qu'en tout sacrement celui qui l'administre n'est que l'instrument de la main de Dieu. L'homme, certes, fait quelque chose : il accomplit une cérémonie symbolique et prononce des paroles qui signifient la grâce propre au sacrement ; mais cette grâce, Dieu est seul à la produire : il se sert de l'homme comme d'un ministre agissant en son nom, à l'instar du pinceau dont le peintre se sert pour dessiner et colorer sur la toile l'image présente à son esprit d'artiste. Dieu est donc l'agent principal : c'est lui-même qui agit, tandis que le ministre n'est qu'une cause instrumentale, un instrument qui agit sous l'impulsion de Dieu. C'est pourquoi, ce que le sacrement confère et produit, c'est-à-dire la grâce, qui nous fait participer à la nature de Dieu, ressemble, en tant qu'effet de Dieu, à la cause divine et non pas au ministre1. Autre conséquence, l'efficacité du sacrement ne peut être contaminée par le ministre : elle est comme la lumière du soleil, qui ne peut se souiller au contact des choses qu'elle illumine2.<br />
<br />
Or, dans le sacrement de mariage, quel est l'instrument de Dieu qui a produit la grâce dans vos âmes ? Est-ce peut-être le prêtre qui vous a bénits et unis dans le mariage ? Non. Il est vrai que, sauf certains cas exceptionnels bien déterminés3, l'Eglise prescrit aux époux, pour que leur lien et leurs engagements mutuels soient valides et leur procurent la grâce, de les échanger en présence du prêtre ; mais le prêtre n'est qu'un témoin qualifié, le représentant de l'Eglise, et ne fait que présider les cérémonies religieuses qui accompagnent le contrat matrimonial. C'est vous-mêmes qui, en présence du prêtre, avez été constitués par Dieu ministres du sacrement de mariage ; c'est de vous qu'il s'est servi pour établir votre indissoluble union et verser dans vos âmes les grâces qui vous rendront constamment fidèles à vos nouveaux devoirs. A quel honneur et à quelle dignité Dieu vous a élevés ! Ne semble-t-il pas avoir voulu que vous soyez, dès le premier instant que vous quittiez le saint autel, les coopérateurs et les instruments de ses œuvres ? Lui-même vous en a ouvert et sanctifié le chemin.<br />
<br />
Dans le sacrement de mariage, l'acceptation mutuelle de vos personnes, votre consentement réciproque manifesté par la parole, est un acte extérieur qui a attiré sur vous les grâces divines ; dans votre vie conjugale, vous serez les instruments de l'art divin en modelant la matière, le corps de vos enfants. Vous appellerez dans la chair tirée de votre chair l'âme spirituelle et immortelle et c'est à votre appel que Dieu la créera, ce Dieu qui a fidèlement produit la grâce à l'appel du sacrement. Et lorsque viendra au monde votre premier-né, la nouvelle Eve redira avec la mère du genre humain : Possedi hominem per Deum, « j'ai acquis un homme par le secours de Dieu » (Gn 4, 1). Dieu seul peut créer les âmes, Dieu seul peut produire la grâce ; mais il daignera se servir de votre ministère pour tirer les âmes du néant, comme il s'en est servi pour vous donner la grâce.<br />
<br />
Dans l'une et l'autre de ces collaborations, Dieu attendra que vous disiez oui, pour user de sa toute-puissance créatrice. Lui qui, « maître de sa force, juge avec douceur et gouverne avec une grande indulgence » (Sg 12, 18), il ne veut point vous traiter comme des instruments inertes ou sans raison, à la façon du pinceau dans la main du peintre : il veut que librement vous posiez l'acte qu'il attend pour accomplir son œuvre de création et de sanctification.<br />
<br />
Bien-aimés fils et filles, vous vous trouvez donc comme placés devant le Créateur pour préparer ses voies ; mais il vous a laissés libres et profondément responsables. Il dépendra de vous aussi que viennent au seuil de la vie ces âmes simples qui ne savent rien, et que l'Amour infini désire si vivement appeler du néant pour en faire un jour ses élus dans l'éternelle félicité du ciel ; et il dépendra, hélas ! également de vous que ces âmes restent à l'état d'images dans la pensée de Dieu, d'images magnifiques, il est vrai, mais qui auraient pu devenir des rayons du Soleil illuminant tout homme venant en ce monde, tandis qu'elles ne seront jamais, par la lâcheté et l'égoïsme des hommes, que des lumières éteintes.<br />
<br />
Ne vous êtes-vous pas, ministres de son sacrement, librement unis devant Dieu, pour lui demander, saintement et librement, dociles au commandement donné à nos premiers parents, les âmes qu'il brûle de vous confier ? Devant l'autel, seule votre libre volonté a pu vous unir par le lien du sacrement de mariage et nul autre consentement ne pouvait se substituer au vôtre. D'autres sacrements, qui sont plus nécessaires, peuvent, en l'absence du ministre, être suppléés par la puissance de la miséricorde divine ; Dieu peut se passer des signes extérieurs pour porter la grâce dans les cœurs : au catéchumène qui n'a personne pour lui verser l'eau sur le front, au pécheur qui ne trouve personne pour l'absoudre, le Bon Dieu accordera, en réponse à leurs actes de désir et d'amour, la grâce qui les rend ses amis et ses fils, même sans l'acte sacramentel du baptême et de la confession.<br />
<br />
Mais dans le sacrement de mariage, personne ne peut suppléer les ministres, de même que personne ne peut se substituer aux conjoints eux-mêmes. Ici triomphe l'incomparable splendeur du plus grand des dons, la liberté de la volonté humaine : l'homme, en tant que doué d'intelligence, a la terrible responsabilité d'être le maître de lui-même et de la vie, de sa vie à lui et de celle d'autrui, de la vie qui monte vers l'éternité ; il a le pouvoir d'en arrêter le cours en d'autres, par un acte de rébellion contre Dieu. Un aveugle instinct assure la continuation de la vie dans les espèces privées de raison ; mais, pour la race humaine, pour la race d'Adam, tombée, et qu'a rachetée et sanctifiée le Verbe incarné Fils de Dieu, les froids et astucieux calculs de l'égoïsme jouisseur peuvent s'employer à couper la fleur d'une vie corporelle qui désire s'ouvrir et s'épanouir. Pareil délit empêche le bras de Dieu d'appeler à l'existence le sourire des âmes innocentes qui auraient vivifié ce corps et élevé ces membres à la dignité d'instruments de l'esprit et de la grâce jusqu'à participer un jour à la récompense de leurs vertus et à la joie éternelle dans la gloire des saints.<br />
<br />
Pour vous, chers époux, conscients de l'inviolable fin du sacrement de mariage, vous préparerez un berceau aux dons de la toute-puissance de Dieu, même si peut-être la divine Providence allait permettre que vos vœux ardents et vos prières ne fussent pas exaucés et que restât vide le berceau préparé avec tant d'amour. Vous verrez sans doute plus d'une fois la grâce inspirer à des âmes généreuses de renoncer aux joies de la famille pour devenir des mères au cœur plus large et d'une plus haute fécondité surnaturelle ; mais vous, dans la belle et sainte union du mariage chrétien, vous avez à votre disposition la vie à communiquer, non seulement dans l'ordre naturel, mais aussi dans l'ordre spirituel et surnaturel, avec la puissance redoutable d'en arrêter le cours.<br />
<br />
Cette faculté de transmettre la vie est pour vous un insigne honneur, mais elle vous soumet dans son usage à la loi de Dieu, dont la sévérité ne doit pas vous surprendre à l'égard de ceux qui, par une détestable faute, la détournent de sa haute et véritable fin. Qu'ils craignent, ceux-là ! (cf. Gen. Gn 38,10). Pour vous, chrétiens sincères et obéissants à Dieu, soyez sans crainte, puisque vous avez compris l'étroite collaboration qui unit l'homme et Dieu dans la transmission de la vie. Votre intelligence qu'illumine la foi ne saurait concevoir que Dieu puisse permettre à l'homme de violer impunément les dispositions de sa Providence et de son gouvernement, car ces dispositions furent hautement sanctionnées lorsque, dès le premier jour de l'apparition de l'homme et de la femme sur la terre, Dieu institua le lien du mariage ; et ce lien, le Christ l'a élevé à la dignité de grand sacrement, pour appeler à la vie d'ici-bas des âmes que Dieu destine à se sanctifier dans la lutte et dans la victoire sur le mal, afin de le contempler, aimer et louer dans la bienheureuse éternité.<br />
<br />
O chers jeunes époux, levez les yeux au ciel : dans ce sacrement de votre mariage dont vous avez été les ministres, Dieu a marqué et disposé pour vous la voie qui y monte. Puisse-t-il vous faire toujours mieux comprendre et respecter le pouvoir dont vous disposez et qui vient également de lui. Puisse-t-il faire de vous les fidèles instruments de sa Providence, pour le rôle éminent qu'il vous a confié dans l'œuvre de la puissance créatrice de la Très Sainte Trinité. Cette grâce, Nous l'implorons sur vous et Nous vous donnons du fond du cœur, en gage des dons célestes les plus abondants, Notre Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_pri%C3%A8re_commune_en_famille_%E2%80%93_12_f%C3%A9vrier_1941_%E2%80%93&diff=2131La prière commune en famille – 12 février 1941 –2012-01-31T11:46:13Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 12 fevrier 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Votre présence Nous apporte un grand réconfort et une grande espérance. Nous avons sous les yeux une assemblée de jeunes familles chrétiennes que le Seigneur se plaît à combler de ses faveurs, lui que vous invoquiez au pied de l'autel tandis que le prêtre bénissait votre union. Vous avez alors en effet invoqué le Seigneur ; à la prière du ministre de Dieu vous avez uni votre prière : c'est par la prière que vous avez commencé votre commune vie nouvelle. Allez-vous continuer à prier ? Invoquerez-vous encore Celui qui est la source de toute paternité et dans l'ordre de la nature et dans l'ordre de la grâce, le Père qui est dans les cieux ? Oui, votre présence ici Nous en donne un gage. Vous venez à Nous pour implorer sur votre jeune foyer Notre bénédiction de Père ; Notre bénédiction confirmera la prière du prêtre et la vôtre ; elle les renforcera pour toute la durée de votre vie : votre présence Nous est une promesse de fidélité à la prière.<br />
<br />
Nous avons brièvement commenté dans Notre dernier discours aux jeunes époux les avis que saint François de Sales donne aux gens mariés. Sur la prière des époux, son pinceau a de délicieuses touches que Nous voudrions aujourd'hui offrir à votre considération :<br />
« C'est la plus grande et fructueuse union du mari et de la femme que celle qui se fait en la sainte dévotion, à laquelle ils se doivent entreporter l'un l'autre à l'envi. Il y a des fruits, comme le coing, qui, pour l'âpreté de leur suc, ne sont guère agréables qu'en confiture ; il y en a d'autres qui, pour leur tendreté et délicatesse, ne peuvent durer, s'ils ne sont aussi confits, comme les cerises et abricots.<br />
Ainsi les femmes doivent souhaiter que leurs maris soient confits au sucre de la dévotion, car l'homme sans dévotion est un animal sévère, âpre et rude ; et les maris doivent souhaiter que leurs femmes soient dévotes, car sans la dévotion, la femme est grandement fragile et sujette à déchoir ou ternir en la vertu »<br />
<br />
C'est une grande vertu que la dévotion ; c'est la sauvegarde de toutes les autres vertus. Mais l'acte le plus beau et le plus ordinaire de la dévotion est la prière. L'homme est esprit et corps, et la prière est la nourriture quotidienne de l'esprit, comme le pain matériel est la nourriture quotidienne du corps. La prière a donc d'heureux effets. Mais de même que l'union fait la force, ainsi la prière en commun possède une plus grande efficacité sur le cœur de Dieu. Aussi Notre-Seigneur a-t-il accordé une bénédiction spéciale à la prière faite en commun et il a proclamé à ses disciples : « Je vous le dis encore : si deux d'entre vous s'accordent sur la terre, quelque chose qu'ils demandent, ils l'obtiendront de mon Père qui est aux cieux. Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d'eux » (Mt 18, 19-20). Mais quelles âmes se trouveront plus véritablement et plus intimement unies au nom de Jésus-Christ pour la prière, que les âmes où le saint sacrement de mariage a imprimé l'image vivante et permanente de la sublime union du Christ avec son Eglise, avec son Epouse bien-aimée sortie au Golgotha de son côté ouvert ?<br />
<br />
C'est donc une grande et fructueuse union que celle des époux qui se mettent à genoux l'un à côté de l'autre pour demander à Dieu de conserver, d'accroître et de bénir la fusion de leurs vies. Tous les chrétiens doivent, sans négliger la prière individuelle, accorder dans leur vie une place à la prière en commun, qui leur rappelle leur fraternité dans le Christ et leur devoir de sauver leurs âmes, non point isolés les uns des autres, mais dans la collaboration : à plus forte raison la prière des époux ne doit-elle pas les éloigner et les séparer, tels des ermites, dans une méditation solitaire, au point de ne les réunir que rarement devant Dieu ou au pied de l'autel. Or où donc leurs cœurs, leurs intelligences, leurs volontés se rapprocheront-ils, se pénétreront-ils dans une union plus profonde, plus forte et plus solide que dans la prière à deux, où une même grâce divine descend du ciel pour harmoniser toutes leurs pensées, leurs affections et leurs désirs ? Quel doux spectacle pour les anges que cette prière de deux époux qui lèvent les yeux au ciel et implorent sur eux-mêmes et sur leurs espérances le regard de Dieu et sa main tutélaire ? Peu de scènes de l'Ecriture Sainte valent la prière de Tobie avec sa jeune épouse Sara ; loin d'ignorer les périls qui menacent leur félicité, ils prennent confiance en s'élevant devant Dieu au-dessus des basses vues de la chair, et ils s'encouragent à la pensée que, fils de saints, il ne leur convient point de s'unir « à la manière des Gentils, qui ne connaissent point Dieu » (Tb 8,4-5).<br />
<br />
Comme Tobie et Sara, vous connaissez Dieu, jeunes époux, Dieu qui fait toujours lever, voilé ou éclatant, son soleil sur votre matin. Pour pleines et encombrées que soient vos journées, sachez trouver au moins un instant pour vous agenouiller et pour commencer votre journée en élevant votre cœur vers le Père céleste, et en implorant son aide et sa bénédiction. Le matin, au moment où le travail quotidien vous réclame et vous sépare jusqu'à midi, peut-être même jusqu'au soir, lorsqu'après un rapide déjeuner vous échangez une parole ou un regard d'adieu, n'oubliez jamais de réciter ensemble ne fût-ce qu'un simple Notre Père ou Je vous salue, et de remercier le ciel du pain qu'il vous a donné. La journée, longue et peut-être pénible, vous tiendra éloignés l'un de l'autre ; mais vous serez toujours, proches ou lointains, sous le regard de Dieu ; et peut-être même que vous élèverez vos cœurs ensemble en de pieux élans vers Dieu, en qui vous resterez unis et qui veillera sur vous et sur votre félicité.<br />
<br />
Et quand tombera le soir sur la dure besogne achevée et que vous vous réunirez au foyer pour goûter la joie d'une commune présence et deviser ensemble des événements du jour, vous donnerez à Dieu, dans ces moments si doux et si précieux d'intimité et de repos, la place qui lui revient. N'ayez crainte : Dieu ne viendra pas vous importuner ni troubler la délicieuse intimité de vos entretiens ; au contraire, Dieu vous entend ; c'est lui qui vous a, dans son cœur, préparé et ménagé ces instants, et il vous donnera par sa présence de Père plus de tendresse et de réconfort.<br />
<br />
Au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Nous vous en supplions, chers jeunes époux, ayez à cœur de garder cette belle tradition des familles chrétiennes : la prière du soir en commun. Elle réunit à la fin de chaque jour, pour implorer la bénédiction de Dieu et honorer la Vierge Immaculée par le rosaire de ses louanges, tous ceux qui s'endormiront sous le même toit : vous deux, et puis, dès qu'ils auront appris de vous à joindre leurs menottes, les petits que la Providence vous confiera, et enfin vos domestiques et collaborateurs, — si le Seigneur en a placés auprès de vous pour vous aider dans les travaux de la maison — car eux aussi sont vos frères dans le Christ et ont besoin de Dieu. Que si les dures et inexorables exigences de la vie moderne ne vous laissent pas le loisir de consacrer à la reconnaissance envers Dieu ces quelques minutes bénies, ni d'y ajouter, suivant une coutume aimée de nos pères, la lecture d'une brève vie de saint, du saint que l'Eglise nous propose comme modèle et protecteur spécial pour chaque jour, gardez-vous de sacrifier en entier, pour rapide qu'il doive être, ce moment qu'ensemble vous consacrez à Dieu, pour le louer et pour lui présenter vos désirs, vos besoins, vos peines et vos occupations.<br />
<br />
De telles pratiques de dévotion ne reviennent point à transformer la maison en église ou en oratoire : ces exercices ne sont que les mouvements sacrés d'âmes qui ont pris conscience de la force et de la vie de la foi. Dans la vieille Rome païenne elle-même, la demeure familiale avait son petit sanctuaire avec un autel dédié aux dieux lares ; on les ornait de guirlandes de fleurs, spécialement aux jours de fêtes ; on y offrait des sacrifices avec des supplications1. C'était un culte entaché de l'erreur polythéiste ; mais cette dévotion devrait faire rougir de honte beaucoup de chrétiens, qui, le baptême au front, ne trouvent ni une place dans leurs chambres pour l'image du vrai Dieu, ni dans les vingt-quatre heures de la journée le temps de rendre au Christ l'hommage collectif de la famille.<br />
<br />
Pour vous, bien-aimés fils et filles, qui avez dans l'âme l'ardeur qu'allume la grâce du sacrement de mariage, le centre de votre existence doit être le Crucifié ou l'image du Sacré-Cœur de Jésus : que le Christ règne sur votre foyer et vous réunisse chaque jour autour de lui. En lui vos espérances trouveront leur soutien et vos angoisses leur réconfort, ce soutien et ce réconfort si nécessaires en cette vie terrestre où les journées, même les plus longues, ne rencontreront jamais une heure de parfaite sérénité.<br />
<br />
Mais voici pour vous unir l'un à l'autre davantage encore, voici un chemin plus haut : le chemin qui vous conduit de votre demeure à celle qui est la maison du Père par excellence, votre chère église paroissiale. Là est la source des bénédictions divines ; là vous attend ce Dieu qui a sanctifié votre union et qui vous a déjà donné tant de grâces ; là est l'autel autour duquel la messe dominicale réunit le peuple chrétien, et l'Epouse du Christ, l'Eglise, vous y convie par une invitation solennelle. Vous y assisterez ensemble toutes les fois que vous le pourrez ; et ce sera un spectacle édifiant — et Nous souhaitons que ce soit souvent, très souvent — chaque fois que vous vous approcherez ensemble de la Table sainte, dans l'union la plus intime de toutes, pour recevoir le Corps de Notre-Seigneur, ce très saint Corps, le lien le plus puissant entre les chrétiens qui s'en nourrissent et qui, membres du Christ, vivent de sa vie, ce très saint Corps qui accomplira en vous, par des voies toutes divines, la pleine fusion de vos âmes dans les hauteurs de l'esprit. Et de quelle incomparable joie vous exulterez, lorsque vous ferez place entre vous deux à une petite tête d'ange aux yeux candides, qui se lèvera à vos côtés pour recevoir sur d'innocentes lèvres l'hostie de neige où vous lui aurez enseigné à croire que demeure la présence réelle de son cher Jésus. Chaque fois qu'autour de vous le baptême aura régénéré un de vos petits, votre joie augmentera et se multipliera ; et leurs cœurs peu à peu s'ouvriront et se prépareront à participer avec vous à ce divin banquet.<br />
<br />
Certes, les événements et les nécessités de la vie ne vous laisseront pas toujours le loisir de vous agenouiller ensemble au pied de l'autel ; vous serez plus d'une fois obligés d'accomplir chacun pour soi ces actes de piété chrétienne ; peut-être que de longues séparations vous seront imposées par vos devoirs de l'heure présente, par les exigences de la guerre. Mais les cœurs déchirés par l'éloignement trouveront-ils meilleur rendez-vous que la sainte communion, où Jésus lui-même les réunira, à travers tous les espaces, dans son propre Cœur ?<br />
<br />
Vous êtes de jeunes époux ; de l'autel qui a béni votre mariage, vous regardez vers l'avenir et vous rêvez d'années nombreuses, de brillantes et roses aurores. Saint François de Sales termine ses avis aux gens mariés en les invitant à célébrer le jour anniversaire de leurs noces par une fervente communion reçue côte à côte : c'est une si belle recommandation que Nous ne pouvons manquer de la répéter à votre adresse. Au pied de l'autel qui vous a vus échanger vos promesses, vous vous retrouverez vous-mêmes, vous rentrerez en vos âmes, et alors est-ce que les grâces de cette union dans le Christ n'assureront pas une durée et une force sans défaillance à vos résolutions de mutuelle confiance, d'intime et inébranlable affection et de don réciproque sans réserve ? Oui, les grâces de cette union dans le Christ nourriront ces sentiments qui forment et illuminent dans vos pensées et dans vos cœurs la fidélité des premiers jours de votre vie commune, et qui doivent, dans les intentions de Notre-Seigneur, continuer à posséder et à soutenir toute votre vie de pèlerinage terrestre.<br />
<br />
Puisse l'effusion de Notre Bénédiction apostolique vous obtenir, chers jeunes époux, l'abondance de cette tendre et forte, franche et persévérante dévotion, qui est, tout au cours de la vie, une source féconde et intarissable de vrai réconfort, de vraie paix, de vraie joie et de véritable félicité.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=L%27amour_chr%C3%A9tien_selon_saint_Fran%C3%A7ois_de_Sales_%E2%80%93_29_janvier_1941_%E2%80%93&diff=2130L'amour chrétien selon saint François de Sales – 29 janvier 1941 –2012-01-31T11:44:54Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 29 janvier 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
En ce jour de la saint François de Sales, l'Eglise rend au bon et grand évêque de Genève un culte qui n'exalte pas seulement ses hautes vertus et son zèle pastoral si ardent : l'Eglise vénère aussi la science et la sagesse de ce maître de la vie chrétienne, et elle l'a proposé comme patron et modèle des publicistes catholiques. Il Nous semble voir, chers jeunes mariés, le grand Docteur tourner du haut du ciel son doux regard vers vous durant cette audience, et il Nous semble recevoir de lui pour vous, dans Notre esprit et sur Nos lèvres, ces avis qu'il donnait lui-même aux personnes mariées dans son incomparable Introduction à la vie dévote. Il vit, il parle, il enseigne, il guide, il avertit dans ces pages, en tant que votre père, maître et ami, car c'est à vous qu'il s'adresse. Philotée, à qui le livre était destiné tout d'abord, était une mère de famille, Mme de Charmoisy, et les remaniements successifs n'ont rien changé au but du livre : instruire les personnes vivant dans le monde, leur apprendre l'amour et la pratique de cette chère dévotion qui n'est rien d'autre que la plénitude de la loi et de la vie chrétienne. Ce livre du doux évêque de Genève, les contemporains du saint le jugeaient le plus parfait en son genre, et Notre prédécesseur le tenait en très haute estime ; cet ouvrage, écrivait-il, devrait se trouver dans toutes les mains. Lisez donc, chers époux, lisez et relisez ces pages aussi délicieuses que solides. Qu'elles deviennent une de vos lectures préférées, à l'exemple de cet excellent père de famille qui fut envoyé en Orient durant la Grande Guerre en qualité de colonel, et qui gardait ce livre dans sa valise d'officier comme un compagnon qui le réconfortait dans les durs travaux et les périls menaçants.<br />
<br />
Mais parmi tous les enseignements du grand évêque de Genève, Nous Nous bornerons à vous rappeler les conseils spéciaux qu'il donne aux personnes mariées, et particulièrement le premier, le principal : « J'exhorte surtout les mariés à l'amour mutuel, que le Saint-Esprit leur recommande tant en l'Ecriture. » Mais quel est cet amour que vous inculque le pieux maître de la vie chrétienne ? Est-ce peut-être le simple amour naturel et instinctif, comme celui d'une paire de tourterelles, écrit saint François, ou l'amour purement humain connu et pratiqué des païens ? Non, tel n'est point l'amour que le Saint-Esprit recommande aux époux. Il leur recommande plus que cela : « un amour qui, sans renier les saintes affections humaines, monte plus haut, pour être dans son origine, dans ses avantages, dans sa forme et dans sa manière « tout saint, tout sacré, tout divin », semblable à l'amour qui unit le Christ et son Eglise.<br />
<br />
Une affection réciproque née de la seule inclination mutuelle ou de la seule complaisance dans les dons humains que les époux se découvrent l'un à l'autre avec tant de satisfaction, une telle affection, pour belle et profonde qu'elle se révèle dans l'intimité des conversations entre nouveaux mariés ne suffit pas. Elle ne saurait à elle seule réaliser l'union de vos âmes, telle que l'a entendue et désirée l'amoureuse Providence de Dieu en vous conduisant l'un vers l'autre. Seule, la charité surnaturelle, lien d'amitié entre Dieu et l'homme, peut former entre vous des nœuds que rien ne puisse desserrer, ni les secousses, ni les vicissitudes, ni les inévitables épreuves d'une longue vie à deux ; seule la grâce divine peut vous élever au-dessus de toutes les petites misères de chaque jour, au-dessus de toutes les oppositions et différences de goûts ou d'idées qui germent, comme de mauvaises herbes, sur les racines de la pauvre nature humaine. Cette charité et cette grâce, n'est-ce pas la force et la vertu que vous êtes allés demander au grand sacrement de mariage ? La charité divine, plus grande que la foi et l'espérance, voilà de quoi ont besoin le monde, la société et la famille.<br />
<br />
Amour saint, et sacré, et divin : n'est-ce pas là, direz-vous peut-être, chose trop haute pour nous ? Un amour si surnaturel, demanderez-vous encore, restera-t-il encore cet amour vraiment humain qui a été le battement de nos cœurs, cet amour que nos cœurs cherchent et où ils trouvent la paix, cet amour dont ils ont besoin et qu'ils sont si heureux d'avoir trouvé ? Rassurez-vous : par son amour, Dieu ne détruit ni ne change la nature, mais il la perfectionne ; et saint François de Sales, qui connaissait bien le cœur humain, concluait sa belle page sur le caractère sacré de l'amour conjugal par ce double conseil : « Conservez donc, ô maris, un tendre, constant et cordial amour envers vos femmes... Et vous, ô femmes, aimez tendrement, cordialement, mais d'un amour respectueux et plein de révérence, les maris que Dieu vous a donnés. »<br />
<br />
Cordialité et tendresse donc, de part et d'autre. « L'amour et la fidélité, observe-t-il, joints ensemble, engendrent toujours la privauté et la confiance ; c'est pourquoi les saints et saintes ont usé de beaucoup de réciproques caresses en leur mariage, caresses vraiment amoureuses, mais chastes, tendres, mais sincères. » Et il citait l'exemple du grand saint Louis, non moins dur pour soi que tendre pour son épouse, et qui savait plier son esprit martial et courageux « à ces menus offices requis à la conservation de l'amour conjugal », à ces « petites démonstrations de pure et franche amitié » qui rapprochent tant les cœurs et rendent douce la vie commune. La vraie charité chrétienne, dévouée, humble et patiente, vainc et dompte la nature ; elle s'oublie elle-même et songe à tout instant au bien et à la joie d'autrui ; qui donc saura, plus et mieux qu'elle, suggérer et diriger ces petites et vigilantes attentions, ces délicates marques d'affection, et les maintenir en même temps spontanées, sincères, discrètes, de manière à ne les rendre jamais importunes, et à les faire accepter toujours avec plaisir et reconnaissance ? Qui donc mieux que la grâce, source et âme de cette charité, vous apprendra à tenir le juste milieu dans ces marques de tendresse si humaine et si divine ?<br />
<br />
Mais la pensée du saint descendait plus profondément encore dans les secrets du cœur humain. A la cordialité et à la tendresse réciproques, il ajoutait, en s'adressant aux maris, la constance, et en parlant aux femmes, le respect et la déférence. Craignait-il peut-être davantage l'inconstance des uns et le manque de soumission des autres ? Ou n'a-t-il pas plutôt voulu nous faire remarquer que dans l'homme la force du chef ne doit pas se séparer de la tendresse envers celle qui, plus faible, s'appuie sur lui ? Voilà pourquoi il recommande aux maris d'être pleins de condescendance, de « douce et amoureuse compassion » pour leurs femmes ; voilà pourquoi il recommande aux femmes que leur amour soit revêtu de respect envers celui que Dieu leur a donné pour chef.<br />
<br />
Vous comprenez toutefois que, si la cordialité et la tendresse doivent s'échanger entre époux et les orner l'un et l'autre, ce sont deux fleurs de beauté différente, puisqu'elles germent sur des racines différentes dans l'homme et la femme. Dans l'homme, elles ont pour racine une fidélité intégrale et inviolable, qui ne se permet pas la moindre petite faute que le mari ne tolérerait point dans son épouse, une fidélité qui donne, comme cela convient au chef, l'exemple ouvert de la dignité morale et de la courageuse franchise à ne jamais dévier ni s'écarter du devoir pleinement rempli ; chez la femme, cette cordialité et cette tendresse jaillissent d'une sage, prudente et vigilante réserve, qui écarte et repousse l'ombre même de ce qui pourrait offusquer la splendeur d'une réputation sans tache ou qui, d'une façon ou d'une autre, la mettrait en péril.<br />
<br />
De cette double racine de cordialité et de tendresse naît l'olivier de la paix perpétuelle dans la vie conjugale, la mutuelle confiance, épanouissement de l'amour. Sans confiance, l'amour baisse, se refroidit, se glace, s'éteint, ou bientôt fermente, éclate, déchire et tue les cœurs. Aussi, observait le saint évêque, « tandis que je vous exhorte d'agrandir de plus en plus ce réciproque amour que vous vous devez, prenez garde qu'il ne se convertisse point en aucune sorte de jalousie ; car il arrive souvent que, comme le ver s'engendre de la pomme la plus délicate et la plus mûre, ainsi la jalousie naît en l'amour le plus ardent et pressant des mariés, duquel néanmoins il gâte et corrompt la substance, car petit à petit il engendre les noises, dissensions et divorces. » Non, la jalousie, fumée et faiblesse du cœur, ne naît point là où brûle un amour qui mûrit et conserve le suc de la véritable vertu ; car, ajoutait le saint, « la perfection de l'amitié présuppose l'assurance de la vertu de la chose qu'on aime, et la jalousie en présuppose l'incertitude ». N'est-ce pas là la raison pour laquelle la jalousie, loin d'être un signe de la profondeur et de la force d'un amour, en révèle les éléments imparfaits et bas, sources de soupçons qui navrent l'innocence et lui font verser des larmes de sang ? La jalousie n'est-elle pas le plus souvent un égoïsme voilé qui dénature l'affection, un égoïsme vide de ce don vrai, de cet oubli de soi, de cette foi sans mauvaises pensées et pleine de confiance et de bienveillance que saint Paul louait dans la charité chrétienne (I Co 13, 4-7) et qui font d'elle, même ici-bas, la source la plus profonde et la plus inépuisable, en même temps que la gardienne la plus sûre, du parfait amour conjugal, si bien décrit par le saint évêque de Genève ?<br />
<br />
Nous demandons à saint François d'intercéder auprès de Dieu, auteur de la grâce et source de tout véritable amour, afin que cette union de vos cœurs – à la fois surnaturelle et tendre, divine dans son origine, et intensément, cordialement humaine dans ses plus hautes manifestations — se conserve toujours, joyeuse et tranquille, entre vous. Nous prions que votre union se resserre à mesure que vous avancerez dans la vie et dans une intime connaissance mutuelle, et à mesure aussi que votre amour mutuel grandira et se fortifiera, pour s'étendre à vos fils, couronne de votre amour, soutien de vos peines, divine bénédiction.<br />
<br />
Nous souhaitons que Notre prière monte jusqu'à Dieu et, pour qu'il la bénisse et l'exauce plus sûrement, Nous vous donnons de grand cœur, en gage des grâces que Nous implorons pour vous, la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_deux_sacrements_du_sacerdoce_et_du_mariage_%E2%80%93_15_janvier_1941_%E2%80%93&diff=2129Les deux sacrements du sacerdoce et du mariage – 15 janvier 1941 –2012-01-31T11:43:44Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 15 janvier 1941<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Parmi les innombrables soucis et responsabilités qui pèsent sur Nos épaules depuis que la divine Providence Nous a appelé à gouverner l'Eglise en des temps si difficiles, les audiences publiques sont une des grandes consolations que le Seigneur Nous accorde pour Notre soulagement. Ces rencontres Nous transportent pour ainsi dire dans un air plus pur ; Nous Nous y sentons plus intimement le Père, un Père qui reçoit ses enfants et qui au milieu d'eux ouvre son cœur et l'épanché librement.<br />
<br />
Mais Nous rangeons volontiers parmi les audiences qui Nous sont particulièrement douces et agréables, celles qui réunissent autour de Nous les jeunes mariés. Animés d'une foi vive, ils viennent, au moment de commencer une vie nouvelle, présenter à Notre paternelle bénédiction leurs âmes rafraîchies par la divine rosée des grâces qu'ils ont reçues du sacrement de mariage.<br />
<br />
N'avez-vous jamais réfléchi que parmi les différents états, les différentes formes de vie chrétienne, il n'y en a que deux pour lesquelles Notre-Seigneur a institué un sacrement : le sacerdoce et le mariage ? Vous admirez sans doute les grandes cohortes des ordres et des congrégations religieuses, les mérites et les gloires dont ils brillent dans l'Eglise ; et pourtant, la profession religieuse — cette émouvante cérémonie, si riche d'un symbolisme nuptial sublime et profond, si pleine de toutes les louanges dont Notre-Seigneur et l'Eglise exaltent la virginité et la chasteté parfaite — la profession religieuse, disons-Nous, si éminente que soit la place occupée dans la vie et l'apostolat catholiques par les religieux et les religieuses, la profession religieuse n'est pas un sacrement.<br />
<br />
Au contraire, le plus modeste mariage que célèbrent deux fiancés pressés de retourner au travail et que bénit un simple prêtre, en présence de quelques parents ou amis, dans la pauvre petite église d'une campagne solitaire ou dans l'humble chapelle d'un quartier ouvrier, ce rite sans éclat ni pompe extérieure est un sacrement et il se place, par sa dignité de sacrement, à côté des magnificences de l'ordination sacerdotale ou de la consécration épiscopale que l'évêque du diocèse en personne accomplit dans la splendeur des ornements pontificaux et dans la majesté d'une cathédrale remplie de ministres sacrés et de fidèles.<br />
<br />
L'ordre et le mariage, vous le savez, occupent une place toute spéciale dans l'Eglise : ils terminent et couronnent les sept sacrements. Pourquoi donc Dieu en a-t-il disposé ainsi ? Sans doute il serait téméraire de dire au Créateur : Quare hoc fecisti ? « Pourquoi avez-vous fait cela ? » ; il serait téméraire de lui demander les raisons de son œuvre et de ses perfections, si les grands docteurs, et en particulier saint Thomas d'Aquin, ne nous en avaient donné l'exemple. Marchons sur leurs traces, et il nous sera permis de rechercher et de goûter les convenances et les harmonies cachées au sein de la pensée et des élections divines, pour y puiser une plus amoureuse confiance et nous élever à une plus haute idée de la grâce reçue.<br />
<br />
Lorsque le Fils de Dieu daigna s'incarner, la parole du Sauveur de l'humanité ramena le lien conjugal de l'homme et de la femme à sa splendeur première. Les passions humaines avaient causé la déchéance de cette noble institution : la Rédemption l'éleva à la dignité de sacrement, et à ce sacrement l'union du Christ avec son Epouse, notre Mère l'Eglise, que féconde le Sang divin, confère une grandeur spéciale. Le Sang de Jésus nous régénère dans la parole de la foi et l'eau du salut et « il donne à ceux qui croient en son nom de devenir enfants de Dieu, à eux qui ne naissent ni du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme » (Jn 1, 12-13). Ces solennelles paroles de saint Jean nous manifestent une double paternité : la paternité de la chair, par la volonté de l'homme ; et la paternité de Dieu, par la puissance de l'esprit et de la grâce divine. Ces deux paternités, dans le peuple chrétien, marquent du signe du sacerdoce et du mariage les pères selon l'esprit, qui communiquent la vie surnaturelle, et les pères selon la chair, qui donnent la vie naturelle ; et c'est pour assurer et perpétuer à travers les siècles la génération et la régénération des fils de Dieu que le Christ a institué en faveur de son Eglise les deux sacrements du mariage et de l'ordre. Deux sacrements : deux paternités, deux pères qui fraternisent et se complètent l'un l'autre dans l'éducation des enfants, fils de Dieu, espérance de la famille et de l'Eglise, de la terre et du ciel. Telle est la haute idée que l'Eglise nous donne du sacerdoce et du mariage, l'Eglise, cette Jérusalem nouvelle, la Ville sainte que Jean vit descendre des cieux vêtue comme une jeune épouse parée pour son époux (Ap 21, 2).<br />
<br />
Elle s'élève au cours des siècles cette Jérusalem, elle se bâtit de pierres vivantes, les âmes baptisées et sanctifiées, chante la sainte liturgie, jusqu'au jour de la fin des temps, où elle montera s'unir au Christ dans les célestes joies des noces éternelles.<br />
<br />
Quels sont les ouvriers qui travaillent à la patiente construction de cette Jérusalem nouvelle ? Avant tout les successeurs des apôtres, le pape et les évêques avec leurs prêtres ; ensemble ils disposent, polissent et cimentent les pierres selon les plans de l'architecte. L'Esprit-Saint les a établis évêques pour paître l'Eglise du Seigneur (Ac 20, 28). Mais que feraient-ils bien, s'il n'y avait auprès d'eux d'autres ouvriers pour extraire, pour tailler, pour polir les pierres, suivant les besoins de l'édifice ? Et qui sont donc ces ouvriers, sinon les époux ? Ce sont les époux qui donnent à l'Eglise ces pierres vivantes et qui les travaillent avec art ; ces ouvriers, bien-aimés fils et filles, c'est vous-mêmes.<br />
<br />
Notez donc bien que votre paternité, votre maternité, ne devra pas se borner à extraire et à réunir péniblement les blocs de pierre brute ; il vous faudra encore les préparer, leur donner la forme qui leur permettra d'entrer pour le mieux dans l'édifice. C'est en vue de ce double office que Dieu a institué le grand sacrement de mariage.<br />
<br />
Comme l'enseigne le Docteur angélique saint Thomas d'Aquin1, ce sacrement qui a consacré votre union, fait de vous « les propagateurs et les conservateurs de la vie spirituelle, selon un ministère à la fois corporel et spirituel » qui consiste « à engendrer les enfants et à les former au culte de Dieu ». Vous êtes, toujours sous la conduite des prêtres, les premiers et les plus proches éducateurs et maîtres des enfants que Dieu vous a confiés. Dans l'édification du temple de l'Eglise, qui ne se compose pas de pierres mortes mais d'âmes vivantes pleines d'une vie nouvelle et céleste, vous êtes pour vos enfants des précurseurs spirituels, depuis leur berceau jusqu'à l'âge d'homme, et vous devez leur montrer le ciel<br />
<br />
Epoux chrétiens, vous n'avez pas dans l'Eglise la simple mission d'engendrer des enfants pour les offrir, pierres vivantes, au travail des ministres de Dieu que sont les prêtres. Les grâces si abondantes que le sacrement de mariage vous communique, vous ne les recevez pas seulement pour rester pleinement et constamment fidèles à la loi de Dieu dans l'auguste moment d'appeler vos enfants à la vie, et pour affronter et supporter avec un courage chrétien les peines, les souffrances et les préoccupations qui accompagnent ce moment et qui le suivent. Ces grâces vous ont été données également pour vous sanctifier, vous éclairer et vous fortifier dans votre ministère corporel et spirituel ; car, avec la vie naturelle, vous avez le devoir, comme instruments de Dieu, de conserver et de contribuer à développer dans les enfants qu'il vous donnera la vie spirituelle qu'ils reçoivent au baptême.<br />
<br />
Aux enfants nouveau-nés, donnez aussi « le pur lait spirituel » (I P 2, 2), afin « qu'il les fasse grandir pour le salut » ; faites-en des pierres vivantes du temple de Dieu, vous qui selon la parole de saint Pierre, formez, par la grâce du mariage, « un temple spirituel, un sacerdoce saint » (I Pierre, 2, 5). Dans la formation chrétienne des petites âmes que Dieu vous confiera, une part vous est réservée, un ministère dont vous n'avez pas le droit de vous désintéresser et où personne ne pourra se substituer pleinement à vous.<br />
<br />
Dans cette formation, vous irez bien demander l'aide de prêtres zélés et de catéchistes, l'aide aussi des excellents éducateurs que sont les religieux et les religieuses ; mais cette aide aura beau être grande, précieuse et large, elle ne vous libérera jamais de votre devoir et de vos responsabilités. Que de fois les maîtres chrétiens se plaignent et se lamentent des difficultés, parfois même des obstacles insurmontables, qu'ils rencontrent dans l'éducation des enfants confiés à leurs soins : ils doivent remédier aux déficiences de la famille, suppléer parfois à la famille elle-même ; ils doivent faire ce qu'elle a mal fait ou ce qu'elle n'a pas fait.<br />
<br />
Les petits anges que le ciel vous donnera, conservez-les pour le Seigneur, pour sa céleste Jérusalem et pour l'Eglise. N'oubliez jamais qu'auprès du berceau doivent se tenir deux pères et maîtres, l'un naturel et l'autre spirituel. Selon les dispositions ordinaires de la divine providence, les âmes ne peuvent parvenir à une vie chrétienne et au salut hors de l'Eglise et sans le ministère des prêtres que le sacrement de l'ordre a préparés. De même, ne l'oubliez jamais, les enfants ne peuvent pour l'ordinaire grandir dans la vie chrétienne que dans un foyer domestique où les parents, unis et bénits par le sacrement de mariage, remplissent le ministère qui leur est propre.<br />
<br />
Chers jeunes époux, daigne notre bon Seigneur et Maître, qui a restauré l'union conjugale, daigne le Christ verser dans vos cœurs l'intelligence et l'amour de la mission que ce sacrement vous a confiée dans l'Eglise, et vous donner l'élan, le courage et la confiance nécessaires pour vous maintenir dans une incessante fidélité à cette incomparable mission.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_le%C3%A7ons_de_la_divine_Providence_%C3%A0_travers_l%E2%80%99%C5%93uvre_de_la_nature_%E2%80%93_8_janvier_1941_%E2%80%93&diff=2128Les leçons de la divine Providence à travers l’œuvre de la nature – 8 janvier 1941 –2012-01-31T11:42:12Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 8 janvier 1940<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Chers jeunes époux, vous voulez manifester par votre présence ici une double ardeur : l'ardeur de la jeunesse qui ne craint point d'affronter les rigueurs de l'hiver et qui les vainc ; et l'ardeur de votre foi qui vient demander au Père commun des fidèles une bénédiction pour la famille que vous avez fondée par un irrévocable consentement mutuel. Le bonheur de votre jeune union et le rêve d'une aurore empourprée de joyeuses espérances vous absorbent en ce moment, et le voyage de Rome n'a pas refroidi la flamme de votre cœur ; c'est à peine si vous avez jeté quelques regards sur les campagnes qui fuyaient, sur les plaines gelées et neigeuses, sur les blanches montagnes, sur les arbres tristes qui tendaient les bras nus de leurs branches vers le gris du ciel.<br />
<br />
Sous cette froide couverture hivernale, la nature semble dormir le sommeil de la mort ; mais elle vit, et elle parle. Sa silencieuse tranquillité est éloquente : à tous ceux qui ont reçu de Dieu la vocation de transmettre la vie, à vous, par conséquent, elle enseigne cette grande leçon de la divine Providence, qu'au soir de la Passion, Notre-Seigneur rappelait à ses apôtres : « En vérité, en vérité, je vous le dis : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il demeure seul ; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruits » (Jean, XII, 24). Quelques instants après, le bon Maître complétait cet enseignement : « Vous serez affligés mais votre affliction se changera en joie. La femme, lorsqu'elle enfante, est dans la souffrance, parce que son heure est venue ; mais lorsqu'elle a donné le jour à l'enfant, elle ne se souvient plus de ses douleurs, dans la joie qu'elle a qu'un homme est né dans le monde » (Jn 16,21). Profonde vérité, humaine et chrétienne à la fois : la vie ne se transmet que par le sacrifice, et la transmission de la vie est une ineffable joie qui chasse tous les souvenirs de la douleur.<br />
<br />
Regardez les campagnes et admirez l’œuvre de la nature. Le grain confié à la terre s'y étend comme dans un sépulcre ; il meurt, semble-t-il, et se décompose, afin que le germe qu'il enclôt puisse se développer, ouvrir l'œil, paraître à la lumière en verdure et pousser une tige vigoureuse. Mais l'hiver viendra s'appesantir sur ce grain, avant que la tiédeur du printemps et la chaude saison n'épanouissent le germe en fleur et la fleur en fruit. Dans l'ordre plus élevé de la nature vivante sensible, toute naissance est plus ou moins douloureuse. Mais la douleur enfante l'amour : la mère, vous l'avez constaté, a besoin de se donner à ses petits, de les garder avec vigilance, de les nourrir de son lait ou de les réchauffer sous ses ailes, si elle veut conserver et fortifier la vie qu'elle leur a transmise.<br />
<br />
Et comme l'hiver précède le printemps, ainsi les peines, dans cette mystérieuse communication de la vie, devancent les joies promises à toute fécondité. Dans l'attente de la moisson désirée, le laboureur sacrifie sans regret et même avec la joie de l'espérance les meilleures de ses graines. La moisson est encore lointaine ; il ne sait quel temps, ni quelle récolte, facile ou difficile, lui enverra la Providence ; mais il n'hésite pas à répandre, de son ample geste de semeur, sur les mottes du champ retourné, les poignées de graines choisies qui vont subir, avant de lever en tiges vertes, les frimas des bises et le froid des neiges, et se décomposer dans les sillons humides ; l'hiver surmonté, les tiges chargées de lourds épis inclineront la tête, comme pour exprimer leur reconnaissance au ciel et à la terre féconde qui les ont nourries.<br />
<br />
Pour vous, chers jeunes mariés, vous voilà maintenant à l'heure des joyeuses semailles en un champ préparé par l'amour. Mais déjà vous l'avez appris, tout jeunes que vous êtes, à l'école de l'expérience, l'avenir qui s'ouvre devant vous, et que Nous vous souhaitons plein de bonheur chrétien, ne vous donnera pas seulement des jouissances et des joies, et, surtout en nos jours agités, vous ne remplirez pas sans peine votre sublime mission de donner la vie à de candides enfants, présents du ciel qu'il vous appartient d'élever et de former à la piété par vos paroles et vos exemples, et qui doivent être un jour votre soutien et celui de la patrie, vos compagnons dans la gloire de l'éternité bienheureuse.<br />
<br />
Le cultivateur ne craint pas de courir les divers risques des jours d'orage, de sécheresse et de gel ; Dieu, il le sait fort bien, dans les desseins de sa miséricorde les comptera ; Dieu ne laisse pas mourir de faim les passereaux qui viennent voleter autour de la charrue, et il n'abandonnera pas non plus l'homme, son serviteur, qui met en lui ses espérances. Pour vous, vous n'ignorez point que Dieu ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces (I Co 10,13) et que la patience fait œuvre parfaite (Jc 1, 2). N'en doutez pas : il proportionnera, dans son infinie bonté, les épreuves à vos forces, ou mieux, aux forces qu'il vous donnera lui-même par sa grâce. Cette foi en Dieu est aujourd'hui pour vos cœurs la source de la confiance : elle sera demain le soutien de vos travaux.<br />
<br />
Mais cela ne doit pas vous faire oublier qu'aux heures elles-mêmes les plus dures que l'avenir vous réserve peut-être, les consolations et les douceurs ne vous manqueront point. Dans les campagnes, vous le savez, l'hiver connaît des joies. N'est-ce pas alors que la famille, dispersée par les travaux durant les autres saisons, se retrouve le plus souvent réunie au foyer ? N'est-ce pas alors le temps des longues, paternelles et fraternelles veillées, où les cœurs se sentent battre plus près les uns des autres et où, par des conversations et par des silences plus éloquents que les paroles, les âmes se pénètrent mieux et se rencontrent plus intimement dans les sentiments et les pensées ? N'est-ce pas alors que le passé, le présent et l'avenir animent joyeusement les souvenirs et les causeries de la famille ?<br />
<br />
Pour vous non plus, bien-aimés fils et filles, si des heures même très pénibles vous attendent, le ciel ne se montrera pas moins riche en réconforts et en consolations. Soyez sans crainte : acceptez les épreuves en chrétiens confiants et courageux, recevez-les des mains de Dieu lui-même, qui les ordonne à votre avancement ; et, alors, loin d'être, comme c'est trop souvent le cas, des occasions de murmures et de plaintes, de querelles et de désunion, elles rapprocheront vos cœurs et la peine fortifiera votre mutuel amour, car l'homme ne vit pas sans douleur. Vous vous connaîtrez, vous vous parlerez, vous vous comprendrez de mieux en mieux et, plus vous avancerez sur le chemin de la vie, plus vous serez l'un à l'autre un appui. Le feu de la tribulation donnera à l'amour qui vous unit une fermeté définitive : rien ne pourra désormais séparer deux âmes qui auront souffert ensemble avec vaillance, et porté leur croix côte à côte dans l'union au Christ.<br />
<br />
Voilà les pensées que Nous inspire Notre amour pour vous. Elles pourront, en ces jours de joie, vous sembler austères ; mais, si vous les considérez à la lumière de la foi qui vous amène ici, c'est là l'unique source du vrai bonheur. Le vrai bonheur ! Ce bonheur ne peut éclore et durer que dans les cœurs qui savent comprendre, accepter et aimer le sens profond de la vie présente. Ce bonheur n'est point puéril, irréfléchi ni frivole, comme celui du monde ; il en est d'autant plus intime, solide et assuré. Fondé sur la plénitude de l'esprit chrétien, il ne s'écroule pas sous le vent de l'adversité, et par lui les joies et les douleurs de la terre deviennent utiles pour une vie meilleure.<br />
<br />
Cet esprit chrétien, jeunes mariés, Nous le demandons à Dieu pour vous et pour tous les vôtres, et, en gage des grâces et faveurs divines, Nous vous donnons de Notre cœur de Père la Bénédiction apostolique</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_famille_et_les_trois_Eglises_%E2%80%93_6_novembre_1940_%E2%80%93&diff=2127La famille et les trois Eglises – 6 novembre 1940 –2012-01-31T11:40:43Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 6 novembre 1940<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
C'est en ces premiers jours de novembre, chers jeunes époux, que vous êtes venus demander Notre bénédiction sur votre avenir plein d'espoirs ; c'est au temps où la grande multitude des croyants, fidèle à l'appel de l'Eglise, dirige ses pas, avec ses larmes et ses prières, vers le coin de terre bénite où reposent les témoins du passé. Si le souvenir des chers disparus ravive dans les cœurs la tristesse des séparations, il laisse sans amertume les âmes à qui la foi donne la sérénité. De plus il vous est doux et salutaire, au moment de fonder une famille, de songer à ceux qui vous ont ouvert le chemin de la vie et transmis un patrimoine de vertus chrétiennes. En revoyant les pâles figures des défunts, telles que votre enfance les a contemplées ou telles que se les représente votre piété, vous pourrez vous redire l'un à l'autre, avec confiance, ce que le jeune Tobie disait à son épouse : Filii quippe sanctorum sumus ! « Nous sommes les enfants des saints ! (Tob., viii, 5) »<br />
<br />
Vous n'ignorez pas que la sainte liturgie unit étroitement la Commémoraison des fidèles trépassés à la solennité de la Toussaint. Cette union met en un singulier relief le dogme consolant de la communion des saints, c'est-à-dire le dogme du lien spirituel intime qui unit avec Dieu et entre elles les âmes en état de grâce. Ces âmes se répartissent en trois groupes : les unes, déjà couronnées au ciel, forment l'Eglise triomphante ; les autres, détenues au purgatoire jusqu'à leur pleine et définitive purification, constituent l'Eglise souffrante ; d'autres enfin cheminent encore sur cette terre et composent l'Eglise militante. La solennité de tous les saints pourrait s'appeler en quelque sorte la fête des trois Eglises. L'oraison de ce jour invoque la bonté de Dieu par les mérites de tous les saints : omnium sanctorum tuorum merita sub una tribuisti celebritate venerari, « Dieu, qui nous avez accordé de célébrer dans une même solennité les mérites de tous vos saints ». Or, il existe des mérites dans les trois Eglises : des mérites glorifiés, dans la triomphante ; des mérites acquis et qui ne peuvent ni augmenter ni se perdre, mais qui attendent encore leur récompense, dans l'Eglise souffrante ; des mérites acquis qu'on peut accroître, mais aussi complètement perdre, dans l'Eglise militante. La fête de la Toussaint est donc comme une grande fête pour toutes les âmes en état de grâce.<br />
<br />
Cette considération doit vous toucher tout particulièrement, jeunes époux qui venez de quitter une famille très chère pour en former une nouvelle. Celle-ci sera la continuation de la première, et, s'il plaît à Dieu, Nous l'en supplions avec vous, le commencement d'une longue série d'autres.<br />
<br />
Vous pensez peut-être qu'à la Toussaint l'Eglise entend simplement glorifier ensemble tous les saints canonisés. Cette journée serait alors comme une récapitulation annuelle du Martyrologe Romain. En réalité c'est bien cela, mais c'est plus encore. En effet, lorsqu'en 609 ou 610 le pape Boniface IV purifia l'antique Panthéon de Rome, que lui avait cédé l'empereur Phocas, il dédia ce temple à la Bienheureuse Vierge Marie et à tous les Martyrs et institua une fête annuelle en leur honneur. Mais déjà le siècle suivant voyait Grégoire III dédier dans la basilique de Saint-Pierre un oratoire « à Notre-Seigneur Jésus-Christ, à sa Sainte Mère, aux saints apôtres, à tous les saints martyrs et confesseurs, aux justes parfaits qui reposent dans la terre ». Enfin Grégoire IV étendit la célébration de la fête de tous les Saints à l'Eglise universelle.<br />
<br />
Tous les saints : qu'est-ce à dire ? Communément on entend par là avant tout les héros du christianisme, ceux qu'une dernière et solennelle sentence du magistère infaillible déclare membres de l'Eglise triomphante et dont le culte est prescrit dans l'Eglise militante universelle. Vous ne manquerez certainement pas de trouver parmi eux des modèles et des patrons spéciaux. Toute famille chrétienne tourne d'instinct, pour ainsi dire, son regard vers la Sainte Famille de Nazareth et s'attribue un titre particulier à la protection de Jésus, Marie et Joseph. Mais, après eux, nombre d'hommes et de femmes se sont sanctifiés dans la vie familiale, tels les saints époux Chrysanthe et Darie, martyrs sous l'empereur Numérien. Il y a au ciel des pères de famille admirables, comme saint Ferdinand III, roi de Castille et de Léon, qui éduqua pieusement ses quatorze enfants ; des mères héroïques, comme la Romaine sainte Félicité, qui, selon les Actes de son martyre, vit de ses propres yeux ses sept fils succomber dans d'atroces tourments, sous le règne de l'empereur Antonin, et qui finit par avoir la tête tranchée. Cette mère courageuse entre toutes, raconte saint Pierre Chrysologue, allait et venait parmi les cadavres transpercés de ses fils, plus joyeuse que si elle s'était trouvée parmi les chers berceaux où ils avaient dormi bébés : c'est qu'elle voyait, des yeux intérieurs de la foi, autant de palmes que de blessures, autant de récompenses que de tourments, autant de couronnes que de victimes .<br />
<br />
Au cours de l'année, chacun des saints a son jour de fête ; on peut donc penser qu'à la fête de la Toussaint l'Eglise ne se borne pas à les évoquer sommairement.<br />
<br />
Remarque qui vaut surtout pour les saints de l'Eglise triomphante. Qu'il y ait au ciel, outre les grands vainqueurs, éclatants de la lumière de la canonisation ou de la béatification, des multitudes d'âmes inconnues sur terre, mais gratifiées de la vision béatifique de Dieu, et que leur nombre dépasse tout calcul humain, saint Jean, qui avait vu leur gloire, en rend témoignage dans l'Apocalypse : « Après cela, je vis une foule immense que personne ne pouvait compter ; ils se tenaient debout devant le trône et devant l'Agneau, vêtus de robes blanches, et des palmes à la main. » Et ces élus sans nom distinct étaient « de toute nation, de toute tribu, de tout peuple et de toute langue » (Ap 7, 9).<br />
<br />
Là se retrouve l'idée de famille : nous sommes enfants des saints ! Dans cette glorieuse phalange, n'avez-vous peut-être pas des ancêtres, peut-être même des proches parents ? Portez en ces jours-ci les yeux vers le ciel, élevez-y votre âme et vous y pourrez voir en esprit, à jamais bienheureux, beaucoup de ceux que vous avez aimés, beaucoup de ceux surtout qui, au cours d'une longue suite de générations, ont établi dans leurs descendants cette foi que vous allez transmettre à d'autres. Quelle force pour vous, et quelle consolation de penser que, après avoir quitté cette terre, ils ne vous ont point oubliés ; qu'il vous aiment toujours avec la même tendresse, mais avec une incomparable clairvoyance de vos besoins et un pouvoir supérieur d'y subvenir ; et que du haut du ciel descendra sur chaque nouveau berceau de leur postérité, en invisibles rayons de grâce, leur sourire de bénédiction.<br />
<br />
Il est vrai, bien vrai, que vous ne sauriez avoir aucune certitude de leur glorification définitive ; il faut être si pur pour être admis à contempler à jamais et sans voile ce Dieu qui trouve des imperfections jusque dans les anges ! (Jb 4,18). L'aïeul vénéré dont la vie nous apparut si digne, si riche de mérites, cette bonne grand-mère dont les jours de labeur s'achevèrent en une mort si pieuse et si douce, se peut-il qu'eux non plus ne soient pas encore au ciel ?<br />
<br />
Vous pouvez du moins, sans vaine présomption, forts d'une ferme confiance dans les promesses que Dieu a faites à la foi et aux œuvres d'une vie vraiment chrétienne, vous pouvez les chercher au lieu de la suprême purification : le purgatoire. Vous éprouverez alors une sereine joie à la pensée que ces êtres bien-aimés sont désormais assurés de leur salut éternel et préservés du péché et des occasions de péché, de toutes les angoisses, infirmités et misères d'ici-bas. A la vue des peines qui les purifient de leurs dernières taches, votre pieuse affection vous engagera à prêter l'oreille à leurs voix bien chères, qui demandent vos suffrages, comme Job implorait, dans l'abîme de ses douleurs, la compassion de ses amis (cf. Job, Jb 19,21).<br />
<br />
Vous comprendrez alors pourquoi la sainte liturgie, qui prolonge durant une octave la joie de la fête de tous les saints, continue sa prière pour l'Eglise souffrante durant tout le mois de novembre, spécialement dédié à ces pieux suffrages. Si vous invoquez donc la protection des saints qui sont au ciel, vous ne manquerez pas de secourir, par la prière, par les aumônes et surtout par le Saint Sacrifice de la messe, vos chers défunts qui se trouvent encore au purgatoire. Selon une pieuse croyance, ils intercéderont pour vous et, admis bientôt à la source de toute grâce, ils en répandront les flots bienfaisants sur toute leur descendance.<br />
<br />
Que dire maintenant des saints de la troisième Eglise, c'est-à-dire des saints qui combattent encore sur cette terre ? Reconnaissez, chers fils et filles, qu'il en existe, et que vous pouvez, si vous le voulez, vous mettre de leur nombre. Au sens étymologique et plus large du mot, la sainteté désigne l'état d'une personne ou d'une chose réputée inviolable ou sacrée. C'est ainsi que Cicéron parlait de matronarum sanctitas, de la sainteté de ces épouses et mères universellement respectées qu'étaient les matrones romaines. Dans un sens plus élevé, le Seigneur disait aux Juifs de l'Ancien Testament : « Soyez saints, parce que je suis saint » (Lv 19,2). Et joignant à ce précepte le secours nécessaire pour l'accomplir, il ajoutait : « C'est moi, votre Seigneur, qui vous sanctifie (Lv 20,7-8). » Dans le Nouveau Testament, être saint c'est être consacré à Dieu par le baptême et conserver l'état de grâce, cette vie surnaturelle tout intime qui, aux yeux du Seigneur et des Anges, sépare les hommes en deux groupes profondément distincts, privés les uns de la grâce sanctifiante, les autres élevés jusqu'à cette mystérieuse et réelle participation de la vie divine. C'est pourquoi nombre de passages du Nouveau Testament désignent les premiers chrétiens du nom de saints. Saint Paul, par exemple, s'accuse d'avoir, avant sa conversion, jeté en prison beaucoup de saints (Ac 26, 10). Le même apôtre écrivait aux fidèles d'Ephèse : « Vous êtes concitoyens des saints et membres de la famille de Dieu (Ep 2, 19) », et il priait les chrétiens de Rome de subvenir aux nécessités des saints (Rm 12, 13).<br />
<br />
Ces saints de la terre ont, eux aussi, leurs mérites, des mérites qui peuvent secourir les autres hommes et les âmes de l'Eglise souffrante. Mais l'Eglise, notre mère, sait fort bien que les mérites des vivants sont précaires. Elle sait fort bien que, si certains de ses enfants de la terre sont pour leurs frères de puissants intercesseurs, ils ont, eux aussi, comme tous ceux qui militent ici-bas, un continuel besoin d'intercession. Aussi donne-t-elle à l'oraison de la Toussaint la conclusion suivante : « Accordez-nous, Seigneur, grâce à de si nombreux intercesseurs, l'abondance tant désirée de vos miséricordes. »<br />
<br />
« Nous sommes enfants des saints ! » Chers fils et filles, il faut bien vous persuader que votre jeune famille pourra et devra être une famille sainte, c'est-à-dire inviolablement unie à Dieu par la grâce. Inviolablement : le sacrement lui-même, qui exige l'indissolubilité du lien conjugal, vous communique une force surnaturelle qui, si vous le voulez, tiendra en échec les tentations et les séductions ; ainsi les perfides insinuations du dégoût de la vie quotidienne et de la fatigue habituelle, du besoin de nouveauté et de changement, la soif des expériences dangereuses, les attraits du fruit défendu n'auront sur vous aucune prise, car vous saurez conserver cet état de grâce par la vigilance, la lutte, la pénitence et la prière. Unis à Dieu, vous serez saints et vos enfants le seront après vous, parce que, lavés dès le baptême dans le sang rédempteur du Christ, vous avez consacré ou sans doute vous allez consacrer votre foyer domestique à son divin Cœur, dont l'image veillera sur vos jours et sur vos nuits.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Merveille_surnaturelle_de_l%27amour_humain_et_du_mariage_chr%C3%A9tien_%E2%80%93_23_octobre_1940_%E2%80%93&diff=2126Merveille surnaturelle de l'amour humain et du mariage chrétien – 23 octobre 1940 –2012-01-31T11:39:24Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 23 octobre 1940<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
La première parole de Notre cœur et de Nos lèvres sera, chers jeunes époux, un acte de gratitude envers la paternelle Providence de Dieu, qui vous a permis, dans le tumulte des discordes et des armes, de chanter au pied de son autel votre cantique d'amour, et qui Nous accorde à Nous-même, parmi tant de tristesses, la joie d'être témoin de votre bonheur. Selon le vœu de la liturgie du mariage, daigne Dieu, auteur de votre union, en être également le conservateur : ''Ut qui te auctore iunguntur, te auxiliante serventur''.<br />
<br />
« Dieu est amour », écrit saint Jean (I Jn 4, 8). Amour substantiel et infini, il se complaît, sans désir ni satiété, dans l'éternelle contemplation de sa perfection sans limite. Seul Etre absolu, en dehors duquel il n'y a que néant, s'il veut appeler d'autres êtres à l'existence, il ne peut les tirer que de sa propre richesse. Dérivation plus ou moins lointaine de l'Amour infini, toute créature est donc fruit de l'amour et mue par l'amour.<br />
<br />
Dans la nébuleuse du chaos, une première force d'attraction, premier symbole d'amour, groupa jadis autour d'un noyau les éléments cosmiques qui constituent un astre. L'attraction de ce premier en appela un second ; d'autres à leur tour furent gagnés, et les mondes, merveilleux cortège, commencèrent leur ronde par le firmament. Mais le chef-d'œuvre de Dieu, c'est l'homme ; et à ce chef-d'œuvre d'amour il a donné une puissance d'amour ignorée des créatures sans raison. Conscient, l'amour humain est personnel ; libre, il est soumis au contrôle de la volonté responsable, et ce pouvoir de se déterminer par soi-même est, selon le poème de Dante, le plus grand don que nous ayons reçu de la bonté du Dieu créateur, le plus conforme à son amour et le plus apprécié de lui.<br />
<br />
Dieu avait donné à l'homme avec le corps et l'âme tout ce qui convient à la nature humaine ; les aspirations de l'homme étaient comblées. Mais la volonté de Dieu ne l'était pas. Il poussa l'amour plus loin encore et il enrichit la créature humaine d'un don nouveau et surhumain : la grâce. La grâce, insondable prodige de l'amour de Dieu, mystère impénétrable à l'intelligence humaine, merveille que l'homme, humble aveu de la prééminence de ce don, a appelée « surnaturelle ».<br />
<br />
Sur cette élévation de l'homme à une vie supérieure, les Pères de l'Eglise, les docteurs et les saints ont écrit d'amples traités ; mais au fond, le petit villageois en dit tout autant lorsqu'il récite la phrase de son catéchisme : « La grâce (sanctifiante) rend l'homme participant de la nature divine. » Dans mille ans, dix mille ans peut-être, lorsque, parmi ces mondes qu'une force infatigable lance les uns vers les autres dans leur immense orbite d'amour, l'homme aura découvert avec stupeur la série continue des créatures échelonnées au-dessus et au-dessous de lui ; quand la recherche scientifique, les progrès de la mécanique et les raisonnements de la spéculation auront donné à notre savoir autant de supériorité sur les connaissances modernes que celles-ci paraissent dominer les faibles lueurs de l'âge préhistorique ; peut-être qu'alors une âme géniale éprise de Dieu saura traduire en langage humain quelque chose des prodigalités — que nous ignorons encore — de l'amour divin pour sa créature de prédilection. Mais une fois que cet explorateur du monde de la matière et de l'esprit parviendra, au-delà de nombreux et sublimes sommets, devant la cime inaccessible et immaculée de la grâce, il ne trouvera pour la décrire que ces trois mots de saint Pierre, le Prince des apôtres : ''Divinae consortes naturae'' (II Pierre, 1, 4), « la grâce nous rend participants de la nature divine ».<br />
<br />
Si l'amour purement sensible a déjà son émouvante et tendre beauté, au point que le Seigneur se compare lui-même à l'aigle qui « veille sur son nid et plane au-dessus de ses petits » (Dt 32, 11), l'amour humain possède, lui, une incomparable noblesse : l'esprit y a sa part, sous l'impulsion du cœur, ce témoin et délicat interprète de l'union du corps et de l'âme, qui met les impressions matérielles de l'un en accord avec les sentiments supérieurs de l'autre. Depuis des siècles, ce charme de l'amour humain a inspiré, dans la littérature, la musique et les arts plastiques, d'admirables œuvres de génie : thème toujours ancien et toujours nouveau sur lequel les âges ont composé, sans l'épuiser jamais, les variations les plus hautes et les plus poétiques.<br />
<br />
Mais quelle indicible beauté nouvelle vient enrichir cet amour de deux cœurs humains, lorsque s'unit harmonieusement à son cantique l'hymne de deux âmes vibrantes de vie surnaturelle ! Ici également se réalise l'échange des dons ; et alors, par la tendresse sensible et ses saines joies, par l'affection naturelle et ses élans, par l'union spirituelle et ses délices, les deux êtres qui s'aiment s'identifient dans tout ce qu'ils ont de plus intime, depuis les inébranlables fondements de leurs croyances jusqu'à l'invincible sommet de leurs aspirations. C'est alors un consortium ''omnis vitae, divini et humani juris communicatio'', « une entière communauté de vie, une participation aux mêmes droits divins et humains ».<br />
<br />
Telle est l'union du mariage chrétien, modelée, selon la célèbre expression de saint Paul, sur l'union du Christ avec son Eglise (Ep 5, 32). Dans l'une et l'autre, le don de soi est total, exclusif, irrévocable ; dans l'une et l'autre, l'époux est le chef de l'épouse, qui lui est soumise comme au Seigneur (ib., 22-23) ; dans l'une et l'autre, le don mutuel devient principe d'expansion et source de vie.<br />
<br />
L'éternel amour de Dieu a suscité du néant le monde et l'humanité ; l'amour de Jésus pour l'Eglise engendre les âmes à la vie surnaturelle ; l'amour de l'époux chrétien pour son épouse a part à ces divines effusions alors que, selon la volonté formelle du Créateur, l'homme et la femme préparent l'habitation d'une âme où vivra le Saint-Esprit avec sa grâce. Ainsi les époux, dans leur mission providentielle, sont les vrais collaborateurs de Dieu et de son Christ ; leurs œuvres elles-mêmes ont quelque chose de divin ; ils peuvent se dire, même ici, divinae consortes naturae, — « participants de la nature divine ».<br />
<br />
Faudrait-il donc s'étonner que ces magnifiques prérogatives comportent de graves devoirs ? La noblesse de l'adoption divine oblige les époux chrétiens à bien des renoncements et à bien des actes de courage, afin que la matière ne retienne point l'esprit dans son ascension vers la vérité et la vertu, et que par sa pesanteur elle n'entraîne point les époux dans les abîmes. Mais Dieu ne commande jamais l'impossible ; avec son précepte qui oblige il donne la force de l'accomplir, et si le mariage, qui est un sacrement, impose des devoirs qui peuvent sembler surhumains, il apporte aussi des secours qui se révèlent surnaturels.<br />
<br />
Ces secours, Nous avons le ferme espoir que Dieu vous les accordera, chers jeunes époux. Vous les avez demandés dans une ardente prière, alors que vos cœurs au pied de l'autel se donnaient l'un à l'autre pour toujours, et vous venez aujourd'hui, en ce mois de Notre-Dame du Saint-Rosaire, implorer à nouveau l'abondance des grâces célestes, par l'intercession de cette Mère de miséricorde que vous voulez établir Reine de votre foyer. A tous ces gages de bonheur pour votre avenir temporel et éternel, Nous ajoutons de grand cœur la Bénédiction apostolique.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_rosaire_et_la_Famille_%E2%80%93_16_octobre_1940_%E2%80%93&diff=2125La rosaire et la Famille – 16 octobre 1940 –2012-01-31T10:31:36Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 16 octobre 1940<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Nous vous souhaitons de grand cœur la bienvenue, chers jeunes époux, vous que semble conduire à Nous la Vierge du Rosaire, en ce mois qui lui est consacré. Il Nous semble, des yeux de l'esprit, la contempler qui se penche vers vous souriante, comme l'ont vue quelques saints privilégiés ; elle vous offre cet objet simple et pieux, cette chaîne d'anneaux souple et légère qui ne veut qu'un esclavage d'amour et qui groupe par dizaines ces petits grains remplis d'un invisible suc surnaturel ; et vous, agenouillés à ses pieds, vous promettez à la Vierge de l'honorer et vous lui offrez, dans toutes les situations de votre vie familiale, le plus souvent possible, le tribut de votre piété.<br />
<br />
Selon l'étymologie du mot, le rosaire est une couronne de roses ; image charmante qui, chez tous les peuples, exprime une offrande d'amour, un sentiment de joie. Mais ce ne sont pas celles dont se parent les impies mentionnés dans l'Ecriture. « Couronnons-nous de roses, disent-ils, avant qu'elles ne se flétrissent (Sg 2, 8)». Les fleurs du rosaire ne se flétrissent point ; les mains des dévots de Marie en renouvellent incessamment la fraîcheur, et la diversité des âges, des pays et des langues donne à ces roses vivaces la diversité de leurs couleurs et leurs parfums.<br />
<br />
A ce rosaire universel et continuel, vous avez pris part dès votre enfance. Vos mamans vous ont enseigné à faire glisser lentement les grains du rosaire entre vos petits doigts et à prononcer en même temps les simples et sublimes paroles de l'Oraison dominicale et de la Salutation angélique. Un peu plus tard, lors de votre première communion, vous vous êtes consacrés à votre Mère céleste ; vous avez reçu en souvenir de ce grand jour le rosaire et vous l'avez récité avec une ferveur ingénue qu'accroissait la délicate beauté de ses perles. Que de fois dans la suite vous avez renouvelé votre double offrande à Jésus et Marie, au pied du tabernacle ou dans la Congrégation de la Vierge ! Et maintenant que vous avez reçu le sacrement de mariage en ce mois de Notre-Dame, votre avenir Nous apparaît tout entier comme une couronne de roses, un rosaire dont la récitation persévérante et commune a pris naissance au pied de l'autel, au moment où vous avez uni vos cœurs, émus des nouveaux et plus graves devoirs que vous imposait votre libre consentement béni de Dieu.<br />
<br />
Votre oui sacramentel, en effet, a quelque chose du Notre Père : il implique l'engagement de sanctifier ensemble le nom de Dieu dans l'obéissance à ses lois « que votre nom soit sanctifié », d'établir son règne en votre foyer domestique « que votre règne arrive », de vous pardonner chaque jour mutuellement vos offenses et autres manquements « et pardonnez-nous... comme nous pardonnons... », de combattre les tentations « et ne nous laissez pas succomber à la tentation », de fuir le mal « mais délivrez-nous du mal » ; il implique surtout le fiat résolu et confiant dans la marche au-devant des mystères de l'avenir.<br />
<br />
Votre oui sacramentel est aussi un reflet de la Salutation angélique : il vous ouvre une source de grâces que vous dispense Marie « pleine de grâce » et qui est l'habitation de Dieu en vous « le Seigneur est avec vous ». Ce oui est un gage spécial de bénédictions et pour vous et pour les fruits de votre union ; c'est un nouveau titre à la rémission des péchés durant votre vie et à l'assistance de Marie à votre heure suprême « maintenant et à l'heure... ».<br />
<br />
Fidèles au devoir de votre nouvel état, vous vivrez dans l'esprit du saint rosaire et vos journées se dérouleront comme un enchaînement d'actes de foi et d'amour envers Dieu et envers Marie, au fil de vos années, que Nous souhaitons nombreuses et riches des faveurs célestes.<br />
<br />
Mais le rosaire signifie aussi que les mystères de votre avenir ne se composeront pas toujours et uniquement de joies ; ils se composeront parfois de providentielles douleurs. C'est la loi de toute vie humaine comme de tout rameau de rosier, qu'aux fleurs se mêlent les épines. Vous vivez en ce moment les mystères joyeux et Nous vous souhaitons d'en goûter longtemps la douceur. Le bonheur en effet est promis à quiconque craint le Seigneur et met toute sa joie dans ses commandements (Ps., cxi, 1) ; il est promis aux doux, aux miséricordieux, aux cœurs purs, aux pacifiques (Mt 5, 4-9), et ces vertus vous vous efforcerez de les acquérir. Vous espérez surtout que la Providence, dont les secrets desseins vous ont attirés l'un vers l'autre, répandra sur votre famille la bénédiction promise aux patriarches, chantée par les prophètes et exaltée par l'Eglise dans la liturgie du mariage : la bénédiction joyeuse de la fécondité : matrem filiorum laetantem, « mère joyeuse au milieu de ses enfants (Ps., cxii, 9) ».<br />
<br />
De même que vous avez reçu et que vous recevrez les joies — celles d'aujourd'hui et celles de demain — avec une filiale reconnaissance et une sage modération, ainsi, dans l'avenir, quand sonnera l'heure des mystères douloureux, vous les accueillerez en esprit de foi et de soumission. Mystère ? Nom que l'homme donne souvent à la douleur ; si d'ordinaire il ne cherche point de justification à ses joies, il voudrait, de sa courte vue, trouver la raison de ses malheurs, et il souffre doublement, quand ici-bas il n'en voit pas le pourquoi. La Vierge du Rosaire est également celle du Calvaire et du Stabat : elle vous apprendra à rester debout à l'ombre, si obscure soit-elle, de la croix ; l'exemple de cette Mère des douleurs et Reine des martyrs vous fera comprendre que les desseins de Dieu dépassent infiniment les pensées de l'homme et que, dussent-ils déchirer notre cœur, ils s'inspirent du plus tendre amour pour nos âmes.<br />
<br />
Pouvez-vous attendre, devez-vous désirer aussi des mystères glorieux dans le rosaire de votre vie ? Oui, s'il s'agit de la gloire que la foi seule peut apercevoir et goûter. Les hommes, souvent, s'arrêtent aux fumeuses lueurs de la renommée, qu'ils se donnent ou se disputent entre eux par des paroles ou des actions claironnantes. Etre loué, être célèbre, voilà, d'après eux, où réside la gloire. Gloria est frequens de aliquo fama cum laude, écrivait Cicéron 2.<br />
<br />
Mais souvent aussi les hommes n'ont nul souci de la gloire que Dieu seul peut donner et c'est pour cette raison, suivant la parole même de Notre-Seigneur, qu'ils n'ont pas la foi : « Comment pourriez-vous avoir la foi, disait aux Juifs le Rédempteur, vous qui allez mendiant la gloire les uns auprès des autres, et qui ne cherchez point la gloire qui vient de Dieu seul ? (Jn 5, 44) ». Selon le prophète Isaïe, la gloire du monde passe comme la fleur des champs (xi, 6). Et, par la bouche du même prophète, Dieu annonce qu'il humiliera les grands de la terre (Isaïe, xiv, 2). Que fera donc le Dieu incarné, ce Jésus qui se déclarait « humble de cœur » (Mt 11, 29) et qui n'avait jamais recherché sa propre gloire ? (Jn 8,50).<br />
<br />
Levez donc plus haut votre regard, ou plutôt, par l'œil de votre foi et à la lumière des Ecritures, entrez plus avant en vous-mêmes, pénétrez jusqu'au tréfonds de vos âmes. Là vous apprendrez de l'Esprit-Saint que « c'est une grande gloire de suivre le Seigneur » (Si 23, 38). Dans la famille où Dieu est honoré, « les enfants des enfants sont la couronne des vieillards et les pères la gloire des enfants ! » (Pr 17, 6). Jeunes mamans de demain, plus vos yeux seront purs, plus vous verrez dans les chères petites créatures confiées à vos soins des âmes destinées à glorifier avec vous le seul être digne de tout honneur et de toute gloire. Alors au lieu de vous perdre, comme tant d'autres, en rêveries ambitieuses sur le berceau de votre nouveau-né, vous vous pencherez avec piété sur ce cœur fragile qui commence à battre, vous songerez, sans vaines inquiétudes, aux mystères de son avenir, que vous confierez à la tendresse — plus maternelle encore et combien plus puissante que la vôtre ! — de la Vierge du Rosaire.<br />
<br />
Par là, le rosaire vous apprendra que la gloire du chrétien ne se réalise point dans son pèlerinage terrestre. Interrogez la série des mystères : joyeux et douloureux, de l'Annonciation au Crucifiement, ils représentent, comme en dix tableaux, toute la vie mortelle du Sauveur ; les mystères glorieux ne commencent, eux, que le jour de Pâques, pour ne plus cesser, ni pour le Christ ressuscité, qui monte à la droite du Père et envoie l'Esprit-Saint présider jusqu'à la fin des siècles à la propagation de son règne ; ni pour Marie, qui, emportée au Ciel sur les ailes ardentes des anges, y reçoit l'éternelle couronne des mains du Père céleste.<br />
<br />
Il en sera ainsi de vous, chers fils et filles, si vous demeurez fidèles aux promesses faites à Jésus et à Marie, fidèles à remplir les devoirs contractés l'un envers l'autre. Ne rougissez point de l'Evangile (cf. Rom. Rm 1, 16). A une époque où nombre d'âmes faibles et vacillantes se laissent vaincre par le mal, n'imitez point leurs erreurs et, selon le conseil de saint Paul, triomphez du mal par le bien (cf. Rom. Rm 12, 21). Ainsi le rosaire de votre vie, égrené en une chaîne d'années, que Nous vous souhaitons longues et remplies de bénédictions, s'achèvera heureusement, au moment où tombera pour vous le voile des mystères, dans la lumineuse et éternelle glorification de la Sainte Trinité : Gloire au Père et au Fils et au Saint-Esprit. Ainsi soit-il.</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=Les_mauvaises_lectures_%E2%80%93_7_ao%C3%BBt_1940_%E2%80%93&diff=2124Les mauvaises lectures – 7 août 1940 –2012-01-31T10:30:06Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 7 aout 1940<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
Lorsque sous le radieux soleil du mois d'août, l'enfant quitte sa famille pour la colonie de vacances, son père jugerait superflu de lui dire : « Mon cher enfant, n'emporte point de serpent dans ta petite valise ; et si jamais tu en rencontres un dans tes promenades, garde-toi de le prendre dans tes mains pour l'examiner. »<br />
<br />
Toutefois l'amour paternel Nous inspire à votre adresse un conseil semblable. Nous avons à l'audience de mercredi dernier exposé brièvement l'utilité des bonnes lectures. Aujourd'hui Nous voudrions vous rappeler le péril des mauvaises ; péril contre lequel l'Eglise n'a jamais cessé d'élever la voix, mais dont néanmoins nombre de chrétiens méconnaissent ou contestent la gravité.<br />
<br />
Vous devez donc vous persuader qu'il y a de mauvais livres, des livres mauvais pour tous, comme il y a des poisons contre lesquels personne ne saurait se dire assuré. En tout homme la chair est sujette aux faiblesses et l'esprit prompt aux rébellions ; ainsi de pareilles lectures constituent un danger pour n'importe qui. Durant la prédication de saint Paul à Ephèse, racontent les Actes des Apôtres, nombre d'auditeurs qui s'étaient adonnés aux pratiques superstitieuses, apportèrent leurs livres et les brûlèrent devant tout le peuple ; en estimant la valeur de ces livres de magie ainsi réduits en cendres, on trouva cinquante mille pièces d'argent (Ac 19, 19).<br />
<br />
Plus tard, durant le cours des siècles, les papes prirent soin de faire publier un catalogue, ou Index, des livres dont la lecture est interdite aux fidèles, et ils ajoutent en même temps que beaucoup d'autres livres, dont l'Index ne contient aucune mention expresse, tombent sous la même condamnation et prohibition, parce que nuisibles à la foi et aux mœurs. Qui donc s'étonnerait de voir les gardiens de la santé spirituelle des fidèles recourir à une pareille défense ? La société civile ne travaille-t-elle point, elle aussi, par de sages mesures législatives et prophylactiques, à empêcher dans l'économie domestique et industrielle l'action délétère des substances toxiques ? N'entoure-t-elle pas de mesures de précautions la vente et l'usage des poisons, et tout spécialement des plus nocifs ?<br />
<br />
Si Nous vous rappelons ce grave devoir, c'est que Nous y sommes poussé par l'extension du mal, extension que favorisent actuellement l'incessant développement de la librairie et la liberté que beaucoup s'attribuent de lire n'importe quoi. Or, il ne saurait exister une liberté de lire tout, pas plus que n'existe la liberté de manger et de boire tout ce qui vous tombe sous la main, fût-ce de la cocaïne ou de l'acide prussique.<br />
<br />
Chers époux, cette mise en garde s'adresse spécialement à vous, qui vous trouvez pour la plupart dans l'âge et l'état d'esprit où l'on se complaît aux récits romanesques, où la foule des désirs trouve une pâture en des bonheurs parfois imaginaires et où la douceur des rêves atténue la rudesse de la réalité. Certes, il ne vous est pas interdit de goûter le charme des récits de pure et saine tendresse humaine ; l'Ecriture Sainte elle-même offre des scènes de ce genre, qui ont conservé à travers les siècles leur fraîcheur idyllique : telles la rencontre de Jacob et de Rachel (Gn 29, 9-12), les fiançailles du jeune Tobie (Tob., 7), l'histoire de Ruth (Ruth, 3). Et il y a eu même des auteurs de grand talent qui ont écrit de bons et honnêtes romans ; qu'il suffise de citer notre Manzoni. Mais à côté de ces fleurs pures, quelle végétation de plantes vénéneuses dans le vaste domaine des œuvres d'imagination ! Or, trop souvent les hommes cueillent ces plantes vénéneuses, plus accessibles et plus voyantes ; trop souvent ils préfèrent aux fleurs pures le parfum pénétrant et enivrant de ces plantes vénéneuses.<br />
<br />
« Je ne suis plus une enfant — dit cette jeune femme — et je connais la vie. Il me faut donc la connaître encore mieux, et j'en ai le droit. » Pauvre jeune femme ! Elle ne remarque point qu'elle tient le langage d'Eve en face du fruit défendu ! Croit-elle peut-être que, pour mieux connaître et aimer la vie, et pour en tirer profit, il soit nécessaire d'en scruter tous les abus et déformations ?<br />
<br />
« Je ne suis plus un enfant — dira également ce jeune homme — et à mon âge les descriptions sensuelles et les scènes voluptueuses ne font plus rien. » En est-il bien sûr, tout d'abord ? Et puis, s'il en était ainsi, ce serait l'indice d'une inconsciente perversion, fruit de mauvaises lectures antérieures. Ainsi, racontent certains historiens, Mithridate, roi du Pont, cultivait des herbes vénéneuses ; il préparait et expérimentait sur lui-même des poisons auxquels il voulait s'habituer ; d'où le nom de mithridatisme.<br />
<br />
Mais n'allez pas croire, jeunes hommes et jeunes femmes, que si vous vous laissez parfois entraîner à lire, en cachette peut-être, des livres suspects, n'allez pas croire que le poison de ces ouvrages ne produise plus d'effet sur vous ; craignez plutôt que pour n'être pas immédiat, cet effet n'en soit que plus malfaisant. Il existe dans les pays tropicaux de l'Afrique des insectes diptères connus sous le nom de mouches tsé-tsé ; leur piqûre ne cause point la mort aussitôt mais une simple et passagère irritation locale. Cependant elle inocule dans le sang des trypanosomes délétères, et, lorsque les symptômes du mal apparaissent clairement, il est parfois trop tard pour y porter remède par les médicaments de la science. Pareillement les images impures et les pensées dangereuses que produit en vous un mauvais livre semblent parfois entrer dans votre esprit sans causer de blessure. Vous serez sujets alors à récidiver, et vous ne vous rendrez pas compte qu'ainsi, par la fenêtre de vos yeux, la mort pénètre dans la maison de votre âme (cf. Jér. Jr 9, 21) ; à moins d'une réaction immédiate et vigoureuse, votre âme, tel un organisme engourdi par la « maladie du sommeil » glissera, languissante, dans le péché mortel et dans l'inimitié de Dieu.<br />
<br />
Sous certains aspects, le danger des mauvaises lectures est plus funeste que celui des mauvaises compagnies : à la façon d'un traître, le mauvais livre sait se rendre familier. Que de jeunes filles et de jeunes femmes, seules dans leur chambre avec le livre en vogue, se laissent dire crûment par lui des choses qu'elles ne permettraient à personne de murmurer en leur présence, ou se laissent décrire des scènes dont pour rien au monde elles ne voudraient être les actrices ou les victimes ! Hélas ! Elles se préparent à le devenir demain ! D'autres, chrétiens ou chrétiennes qui dès leur enfance ont marché dans la bonne voie, gémissent parfois de voir se multiplier soudain les tentations qui les oppriment et devant lesquelles ils se sentent toujours faibles. S'ils interrogeaient avec sincérité leur conscience, ils devraient peut-être reconnaître qu'ils ont lu un roman sensuel, parcouru une revue immorale, attaché le regard sur des illustrations indécentes. Les pauvres âmes ! Peuvent-elles, en toute loyauté et logique, se plaindre qu'un flot de fange menace de les submerger, quand elles ont ouvert les digues d'un océan de poison ?<br />
<br />
Au surplus, chers jeunes époux, vous préparez maintenant votre avenir et implorez de Dieu entre autres la bénédiction de la fécondité sur votre union ; songez que l'âme de vos enfants sera le reflet de la vôtre. Vous êtes certes résolus à leur donner une éducation chrétienne et à ne leur inspirer que de bons principes. Excellente résolution. Mais suffira-t-elle toujours ? Hélas non ! Il arrive parfois que des parents ont donné à un fils ou à une fille une éducation soignée, les ont tenus à l'écart des plaisirs dangereux et des mauvaises compagnies, et qu'ils les voient, à l'âge de 18 ou 20 ans, victimes de chutes misérables ou même scandaleuses ; l'ivraie a étouffé le bon grain semé par les parents. Quel est l'inimicus homo, l'ennemi qui a fait pareil mal ? Le rusé tentateur s'est furtivement introduit au foyer domestique lui-même, dans ce petits paradis terrestre, et il a trouvé déjà cueilli, pour l'offrir à ces mains innocentes, le fruit corrupteur : un livre laissé par négligence sur le bureau du père a miné dans le fils la foi baptismale ; un roman oublié par la mère sur le sofa ou le fourneau a terni dans la fille la pureté de la première communion. Et le mal se découvre, avec épouvante, d'autant plus difficile à guérir que la tache faite à la candeur d'une âme vierge est plus tenace.<br />
<br />
Mais à côté des écrits qui propagent l'impiété et l'inconduite, Nous ne pouvons omettre de mentionner ceux qui répandent le mensonge et provoquent la haine. Le mensonge, abominable aux yeux de Dieu et détesté de tout homme droit (Pr 6,17 et Pr 13, 5), l'est encore davantage lorsqu'il propage la calomnie et sème la discorde parmi les frères (Pr 6, 19). Comme les maniaques des lettres anonymes ruinent par leur plume trempée de fiel et de fange la félicité des familles et l'union des foyers, une certaine presse semble avoir pris à tâche de détruire, dans la grande famille des peuples, les relations fraternelles entre les fils du même Père céleste. œuvre de haine qui s'accomplit par le livre, et plus souvent encore, par le journal.<br />
<br />
Que dans la hâte fiévreuse du travail quotidien il échappe une erreur à un écrivain, qu'il accepte une information peu sûre, qu'il émette une appréciation injuste, tout cela bien souvent peut paraître et peut être légèreté plutôt que faute. Qu'il pense pourtant que de pareilles légèretés et inadvertances peuvent suffire, surtout en des époques de tensions aiguës, à produire de graves répercussions. Plaise à Dieu que l'histoire n'enregistre aucune guerre provoquée par un mensonge habilement propagé !<br />
<br />
Un publiciste conscient de sa mission et de sa responsabilité se sent le devoir, s'il a répandu l'erreur, de rétablir la vérité. Il s'adresse à des milliers de lecteurs sur qui ses écrits peuvent produire un effet, et il est tenu de ne point ruiner en eux et autour d'eux le patrimoine sacré de vérité libératrice et de pacifiante charité que dix-neuf siècles de christianisme, dix-neuf siècles de labeur, ont apporté au genre humain. On a dit que la langue a tué plus d'hommes que Pépée (cf. Si 28, 22). Pareillement la littérature mensongère peut devenir plus homicide que les chars blindés et les bombardiers.<br />
<br />
L'Evangile de la Transfiguration du Seigneur que nous avons lu hier à la sainte messe, raconte comment, pour révéler sa gloire à ses trois apôtres préférés, le divin Maître commença par les conduire seuls, à l'écart, sur une haute montagne (Mc 9, 1). Si vous voulez assurer à vos foyers la bénédiction de Dieu, la protection spéciale de son Cœur, les grâces de paix et d'union promises à qui l'honore, séparez-vous de la foule en repoussant les publications mauvaises et corruptrices. Cherchez le bien en ce domaine comme dans les autres, prenez l'habitude de vivre sous le regard de Dieu et dans la fidélité à sa loi : vous ferez alors de votre foyer un Thabor intime et inaccessible aux miasmes de la plaine et où vous pourrez dire avec saint Pierre : « Maître, il nous est bon d'être ici ! (Mc 9, 4) ».</div>Salettensishttp://salve-regina.com/index.php?title=La_lecture_%E2%80%93_31_juillet_1940_%E2%80%93&diff=2123La lecture – 31 juillet 1940 –2012-01-31T10:28:45Z<p>Salettensis : creation de l'audience</p>
<hr />
<div>{{Infobox Texte<br />
| thème = Magistère pontifical sur la famille - Discours aux jeunes époux<br />
| auteur = Pie XII<br />
| source = <br />
| source web = <br />
| date de publication originale = 31 juillet 1940<br />
| résumé = <br />
| difficulté de lecture = ♦ Facile<br />
| remarque particulière =<br />
}} <br />
<br />
{|<br />
|-<br />
| <br><br />
|}<br />
L'été est d'habitude la saison des vacances. Les vacances ! Ce nom chante à bien des oreilles comme le son d'une cloche joyeuse, parce qu'il annonce après de longs mois de travail une période de repos. Vous goûtez ce repos, chers jeunes époux, dans ce voyage de noces, peut-être bien court, qui vous a conduits dans la Ville éternelle. Les vacances offrent à quelques familles l'occasion d'un séjour dans une contrée hospitalière du voisinage, dans les montagnes ou sur les plages d'Italie. Pour d'autres familles, qui, moins aisées, ne peuvent quitter leur demeure, les vacances sont au moins le temps où parents et enfants se retrouvent plus longuement unis dans la paix du sanctuaire domestique.<br />
<br />
La paix ! Que de familles aujourd'hui soupirent après elle ! Que d'épouses, de mères, de fiancées — fermement résolues pourtant et prêtes aux derniers sacrifices dans l'accomplissement de leurs devoirs patriotiques — ont le cœur déchiré par le départ d'un être cher pour une destination lointaine, peut-être inconnue et souvent périlleuse ! Il y en a d'autres qui ont le cœur plus tourmenté encore : leur pensée s'agite et se perd dans la nuit d'une angoissante incertitude ; elles interrogent terre et ciel, en quête d'un renseignement digne de foi sur le sort, tragique peut-être, de l'être bien-aimé dont elles n'ont plus de nouvelles. La paix ! Blanche colombe qui, ne trouvant où poser le pied sur une terre couverte de cadavres et submergée par un déluge de violence, semble avoir regagné l'arche de la Nouvelle Alliance, le Cœur de Jésus – Cor, arca legem continens... :« Cœur, arche qui contenez la Loi »1 – pour n'en sortir que le jour où elle pourra enfin cueillir, sur l'arbre de l'Evangile, le vert rameau de la charité fraternelle entre les hommes et entre les peuples.<br />
<br />
Malgré les tristesses de l'heure présente, il y en a plus d'un parmi vous, Nous le souhaitons du fond du cœur, qui ne laissera pas de goûter quelque repos. Mais l'homme ne saurait se contenter d'étendre mollement ses membres fatigués et de s'abandonner à un sommeil réparateur ; le repos de l'homme comprend aussi de saines distractions et, pour l'ordinaire, des lectures. Et comme il n'existe plus de notre temps, pour ainsi dire, une seule famille où n'entrent point le livre, la brochure et le journal, et que les loisirs des vacances multiplient les occasions de lecture, Nous voudrions vous adresser quelques paroles à ce sujet.<br />
<br />
Le premier homme qui, désireux de communiquer à d'autres sa pensée sous une forme plus durable que le son fugitif des paroles, grava, peut-être avec un grossier silex sur la paroi d'une caverne, des signes conventionnels dont il fixa et expliqua l'interprétation, cet homme inventa par le fait même l'écriture et l'art de la lecture. Lire, c'est entrer à travers des signes graphiques plus ou moins compliqués dans la pensée d'autrui. Or, puisque « les pensées des justes sont l'équité, et les conseils des méchants la fraude », il s'ensuit que certains livres comme certaines paroles, sont des sources de lumière, de force, de liberté intellectuelle et morale, tandis que d'autres ne font qu'apporter périls et occasions de péché. Tel est l'enseignement de l'Ecriture sainte : Cogitationes justorum judicia, et consilia impiorum fraudulenta. Verba impiorum insidiantur sanguini ; os justorum liberabit eos. « Les pensées des justes sont l'équité, et les conseils des méchants, la fraude. Les paroles des méchants sont des pièges de mort, mais la bouche des hommes droits les sauve » (Pr 12, 5-6). Il y a donc de bonnes et de mauvaises lectures comme il y a de bonnes et de mauvaises paroles.<br />
<br />
La parole n'est souvent qu'un éclair. Dans la nuit et la tempête l'éclair peut suffire à remettre le voyageur sur le bon sentier ; et, même sur le chemin le plus sûr, un éclair, un seul, suffit à foudroyer l'imprudent. Tels sont les effets de la bonne ou de la mauvaise parole. Quant au livre, son action est moins rapide, mais elle se prolonge dans le temps. C'est une flamme qui peut couver sous la cendre ou une faible lueur dans la nuit, une lueur qui tout à coup se rallume, bienfaisante ou dévastatrice. Le livre sera la lampe du sanctuaire, toujours prête à signaler au fidèle qui s'avance le saint tabernacle et son hôte divin, ou ce sera le volcan dont les terribles éruptions jettent des cités entières dans la désolation et la mort. Vous désirez les agréables conversations, les paroles sages et réconfortantes ; vous haïssez non sans raison le blasphème et les propos corrupteurs ; cherchez donc de même les bons livres et détestez les mauvais.<br />
<br />
Nous n'entendons pas vous décrire en cette allocution les dommages causés par la mauvaise presse ; Nous aimons mieux vous montrer, pour vous exhorter à les aimer et à les répandre, l'heureuse influence des bonnes lectures, comme Nous en trouvons un éclatant exemple dans la vie du saint que l'Eglise fête aujourd'hui, Ignace de Loyola.<br />
<br />
Capitaine assoiffé de renom et de gloire, défenseur intrépide de Pampelune contre les soldats du roi de France, Ignace avait été frappé par le projectile d'une bombarde et il en avait eu la jambe gauche cassée et la droite grièvement atteinte. Estimant à sa juste valeur l'héroïque courage qu'il avait montré, les Français, lors de la prise de la citadelle, le traitèrent d'une manière chevaleresque et le firent transporter sur un brancard au château de Loyola. Entré en convalescence après des opérations extrêmement douloureuses, il se serait volontiers jeté, pour chasser l'ennui, sur des livres de chevalerie, des romans d'amour et de prouesses alors en vogue, comme Amadis de Gaule ; mais il ne s'en trouva aucun dans cet austère château. On lui offrit par contre la Grande Vie de Jesus-Christ par Ludolphe de Saxe2 et les Légendes des Saints par Jacques de Voragine. Faute d'autres livres, Ignace se résigne à lire ceux-là. Mais, bien vite, insensiblement, dans son âme loyale, d'abord surprise, puis subjuguée, se glisse une lumière plus pure, plus douce et plus brillante que le vain éclat des cours d'amour, des tournois de chevaliers et des actes de bravoure sur les champs de bataille.<br />
<br />
Devant ses yeux encore brûlants de fièvre, la vision jusqu'alors tant admirée des grands gentilshommes aux armures damasquinées pâlissait ; d'autres héros se levaient à leur place, jusqu'alors à peine entrevus dans quelques instants de prière. Et peu à peu, dans les longues nuits sans sommeil, sous le pinceau de Jacques de Voragine, les ombres des martyrs couverts de sang, des moines à la cagoule grise, des vierges aux vêtements de lys, prenaient corps. Leurs froides figures s'animaient ; leurs gestes acquéraient expression et relief. Et au-dessus d'elles l'image d'un Roi généreux surgissait des pages de Ludolphe, l'image d'un Roi qui appelait à sa suite, pour conquérir la terre des infidèles, des légions de soldats obéissants et une petite troupe de chevaliers enthousiastes, désireux de se signaler à son service. Mais ce Roi souverain et Seigneur éternel ne parlait plus d'héroïques épopées ni de sanglantes mêlées où l'on frappait d'estoc et de taille. Il disait : « Qui veut me suivre, il faut qu'il souffre avec moi, afin que, m'ayant suivi dans mes labeurs, il me suive également dans la gloire. » L'âme d'Ignace, éclairée par cette lumière nouvelle, se détachait ainsi de plus en plus de ses fallacieux songes terrestres et commençait son oblation totale au Seigneur de toutes choses3.<br />
<br />
Bien-aimés fils et filles, rentrez en vous-mêmes, recueillez-vous un instant et recherchez avec sincérité d'où vient ce qu'il y a de meilleur en vous. Pourquoi croyez-vous en Dieu, en son Fils incarné pour la Rédemption du monde, en sa Mère dont il a fait votre Mère ? Pourquoi obéissez-vous à ses commandements ? Pourquoi aimez-vous vos parents, votre patrie, votre prochain ? Pourquoi êtes-vous résolus à fonder un foyer qui ait Jésus pour Roi et où vous puissiez transmettre à vos enfants le trésor familial des vertus chrétiennes ? Il est certain que c'est parce que la foi vous a été donnée dans le baptême ; parce que vos parents, votre curé, vos maîtres et maîtresses d'école vous ont enseigné par la parole et par l'exemple à faire le bien et à éviter le mal. Mais examinez vos souvenirs mieux encore ; parmi les meilleurs et les plus décisifs, vous trouverez probablement celui d'un livre bienfaisant : le catéchisme, l'histoire sainte, l'Evangile, le missel, le bulletin paroissial, l'Imitation de Jésus-Christ, la vie d'un saint ou d'une sainte. Vous reverrez des yeux de l'esprit un de ces livres, qui n'est peut-être ni le plus beau, ni le plus riche, ni le plus savant, mais sur les pages duquel votre lecture, un soir, s'est tout à coup arrêtée, votre cœur a battu plus fort, vos yeux se sont mouillés de larmes. Et alors, sous l'irrésistible action du Saint-Esprit, s'est creusé dans votre âme un sillon profond qui, malgré les ans, malgré les écarts plus ou moins longs, peut encore vous servir de guide dans le chemin qui vous mène à Dieu.<br />
<br />
Si, du moins les plus jeunes, vous n'avez pas encore tous fait cette expérience, vous en sentirez probablement un jour la pénétrante douceur quand vous retrouverez sur une étagère encombrée ou dans une vieille armoire un petit livre de vos premières années, et que vous découvrirez avec émotion dans les pages jaunies, comme une fleur desséchée dans le jardin de votre enfance, l'histoire édifiante, la maxime, la pieuse prière que vous aviez laissée ensevelie sous la poussière des occupations et préoccupations de la vie quotidienne, mais qui tout de suite reprendra le même parfum, la même saveur, la même vigueur de coloris qu'au temps où elle avait enchanté et réconforté votre âme.<br />
<br />
C'est là un des grands avantages du bon livre. Si vous dédaignez les sages avertissements et le juste blâme d'un ami, il vous abandonne ; mais le livre que vous abandonnez vous restera fidèle négligé ou repoussé à plus d'une reprise, il est toujours prêt à vous redonner l'aide de ses enseignements, la salutaire amertume de ses reproches, la claire lumière de ses conseils. Ecoutez donc ses avis aussi discrets que directs. Il vous adresse un blâme trop souvent mérité peut-être, il vous rappelle un devoir trop souvent oublié, comme il l'a fait à bien d'autres avant vous ; mais il ne vous découvrira pas leur nom, et il ne dévoilera pas le vôtre. Tandis que, sous la lampe silencieuse, le livre par vos yeux entre en vous et qu'il vous réprimande ou vous réconforte, personne n'entendra sa voix, hormis votre propre cœur.</div>Salettensis