Communier avec fruit ; Préparation, action de grâce et bienfaits du rite tridentin

De Salve Regina

Spiritualité de la Messe
Auteur : Abbé Quentin Sauvonnet
Date de publication originale : 2003

Difficulté de lecture : ♦ Facile

Les fruits ou effets de la communion sacramentelle

 

« Tout effet produit pour la vie du corps par la nourriture et la boisson matérielles : soutenir, accroître, réparer, délecter, ce sacrement le produit pour la vie de l’âme. » Eugène IV, décret aux arméniens. D’où il suit que l’Eucharistie est un sacrement des vivants et non des morts, qu’elle donne la grâce seconde, c’est-à-dire un accroissement de grâce, et non la grâce première.

 

Augmentation de la grâce

L’Eucharistie nous unit à Jésus-Christ, auteur de la grâce et confère une augmentation de la grâce sanctifiante et des dons du Saint-Esprit.

Ceci est de Foi :

·          Jn 6, 51 : Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement; et le pain que je donnerai, c'est ma chair, que je donnerai pour la vie du monde.

·          Concile de Florence : « L'effet de ce sacrement, qu'il opère dans l'âme de celui qui le reçoit dignement, est l'union de l'homme au Christ. Et parce que par la grâce l'homme est incorporé au Christ et uni à ses membres, il en résulte que par ce sacrement la grâce est accrue chez ceux qui le reçoivent dignement… »

 

à Saint Thomas donne quatre raisons qui manifestent le bien fondé de cette réponse de foi, affirmant que ce sacrement augmente en nous la grâce (III, Q.79, a.1) :

- parce qu’il contient l’auteur de la grâce et nous unit à lui;

- parce qu’il commémore la Passion, source de la grâce;

- parce qu’il est donné par mode de nourriture, et donc produit une grâce qui nourrit;

- parce qu’il est donné sous les espèces du pain et du vin, l’un et l’autre confectionnés à partir de multiples grains : ainsi, ce sacrement nous unit aux autres membres du corps mystique.

Obtention de la gloire

·          Jn 6, 51 : Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement; et le pain que je donnerai, c'est ma chair, que je donnerai pour la vie du monde.

·          Concile de Trente, Session XIII : « Il a voulu, en outre, que ce soit le gage de notre gloire à venir et de notre félicité éternelle ».

Augmentation de la vertu de Charité

L’union à Dieu est l’effet propre de ce sacrement

Alors que, nous dit Saint Thomas, dans le sacrement de Confirmation par exemple « l’accroissement de la grâce et le perfectionnement de la vie spirituelle sont destinés à nous faire résister aux tentations extérieures, l’Eucharistie accroît et perfectionne la vie spirituelle à cette fin que l’homme soit accompli en soi-même par l’union à Dieu » (III, q. 79, a. 1). Or l’amour est une vertu unitive.

·          Jean 6, 56-57 : « Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui… Celui qui me mange vivra aussi par moi. »

·          Saint Cyrille de.Jérusalem : « Ren­dus dignes des divins mystères, vous êtes devenus, pour ainsi dire, concorporels et consanguins du Christ » (Cat. Myst. 4).

·          Saint Cyrille d’Alexandrie : « De même que si l’on mêle de la cire fondue à une autre cire, il faut qu’elles se mélangent intimement ; ainsi qui reçoit la chair et le sang du Seigneur, lui est uni de telle sorte que le Christ est en lui et lui dans le Christ » (In Jo. 1, 6, c. 17).

 

L’amour de Dieu et l’amour du prochain sont une même vertu ; l’Eucharistie accroît donc aussi la charité envers le prochain, principalement envers les membres vivants du corps mystique du Christ, c’est-à-dire ceux qui par la grâce participent à la nature divine :

·          1 Cor 10, 17 : « Puisqu’il y a un seul pain, nous formons un seul corps, malgré notre nombre, car nous participons tous à un même pain ».

·          Saint Augustin Sermon 272 : « Rappelez-vous que le pain ne se fait pas d’un seul grain, mais de beaucoup… rappelez-vous d’où se fait le vin : beaucoup de grains pen­dent à la grappe, mais la liqueur est le mélange de ces grains réunis ».

 

Son effet sur le péché

1.       par rapport au péché mortel :

Ne l’efface pas :

·          1 Cor 11, 29 : « Celui qui en mange et en boit indignement, mange et boit sa propre condamnation ».

En préserve cependant, en fortifiant l’âme et en mettant en fuite le démon :

·          Concile de Trente : « un antidote qui préserve des fautes mortelles » (Sess. 13, ch. 2).

·          « Revenons donc de cette table sainte semblables à des lions au souffle de feu, et devenus terribles au démon » (Saint J. Chrysostome, hom. 61, Ad. Pop. Antioch.).

 

2.       par rapport au péché véniel :

Quant au péché véniel, on sait qu’il n’ôte ni la grâce ni la charité habituelles, mais il diminue la ferveur de cette vertu. L’Eucharistie ranime la ferveur de la charité et par là détruit le péché véniel :

·          « elle nous délivre des fautes quo­tidiennes [vénielles] » (Conc. de Trente, Sess. 13, ch. 2).

 

3.       par rapport à la peine du péché :

Le Sacrement d’Eucharistie n’est pas de soi satisfac­toire ; il ne remet donc pas directement les peines temporelles dues au péché. Toutefois, dit saint Thomas, parce qu’il pro­duit l’union au Christ, et que cette union se fait par la charité, dont la ferveur nous obtient la rémission de la coulpe et de la peine, il s’ensuit que, par une sorte de con­comitance à l’effet principal, l’homme reçoit la rémission de la peine, selon la mesure de sa ferveur » (III, q. 79, a. 5).

 

Effets sur le corps

Par la présence réelle du Christ en nous, notre corps même est sanctifié, c’est-à-dire qu’il est en quelque manière consacré au Christ et lui appartient à un titre spé­cial. Plus que jamais il devient le temple de Dieu, le Saint des Saints :

1.         préservation de l’impureté.

Les Pères ont souvent affirmé cet effet de l’Eucharistie :

·          Clément d’Alexandrie : « Rece­vons le Christ en nous, afin d’éteindre les passions de notre chair » (Paedag. 1, 6).

·          Saint Cyrille d’Alexandrie : « Présent en nous, le Christ apaise la loi de la chair qui sévit en nos membres ; il réveille notre piété envers Dieu, il réfrène les troubles, ne nous impute plus nos fautes, mais comme des malades nous guérit. » (In. Jo. 6, 67).

Comment est produit cet effet ? Certains théologiens pensent que l’Eucharistie agit physiquement sur notre corps, apaisant la concupis­cence en rétablissant l’harmonie entre l’âme et le corps. Ce n’est pas impossible ; cependant ce mode parait extraor­dinaire et miraculeux. Saint Thomas croit que cet effet n’est produit qu’indirectement par l’augmentation de la charité :

·          « Bien que ce sacrement ne soit pas destiné à dimi­nuer la concupiscence, cependant il le fait par voie de con­séquence en tant qu’il accroît la charité. » (III, q. 79, a. 6, ad 3).

 

2.  gage de résurrection.

 C’est la promesse même du Christ :

·          « Qui mange ma chair… a la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour. » (Jo. 6, 55).

Aussi saint Ignace d’Antioche appelle-t-il l’Eucharistie « un ferment d’immortalité ». Non qu’il faille entendre par là une sorte de qualité physique produite dans le corps lui-même, mais un droit spécial à la résurrection glo­rieuse, et comme dit saint Irénée une ‘assurance d’immortalité’.

 

les dispositions requises

 

L’état de grâce

Le Christ annonce (Jo. 6) qu’il nous donnera son corps et son sang en nourriture et breuvage spirituels. Or, on ne donne pas de nourriture à des morts ; la réception de l’Eucharistie suppose donc bien dans l’âme la vie de la grâce, et elle l’y accroît. Saint Paul rappelle vive­ment aux Corinthiens la nécessité de la pu­reté de l’âme pour recevoir ce sacrement :

·          1 Cor. 11, 27-28 : « Qui mange ce pain ou boit ce calice indignement, est justiciable du corps et du sang du Seigneur. Que l’homme s’éprouve donc lui­-même » avant de communier !

·          Saint Ambroise de Milan, De Sacramentis : « Te voilà pur de tout péché, puisque tes fautes ont été effacées ; aussi le Seigneur te juge-t-il maintenant digne des sacrements célestes et t’in­vite-t-il à ce céleste festin » (L. 5, c. 2, n. 6).

·          Saint J. Chry­sostome : « Si personne n’ose toucher témérairement le vêtement d’un roi, com­ment oserions-nous déshonorer à ce point le corps saint et immaculé du maître du monde, corps uni à la divinité, corps par qui nous existons et nous vivons, par qui les portes de la mort ont été brisées, celles du ciel ouvertes ? Je t’en prie, ne te détruis pas par ton imprudence, mais approche-toi avec tremblement et pureté » (hom. 24 sur la I aux Cor., n. 4).

·          Concile de Trente : « Si quelqu’un dit que la foi seule est une préparation suf­fisante pour recevoir le très saint sacrement d’Eucharistie, qu’il soit anathème ! Et afin qu’un si grand sacrement ne soit pas reçu indignement pour la mort et la condamnation du coupable, le saint Concile décrète et déclare à ceux qui se sentent souillés d’une faute grave, que, quelle que soit leur contrition, ils doivent, pourvu qu’ils puissent avoir un confesseur, faire d’abord leur confession sacramentelle. Si quelqu’un ose prétendre ou enseigner le contraire, il est par le fait même excommunié » (Sess. 13, c. 5, 13).

ð      D’où la nécessité de se confesser régulièrement, ou au moins dès qu’on a commis un péché mortel.

ð      Le texte de Saint Paul nous invite à faire un examen de conscience avant de communier, invitation que renouvelle le catéchisme du concile de Trente.

 : De cette condition dépend la ‘validité’ de la communion.

Autres dispositions de l’âme

1.      l’intention droite :

Communément définie comme le désir de plaire à Dieu et de devenir meilleur. Un document du magistère en parle :

§         décret « sacra tridentina synodus » (1905) : « L'intention droite consiste à s'approcher de la sainte table, non par habitude ou par vanité, ou pour des raisons humaines, mais pour satisfaire à la volonté de Dieu, s'unir à lui plus intimement par la charité et, grâce à ce remède divin, combattre ses défauts et ses infirmités ».

 Remarquons que le catéchisme du concile de Trente nous exhorte à « réfléchir en silence au-dedans de nous-mêmes combien nous sommes indignes de ce bienfait divin que nous recevons dans la sainte Eucharistie, (…) nous devons répéter du fond du cœur : « Seigneur, je ne suis pas digne que vous entriez dans ma maison. » Demandons-nous également si nous aurions le droit de dire avec S. Pierre : « Seigneur, vous savez que je vous aime ! »

2.      Le même catéchisme pose comme condition « absolument indispensable, de nous demander à nous-mêmes si nous sommes en paix avec les autres, si nous aimons notre prochain sincèrement et du fond du cœur ».

§         Mt 5, 23 : « Si en offrant votre don à l’autel, vous vous souvenez que votre frère a quelque chose contre vous, laissez-là votre don devant l’autel, et allez vous réconcilier avec votre frère, puis après vous viendrez faire votre offrande ».

 

 : Du respect de ces conditions, nos communions seront plus ou moins fructueuses. Plus ou moins de grâces actuelles y sont rattachées. La ferveur de nos actes de charité en découlent, et avec elle plusieurs effets mentionnés ci-dessus (remise de la peine du péché, effacement des péchés véniels…)

 

Dispositions du corps

Notre corps étant appelé à devenir le tabernacle vivant, il convient de marquer le respect dû à l’hôte divin en observant les conditions suivantes :

1.       être à jeun : même si aujourd’hui nous ne sommes tenus qu’à une heure de jeûne, rien n’empêche les fidèles, désireux d’offrir plus à notre Seigneur, d’observer une période de jeûne plus longue (telle que les trois heures anciennement prescrites). [La loi fixe le minimum requis ! Elle ne vise pas à limiter nos efforts.]

2.       avoir une tenue correcte et une attitude respectueuse. La raison en a été donnée ci-dessus. On ne saurait trop insister sur le bien fondé de la mantille pour les dames qui marque de la façon la meilleure qui soit ce respect. Derrière ce qui apparaît souvent comme une exigence anachronique se trouvent des raisons de convenance qu’on gagnerait à redécouvrir…

 

L’action de grâces

 

Tout sacrement confère la grâce à l’âme bien disposée au moment précis où l’applica­tion est complète. Donc l’Eucharistie confère la grâce et la cha­rité habituelles au moment de la manducation du corps du Christ, au moment où il serait vrai de dire d’un aliment cor­porel : je mange ce pain, donc au moment de la déglutition. La durée de la présence réelle ne produit donc pas en nous un accroissement continu de la grâce et de la charité habi­tuelles ; l’effet du sacrement est instantané. Dans quelle mesure cet effet est-il produit ? A la mesure des dispositions du communiant.

Quant aux grâces actuelles, on peut admettre qu’elles sont offertes au communiant, s’il n’y met pas obstacle, tout le temps que dure la présence réelle, titre actif à ces grâces. Mais il dépend de l’homme d’y coopérer et d’en bien user. Elles sont donc diminuées ou même complètement taries par l’attache au péché véniel, les distractions, la négligence. D’où l’importance de la préparation et surtout en ce qui nous occupe de l’action de grâces.

 

 

Bienfaits du rite traditionnel

Loin de nous l’idée d’insinuer que les communions dans les autres rites ne sont pas valables et qu’elles ne portent aucun fruit. En quoi peut-on alors parler de bienfaits du rite traditionnel ? Il ne faut pas chercher du côté de la ‘validité’ de la communion mais plutôt du coté de ses fruits dans la mesure où le fidèle est mieux disposé à les recevoir :

§         attitude plus respectueuse. Plus de génuflexions, communion à genou et sur la langue. Sur ce dernier point nous n’abordons pas les dangers de sacrilège, la faiblesse des fondements historiques de la communion dans la main (surtout telle que nous la pratiquons aujourd’hui). Nous ne rappellerons qu’un seul principe en matière sacramentaire : pour tout ce qui touche aux sacrements, il faut aller au plus sûr ! De ce fait, et à tout point de vue, la communion sur la langue l’emporte sur la communion dans la main.

§         Il est un aspect qu’on ne développe pas assez : le rapport de la communion au sacrifice eucharistique. En effet, déjà dans l’ordre naturel, la manducation de la victime est l’achèvement du sacrifice ; elle met en rapport les fidèles avec la divinité pour laquelle le sacrifice a été offert.

Cela est parfaitement vrai pour le prêtre, pour lequel la communion est une partie intégrale du sacrifice. Cela est également vrai pour les fidèles dans la mesure où ils participent à l’offrande de la victime à immoler.

Or c’est avant tout sur l’offertoire que l’ancien rite l’emporte sur le nouveau, ainsi que sur l’application des fruits qui découleront du sacrifice à offrir. (Cf. l’étude sur l’offertoire du P. Guérard des Lauriers parue dans Itinéraires.)

On voit donc un aspect de plus des bienfaits du rite tridentin…

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