Le discernement des Esprits selon les règles de Saint Ignace de Loyola

De Salve Regina

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Vie spirituelle
Auteur : Saint Ignace de Loyola
Source : Extrait des Règles du discernement des esprits

Difficulté de lecture : ♦♦♦ Difficile

Règles du discernement des esprits de la première semaine

Première règle, N° 314

A l’égard des personnes qui vont de péché mortel en péché mortel, la conduite ordinaire de l’ennemi est de leur proposer des plaisirs apparents, leur occupant l’imagination de jouissances et de voluptés sensuelles, afin de les retenir et de les plonger plus avant dans leurs vices et dans leurs péchés. Le Bon Esprit, au contraire, agit en elles d’une manière opposée, il excite dans leur conscience le trouble et le remords, en leur faisant sentir les reproches de la raison.

Deuxième règle, N° 315

Dans les personnes qui travaillent courageusement à se purifier de leurs péchés et vont de bien en mieux dans le service de Dieu, Notre-Seigneur, le Bon et mauvais esprit opèrent en sens inverse de la règle précédente. Car c’est le propre du mauvais esprit de leur causer de la tristesse et des tourments de conscience, d’élever devant elles des obstacles, de les troubler par des raisonnements faux, afin d’arrêter leurs progrès dans le chemin de la vertu, au contraire, c’est le propre du Bon Esprit de leur donner du courage et des forces, de les consoler, de leur faire répandre des larmes, de leur envoyer de bonnes inspirations et de les établir dans le calme ; leur facilitant la voie et levant devant elles tous les obstacles, afin qu’elles avancent de plus en plus dans le bien.

Troisième règle, N° 316

De la consolation spirituelle. J’appelle consolation un mouvement intérieur qui est excité dans l’âme, par lequel elle commence à s’enflammer dans l’amour de son Créateur et Seigneur et en vient à ne savoir plus aimer aucun objet créé sur la terre pour lui-même, mais uniquement dans le Créateur de toutes choses. La consolation fait encore répandre des larmes qui portent à l’amour de son Seigneur l’âme touchée du regret de ses péchés, ou de la Passion de Jésus-Christ, Notre-Seigneur, ou de toute autre considération qui se rapporte directement à son service et à sa louange. Enfin, j’appelle consolation toute augmentation d’espérance, de foi et de charité, et toute joie intérieure qui appelle et attire l’âme aux choses célestes et au soin de son salut, la tranquillisant et la pacifiant dans son Créateur et Seigneur

Quatrième règle, N° 317

De la désolation spirituelle. J’appelle désolation spirituelle le contraire de ce qui a été dit dans la troisième règle ; les ténèbres et le trouble de l’âme, l’inclination aux choses basses et terrestres, les diverses agitations et tentations qui la portent à la défiance et la laissent sans espérance et sans amour, triste, tiède, paresseuse, et comme séparée de son Créateur et Seigneur. Car comme la consolation est opposée à la désolation, les pensées que produit l’une sont nécessairement contraire à celles qui naissent de l’autre.

Cinquième règle, N° 318

Il importe, au temps de la désolation, de ne faire aucun changement, mais de demeurer ferme et constant dans ses résolutions et dans la détermination où l’on était avant la désolation, ou au temps même de la consolation. Car, comme ordinairement le Bon Esprit qui nous guide et nous conseille dans la consolation ; ainsi dans la désolation est-ce le mauvais esprit, sous l’inspiration duquel nous ne pouvons prendre un chemin qui nous conduise à une bonne fin.

Sixième règle, N° 319 - La règle d’or de la vie intérieure : la contre-attaque.

Quoique nous devions jamais changer nos résolutions au temps de la désolation, il est cependant très utile de nous changer courageusement nous-mêmes, je veux dire notre manière d’agir, et de la diriger toute entière contre les attaques de la désolation. Ainsi, il convient de donner plus de temps à la prière, de méditer avec plus d’attention, d’examiner plus sérieusement notre conscience, et de nous adonner davantage aux exercices convenables de pénitence.

Septième règle, N° 320

Que celui qui est dans la désolation considère comment le Seigneur, pour l’éprouver, le laisse à ses puissances naturelles, afin qu’il résiste, comme de lui-même, aux diverses agitations et tentations de l’ennemi ; car il le peut avec le secours divin qui lui reste toujours, quoiqu’il ne le sente pas, parce que le Seigneur lui a soustrait cette ferveur sensible, cet amour ardent, cette grâce puissante, ne lui laissant que la grâce ordinaire, mais suffisante pour le salut éternel.

Huitième règle, N° 321

Que celui qui est dans la désolation travaille à se conserver dans la patience, vertu directement opposée aux attaques qui lui surviennent, et qu’il emploie, comme nous l’avons dit dans la sixième règle, les moyens nécessaires pour vaincre la désolation.

Neuvième règle, N° 322 : Pourquoi le Bon Dieu permet-il la tentation ?

La désolation a trois causes principales. Premièrement, elle peut être un châtiment. Notre tiédeur, notre paresse, notre négligence dans nos exercices de piété, éloignent de nous la consolation spirituelle. Secondement, elle est une épreuve. Dieu veut éprouver ce que nous pouvons, et à jusqu’à quel point nous sommes capables de nous avancer dans son service et de travailler à sa gloire, privés de ces consolations abondantes et de ces faveurs spéciales. Troisièmement, elle est une leçon. Dieu veut nous donner la connaissance certaine, l’intelligence pratique et le sentiment intime qu’il ne dépend pas de nous le faire naître ou de conserver dans nos cœurs une dévotion tendre, un amour intense accompagné de larmes, ni aucune sorte de consolation spirituelle ; mais que tout est don et une grâce de sa divine bonté ; il veut nous apprendre à ne point placer trop haut notre demeure, en permettant à notre esprit de s’élever et de se laisser aller à quelque mouvement d’orgueil ou de vaine gloire, nous attribuant à nous-mêmes les sentiments de la dévotion et les autres effets de la consolation spirituelle.

Dixième et onzième règle, N° 323 et 324

323 — Que celui qui est dans la consolation pense comment il se comportera au temps de la désolation et qu’il fasse dès lors provision de courage pour le moment de l’épreuve.

324 — Qu’il s’efforce aussi de s’humilier et de s’abaisser autant qu’il lui est possible, pensant de combien peu de chose il est capable au temps de la désolation, lorsqu’il est privé de la grâce sensible ou de la consolation. Au contraire, celui qui est dans la désolation se rappellera qu’il peut beaucoup avec la grâce, qu’elle lui suffit pour résister à tous ses ennemis, pourvu qu’il s’appuie sur le secours de son Créateur et Seigneur.

Douzième règle, N° 325

Notre ennemi ressemble à une femme ; il en a la faiblesse et l’opiniâtreté. C’est le propre d’une femme, lorsqu’elle se dispute avec un homme, de perdre courage et de prendre la fuite aussitôt que celui-ci lui montre un visage ferme ; l’homme au contraire, commence-t-il à craindre et à reculer, la colère, la vengeance et la férocité de cette femme s'accroissent et n’ont plus de mesure. De même c’est le propre de l’ennemi de faiblir, de perdre courage et de prendre la fuite avec ses tentations, quand la personne qui s’exerce aux choses spirituelles montre beaucoup de fermeté contre le tentateur, et- fait diamétralement le contraire de ce qui lui est suggéré. Au contraire, si la personne qui est tentée commence à craindre et à supporter l’attaque avec moins de courage, il n’est point bête féroce sur la terre dont la cruauté égale la malice infernale avec laquelle cet ennemi de la nature humaine s’attache à poursuivre ses perfides desseins.

Treizième règle, N° 326

Sa conduite est encore celle d’un séducteur ; il demande le secret et ne redoute rien tant que d’être découvert. Un séducteur qui sollicite la fille d’un père honnête ou la femme d’un homme d’honneur, veut que ses discours et ses insinuations restent secrets. Il craint vivement, au contraire, que la fille découvre à son père ou la femme à son mari, ses paroles trompeuses et son intention perverse ; il comprend facilement qu’il ne pourrait réussir dans ses coupables desseins. De même, quand l’ennemi de la nature humaine veut tromper une âme juste par ses ruses et ses artifices, il désire, il veut qu’elle l’écoute et qu’elle garde le secret. Mais si cette âme découvre tout à un confesseur éclairé ou à une autre personne spirituelle qui connaisse les tromperies et les ruses de l’ennemi, il en reçoit un grand déplaisir ; car il sait que toute sa malice demeurera impuissante, du moment où ses tentatives seront découvertes et mises au grand jour.

Quatorzième règle, N° 327

Enfin, il imite un capitaine qui veut emporter une place où il espère faire un riche butin. Il assoit son camp, il considère les forces et la disposition de cette place et il l’attaque du côté le plus faible. Il en est ainsi de l’ennemi de la nature humaine. Il rôde sans cesse autour de nous ; il examine de toutes parts chacune de nos vertus théologales, cardinales et morales et, lorsqu’il a découvert en nous l’endroit le plus faible et le moins pourvu des armes du salut, c’est par là qu’il nous attaque et qu’il tâche de remporter sur nous une pleine victoire.

Règles du discernement des esprits de la deuxième semaine

Première règle, N° 329

C’est le propre de Dieu et de ses Anges, lorsqu’ils agissent dans une âme, d’en bannir le trouble et la tristesse que l’ennemi s’efforce d’y introduire, et d’y répandre la véritable allégresse et la vraie joie spirituelle. Au contraire, c’est le propre de l’ennemi de combattre cette joie et cette consolation intérieure, par des raisons apparentes, des subtilités et de continuelles illusions.

Deuxième règle, N° 330

Il appartient à Dieu seul de donner de la consolation à l’âme sans cause précédente, parce qu’il n’appartient qu’au Créateur d’entrer dans l’âme, d’en sortir, et d’y exciter des mouvements intérieurs qui l’attirent tout entière à l’amour de sa divine Majesté. Je dis sans cause, c’est-à-dire sans aucun sentiment précédent ou connaissance préalable d’aucun objet qui ait pu faire naître cette consolation au moyen des actes de l’entendement et de la volonté.

Troisième règle, N° 331

Lorsqu’une cause a précédé la consolation, le Bon et le mauvais ange peuvent également en être l’auteur, mais leur fin est différente. Le Bon Ange a toujours en vue le profit de l’âme, qu’il désire voir croître en grâce et monter de vertu en vertu. Le mauvais ange, au contraire, veut toujours arrêter ses progrès dans le bien, leur fin est différente.

Quatrième règle, N° 332

C’est le propre de l’ange mauvais, lorsqu’il se transforme en " ange de lumière ", d’entrer d’abord dans les sentiments de l’âme pieuse, et de finir par lui inspirer les siens propres. Ainsi, il commence par suggérer à cette âme des pensées bonnes et saintes, conforme à ses dispositions vertueuses ; mais bientôt, peu à peu, il tâche de l’attirer dans ses pièges secrets, et de la faire consentir à ses coupables desseins.

Cinquième règle, N° 333

Nous devons examiner avec un grand soin la suite et la marche de nos pensées. Si le commencement, le milieu et la fin, tout en elles est bon et tendant purement au bien, c’est une preuve qu’elles viennent du Bon Ange. Mais si dans la suite des pensées qui nous sont suggérées, il finit par s’y rencontrer quelque chose de mauvais… ou de dissipant… ou de moins bon que ce que nous nous étions proposé de faire… ou si ces pensées affaiblissent notre âme, l’inquiètent, la troublent, en lui ôtant la paix, la tranquillité dont elle jouissait d’abord, c’est une marque évidente qu’elles procèdent du mauvais esprit, ennemi de notre avancement et de notre salut éternel.

Sixième règle, N° 334

Quand l’ennemi de la nature humaine aura été découvert et reconnu à sa queue de serpent, c’est-à-dire par la fin pernicieuse à laquelle il nous porte, il sera utile à la personne qui aura été tentée de reprendre aussitôt la suite des bonnes pensées qu’il lui a suggérées, d’en examiner le principe, et de voir comment, peu à peu, il a tâché de la faire déchoir de la suavité et de la joie spirituelle dans laquelle elle était, jusqu’à l’amener à sa fin dépravée. L’expérience qu’elle acquerra par cette recherche et cette observation lui fournira les moyens de se mettre en garde dans la suite contre les artifices ordinaires de l’ennemi.

Septième règle, N° 335

Le Bon Ange a coutume de toucher doucement, légèrement, suavement l’âme de ceux qui font chaque jour des progrès dans la vertu ; c’est pour ainsi dire, une goutte d’eau qui pénètre une éponge. Le mauvais ange, au contraire, la touche durement, avec bruit et agitation, comme l’eau qui tombe sur la pierre. Quant à ceux qui vont de mal en pis, les mêmes esprits agissent sur eux d’une manière opposée. La cause de cette diversité est dans la disposition même de l’âme qui est au contraire ou semblable à la leur. Si elle est contraire ils entrent avec bruit et commotion ; on sent facilement leur présence. Si elle est semblable, ils entrent paisiblement et en silence, comme dans une maison qui leur appartient et dont la porte leur est ouverte.

Huitième règle, N° 336

Lorsque la consolation spirituelle est sans cause qui l’est précédée, il est certain qu’elle est à l’abri de toute illusion, puisque, comme nous l’avons dit dans la seconde de ces règles, elle ne peut venir que de Dieu Notre-Seigneur. Cependant la personne qui reçoit cette consolation doit apporter beaucoup d’attention et de vigilance à distinguer le temps même de la consolation du temps qui la suit immédiatement. Dans le second temps, où l’âme est encore toute fervente et comme pénétrée des restes précieux de la consolation passée, elle forme de son propre raisonnement, par une suite de ses habitudes naturelles, et en conséquence de ses conceptions et de ses jugements, sous l’inspiration du bon ou du mauvais esprit, des résolutions et des décisions qu’elle n’a pas reçues immédiatement de Dieu, Notre-Seigneur, et que, par conséquent, il est nécessaire de bien examiner avant de leur accorder une entière créance, et de les mettre à exécution.

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