La communion spirituelle (DTC)

De Salve Regina

Spiritualité de la Messe
Auteur : H. Moureau
Source : Article du Dictionnaire de Théologie Catholique (Lethouzey), Colonne 572-574
Date de publication originale : 1902-1950

Difficulté de lecture : ♦♦ Moyen

La communion spirituelle

Communier spirituellement, c’est s’unir à Jésus-Christ présent dans l’eucharistie, non pas en le recevant sacramentellement, mais par un désir procédant d’une foi animée par la charité.[1]


1° On sait que la justification est produite par l’acte de charité ou par celui de contrition parfaite en tant que cet acte inclut chez le non-baptisé le vœu de recevoir le baptême et, chez le baptisé, le vœu de confesser ses fautes pour en être absous.[2] Ainsi, pour opérer l’effet de ces sacrements, le désir implicitement contenu dans l’acte de contrition ou de charité suffit; il n’en est pas de même pour l’eucharistie. La communion spirituelle exige essentiellement le désir explicite de s’unir à Jésus-Christ sacramentellement. Ce désir suppose donc la foi à l’eucharistie et comme il a été dit, il doit être accompagné de la charité.


2° II suit de la que ni les anges ni les bienheureux dans le ciel ne peuvent communier spirituellement. Développant cette pensée, saint Thomas[3] fait remarquer que l’on peut communier spirituellement de deux façons : 1. en s’unissant au Christ en personne naturelle; c’est ainsi que communient les anges en tant qu’ils sont unis au Christ par la charité et par la vision face à face; c’est là le pain que nous mangerons un jour dans la patrie; 2. on peut se nourrir spirituellement du Christ en s’unissant à lui en tant qu’il est présent sous les espèces, c’est-à-dire par la foi au Christ jointe au désir de recevoir le sacrement ou il est présent : or ce mode de communion n’existe pas pour les anges.


3° Trois actes constituent la communion spirituelle : 1. l’acte de foi à la présence réelle de Jésus-Christ au sacrement de l’autel; 2. l’acte de désir, dont une forme très recommandable consiste à s’imaginer que l’on s’approche de la sainte table et que l’on reçoit l’hostie de la main du prêtre; 3. l’acte d’action de grâces, le même que ai l’on avait réellement communié.


4° Le moment où la communion spirituelle est particulièrement indiquée est naturellement celui de la communion du prêtre a la messe; mais on peut communier spirituellement à tout moment de la journée, autant de fois que l’on veut et en n’importe quel lieu. Celui qui serait en état de péché mortel n’est nullement tenu de se confesser; il suffit qu’il fasse un acte de contrition parfaite. Et si la contrition était imparfaite, il ne pécherait point, mais, au contraire, il ferait une chose bonne en faisant les actes de la communion spirituelle; seulement il n’obtiendrait point les grâces spéciales attachées à ce mode de communion, attendu qu’il manquerait d’une disposition essentiellement requise.[4]


5° Les effets de la communion spirituelle sont identiques à ceux de la communion sacramentelle, sauf leur intensité, qui est moindre.[5] Toutefois, ceci doit s’entendre à égalité des dispositions, car, autrement, une communion spirituelle, faite avec plus de ferveur, pourra produire plus de fruit qu’une communion sacramentelle faite avec tiédeur. Il n’est pas besoin de dire que les fruits de la communion spirituelle sont uniquement ex opere operantis.


6° En raison des fruits excellents de la communion sacramentelle et de l’effet qu’elle a d’aviver la foi et d’enflammer l’amour des fidèles envers l’auguste sacrement ainsi que de les porter à s’approcher de la sainte table fréquemment et avec ferveur, la communion spirituelle est hautement approuvée et recommandée par l’Église. Ainsi, parmi les motifs que le concile de Trente[6] invoque pour prouver que les messes où le prêtre seul communie sont néanmoins des messes communes à tous les fidèles, il allègue la communion spirituelle que le peuple fait à ces messes, signifiant ainsi clairement que communier spirituellement c’est participer très véritablement aux fruits du sacrement de l’autel.


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Sources : S. Thomas, Sum. theol., IIIa, q. lxxx, a. 1, 2; Suarez;, In IIIam Sum., disp. LXII, sect.I, n. 2; Salmanticenses, Cursus theologicus, disp. II, dub.I, II ; Gihr, Die heiligen Sakramente, t. II, § 22.

  1. Concile de Trente, sess. XIII, ch. VIII : « Pour ce qui est de l’usage, nos pères ont justement et sagement distingué trois manières de recevoir ce saint sacrement. Ils ont enseigné que certains ne le reçoivent que sacramentellement en tant que pécheurs. D’autres ne le reçoivent que spirituellement : ce sont ceux qui, mangeant par le désir le pain céleste qui leur est offert avec cette « foi » vive « qui opère par la charité » Ga 5,6 , en ressentent le fruit et l’utilité. D’autres, enfin, le reçoivent à la fois sacramentellement et spirituellement : ce sont ceux qui s’éprouvent et se préparent de telle sorte qu’ils s’approchent de cette table divine après avoir revêtu la robe nuptiale Mt 22,11-14 . » (Denzinger 1648)
  2. Voir charité, t. II, col. 2236-2245.
  3. Sum. theol.IIIa, q. lxxx, a. 2, ad 1um, 2um
  4. Scavini, Theologia moralis, tr. IX, n. 167.
  5. S.Thomas, Sum. theol,, III, q. lxxx, a. 1, ad 3um.
  6. sess. XXII, ch. VI : « Le saint concile souhaiterait, certes, que les fidèles assistant à chaque messe ne communient pas seulement par un désir spirituel, mais aussi par la réception sacramentelle de l'eucharistie, par quoi ils recueilleraient un fruit plus abondant de ce très saint sacrifice. Cependant, s'il n'en est pas toujours ainsi, il ne condamne pas pour cela, comme privées et illicites , les messes où seul le prêtre communie sacramentellement ; mais il les approuve et les recommande, puisque ces messes doivent elles aussi être regardées comme vraiment publiques, en partie parce que le peuple y communie spirituellement, en partie parce qu'elles sont célébrées par un ministre public de l'Eglise, non pas pour lui seulement, mais pour tous les fidèles qui appartiennent au corps du Christ. » (Denzinger 1747)
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